Algérie / TU N’IRAS PAS, CE SOIR !

par Belkacem Ahcene – Djaballah

Samedi 8 mars, une bonne partie de l’Algérie s’est retrouvée, tard le soir, devant la petite lucarne, regardant une émission montrant un célèbre globe-trotter (ce qui est tout à fait différent du journaliste) français, visitant quelques villes du pays et dont le concept de base repose essentiellement – sinon avant tout- sur une «nuit passée chez l’habitant». Assurément, visiblement, pour mieux (faire) connaître et (faire) comprendre les comportements sociétaux.

Sur le plan strictement professionnel, c’est là une démarche très acceptable et même honorable dès l’instant qu’il y a accord des populations accueillantes et des autorités (et, il ne peut en être autrement dès l’instant où est octroyé un visa) quant aux déplacements et contacts. D’autant que de telles émissions, selon moi, ne peuvent que contribuer à la diffusion internationale d’une bonne image du pays et des populations. Que l’on aime ou pas ce type d’émissions relève d’un autre débat.

Hélas, en Algérie, notre «explorateur» sociétal n’a pas rencontré le grand succès espéré, sauf en Kabylie (une nuit chez un citoyen, le dîner et le petit déjeuner y compris et ce, dans une ambiance et des échanges libres et enjoués et citoyen patriote à saluer tout particulièrement pour sa définition si claire de la «Révolution algérienne») et un petit peu à Djanet (seulement un déjeuner et une courte sieste chez un couple de cadres venu du Nord). Il n’a rencontré que des refus et des revirements à Djanet, à Ghardaïa et même à Oran.

Pourquoi ? Présence d’une caméra, cet «oeil du diable», assez sans-gêne et, parfois, porteuse d’ennuis car enregistreuse implacable de paroles, d’attitudes aussi bien neutres que perçues (sic!) comme «mauvaises»?

Présence, se voulant discrète mais bien repérable (quand elle n’a pas été envahissante et «décourageante» tout particulièrement au Sud) des «gardiens» de la paix, de la sécurité et de l’environnement ?

Mentalité encore assez conservatrice, et surtout prudente, des populations lesquelles bien que plus que généreuses en public -et entre hommes – n’ouvrent pas facilement les portes du domicile familial à l’«étranger» ?

De tout un peu et un peu de tout. Ce qui ne peut que compliquer la tâche à toutes celles et à tous ceux qui, depuis quelques années, s‘escriment à promouvoir l’image extérieure du pays et à encourager -par bien des facilitations – le tourisme étranger, tout particulièrement au sud du pays. Heureusement, les jeunes, certainement peu soucieux des préoccupations des autres, sinon celles de leurs parents, ont réussi -malgré quelques impairs assez pardonnables- grâce à leur spontanéité, à colmater les brèches communicationnelles et à «sauver les meubles». Les femmes aussi !


Ps: La diffusion de l’émission (sur une chaîne assez spécialisée) a connu un succès certain puisqu‘elle a été suivie- en France – par 609.000 téléspectateurs sans compter les pays étrangers. Par ailleurs, sur les réseaux sociaux, il a été enregistré 25 millions de vues. Ce qui n’est pas rien.



            Antoine de Maximy livre ses premières impressions sur son voyage en Algérie

Par Farida O. – Le journaliste français Antoine de Maximy a livré ses premières impressions sur ses rencontres avec les Algériens dans le cadre de son reportage tourné pour l’émission «J’irai dormir chez vous». Le globe-trotteur qui a visité plusieurs villes algériennes – Alger, Oran, Tizi-Ouzou, Djanet, Ghardaïa – s’est dit satisfait dans l’ensemble par l’accueil qui lui a été réservé, même si le pari de passer la nuit chez l’habitant a paru irréalisable, pour des raisons liées au tempérament des Algériens, non qu’ils soient inhospitaliers, mais par méfiance envers les médias étrangers, français plus particulièrement.

«Pourquoi est-ce que j’ai été suivi [par un policier en civil à Ghardaïa, ndlr] ? Est-ce que c’était pour contrôler qui je rencontrais ? Ce que je filmais ? Eh bien, sincèrement, je ne crois pas. Ils [les autorités algériennes, ndlr] voulaient absolument qu’il ne m’arrive rien. Parce que, évidemment, ça aurait fait mauvais genre. D’ailleurs, c’est ce qui s’est vérifié à Ghardaïa, parce qu’[ils] m’ont empêché d’aller chez l’épicier de peur que je mange quelque chose qui me rende malade», a raconté le journaliste, qui s’est dit impressionné par l’efficacité de l’agent qu’il croisait par deux fois sur son chemin, sans qu’il sache comment il a fait pour le devancer sans même qu’il s’en rende compte.

«Sans déconner, ça fait quarante ans que je mange des trucs terribles dans tous les pays du monde, eh ben, ils étaient inquiets. Et, donc, c’était vraiment pour me protéger. D’ailleurs, j’ai filmé tout ce que je voulais et [ils] n’ont jamais contrôlé mes images», a admis Antoine de Maximy, en expliquant que «les problèmes des caméras ne s’arrêtent pas là, parce qu’en Algérie, il y pas mal de gens qui n’aiment pas être filmés, pour des raisons religieuses, déjà, et puis il y a beaucoup de gens qui n’aiment pas les caméras».

«Ce qui est paradoxal, a-t-il constaté, c’est que ça ne les empêche pas de venir pour faire des selfies.» «En même temps, ça fait plaisir que des gens t’apprécient», a-t-il dit. «Evidemment, je respecte au mieux ceux qui ne veulent pas être filmés, mais là où ça se complique, c’est qu’il y a des gens qui disent oui au début, puis ils changent d’avis, ils ne veulent plus être dans le film, et ça, ça m’est arrivé plusieurs fois pendant le voyage», a-t-il remarqué. «Par exemple, à Alger, où j’ai rencontré quatre jeunes dans la rue en train de tourner un clip. J’explique ce que je fais, en plus, il y a pleins de gens qui me filment à ce moment-là, donc ils comprennent que je suis connu, je leur explique que c’est pour la télévision française. Je les filme en train de filmer leur clip. En fin d’après-midi, il y en a trois qui partent chez eux, puis il y a une jeune femme du groupe qui décide d’aller retrouver des amis dans un café, donc je pars avec elle. Eh bien, figurez-vous que plusieurs semaines après mon retour en France, ceux qui étaient partis en voiture m’ont dit qu’ils ne voulaient pas être dans le film», a rapporté le journaliste, dont le reportage est programmé pour ce 8 mars sur RMC Découverte.

La jeune Algérienne dont parle le journaliste français lui a décrit à grands traits une «situation de la femme» qui «commence à changer en Algérie», sous-entendant que celle-ci serait mauvaise. Mais cette dynamique jeune fille n’a pas eu le réflexe de rappeler à son interlocuteur que la femme algérienne touche un salaire égal à celui de l’homme, contrairement à la France où il est inférieur d’au moins 25% pour des raisons de ségrégation sexiste.

F. O.


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