Liberté d’internet : elle n’existe pas et n’existera jamais

par Paul Leleu 
31 janvier 2019

Réseaux sociaux, médias, liberté d’expression, GAFA, géants du web, crypto-monnaies, dissidence politique, anonymat, censure… Récemment, le (très bon) chroniqueur Michel Drac, vient de publier une courte vidéo sur sa chaine You-Tube mettant en alerte sur la censure du réseau, qui commence aux USA. Notamment en s’attaquant à la monétisation (Pay-Pal et Visa) qui permet aux youtubers politiques de gagner leur vie et financer leur activité dissidente. Il me semble important de rebondir sur cette alerte. Le Web est considéré à tort comme un média libre. Ce n’est pas un « média libre », mais un « média participatif ». En clair, chacun peut poster un contenu, mais tout cela reste sous le contrôle du gérant du réseau. C’est un peu comme la « libre antenne » dans les radios : tu peux téléphoner au standard et parler à l’antenne, mais uniquement sous le contrôle de l’animateur. Et derrière « l’animateur », les propriétaires des réseaux physiques du web.

L’illusion de la « joie internet ».

Malheureusement, internet bénéficie d’une insolente bonne réputation dans les dissidences de gauche ou de droite. Et rien à faire pour en démordre. Il y a quelques années à un séminaire dans un parti politique radical sur l’utilisation d’internet, la salle était remplie de gens enthousiastes. Chacun se félicitait des chiffres flatteurs d’audience procurés par le web. C’est vrai en partie, je ne le nie pas. Mais dans la salle, il y a eut un seul type pour poser la question de la vraie liberté du web ; c’est à dire des réseaux durs eux-mêmes. Ca m’a mis la puce à l’oreille. Qui possède les serveurs, les câbles, et l’énergie qui alimente le réseau ? Mais il est rabroué par le leader, ainsi que par la salle. Effectivement, ce pauvre garçon n’avait pas l’air aussi charismatique que les grandes gueules qui étaient là. Et pourtant…

Alain Soral (quoi qu’on pense de sa ligne politique) a été victime il y a quelques mois de censure de la part de Facebook et de You-Tube. En un clic, ces entreprises basées aux USA, peuvent « éteindre », au propre comme au figuré, une expression politique. On peut toujours aller se réfugier sur un réseau « russe » : mais dans la pratique, c’est une fausse solution. D’une part, les français ordinaires ne fréquentent pas les réseaux russes, et on perd donc 95% d’audience, et on retombe dans la marginalité. L’intérêt d’internet est justement de permettre de diffuser ses idées auprès des gens ordinaires : et donc de fréquenter les réseaux « mainstream ». D’autre part, le réseau « russe » ou « chinois » ou « iranien » (ou ce que vous voulez), est sous l’emprise d’un autre état. En clair, vous ne pourrez nullement critiquer l’état hôte. Mais en plus, dans la cadre des arrangements de « bonnes manières » entre blocs géopolitiques, vous risquez un jour de servir de pièce de négociation. Et de vous voir, derechef, censuré en un clic. Il n’y a donc pas de solution miracle.

Il faut aussi démythifier internet. Il est faux de croire qu’avant internet nous n’avions ni moyens de communication ni sources d’informations. Bien-sûr qu’on ne pouvait pas écouter en streaming la dernière vidéo de notre dissident favori. Ni naviguer pendant des heures sur les différents sites, et de se faire des petits « trips » underground pour se divertir. Certes. En fait, la quantité d’information dissidente a énormément augmenté. Mais si on réfléchit honnêtement, la qualité de l’information dissidente n’a pas fondamentalement augmentée. En fait, les classiques marxistes ou nationalistes (selon ses idées), datent pour la plupart du 19ème et du 20ème siècle ! Et nos aînés, depuis des générations, nous en transmettent l’essentiel. Et il n’y a pas si longtemps, de nombreuses librairies et bouquinistes (toutes opinions confondues), nous permettaient de naviguer avec la même fantaisie parmi les mille-et-une variations de la dissidence, y compris dans ses aspects plus folkloriques ou complotistes (on a tous nos petits péchés-mignons de ce côté). Et nous avions nos lieux de socialisation, pour échanger et faire des rencontre à échelle humaine.

Aujourd’hui, en raison de l’évolution du coût du logement et du mode de vie dans les grandes villes, nombre d’entre-nous vivent dans la France périphérique. Nos cafés, nos librairies et nos lieux de vie finissent par s’éteindre. Tout le réseau informel est en train de disparaitre. Bien sûr, ce réseau informel est remplacé par le réseau virtuel, internet. On me dira aussi que de nombreux lieux informels et amicaux continuent d’exister. Mais quand même… Est-ce-que le « réseau virtuel » remplace vraiment le « réseau informel » ? Le « réseau informel » était extrêmement dur à fermer d’un coup pour les autorités. Parce-qu’il est possible de fermer une librairie, une brochure ou un café, mais qu’il est impossible de fermer tout. Il y avait donc une grande résilience. Peut-on en dire autant du « réseau virtuel » internet ?

L’exemple inquiétant de la Bibliothèque Google, du GPS et de Wikipédia

Depuis des années, Google ou Wikipédia sont en train de mettre la main sur tout le savoir humain, dans une totale indifférence. On parle du brevetage du vivant, mais on ne parle pas de l’accaparement du savoir. Google est en train de créer sa « bibliothèque universelle » : il va donc vers les bibliothèques nationales ou régionales des différents pays, et propose fort généreusement de numériser les archives. Les bibliothèques sans budget acceptent souvent. Non seulement, on ouvre toute notre mémoire à Google (mais ce n’est peut-être pas si grave). Mais en revanche, Google choisit ce qu’il numérise. Eh oui, les contraintes budgétaires. En fait, Google choisit de facto, ce qui va figurer ou non en ligne. Et comme plus personne ne se rend dans les archives poussiéreuses dans un entrepôt improbable, Google choisit tranquillement ce que nous avons le « besoin de connaitre ». Bien-sûr, tout cela ne se présente pas comme une censure mais simplement comme un service commercial banal (et même humanitaire !) qui va permettre d’aider les états à mettre à la disposition du monde entier « une bonne partie » des bibliothèques mondiales. Reste à savoir quelle « partie », et sur quels critères. Et aucun recours n’est possible, car il ne s’agit pas du droit d’accès aux bibliothèques, mais d’un simple service commercial informel.

Wikipédia procède de la même façon. Jusque dans les années 1990 vous aviez de nombreuses encyclopédies en France (Universalis, Bordas, Encarta, etc.). Ils vendaient des encyclopédies produites par des professionnels qu’ils rémunéraient. Wikipédia a ensuite été créé par un ancien magna du porno, pour s’occuper de notre savoir ! Les gens se sont mis à collaborer gratuitement, et à déverser tout leur savoir bénévolement. Au début, ça semble sympathique, « anarchiste », horizontal, libertaire : on se débarrasse de la « tutelle » de quatre ou cinq éditeurs qui font « payer » l’accès au savoir. Les « lobbys » qui contrôlent ces éditeurs sont également battus en brèche. Rapidement vient la question de « réguler » les conflits de savoir, et une « gouvernance » (bienveillante, ouverte et gentille, on vous l’assure) se charge, dans l’opacité la plus totale et la cooptation, de dire la vérité sur le savoir encyclopédique. Autrefois, les encyclopédies, c’était comme les libraires : vous aviez le choix, et vous saviez si vous ouvriez un livre produit par un facho, un libéral ou un marxiste (vous aviez donc une lecture critique). Aujourd’hui, c’est la pensée unique, « bienveillante ». Et si vous voulez aller voir ailleurs… ben il n’y a plus rien ! Puisque la concurrence Wikipédia gratuite a coulé en quelques années toutes les encyclopédies historiques, en France, et dans chaque pays du monde ! Car le même phénomène se produit chez nos voisins ! Alors c’est vrai que vous pouvez consulter sur Wikipédia des informations que vous ne trouviez pas dans l’Universalis, comme la biographie d’un footballeur en vogue ou les origines familiales palpitantes d’une starlette de la télé-réalité. Le tout, alimenté par des « sources fiables » notées en bas de page : des articles de presse, parfois contradictoires, publiés par des journaleux dans des médias « fiables » possédés par une poignée de milliardaires. Et si un jour vous voulez recréer une encyclopédie indépendante et professionnelle, et si vous trouvez le moyen de la financer, vous n’aurez plus aucun professionnel vivant de ce métier disparu. Et puis vous aurez le problème des sources : Wikipédia qui collecte tout le savoir mondial, vous dira peut-être que c’est propriété privée ! Pareil pour le Wikitionnaire, qui va éradiquer Larousse, Littré et Robert : c’est la langue elle-même, qui est en train de passer sous contrôle privé américain ! Et puis, il faut remarquer cette nouvelle tendance, par exemple sur Wikipédia : « faites un don pour aider la Fondation Wikipédia »… bref, un jour qu’elles seront devenues monopolistiques, ces entreprises pourront décider de nous faire payer l’accès à notre propre culture !

Vous pouvez encore appliquer cette logique au GPS, ce service satellitaire américain qui est en train d’anéantir nos cartes Michelin et IGN, qui ne peuvent plus se financer. De toutes façons, qui sait encore lire une carte ? Sans parler des plans de banlieue ! Les gens ne savent même plus se repérer dans l’espace, ou même lire un panneau (on les supprimera peut-être un jour, avec GPS obligatoire). C’est à dire que la connaissance même de notre territoire deviendra la propriété privée d’une entreprise américaine, accessible uniquement par réseau satellite, après avoir payé l’appareil adéquat.

Bien-sûr, ces entreprises « bienveillantes » ne présentent jamais l’affaire sous cet angle. Elles proposent un « simple service commercial librement consenti »… mais qui débouchera de manière certaine sur notre esclavage.

Réseaux sociaux : vers la fin de la presse.

De la même façon, les « réseaux sociaux » sont en train de faire disparaitre la presse, et la liberté d’expression qui y est attachée. Comme pour les bibliothèques, les librairies, les lieux de sociabilité physiques, les cartes ou les encyclopédies, la presse est en train d’être tuée par internet.

Au début, c’est l’extase ! Comme pour les radios-libres. Un grand élan libertaire, un joyeux foutoir, une ivresse d’expression. Tout semble enfin possible.

Les médias français (les « merdias » jubilent certains !) sont possédés à 90% par 10 milliardaires. Chacun pousse de cris de joie en apprenant que leur audience s’effondre. Sauf que les réseaux sociaux Facebook, Twitter ou You-Tube sont possédés par qui ? Par 3 milliardaires même pas basés en France ! En fait, internet n’est pas en train de décentraliser l’information, mais au contraire de la centraliser à outrance. Et là encore, il ne s’agit pas seulement d’une centralisation française, mais mondiale ! Et dans la joie et la bonne humeur. Avec la dissidence (nous !) à la manoeuvre. Nous creusons notre propre tombe !

J’ai eu l’occasion de discuter il y a quelques années avec un ancien des radios-libres. Un vrai de vrai, un dur de dur. Ils ont déboulonnés l’ORTF, et pendant 2 ou 3 ans ils ont diffusé à fond. Avant de se planter financièrement, et de devoir revendre leur fréquence. Leur fréquence appartient aujourd’hui à je ne sais plus quelle radio-poubelle ordinaire. Et voilà le travail. On est juste passé de la « propagande gaulliste », au capitalisme sans-filtre, directement dans le cerveau des masses. Et l’ORTF, pour suivre l’évolution du goût du public modelé par les radios-poubelles, s’est transformé en France-Info, France-Inter, qui ne brillent ni par leur qualité ni par leur liberté. C’est ce qui est en train de se passer avec les réseaux sociaux.

Une mutation du domaine juridique : du droit de presse vers le droit commercial.

Mais cette fois-ci, c’est différent. Car, comme pour Google, Wikipédia ou GPS, les réseaux sociaux sont en train de transformer la nature juridique des médias. Jusqu’à présent, les médias, même possédés par des capitalistes, doivent respecter le droit de la presse. Ils sont obligés d’inviter tous les candidats en période de campagne électorale, ou de publier des droits de réponse, etc. C’est peu, mais finalement c’est beaucoup, comparé à ce qui nous attend.

En effet, les réseaux sociaux se présentent à juste titre comme des gentilles (toujours la gentillesse !) « plateformes de divertissement » entre particuliers. C’est un simple service de divertissement, et non une entreprise de presse avec toutes ses obligations. C’est un peu comme la différence entre un café ordinaire où tout le monde peut rentrer du moment qu’il respecte la loi, et une discothèque privée où le vigile peut choisir à la tête du client. Lorsqu’ils censurent, les opérateurs du web en appellent aux « valeurs de la communauté », au « règlement intérieur », ou d’autres genre de prétextes. Et en fait, il est difficile juridiquement d’en appeler à la « liberté d’expression ». Car, juridiquement, internet c’est pas comme la presse ou une élection organisée par l’Etat. C’est juste une entreprise commerciale qui vous offre un « espace de divertissement », et qui peut décider de chasser les « mauvais coucheurs » à sa guise. En fait, internet c’est une soirée privée. Au début tu peux dire des gros mots, mais à la fin, tu te fais jeter sans recours possible.

En outre, les opérateurs de réseaux sociaux ne sont nullement responsables de la diversité et de l’équité de contenus qu’ils diffusent. En clair, le « plébiscite du public » fait la loi, et fait monter les tendances. On se met à tous penser la même chose, et lire les mêmes choses sans nous en rendre compte. Et puis, la concurrence est « libre et non faussée », entre le simple you-tubeur qui poste sa petite vidéo artisanale, et les géants capitalistes qui peuvent produire massivement des millions de contenus. Il serait grand temps que les dissidents en tous genres, relisent les « thèses de Lénine » au Premier Congrès de la 3ème Internationale, notamment sur « la liberté de la presse », et sur la « démocratie en général ».

Il faut donc éviter de voir internet comme le veau d’or de la dissidence. Car, on risque de tomber sous le charme et la fascination pour un outil virtuel, qui n’a en fait rien de virtuel du tout. Internet est un réseau physique avant tout. Internet est même un moyen extrêmement efficace pour contrôler et espionner, de manière à la fois centralisée et détaillée, l’ensemble des dissidences. Internet est le moyen de ficher individuellement et en détail les opinions politiques et le réseau d’amitié de chaque personne. En outre, internet peut être aussi un moyen d’entrisme de masse avec les faux-comptes (comme les manifestations sans service d’ordre).

Demain, il n’y aura plus de « médias pourris », mais il n’y aura plus de médias du tout ! Il ne restera que les « réseaux sociaux ludiques de la bonne-ambiance et de la communauté bienveillante des amis ». Avec exclusion pour les « discours de haine » et ceux qui « ne respectent pas les valeurs de la communauté ». Et aucun recours. Nous ne sommes plus sous droit de la presse, mais sous le droit commercial. On ne parle plus de droit, mais de règlement intérieur. On n’est plus au tribunal, mais au conseil de discipline.

Dans le même temps, les réseaux traditionnels télévision herzien, ainsi que le téléphone fixe sont en train de disparaitre tout à fait. Ils ne sont plus réactivables, ils sont démantelés. En fait, nous ne disposons même plus de réseaux alternatifs en cas de conflit avec les propriétaires du web ! L’industrie du livre et de la presse-papier, ses réseaux de création et de distribution sont également en train de disparaitre. Les lieux de socialisation non virtuelle disparaissent. Les gens habitent de plus en plus dans les zones « périphériques » où les loyers sont bas, et si demain il n’y a plus d’internet et que le pétrole se raréfie, il ne reste plus rien comme lien. En fait, nous devenons hyper dépendants de réseaux de droit privé, dont nous ne maitrisons rien.

Comment monétiser sur internet ? Les Crypto-monnaies.

Selon Michel Drac et son interlocuteur dans la vidéo, la censure américaine frappe la dissidence au porte-monnaie. Ce sont donc les opérateurs de paiement tels que Pay-Pal, SWIFT ou Visa qui sont à la manoeuvre dans la censure qui commence aux USA. Mais quoi de surprenant ? Les capitalistes ne vont quand même pas se laisser faire ! Certains suggèrent donc de recourir aux Crypto-monnaies… ou l’art de s’enfoncer toujours plus loin dans l’aliénation.

Autrefois, on payait une brochure ou un bouquin dissident avec de l’argent liquide. Aucune trace, aucun contrôle. Et l’auteur artisanal pouvait, sans se faire pister, aller régler avec cet argent les dépenses de la vie courante.

Mais avec les Crypto-monnaies tout devient compliqué et opaque. En outre, à un moment donné, il faut passer par les réseaux bancaires contrôlés. Et puis même, il faut se poser la question de savoir ce que sont ce prétendues crypto-monnaies. En fait les crypto-monnaies ont une seule fonction : préparer la disparition de la monnaie fiduciaire, de l’argent-liquide. Les crypto-monnaies sont une expérimentation numérique pour remplacer les bonnes vieilles valises de billets. En effet, si la monnaie fiduciaire disparait, l’argent sale aura du mal à circuler. Le système anticipe donc avec les crytpo-monnaies.

On veut nous faire croire que les crypto-monnaies sont créées par de « joyeux lurons inconnus » et « bienveillants » (encore la bienveillance !), de sympathiques geek préoccupés de faire sauter les banques centrales, et les méchants états corrompus qui les dirigent. Qui peut croire décemment que les dites « banques centrales corrompues » vont tranquillement se laisser piller par une bande de joyeux drilles libertaires ?

Qui peut croire décemment que les services secrets américains, russes ou chinois qui connaissent à tout instant la couleur de votre slip et le nom de jeune-fille de votre arrière-grand-mère ne connaissent pas les inventeurs de ces crypto-monnaies ? Ils connaissent obligatoirement ces créateurs, si ce ne sont pas eux-mêmes qui les ont créés. Et si on nous dit qu’on ne connait pas qui a créé le Bitcoin, c’est qu’on nous ment effrontément. Bien-sûr, comme dans toute « guerre de 4ème génération », tout un tas d’entrepreneurs libéraux-libertaires sont de la partie, sans savoir exactement à quelle farce ils participent. Chaque animateur de radio-poubelle sincère n’est pas sensé savoir qu’il participe à un dessein plus large d’abrutissement massif de la population. Il en est de même pour les excités du Bitcoin, et autres crypto-monnaies. D’ailleurs, comme on nous dit « que personne ne les contrôle », alors on ne prend même pas la peine de se demander si par hasard on nous ment encore une fois, et qu’elles sont gérées bien tranquillement de manière opaque ! Vu que personne ne se pose la question : on n’enquête pas sur une question qui ne se pose pas.

Lorsque les crypto-monnaies (qui ne sont crypto que pour les citoyens) seront au point, l’oligarchie passera à la destruction de la monnaie fiduciaire, et au contrôle total du financement de la dissidence. Il ne sera pas possible de donner un petit billet à un bouquiniste, ou à une feuille militante.

La question de la monétisation des contenus de la dissidence sur internet est donc encore une fausse question. Tous les chemins sont pourris, et ils mènent tous à « Rome » (ou plutôt à Babylone).

Qu’est-ce qu’internet, en vrai ?

Car à la fin, il faut se poser la seule question qui vaille, celle que ce foutu militant avait posé dans ce symposium politique. C’est quoi internet, en vrai ?

Internet ce n’est pas « de l’information » comme nous le raconte la publicité pour Wanadoo ou SFR. Internet n’est pas un « réseau virtuel ». Internet c’est d’abord des réseaux de câbles bien concrets (les fameux câbles-transocéaniques), des noeuds, des serveurs, des opérateurs, des centrales électriques nucléaires ou conventionnelles qui alimentent en électricité. Ce sont aussi des ordinateurs, des logiciels, des virus, des mises-à-jour, des terres-rares, des guerres, des normes, des algorithmes, et je ne sais quoi encore. Les satellites en orbite complètent ce réseau hautement technologique. Internet est un réseau entièrement entre les mains d’entreprises géantes et d’états puissants. Internet pousse à la caricature le capitalisme ultra-moderne, opaque et totalitaire. La liberté d’internet est un gentil oxymore.

Il faut prendre la peine d’aller consulter (sur internet !) les cartes des câbles transocéaniques, leur histoire et les articles de presse qui s’y rapportent. Prendre le temps de regarder les photos, pour voir à quoi ça ressemble. Ils sont curieusement les descendants des premiers câbles de télégraphe et de téléphone, et l’Angleterre en l’Amérique (bref, les anglo-américains…) possèdent les principaux noeuds du réseau. Ces noeuds sont des genres d’entrepôts ultra-sécurisés, gérés directement par les Services Secrets, qui bien sûr n’espionnent pas les contenus qui passent dessus. Un ingénieur d’Orange (ex-France Télécom) s’est dit « tellement inquiet qu’il préfère ne même pas se poser la question ».

La « liberté d’internet » ne peut être qu’une concession accordée par l’oligarchie qui possède ces réseaux. Les conflits entre les producteurs de soft et les producteur de hard, à propos de la bande-passante sont parfaitement superfétatoires. Ils ne concernent pas notre liberté, mais le partage du magot entre capitalistes. Les opérateurs de hard, des réseaux physiques, faisant d’ailleurs bien sentir aux opérateurs de soft que les « géants du web », ce sont aussi eux. Ce qui confirme mon propos sur la nature physique du réseau internet.

En guise de conclusion poétique : « lorsque nous n’aurons plus de papier, nous ne pourrons même plus écrire à la main, ni lire à la lumière du jour ».

Sur le même thème:

BIGAFAM, ou les réseaux sociaux à l’ère de la post-vérité
Bitcoin : A l’aube du cycle de la raison
La guerre de l’information
La ‘démocratie’ est-elle enfin possible ? 
Mieux que Big Brother : Facebook, le plus gros pompeur de données personnelles au monde

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *