« Rage », le livre de Bob Woodward : La bombe médiatique qui va peut-être sceller l’avenir politique de Trump

    “[COVID-19] is also more deadly than even your strenuous flu…It’s deadly stuff
(Donald Trump, in Bob Woodward, Rage, February 7, 2020).

[COVID-19] is going to disappear. One day, it’s like a miracle, it will disappear
(Donald Trump, in Bob Woodward, Rage, February 27, 2020)

« My fucking generals are a bunch of pussies…They prioritize their alliances rather than trade deals
(Donald Trump, In Bob Woodward, Rage, September 11, 2020).

Par Arezki Ighemat *


Après le livre “The Room Where It Happened : A White House Memoir” de John Bolton, ancien conseiller de Trump pour les affaires de sécurité nationale, et le livre « Too Much and Never Enough : How My Family Created the World’s Most Dangerous Man” de Mary Trump, la nièce du président Trump, parus tous deux respectivement le 23 juin et le 14 juillet 2020 aux éditions Simon and Schuster, voici le troisième, intitulé « Rage », de Bob Woodward, paru hier 15 septembre, chez le même éditeur, à passer au peigne fin Donald Trump et son premier mandat comme Président qui prend fin le 3 novembre prochain.

Il faut rappeler, à ceux qui ne le connaissent pas, que Bob Woodward —qui est un ancien reporter d’investigation au fameux journal The Washington Post depuis 1971— est celui qui a fait éclater, avec son collègue Carl Bernstein, le scandale du WaterGate à la suite duquel le président Richard Nixon avait été poussé à démissionner. A signaler aussi, Bob Woodward a écrit 19 ouvrages sur la politique américaine dont 13 sont classés « best selling books ». Sur la scène américaine comme dans le monde dans son ensemble, Woodward est considéré comme un des plus prestigieux reporters d’investigation de notre siècle. Il a reçu de nombreux prix des plus connues institutions de journalisme, dont le Worth Bingham Prize for Investigative Reporting (1972-1986) et le Gerald Ford Prize for Reporting on the Presidency (2002). Ses talents d’investigateur sont tellement reconnus que Robert Gates, ancien directeur de la CIA, avait dit qu’il aurait aimé le recruter à la CIA parce que « his ability to get people to talk about stuff they shouldn’t be talking about is just extraordinary and may be unique » (son habilité à faire parler les gens sur des sujets dont ils ne devraient pas parler est tout simplement extraordinaire et peut-être unique) (voir Gold Hadas, Gates : I wanted Woodward in CIA », Politico, March 4, 2016).

Ce nouveau livre de Woodward, comme le précédent intitulé « Fear : Trump in the White House », paru le 11 septembre 2018, soit deux ans presque jour pour jour avant «Rage », fait des révélations explosives sur Donald Trump et son premier mandat de Président. Résultat de 18 interviews avec Trump et de plusieurs autres avec d’autres responsables à la Maison-Blanche, ce nouveau livre aura, sans aucun doute, une influence des plus grandes sur l’avenir des élections du 3 novembre prochain et sur celui de Trump lui-même. L’objet du présent article est de recenser et d’analyser les révélations faites par Woodward dans ce livre et d’en mesurer l’impact sur Trump et sa présidence.

Révélation#1 : Trump a minimisé la pandémie de COVID-19 et a priorisé l’économie sur la santé


L’une des révélations que Woodward fait dans son livre est le fait que Donald Trump ait minimisé volontairement la gravité de la menace que constituait Covid-19 sur la population américaine. Selon Woodward, la raison principale pour laquelle Trump n’a pas alerté la population sur la gravité de la pandémie est de permettre à l’économie de continuer à fonctionner normalement, ce qu’il considère comme son joker pour gagner sa réélection en novembre prochain.

Le livre de Woodward montre que l’appréciation de Trump, quant à la gravité de la pandémie, est contradictoire. En effet, Trump commence par avouer que la pandémie est très grave, puis il dit tout à fait l’opposé : que la pandémie va disparaître comme par miracle. C’est ainsi que le 7 février 2020, dans une interview qu’il a accordée à Woodward, Trump dira, en parlant de Covid-19 « It goes through the air. That’s always tougher than tough…You just breathe the air and that’s how it’s passed…That’s a delicate one. It’s also more deadly than even your strenuous flu…It’s deadly stuff” (Le virus se transmet par l’air. C’est plus dur que dur… Vous respirez l’air et vous attrapez le virus… C’est une chose délicate. C’est plus mortel que la plus ardue des grippes. C’est une chose mortelle).

En janvier 2020, le conseiller de Trump à la Sécurité nationale, Robert C. O’Brien, l’avait pourtant averti que la Covid-19 était « la plus grande menace à la sécurité nationale à laquelle il avait à faire durant sa présidence ». Cependant, et en dépit de cet avertissement, et aussi pour éviter que la pandémie ne provoque une récession économique qui serait fatale pour sa réélection en novembre prochain, Trump fera plusieurs déclarations dans lesquelles il dira que Covid-19 n’est pas plus grave que la grippe saisonnière habituelle et que le virus allait disparaître, miraculeusement.

Pour convaincre ses supporters politiques que ce qu’il dit est vrai, il comparera le Covid-19 à la grippe saisonnière : « So, last year, 37 000 Americans died from the common flu. It averages between 27 000 and 70 000 [deaths] per year. Nothing is shut down, life and the economy go on” (L’année dernière, 37 000 Américains sont morts de la grippe saisonnière habituelle. Rien n’est fermé et la vie et l’économie continuent) (Tweet de Trump, 9 mars 2020, rapporté par Woodward).

Par ailleurs, contredisant tous les avis de son Conseil scientifique de suivi de la pandémie, dirigé par le célèbre épidémiologiste Anthony Fauci, Trump ira plus loin pour annoncer le 27 février 2020 : « It’s [Covid-19] going to disappear. One day, it’s like a miracle, it will disappear » (Le virus va disparaître. Un jour, comme par miracle, il va disparaître). Selon Woodward, Trump justifie sa minimisation de la gravité de la pandémie en disant qu’il ne voulait pas créer la panique au sein de la population : « I wanted to—I wanted to always play it [the virus] down…I still like playing it down because I don’t want to create a panic » (Je voulais —je voulais toujours minimiser la gravité du virus… et je minimise toujours le virus parce que je ne voulais pas créer la panique).

Toujours pour se justifier, Trump dira, dans une interview qu’il a accordée à Sean Hannity, de la chaîne TV Fox News : « Je suis le leader du pays, je ne peux pas sauter vers le haut et vers le bas et faire peur à la population. Je ne veux pas créer une panique, et c’est ce que j’ai fait exactement). Comme on s’y attendait et comme il le fait chaque fois qu’un livre le critique et critique sa politique —que ce soit John Bolton, Mary Trump, ou Woodward lui-même dans son précédent livre « Fear : Trump in the White House», Trump réagira brutalement contre Woodward. Un des arguments qu’il a trouvés pour le « bombarder » est de reprocher à Woodward — puisque ce dernier, selon Trump, était conscient de la gravité de la pandémie — de ne pas avoir publié son livre il y a trois mois et de ne pas avoir alerté lui-même la population sur cette gravité. La réaction de Woodward à ce reproche était rapide et nette : « Je ne suis pas le Président, Monsieur le Président ».

Révélation#2 : Trump a une politique étrangère et sécuritaire erratique et bizarre


Dans ses nombreuses interviews avec Trump, Woodward trouve que la politique étrangère et sécuritaire du Président pose un certain nombre de problèmes qui, pour beaucoup, demeurent encore sans réponses. Tout d’abord, selon Woodward, Trump entretient, bizarrement, des relations spéciales et privilégiées avec les chefs d’Etat autocrates du monde comme Kim Jong-Un de Corée du Nord et Vladimir Poutine de Russie. Avec le dirigeant Nord-Coréen, il a échangé quelques 27 lettres auxquelles Woodward a eu accès et qu’il appelle « the love letters » (les lettres d’amour). Trump dira à Woodward que dans ces lettres, Kim Jong-Un s’adresse à lui par l’expression « Your Excellency » (Votre Excellence). Trump dira aussi « I’m the only one he smiles with” (Je suis le seul à qui il sourit). Comme si le sourire était un signe que les relations politiques et économiques entre les deux pays allaient bien.

En contrepartie des compliments que lui distribue Trump, Kim Jong-Un répond par des compliments similaires : « A deep and special friendship between us will work as a magical force » (Une amitié profonde et spéciale entre nous fonctionnerait comme une force magique). Kim Jong-Un ajoute : « Une autre rencontre entre nous serait « reminiscent of a scene from a fantasy film » (Une autre rencontre entre nous rappellerait une scène de film fantastique). Pour souligner cette relation privilégiée qu’il a avec le dirigeant Nord-Coréen, et pour stigmatiser Obama, son prédécesseur, qu’il ne porte pas dans son cœur comme tout le monde le sait, Trump dira que « Kim considers Obama as an asshole » (Kim considère Obama comme un personnage stupide : littéralement « trou de derrière »). Comme si cela était une qualité supplémentaire du dirigeant Nord-Coréen.

Toujours pour souligner cette relation exceptionnelle avec les dirigeants de pays non démocratiques, Trump poursuit : « It’s funny, the relationships I have [with the autocrats], the tougher and meaner they are, the better I get along with them”. You know ? Explain that to me someday, o kay ? It’s a mystery ! » (C’est drôle, les relations que j’ai avec [les autocrates], plus ils sont durs et mauvais, mieux je m’entends avec eux. Vous savez ? Expliquez-moi cela un jour, O Kay ? C’est un mystère).

Pour Woodward et beaucoup d’autres experts politiques américains, ce « coup de foudre » pour le dirigeant Nord-Coréen est, pour le moins, problématique lorsqu’on sait que les relations — si relations il y avait —entre les deux pays ont toujours été jusqu’à aujourd’hui chaotiques et belliqueuses et ont, par moment, atteint le point d’une guerre nucléaire réciproque imminente. Pour souligner cette « guerre psychologique » entre les deux pays, Woodward raconte que le général Jim Mattis, ancien Secrétaire de Trump à la Défense, se rendait souvent à la Cathédrale nationale à Washington pour prier qu’un conflit nucléaire entre les deux pays n’ait pas lieu.

Woodward rapporte aussi qu’un jour, tellement inquiet qu’une attaque était imminente de la part de la Corée du Nord, Mattis « slept in his cloths, wanting to be ready in the even North Korea fired weapons at the US » (Mattis a dormi avec ses habits quotidiens pour être prêt en cas d’une attaque nord-coréenne contre les USA). Mattis sait, en effet, que le dirigeant nord-coréen — que Trump avait qualifié du nickname de « Little Rocket Man » – est imprévisible puisqu’il avait lancé plusieurs missiles d’essai contre la Corée du Sud auparavant et qu’il a menacé de faire de même contre les USA. Au point que Trump avait déclaré le 10 février 2016 : « I would get China to make that guy [Kim Jong-Un] disappear in one form or another very quickly” (Je ferais en sorte que la Chine fasse disparaître ce gars [Kim Jong-Un] sous une forme ou une autre et très rapidement). Pourquoi Trump se servirait-il de la Chine pour faire disparaître son ennemi Nord-Coréen est une autre question qui n’est pas le sujet de cet article. Woodward fait une autre révélation dans son livre.

Avec ses talents de journaliste-investigateur chevronné dans les scandales politiques, Woodward réussit, en effet, à faire dire à Trump ce qu’il ne voulait probablement pas que le public sache : un secret militaire d’une importance stratégique pour la sécurité nationale. Trump fait à Woodward la confidence suivante : « I have built a weapons system that nobody’s ever had in his country before. We have stuff that you haven’t seen or heard about. We have stuff that Putin and Xi have never heard about before… What we have is incredible” (J’ai fait construire un système d’armements que personne n’a jamais eu dans son pays auparavant. Nous avons des choses que vous n’avez jamais vues ou dont vous n’avez jamais entendu parler. Nous avons des choses dont Poutine et Xi n’ont jamais entendu parler avant… Ce que nous avons est incroyable !).

Selon les dires d’un officiel du Département de la Défense rapportés par CNN le 20 juillet 2020, Trump parlerait d’un « super-duper missile which uses hypersonic technology » (Trump fait peut-être référence à un super-hyper missile qui utiliserait la technologie hypersonique). Cette information est tellement surprenante que Woodward rapporte les propos du général Mattis disant que cette divulgation de secrets militaires montre aux ennemis des Etats-Unis « How to destroy America. That’s what we’re showing them. How to isolate us from all our allies. How to take us down. And it’s working very well” (cela montre aux ennemis des Etats-Unis comment détruire l’Amérique. Comment nous isoler de tous nos alliés. Comment nous détruire. Et cela fonctionne très bien). Tout cela, selon Woodward, a fait dire au général Mattis que le président « is dangerous » and « unfit » (le président est dangereux et incompétent). De son côté, Trump ne porte pas ses généraux dans son cœur, comme quand il déclare : « My fucking generals are a bunch of pussies » (Mes généraux de merdre, ce sont comme une bande d’incapables, avec connotation sexuelle). Trump justifie cette caractérisation en disant : « They prioritize their alliances rather than trade deals » (ils donnent la priorité à leurs alliances plutôt qu’aux accords commerciaux). Comme si le rôle des généraux était de négocier des accords commerciaux. Woodward parle aussi des relations privilégiées bizarres qu’entretient Trump avec Vladimir Poutine.

Selon Woodward, Trump dira que toutes les investigations qui ont été conduites contre lui sur l’affaire dite du « RussiaGate » dans laquelle Trump serait soupçonné d’avoir fait des deals avec Poutine au dépend des intérêts américains — notamment l’investigation faite par Bob Muller — l’ont empêché d’avoir des relations « normales » avec la Russie : « Putin said to me in a meeting…it’s a shame, because I know it’s very hard for you to make a deal with us » (Poutine m’a dit dans un meeting… C’est une honte, car je sais qu’il vous est difficile de faire un deal avec nous). Woodward révèle aussi que beaucoup de politiciens et experts pensent que cette relation « spéciale » avec Poutine est sujette à questions. Il cite le cas de Dan Coats, l’ancien directeur de l’Intelligence nationale de Trump, qui croit que cette relation cache quelque chose. Woodward écrit, dans son livre : « Coats also thought that the Russian president Vladimir Putin had damaging information about the president. Coats continued to harbor the secret belief, one although unsupported by intelligence, that Putin had something on Trump” (Coats pense aussi que le président russe Vladimir Poutine a des informations dommageables concernant le Président. Coats continue de croire au secret, bien que non confirmé par l’Intelligence, selon lequel Poutine aurait quelque chose sur Trump).

Woodward pense que Coats serait tellement étonné du contraire qu’il déclare : « How else to explain the president’s behavior ? » (Sinon, comment expliquer le comportement du Président ?). Selon Woodward, et cela est confirmé par d’autres sources, Trump aurait, en effet, négocié, en 2016, la construction d’une tour à Moscou « qui promettait de rapporter des dizaines de millions de dollars de profits à Trump et cela sans courir aucun risque », information que Trump a toujours réfutée. Selon Coats, c’est cette information « secrète » que Poutine pourrait à tout moment divulguer contre Trump.

Révélation#3 : Trump n’a aucune compassion pour ceux qui souffrent


Bob Woodward montrera aussi, dans son livre intitulé “Rage”—comme l’avaient montré avant lui John Bolton, dans son ouvrage « The Room Where It Happened : A White House Memoir, Mary Trump, la nièce de Trump, dans son livre « Too Much and Never Enough : How My Family Created the World’s Most Dangerous Man”, et celui de Bob Woodward lui-même intitulé « Fear : Trump in the White House”—que Donald Trump n’a aucune empathie pour les Américains et les étrangers qui n’ont pas les mêmes privilèges que lui et sa famille. Il illustre cette absence totale d’empathie par deux exemples.

Le premier exemple est le cas des Noirs Américains qui souffrent de deux maux endémiques : le racisme et la pauvreté. Le racisme — qui n’est pas un phénomène nouveau aux Etats-Unis — s’est toujours traduit par de nombreux meurtres dont les Noirs sont particulièrement victimes, notamment suite à des bavures policières. Mais le racisme a connu une recrudescence depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir en 2016. Les crimes perpétrés contre les Noirs Américains suite à ces bavures se sont, en effet, multipliés et aggravés depuis 2016. La liste de tous les crimes commis contre les Noirs depuis cette date étant trop longue à énumérer ici, il nous suffira d’indiquer les plus récents : Stephen Clark (18 mars 2018), Botham Jean (6 septembre 2018), Breonna Taylor (13 mars 2020, George Floyd (25 mai 2020), et Jacob Blake (13 août 2020).

Pour savoir comment Trump perçoit ces crimes, dans une de ses interviews, Woodward pose à Trump la question suivante à propos de la recrudescence de la colère et des souffrances des Noirs Américains ces quatre dernières années : « Do you have any sense that that privilege has isolated and put you in a cave to a certain extent as it put me and I think lots of white privileged people in a cave and that we have to work our way out of it to understand the anger and the pain, particularly Black people, feel in this country? Do you? (Avez-vous conscience du fait que ce privilège [que vous, moi, et beaucoup de Blancs ont] vous a isolé et mis dans une sorte de caverne et que nous avons le devoir d’en sortir pour comprendre la colère et la peine que les Noirs en particulier ressentent dans ce pays ? En avez-vous conscience ?).

La réponse de Trump ne semblait pas surprendre Woodward qui connaissait, bien sûr, les sentiments du Président pour les personnes marginalisées : « No, you really drank Kool-Aid, didn’t you ? Just listen to you ! Wow ! No, I don’t feel that at all” (Non, avez-vous bu du Kool-Aid [boisson arômatisée ayant le don d’endoctriner la personne qui la boit], avez-vous ? Juste écoutez-vous ! Wow ! Non, je n’ai jamais senti cela du tout). Et comme pour se justifier et se rattrapper, Trump ajoute : « I’ve done a tremendous amount for the Black community. And, honestly, I’m not feeling any love » (J’ai fait énormément pour la communauté noire. Et, honnêtement, je n’ai aucun sentiment d’amour). Il complète cet argument en disant : « The economy had been positive to Black people before the COVID led to an economic crisis” (L’économie a été positive pour les Noirs avant que la Covid n’ait entraîné une crise économique). Le second exemple cité par Woodward comme preuve que Trump n’éprouve aucune empathie pour les gens qui souffrent est le cas des Palestiniens dont le territoire est quotidiennement spolié par les autorités israéliennes.

Pour justifier la décision d’arrêter l’aide que les Etats-Unis traditionnellement accordaient à l’Autorité palestinienne, Trump, selon Woodward, a montré à Rex Tillerson, son ancien Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères, une vidéo que lui avait passée Benjamin Netanyahu montrant Mahmoud Abbas, le président de l’OLP, en train d’ordonner le meurtre d’Israéliens. S’adressant à Tillerson, Trump lui dit : « Watch this ! This is umbelievable. You’ve got to see this! (Regardez ça! C’est incroyable. Vous devez voir ça!). Selon Woodward, la vidéo — que Tillerson considère comme fabriquée ou, en tous cas, fausse — montre Mahmoud Abbas en train de faire des déclarations inflammatoires et d’ordonner le meurtre d’enfants israéliens. Après le visionnage de la vidéo, et en présence de Netanyahu, Woodward rapporte Netanyahu dire à Trump : « That’s the guy you want to help ? (Est-ce ce gars que vous voulez aider ?).

Lorsque Netanyahu a quitté la salle où la vidéo a été visionnée, Tillerson, selon Woodward, aurait dit : « Mr. President, do you realize that the whole thing was fabricated ? » (Mr. Le Président, réalisez-vous que toute cette chose a été fabriquée ?). Toujours, selon Woodward, Trump répondra à Tillerson en disant : « Well, it’s not fabricated. They got the guy on tape » (Bien, elle n’est pas fabriquée. Ils ont enregistré le gars sur vidéo). Plus tard, lors de sa rencontre avec Mahmoud Abbas à Bethlehem, Trump traitera ce dernier de « lier » (menteur) et de « murderer » (assassin). A la suite de cet évènement, Trump a pris la décision d’annuler toute forme d’aide à l’OLP et ordonné la fermeture du bureau de l’OLP à Washington. En privant le peuple palestinien de cette aide vitale, Trump a montré, une fois de plus, qu’il n’a aucune sympathie pour les gens et les peuples qui souffrent ou sont spoliés.

Conclusion


Il est clair que le livre de Bob Woodward ne va pas être accueilli avec joie par Trump et ses supporters politiques. Avant-même d’être publié —il est prévu de paraître le 15 septembre— Trump a déjà tweeté que le livre est un « Fake » (faux) et que son auteur est « rapidly fading » (rapidement en voie d’érosion) alors que seulement l’année dernière, Trump disait de Woodward « He is cool, calm and interesting » (Il est bien, calme et intéressant). Trump a tweeté sur le livre en disant « Le livre de Bob Woodward est un « Fake », comme toujours, exactement comme beaucoup d’autres livres. Mais, croyez-le ou pas, j’ai eu récemment de grands livres sur moi ». Il ajoutera que le livre de Woodward « contains as much bad stuff as possible, much of it is lies” (le livre de Woodward contient beaucoup de mauvaises choses et la plupart sont des mensonges).

Ce qui est sûr, c’est que le livre de Woodward est attendu avec beaucoup d’appréhension par une grande partie du peuple américain et ses supporters politiques, impatients d’apprendre ce qui se dit encore de leur Président qu’ils ne sachent pas déjà et sur leur décision de lui accorder ou non un second terme en novembre prochain. Soucieux de l’impact que ce nouveau livre de Bob Woodward aura sur sa réputation déjà sévèrement entamée, et pour faire oublier ce nouveau nuage sur son avenir politique, Trump fait des annonces bruyantes comme celle concernant l’accord de paix conclu entre Bahreïn et Israel le 11 septembre courant ou celle portant sur les négociations en cours entre les Talibans et le gouvernement afghan. Trump compte aussi sur l’éventualité de la découverte d’un vaccin ou d’un médicament miracle contre la Covid-19 avant l’élection du 3 novembre prochain. Cependant, si ce miracle ne se produit pas pour rassurer les Américains sur leur santé et celle de leurs enfants et celle de l’économie —cette dernière étant son cheval de bataille pour gagner l’élection prochaine— l’avenir de Trump peut être un point d’interrogation.

Toutefois, lorsqu’on voit tous les obstacles juridiques et politiques que Trump a pu traverser avec succès depuis son arrivée au pouvoir en 2016—les nombreuses investigations contre lui, notamment l’enquête de Bob Muller sur l’affaire dite du RussiaGate dans laquelle Trump est soupçonné d’avoir fait des deals avec le Président russe, son impeachment par le Congrès pour abus de pouvoir et abus de justice, etc.. —et compte tenu du gigantesque « lobby network » dont il dispose, il n’est pas possible de dire de façon certaine s’il va encore échapper ou pas au verdict de l’élection prochaine.


* Ph. D en économie, Master of Francophone
Literature (Purdue University, USA)


 

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