Algérie / Dessalement de l’eau de mer et exploitation de la nappe albienne : Une option stratégique

        Les 7 unités de dessalement, actuellement en construction, porteront la production à 3,3 millions de m3/ jour.

La raréfaction de la ressource hydrique a tendance à devenir structurelle. D’année en année, la pluviométrie déçoit les Algériens et fait monter les craintes d’une véritable désertification du pays. Les trois dernières années auront été les plus sèches de l’histoire pluviométrique connue du pays. de mémoire d’Algérien, l’on n’a jamais assisté à une pareille situation où au mois de novembre, le pays se retrouve, à ce point en situation de stress hydrique. L’ambitieux programme de réalisation de barrages et de transferts d’eau n’aura visiblement pas suffi à garantir la sécurité hydrique du pays. Pourtant, l’option décidée par les autorités publiques au tout début du XXIe siècle était censée mettre le pays à l’abri d’une crise hydrique. Mais il faut croire que le dispositif mis en place n’était pas proportionné à la situation dramatique que traverse le pays. Il faut dire qu’aucun dispositif ne peut faire face à plusieurs années de sécheresse, à l’image de ce que vit le pays.
La solution qui était considérée comme transitoire en 2001 est actuellement une option irréversible pour sauver ce qui peut l’être, c’est-à-dire, l’alimentation humaine. Cette solution est le dessalement de l’eau de mer. Engagé, il y a plus de 20 ans, l’usine de dessalement d’El-Hamma réalisée avec le concours technique et financier américain a constitué la première expérience. Plusieurs mono blocs ont été réalisés à la même période. Mais à l’époque, la stratégie était de réaliser un méga-complexe de barrages à même de multiplier par trois les capacités nationales de stockage d’eau de surface, jusqu’à parvenir à un potentiel de collecte de 8,4 milliards de m3. Mais en raison de la très faible pluviométrie, ce réservoir n’est rempli qu’à hauteur de 35% et ce niveau est en baisse continuelle. On ne peut pas parler de fausse stratégie, lorsque l’État a décidé de doter le pays de 85 barrages, avec des prévisions de 135 à l’horizon 2030, et prioriser cet aspect de la mobilisation de l’eau par rapport au dessalement de l’eau de mer.

Mais la réalité est là. Le complexe hydraulique ne sert présentement pas à grand-chose. D’où le recentrage de cette stratégie en renversant quelque peu les priorités. Il s’agira désormais d’accorder un intérêt plus accru au dessalement de l’eau de mer. Les décisions présidentielles qui ont consisté à remettre en état de marche des unités de dessalement de l’eau de mer dans l’Algérois et la réalisation de plusieurs véritables usines sur toute la longueur la littoral, à l’est, au centre et à l’ouest du pays, confirment l’adoption de la nouvelle vision stratégique.

On retiendra que présentement l’Algérie dispose déjà de 21 stations de dessalement de l’eau de mer réparties sur les 14 wilayas côtières. À l’exception de la station d’Alger et de deux autres à Oran qui produisent des quantités appréciables d’eau, le reste des installations sont de dimensions modestes. Ces stations produisent 17% de l’eau consommée par les ménages du pays. Elles alimentent 6 millions de personnes avec un volume de 2,6 millions m3/jour. Compte tenu de la persistance de la sécheresse, ces niveaux de production demeurent insuffisants pour alimenter plus ou moins convenablement les foyers algériens. Un état de fait qui a amené les autorités centrales à programmer d’urgence 7 unités de dessalement, actuellement en construction, ce qui portera la production à 3,3 millions de m3/ jour. Cela reste loin de l’objectif tracé pour l’horizon 2030 où l’État entend parvenir à alimenter les foyers algériens à hauteur de 50% par le seul biais du dessalement de l’eau de mer. Un objectif ambitieux, mais réalisable, au vu des moyens mis en oeuvre, avec notamment la contribution de Sonatrach qui a déjà acquis une expertise en la matière.

Il reste, cependant, que même cet objectif risque d’être désuet face à la grave crise hydrique que traverse le pays. Il n’est pas dit que la sécheresse perdurera encore longtemps, mais il n’est également pas assuré qu’il pleuvra plus ou moins abondamment les mois et les années à venir. Aussi, la stratégie mise en place et qui consiste à recourir systématiquement à l’eau dessalée pour servir à la consommation des ménages est plus que jamais de mise. Cela, même si la mobilisation de l’Albien et le recyclage des eaux usées feront partie intégrante de la stratégie des pouvoirs publics dédiée à la lutte contre le stress hydrique. Le dessalement de l’eau de mer est une option que commande le réchauffement climatique.

Saïd BOUCETTA


                      Face au stress hydrique : A fond le dessalement !

 

Par Feriel Nourine

Face à une pluviométrie de moins en moins généreuse, ces dernières années, et un stress hydrique dont l’impact se fait de plus en plus préoccupant, les pouvoirs sont en train d’actionner des démarches qui permettent d’aller explorer et exploiter d’autres sources d’approvisionnement.
Dans le cas de l’eau potable, le cap a été mis essentiellement sur le dessalement d’eau de mer, notamment pour alimenter les régions les plus affectées par le manque de pluie. Les derniers projets de stations de dessalement d’eau de mer (SDEM) font, en effet, face à la défaillance de l’offre dont pâtissent de nombreux barrages pour raison de pluviométrie peu abondante, mais aussi d’envasement, faut-il le souligner.

Face à cette situation, les projets sont en train de se multiplier pour élargir la cartographie des SDEM et faire contribuer davantage l’eau de mer dessalée à la consommation des ménages. A ce jour, cette contribution est estimée à 17% au niveau national, a indiqué hier l’inspecteur général du service irrigation au niveau du ministère des Ressources en eau, Omar Bougherra.
Un taux qui reste visiblement insuffisant face à des données climatiques qui sont en train de réinstaller la sécheresse en Algérie, ces dernières années, replongeant les citoyens de plusieurs régions dans le stress hydrique et les programmes de restriction mis en place par les services concernés. Intervenant sur la chaine privée Echourouk, M. Bougherra a cependant souligné que du travail restait à faire et que les objectifs du gouvernement étaient d’atteindre 42% au cours des années 2024-2025 et 60% à l’horizon 2030.

L’intervenant a précisé qu’actuellement, les wilayas de l’Ouest sont les plus grands bénéficiaires de l’eau dessalée, car la plupart des stations sont situées dans cette région et fournissent plus de 50 % du taux général en provenance des SDEM.
Concernant la wilaya d’Alger, le même responsable a indiqué que 47% de l’eau qui y est distribuée provient de l’eau de mer dessalée. C’est dire la dépendance de ce type de ressources hydriques au niveau de la capitale et d’autres wilayas.
Ce qui pousse à poursuivre les efforts en la matière et à viser des taux nettement plus hauts que ceux réalisés à ce jour.
Mais le gouvernement ne semble pas vouloir s’arrêter au renforcement du parc de SDEM. Il compte aussi mettre en place des mécanismes servant à développer cette activité et à la hisser à la dimension de la place et de l’intérêt grandissant qu’elle occupe dans la gestion des ressources hydriques en Algérie. Cela devrait se faire sous l’égide d’un organisme dédié, et en ce sens, un projet de décret exécutif portant création, organisation et fonctionnement de l’Agence nationale de dessalement de l’eau, a été présenté mercredi dernier en réunion du Gouvernement.

Ce projet de texte vient en application des orientations du président de la République relatives à la stratégie nationale de développement des ressources en eau non conventionnelle, a fait savoir un communiqué du Premier ministère, expliquant que la création de cette agence «renforcera et harmonisera les instruments nationaux dédiés au développement de l’activité de dessalement de l’eau».
Dans cette optique, sa mission consiste à réaliser des stations de dessalement de l’eau, et d’en assurer la gestion et la maintenance, de superviser les études stratégiques en matière de dessalement de l’eau et de mettre l’eau produite au niveau des stations de dessalement de l’eau, à la disposition des organismes chargés de la distribution de l’eau, a-t-on précisé.
Pour rappel, le secteur national des ressources en eau compte actuellement 12 SDEM, dans l’attente de la réception de nouvelles unités, qui porteront leur nombre à 23 durant les deux prochaines années.

Outre les stations de dessalement d’eau de mer, l’intérêt conféré par l’Etat au renforcement des capacités de mobilisation des eaux concerne notamment le lancement de la réalisation de nouveaux barrages, dont quatre seront réceptionnés en 2024, indique-t-on au niveau du ministère de tutelle, précisant que ces nouvelles réalisations porteront à 85 le nombre de barrages, dotés d’une capacité globale de 9 milliards de m3, contre une capacité de mobilisation estimée actuellement à 6,8 milliards de mètres cubes d’eau.


                         50000 milliards de m3 d’eau sous les dunes

                                       La nappe albienne et ses mystères

Les eaux de la nappe de l’Albien posent d’énormes soucis; elles sont saumâtres et chargées d’acide obstruant et endommageant les canalisations.

 

Il n’y a pas que du pétrole, de l’or et du fer dans le sud algérien. Sous les gigantesques étendues de sable et des températures extrêmes frôlant les 50 degrés, il existe d’immenses réserves d’eau douce. Cette eau a été accumulée durant la seconde partie de l’ère secondaire du temps géologique. Les scientifiques appellent cette mer souterraine, qui s’est formée, il y a environ 100 millions d’années, la nappe albienne. Elle contient plus de 50000 milliards de m3 d’eau, l’équivalent de 50000 fois le barrage de Beni Haroun qui se trouve à l’est du pays. La nappe s’étend entre la Libye, la Tunisie et majoritairement l’Algérie. La répartition territoriale est estimée à pour l’Algérie: 70%, pour la Libye: 20% et enfin pour la Tunisie: 10%.

En ces temps de sécheresse, cette nappe peut-elle étancher la soif des Algériens? Surnommée la source de l’humanité, cette réserve aquifère peut en effet subvenir à la consommation algérienne pour des milliers d’années. Mais elle a ses mystères qu’il va falloir résoudre. Toutes proportions gardées, la nappe phréatique est comme l’immense gisement de fer à Ghar Djebilet qui lui aussi refuse de se livrer en entier puisqu’il garde son mystère. Il a été fait appel à des études scientifiques poussées pour l’alléger d’un taux de phosphore relativement élevé. À cela s’ajoute le coût de son exploitation dans le transport qui nécessite la réalisation d’une voie à plusieurs milliards de dollars et de l’eau et des infrastructures. De même que les eaux de la nappe malgré le fait qu’elles soient relativement peu minéralisées par rapport aux eaux des autres nappes, elles posent, néanmoins, d’énormes soucis. Elle se trouve à des profondeurs allant parfois jusqu’à 2000 mètres, ce qui est très coûteux en termes de forage. Une fois en surface, l’eau jaillit à des températures avoisinant les 60 degrés, ce qui nécessite un équipement bien spécifique pour refroidir cette eau avant son utilisation. Malgré les différents remèdes mis en place pour abaisser cette température, tours de refroidissement, plans d’eau à l’air libre, etc. les eaux restent relativement chaudes. Elles sont néfastes aux plantes irriguées et dégradent les réseaux de distribution.

À présent, de nombreux spécialistes recommandent de réduire les forages à l’Albien à l’intérieur des principales agglomérations sahariennes. À cela s’ajoute un problème chimique: cette eau est souvent chargée d’un acide, H2S, accélérant la corrosion du tubage. Une situation qui exige un double tubage et une double cimentation pour préserver les canalisations. C’est dire que la nappe albienne n’est pas facilement exploitable et elle ne verdira pas notre Sud d’un simple jet d’eau. Et ce n’est pas demain qu ‘elle nous assurera une sécurité alimentaire définitive. Notre agriculture, comme de nombreux autres secteurs d’ailleurs, sont malades du fait des ravages de la bureaucratie, de la manipulation des chiffres et des projections hasardeuses. Il serait naïf de croire que nous avons trouvé la panacée dans l’agriculture saharienne irriguée à l’Albien. Avec les mêmes pratiques, les mêmes réflexes et les mêmes hommes, on ne pourra que reproduire la débâcle agricole accusée au nord du pays. On ne fera donc qu’une translation de nos erreurs vers le sud du pays et de la sorte, on n’arrivera jamais à éradiquer les importations des produits agricoles, notamment les céréales. Mais il y a un îlot important de réussite dans cette «affaire albienne». Cette réussite engrangée par les trois pays qui se partagent cette mer est sa partition. Un exercice portant compliqué mais a été brillamment réussi par l’Algérie, la Tunisie et la Libye.

En avril 2005, dans le cadre d’un projet de l’observatoire du Sahel et du Sahara (OSS), l’Algérie, la Tunisie et la Libye ont en effet mis en place un mécanisme de gestion concertée de leurs ressources en eaux profondes dont la nappe fait partie. L’ accord stipulait la mise en place d’une gestion équitable et raisonnable de cette nappe. Le suivi scrupuleux de cette opération est confié à l’Observatoire du Sahel et du Sahara basé à Tunis. C ‘est tant mieux, car un conflit hydrique en ce moment et dans cette région n’est pas du tout le bienvenu.

Brahim TAKHEROUBT


Systèmes Aquifères du Sahara Septentrional

 

Répartition du Continental Intercalaire en Algérie

  • Particularités de la nappe albienne : Le Continental Intercalaire est l’un des aquifères les plus étendu de la planète avec près de 800 000 km2 selon CDARS (1999b). L’une de ses particularités est de constituer une ressource en eau souterraine fossile. Le volume d’eau contenu dans l’aquifère est cependant considérable ; la même source indique que son volume peut être évalué à 35 000 Milliards de mètres cubes ce qui signifie qu’il faudrait un débit continu de 1000 m3/s pendant 1000 ans pour le remplir. Cette ressource en eau s’apparente donc à un gisement minier ou pétrolier dans lequel, les prélèvements se font au détriment du stock.

    Télécharger : nappe albienne ETSOURI Salim


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