La Chine ne souhaite pas la guerre commerciale

LE CERCLE/TRIBUNE – Pour Zhai Jun, ambassadeur de Chine en France, «  l’unilatéralisme et le protectionnisme vont à contre-courant de l’histoire ».  Selon le diplomate, «  personne ne sortira indemne » de la guerre commerciale que mènent actuellement les Etats-Unis à la Chine et à l’Europe.

A l’issue du  XXe sommet Chine-Union européenne, les deux parties ont publié une déclaration conjointe réaffirmant leur attachement à une économie mondiale ouverte, ainsi que leur soutien résolu à une architecture commerciale multilatérale centrée autour de l’Organisation mondiale du commerce et fondée sur des règles communes. A l’heure où les Etats-Unis agitent la bannière de l’« America First » et recourent au protectionnisme, la Chine et l’Europe ont ainsi envoyé ensemble un signal positif d’une immense portée.

L’unilatéralisme et le protectionnisme vont à contre-courant de l’histoire et, d’une guerre commerciale, personne ne sort indemne. C’est la leçon tirée par l’homme moderne de son histoire chaotique. C’est cette leçon qui l’a poussé à bâtir un ordre international fondé sur des valeurs clefs telles que le multilatéralisme, le respect des traités, la concertation respectueuse et l’esprit d’ouverture qui ont été les moteurs du développement et de la prospérité dans le monde.À LIRE AUSSI

Aujourd’hui, jamais les intérêts des différents pays n’ont été aussi interdépendants. La matraque douanière américaine constitue une menace pour les intérêts des pays visés. Mais elle menace aussi les intérêts des entreprises et des consommateurs américains dont des filières industrielles et des chaînes de valeur mondialisées subiront le contrecoup. A ce jeu, il n’y aura pas de vainqueur.

Faciliter les échanges

La Chine, l’UE et les Etats-Unis sont les trois piliers économiques du monde. En Chine, un proverbe dit : « Quand le plafond menace de s’effondrer, c’est aux plus grands de le soutenir. » Dans un contexte international hautement incertain, les relations entre la Chine et l’UE jouent un rôle d’ancrage stabilisateur.

Ce n’est qu’en poursuivant sur la voie de la libéralisation et de la facilitation des échanges, en poussant les négociations pour parvenir à un accord sur l’investissement Chine-UE et en travaillant ensemble à résoudre les difficultés d’accès au marché que nous pourrons redonner à tous de la confiance et consolider une dynamique de relance mondiale.

Ce n’est qu’en respectant les règles en vigueur du commerce mondial, en travaillant ensemble à la réforme de l’OMC et en bâtissant un ordre économique mondial ouvert que l’on pourra éviter le chaos et empêcher le monde de sombrer dans les abysses de l’anarchie.

Ce n’est qu’en créant une synergie entre l’initiative des « Nouvelles routes de la soie » et les grands programmes d’infrastructures et d’investissements européens, que les bénéfices de notre partenariat commun pourront mieux rejaillir sur les pays tiers. Démontrons par l’exemple que seuls l’entente et le dialogue entre les peuples constituent les moteurs durables de la croissance mondiale.

Contre-mesures proportionnées

En tout état de cause, et quelles que soient les perspectives du contentieux commercial sino-américain, la Chine persévérera dans la voie de la réforme et de l’ouverture, car c’est à cette politique que notre pays doit ses remarquables succès depuis quarante ans.

Depuis le début de cette année, le gouvernement chinois a adopté tout un train de mesures dans ce sens : publication de la nouvelle liste négative pour les investissements étrangers, renforcement de la protection des propriétés intellectuelles, assouplissement des règles d’accès aux marchés financiers, baisse des tarifs douaniers, notamment pour les automobiles, ou encore accélération du processus d’adhésion à l’accord sur les marchés publics de l’OMC. Ces mesures émanent de nos besoins intrinsèques de développement et sont bénéfiques au monde entier.À LIRE AUSSI

Naturellement, à l’heure où les Etats-Unis font preuve d’inconstance et brandissent l’étendard de la guerre commerciale, nous nous voyons obligés de recourir à des contre-mesures proportionnées, tout en saisissant l’organe de règlement des différends de l’OMC. La Chine ne souhaite pas la guerre commerciale. Cependant, face  aux intimidations commerciales, qui peut être sûr que, si elle fait des concessions, elle ne s’exposera pas à des exigences toujours plus nombreuses ?

Zhai Jun est ambassadeur de Chine en France.

Les Echos 25.07.2018

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