Débat / La convention de l’UA sur la prévention et la lutte contre la corruption, quelle est l’opportunité pour le Maroc ?

La ratification par le Maroc de la convention de l’UA sur la prévention et la lutte contre la corruption a valeur de symbole.

La convention de l’Union africaine (UA) sur la prévention et la lutte contre la corruption a été disséquée lors d’une rencontre organisée vendredi conjointement par Transparency Maroc et l’Association marocaine des journalistes d’investigation. L’opportunité pour le Maroc d’adopter ce texte a été soulevée.

Transparency Maroc et l’Association marocaine des journalistes d’investigation (Miraj) ont organisé une table ronde autour d’un thème d’actualité qui concerne les membres des deux organisations. Il s’agit des apports et enjeux de la ratification par le Maroc de la convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption. Pour rappel, cette convention est dans le circuit d’adoption par le Parlement après avoir été adoptée en Conseil des ministres en octobre dernier.
Ainsi, les participants à cette rencontre se sont interrogés sur l’opportunité et l’utilité de la ratification par le Maroc de cette convention, alors qu’il a déjà ratifié la convention des Nations unies contre la corruption. D’autant plus que Transparency Maroc a déjà élaboré une étude sur cette question dont les résultats seront publiés d’ici la fin de ce mois.
Michèle Zirari, secrétaire générale adjointe de Transparency Maroc, a exposé lors de cette table ronde quelques premières conclusions de cette étude. La juriste a commencé par poser quelques questions, notamment celle de savoir si cette convention africaine donne plus de moyens que celle de l’ONU. «Sur le plan du volume, la convention des Nations unies est plus volumineuse avec plus de 70 longs articles classés en chapitres, ce qui en permet une consultation aisée. Alors que la convention africaine, avec 28 articles, est moins étoffée, ce qui pourrait présenter un avantage. Mais cela fait quand même une énorme différence, car en l’absence d’un plan pour cette convention, il faut lire tous les articles pour savoir de quoi il s’agit», souligne Michèle Zirari. Et de préciser que les deux conventions touchent les mêmes domaines. Les infractions sont punies de la part des deux textes, qu’il s’agisse de «la corruption passive ou active».
Les deux textes traitent notamment de l’enrichissement illicite et du blanchiment d’argent. Par ailleurs, souligne-t-elle, il y a une différence à ce niveau. La convention de l’Union africaine insiste pour que ces infractions soient punies, alors que celle de l’ONU prévoit distingue entre les infractions qui doivent être sanctionnées et d’autres dont la sanction reste facultative. C’est dire que la convention africaine est plus coercitive que celle de l’ONU. Toujours est-il que les deux conventions prévoient des mesures de lutte contre la corruption dans la fonction publique, dans le secteur privé, au niveau des marchés publics, en matière d’accès à l’information et au niveau de la justice. Elles insistent sur la participation de la société civile, prévoient des mesures destinées à prévenir le blanchiment d’argent… «En fait, dans les deux textes, on retrouve des mesures similaires et on ne peut pas dire que l’une apporte beaucoup plus que l’autre», explique la représentante de Transparency.
Ainsi, en ce qui concerne l’avantage de la ratification et son utilité, il a surtout une valeur symbolique, étant donné le retour du Maroc à l’Union africaine. «Nous voulons travailler avec les États africains, c’est un indicateur très important. Cela va nous rapprocher de nos amis africains. En plus, cette convention a l’avantage de poser des obligations. Aussi, il y a des relais pour pousser les États à les respecter, notamment grâce à la société civile et aux médias», affirme-t-elle. Intervenant lors de cette table ronde, Nadir Hassan, président du réseau Miraj, a mis, pour sa part, l’accent sur le rôle à jouer par le journalisme d’investigation pour la lutte contre la corruption. Il a saisi cette occasion pour faire la promotion de ce genre journalistique en insistant sur la différence entre le «journalisme classique» et le journalisme d’investigation. Il a lancé un appel aux journalistes marocains ayant des idées ou des projets d’enquêtes pour répondre à l’appel à candidature lancé par Miraj visant à parrainer financièrement et en termes d’encadrement les enquêtes proposées. Bien évidemment seront retenues celles qui répondent aux conditions exigées dans l’appel à candidature et dont le délai est fixé à fin décembre. 

Brahim Mokhliss  Le Matin 14.12.2018

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