Ukraine / Réflexions

La guerre en Ukraine est devenue essentiellement une guerre d’artillerie. C’est même une guerre d’artillerie par excellence et sera étudiée comme telle à l’avenir dans les écoles de guerre. 

Le conflit auquel cette guerre ressemble le plus est la guerre Irak-Iran (1980-1988). Ce conflit n’est pas sans rappeler également celui de la  guerre d’hiver entre l’ex-URSS et la Finlande en 1939. Le déroulement de ce conflit défavorable aux Soviétiques eut une influence majeure sur la décision d’Hitler d’envahir L’URSS en 1941.

L’Ukraine aurait reçu une quantité bien plus importante de systèmes d’artillerie OTAN que ce qui a été délibérément annoncé par les médias occidentaux. Le renseignement militaire russe s’est encore fait intoxiquer  et a sous-estimé le nombre, la mobilité et la manœuvrabilité de ces systèmes (Himars, Caesars, etc.)

Les systèmes US HIMARS se sont révélés redoutables sur le théâtre ukrainien au point où le commandement militaire russe a ordonné que la priorité absolue des forces russes est désormais de détruire ces systèmes d’artillerie.

Une évaluation sommaire de la situation a laissé entrevoir la nécessité d’utiliser des centaines de drones et de munitions suicides pour attenuer la menace posée par les systèmes d’artillerie de l’OTAN fournis à l’Ukraine. La Russie a longtemps négligé le domaine des drones et se retrouve aujourd’hui à rechercher ces systèmes d’armes auprès de pays tiers. Or, seuls la Corée du Nord et l’Iran peuvent lui fournir des drones. Paradoxalement, l’Iran est l’un des rares pays ayant testé au combat des drones furtifs avancés. Le recours de la Russie à l’Iran, un pays dont les forces armées, hormis les missiles et les drones de combat, disposent d’un matériel obsolète du fait des trains de sanctions internationales auxquels ce pays est confronté, pourrait toutefois ternir davantage le prestige “rehaussé durant la décennie 2005-2015” de la puissance militaire russe.

L’usage de mines antipersonnel et antichar par les forces armées ukrainiennes s’est avéré extrêmement efficace à ralentir les offensives des unités russes sur les lignes de front opérationnelles et plus précisément celles, implantées massivement sur les abords stratégiques de Kharkov, non seulement la deuxième plus grande ville du pays, mais celle dont la position est adjacente de la frontière russe.

L’Ukraine aurait envoyé d’importants renforts (+20 000 hommes) pour tenir la  ligne Seversk-Soledar-Bakhmout. Les pertes ukrainiennes sont élevées mais le système de rotations des unités ukrainiennes, géré par l’OTAN, a pu maintenir la ligne de défense.

Autre révélation de cette guerre, l’Ukraine a mis à l’abri la majeure partie de son aviation de combat, soit dans des pays tiers ou dans des bunkers. De ce fait, l’offensive russe du 24 février 2022 n’aurait détruit que très peu d’appareils de seconde ligne au sol et ce, contrairement aux déclarations russes sur la suppression des forces aériennes ukrainiennes dès le 27 février 2022. Cela a induit en erreur de nombreux observateurs (dont nous-mêmes) et faussé l’evaluation de la situation. Même si l’on admet comme vraies les informations faisant état de la livraison toujours majorée par rapport aux déclarations des médias d’avions de combat de fabrication soviétique des stocks polonais, tchèques et bulgares, ce qui permet à certains analystes russes d’évoquer une démilitarisation indirecte de ces pays, cela n’atténue en rien l’aveuglement stratégique russe et sa grave  sous-estimation du problème posé.

Le fait de savoir si l’Ukraine a pu avoir des informations sur la date et l’heure exacte de l’opération militaire russe importe peu- même si elle est hautement probable vu les erreurs continues du renseignement militaire russe et plus encore celui du renseignement extérieur.  Près de 150 jours après le début de cette opération, des avions de combat et des hélicoptères militaires ukrainiens apparaissent encore au-dessus de certains champs de bataille au Donbass…

Un allongement de la durée du conflit au-delà d’une année aura des répercussions sur la géopolitique de l’espace post-soviétique. Si des pays comme la Géorgie, les États Baltes ou la Moldavie sont déjà hostiles à la Russie, une dégradation prolongée des ressources russes en Ukraine pourrait amener l’Azerbaïdjan et le Kazakhstan à se repositionner plus ouvertement suivant de nouveaux intérêts contraires à ceux de la Russie. l’Azerbaïdjan est déjà en phase avec la Turquie et adhère à une sorte d’idéologie centrée sur le continuum du monde turc des steppes de l’Asie centrale à l’Anatolie.   Nous entrons ici dans les prémisses d’autres conflits à venir des décennies 2040-2050.

L’aboutissement de ce conflit ne sera pas facile quel que soit le résultat partiel ou final. S’il prépare le terrain à d’autres conflits futurs, il a déjà totalement déstructuré une grande partie de la géopolitique eurasienne. Ce qui permet déjà l’émergence d’autres géopolitiques périphériques dans le Grand jeu. En déclenchant une guerre des Slaves dont le scénario a été envisagé dès 1991, puis repris en 1995 et 1997, l’Empire a précipité le monde vers une nouvelle configuration qui sera probablement ni à l’avantage des uns, ni à celui des autres.


 

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