Sahara occidental : le Maroc accueille un haut responsable américain, l’Algérie appelle à l’impartialité

     Les États-Unis ont officiellement lancé dimanche le processus d’ouverture d’un consulat américain au Sahara occidental, dans le sillage de l’accord de normalisation des relations entre le Maroc et Israël
Le ministre marocain des Affaires étrangères Nasser Bourita (au centre) et David Schenker, secrétaire d’État américain adjoint pour le Proche-Orient et l’Afrique du Nord posent avec d’autres responsables après leur réunion à Dakhla, au Sahara Occidental, le 10 janvier 2021 (AFP)
Le ministre marocain des Affaires étrangères Nasser Bourita (au centre) et David Schenker, secrétaire d’État américain adjoint pour le Proche-Orient et l’Afrique du Nord posent avec d’autres responsables après leur réunion à Dakhla, au Sahara Occidental, le 10 janvier 2021 (AFP)
Par   MEE  

Cette visite, la première d’un haut responsable américain, fait suite à l’accord tripartite signé le 22 décembre par les Américains, les Israéliens et les Marocains, actant une normalisation diplomatique entre le Maroc et Israël, avec une reconnaissance américaine de la souveraineté de Rabat sur le Sahara occidental.

Traduction : « #AmbFischer : Notre voyage d’aujourd’hui à Dakhla est une autre étape historique au cours plus de 200 ans d’amitié entre le Royaume du Maroc et les États-Unis d’Amérique. »

Surtout, les États-Unis ont officiellement lancé dimanche le processus d’ouverture d’un consulat américain au Sahara occidental, la dernière des anciennes colonies africaines au statut non réglé, que se disputent le Maroc et les indépendantistes du Front Polisario.

Un processus qui « prendra des mois », a reconnu dimanche l’ambassadeur américain, David Fischer, après avoir visité un des bâtiments proposés pour abriter le consulat à Dakhla, port de pêche situé dans le sud du Sahara occidental, destiné à devenir un « hub maritime régional » desservant l’Afrique et les Canaries grâce à un projet colossal de développement lancé par Rabat.

« David Fischer a clairement affiché son soutien, et celui de son administration, à la marocanité du Sahara. Un attachement que le diplomate a d’abord voulu démontrer sous le signe de l’humour, en affirmant qu’il envisageait de s’installer dans la « Perle du Sud » [Dakhla] avec son épouse Jennifer, et en invitant Nasser Bourita [le ministre marocain des Affaires étrangères] à faire de Dakhla une capitale diplomatique pouvant accueillir des ambassades », relève le site marocain d’informations TelQuel.

Une enveloppe de 2,4 milliards d’euros

La nouvelle carte du Maroc intégrant le Sahara occidental a été adoptée par Washington trois jours après l’annonce de l’accord. Le premier vol commercial entre Tel Aviv et Rabat a été affrété dix jours plus tard, en présence du gendre et conseiller de Donald Trump, Jared Kushner.

« En reconnaissant la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, le président Trump a rejeté les status quo ratés qui ne bénéficiaient à personne, et à la place, il a mis en route une solution durable et mutuellement acceptable », avait souligné Jared Kushner à l’époque.

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En plus de l’ouverture d’un « consulat » américain à Dakhla, l’accord inclut une enveloppe de trois milliards de dollars (2,4 milliards d’euros), débloquée par la Banque américaine de développement (DFC) pour le « soutien financier et technique de projets d’investissements privés » au Maroc et en Afrique subsaharienne.

À son arrivée à Laâyoune, après une tournée régionale qui l’a conduit en Algérie et en Jordanie, David Schenker a aussi visité le siège de la mission de l’ONU au Sahara occidental, la MINURSO.

La MINURSO est restée spectatrice, à la mi-novembre, quand le Maroc a déployé ses troupes dans une zone tampon pour « sécuriser » la seule route vers l’Afrique de l’Ouest, à la frontière avec la Mauritanie. Ce mouvement militaire a poussé le Polisario à rompre le cessez-le-feu, signé en 1991 sous l’égide de l’ONU, et généré des tensions avec l’Algérie voisine, sans susciter de réaction du Conseil de sécurité de l’ONU.

Caractère illégal de la présence marocaine

En Algérie, où l’APS (agence de presse officielle) a rapporté une réponse armée de l’armée sahraouie contre « de nombreuses positions des soldats de l’occupation [marocaine] au cours de la semaine écoulée », les autorités ont fait savoir qu’elles espéraient voir Washington conserver son « impartialité » sur la scène régionale et internationale.

Le président américain élu Joe Biden ne s’est pas encore prononcé sur le dossier du Sahara occidental.

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« Chaque administration dispose de la prérogative de décider sa politique étrangère », a rappelé David Schenker à Alger.

« Sur la question de savoir si les États-Unis seront présents sur le terrain au Sahara occidental, je veux être clair : les États-Unis n’établissent pas de base militaire au Sahara occidental » et l’état-major du commandement militaire américain pour l’Afrique (AFRICOM) « n’y sera pas relocalisé », a-t-il dit.

Joseph Huddleston, Harshana Ghoorhoo, Daniela A. Maquera Sardon, trois chercheurs américains de l’université Setan Hall spécialisés dans les questions de politique internationale, ont publié une tribune dans le magazine américain Foreign Policy.

« Il n’existe aucune raison stratégique empêchant Biden d’annuler, dès son investiture [le 20 janvier], le revirement impétueux de Trump », au sujet du Sahara occidental, affirment-ils.

Ils ont aussi rappelé le caractère illégal de la présence marocaine au Sahara occidental, en vertu des résolutions des Nations unies et des verdicts prononcés par plusieurs cours internationales.

« Ceci signifie que les activistes défendant le droit à l’autodétermination [du peuple sahraoui] et le Front Polisario ne sont pas des ‘’séparatistes’’, comme cela a été mentionné dans le Washington Post et le New York Times, mais plutôt un mouvement de décolonisation. »

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