Algérie / Guerre de libération: Macron lève le secret sur les archives

     par El-Houari Dilmi 

 Un nouveau pas vient d’être franchi dans le dossier mémoriel, sujet à des accès de fièvre récurrents entre Alger et Paris. En effet, le Président français, Emmanuel Macron, a décidé de faciliter l’accès, dès aujourd’hui (mercredi), aux archives classifiées de plus de 50 ans, y compris celles relatives à la Guerre de Libération nationale (1954-1962), indique un communiqué de la présidence de la République française.

Cette décision a été prise afin de « permettre aux services d’archives de procéder, dès demain (mercredi) aux déclassifications des documents couverts par le secret de la Défense nationale jusqu’aux dossiers de l’année 1970 incluse», précise le communiqué de l’Elysée.Selon la même source, « cette décision sera de nature à écourter sensiblement les délais d’attente liés à la procédure de déclassifications, s’agissant notamment des documents relatifs à la Guerre de Libération nationale (Algérie) ».

Cette annonce intervient une semaine après la reconnaissance par le Président Macron, « au nom de la France », que l’avocat et dirigeant nationaliste Ali Boumendjel avait été « torturé et assassiné » par l’armée coloniale, en 1957. Cette décision « démontre que nous allons très vite », note le communiqué de la présidence française, relevant que sa « portée dépasse le cadre de l’Histoire de l’Algérie et que le président français a répondu favorablement aux attentes de la communauté universitaire qui se plaignait, notamment des difficultés d’accès aux archives classifiées, de plus de 50 ans, en raison de l’application scrupuleuse d’une circulaire sur la protection du secret de la défense nationale », toujours selon le communiqué de l’Elysée.

« L’Algérie réclame la totalité de ses archives dont une grande partie se trouve en France, qui a toujours avancé de faux prétextes, comme par exemple la déclassification de nombre d’archives pourtant réunies depuis plusieurs décennies », avait déclaré, en décembre dernier, Abdelmadjid Chikhi, Conseiller du président de la République en charge des Archives et de la Mémoire nationale. Fustigeant la loi française de 2006 décrétant les archives comme partie du domaine public et stipulant qu’elles sont inaliénables et imprescriptibles, Abdelmadjid Chikhi a qualifié cette mesure de « violation » du principe de non-rétroactivité des lois, d’autant, a-t-il ajouté, que « le dossier des archives, objet de négociations, n’est pas encore clos».


        Guerre d’Algérie : quand le secret défense entrave la mémoire


        L’Elysée annonce l’ouverture des archives de la guerre d’Algérie

L’Elysée a annoncé l’ouverture des archives de la guerre menée par l’armée française en Algérie. Cette décision doit permettre d’« écourter sensiblement les délais d’attente liés à la procédure de déclassification» des documents, annonce mardi l’Elysée (présidence française).

Voilà qui répond sans nul doute à la tribune de nombreux historiens qui dénonçaient il y a quelques jours la fermeture des archives de la guerre d’Algérie. Le rapport de l’historien Benjamin Stora sur la question mémorielle de la colonisation et de la guerre d’Algérie préconisait aussi l’accès aux archives classifiées de plus de cinquante ans, notamment celles sur la guerre d’Algérie.

Dans un communiqué publié mardi 9 mars, l’Elysée annonce que le chef de l’Etat « a pris la décision de permettre aux services d’archives de procéder dès demain [mercredi] aux déclassifications des documents couverts par le secret de la défense nationale (…) jusqu’aux dossiers de l’année 1970 incluse ». « Cette décision sera de nature à écourter sensiblement les délais d’attente liés à la procédure de déclassification, s’agissant notamment des documents relatifs à la guerre d’Algérie », selon le texte.

Cette annonce intervient une semaine après la reconnaissance par le président de la République, « au nom de la France », de la torture et de l’assassinat de l’avocat et dirigeant nationaliste Ali Boumendjel par l’armée française pendant la guerre d’Algérie en 1957.

Ces gestes d’apaisement sont recommandés dans le rapport remis à Emmanuel Macron le 20 janvier par Benjamin Stora dans le but de « réconcilier les mémoires » et de « regarder l’histoire en face ». La décision sur les archives « démontre que nous allons très vite », souligne l’Elysée.

Mais sa portée dépasse le cadre de l’histoire de l’Algérie et M. Macron « a entendu les demandes de la communauté universitaire » qui se plaint des difficultés d’accès aux archives classifiées de plus de cinquante ans en raison de l’application scrupuleuse d’une circulaire sur la protection du secret de la défense nationale.

« Le gouvernement a engagé un travail législatif d’ajustement du point de cohérence entre le code du patrimoine et le code pénal » afin de « renforcer la communicabilité des pièces, sans compromettre la sécurité et la défense nationales », précise l’Elysée. Avec, comme objectif, de parvenir à un nouveau dispositif « avant l’été 2021 ».

Tout en saluant les récentes décisions prises par M. Macron, les autorités algériennes réclament depuis des années l’ouverture des archives coloniales ainsi que le règlement de la question des « disparus » de la guerre d’indépendance, plus de 2 200 personnes selon Alger, et celle des essais nucléaires français dans le Sahara algérien.

Cependant, restent les archives du FLN/ALN. Elles demeurent inaccessibles aux chercheurs, historiens et journalistes. Les autorités algériennes ont mis presque sous scellés nombre d’archives sensibles, comme celles du MALG, mais aussi des wilayas.

Auteur :  L.M/AFP

        Colonisation et guerre d’Algérie: Une longue marche vers la reconnaissance

                             par Hafid Adnani* 

 Avec la reconnaissance officielle, le 2 mars 2021, de l’assassinant par l’armée française de l’avocat Ali Boumendjel, en mars 1957, un nouveau pas a été franchi dans le chemin vers la vérité et la reconnaissance officielle, par la France, de l’ensemble des crimes commis en son nom en Algérie durant 132 ans ; la guerre d’Algérie (1954-1962) ayant été le très violent et inévitable aboutissement d’un processus de domination, d’un système inique qui a succédé à la conquête de 1830 : la colonisation.

Rappelons-nous, en effet, les mots de Jules Michelet dans son «introduction à l’histoire universelle» publié pourtant en 1831 : «Avec le monde a commencé une guerre qui doit finir avec le monde, et pas avant ; celle de l’homme contre la nature, de l’esprit contre la matière, de la liberté contre la fatalité. L’histoire n’est pas autre chose que le récit de cette interminable lutte.» La guerre de la liberté contre la fatalité. Voilà dans quelle logique de l’histoire peut s’intégrer la lutte anticoloniale.Il ne s’agit donc pas ici uniquement de la colonisation de l’Algérie. Car la colonisation est une réalité historique, géographique, économique, sociale et humaine qui va au-delà de la France et de l’Algérie, et qui rappelons-le, perdure encore dans le monde d’aujourd’hui. En effet, depuis la création de l’Organisation des Nations unies, en 1945, plus de 80 anciennes colonies dans lesquelles vivaient quelque 750 millions de personnes ont accédé à l’indépendance. Aujourd’hui, 17 territoires sont encore inscrits sur la liste des territoires non autonomes et regroupent près de 2 millions de personnes. Le processus de décolonisation n’est, par conséquent, pas encore achevé, selon la même ONU. Le changement de paradigme est désormais acquis toutefois.

L’Algérie, une situation particulière au sein du «second empire» colonial français

L’Algérie, colonie de peuplement, est toutefois la première terre qui inaugura la «seconde colonisation» française. Cette dernière constitua un second empire colonial français, lequel remplaça, d’une certaine manière, le Second Empire de Napoléon III, qui fut défait à Sedan le 2 septembre 1870.

C’est le Président Emmanuel Macron, né en 1977, donc 15 ans après la fin de la guerre d’Algérie, qui restera dans l’histoire comme le président français qui est allé le plus loin jusqu’ici, dans un processus de reconnaissance, pourtant semé d’embûches et extrêmement difficile à faire aboutir, tant le sujet est encore brûlant en 2021. Emmanuel Macron est le symbole d’une génération qui n’a pas connu ce moment d’une violence extrême qui mit fin à la colonisation de l’Algérie, et qui souhaite débarrasser le pays qu’il dirige d’un refoulé lourd de conséquences. Les deux derniers présidents français (Nicolas Sarkozy et François Hollande pour se limiter à eux), étant nés, eux, au début de la guerre d’Algérie (1955 et 1954 respectivement), ont un rapport bien différent avec la question algérienne.

Le communiqué de l’Elysée reconnaît officiellement l’assassinat de Ali Boumedjel, torturé et jeté du sixième étage d’un immeuble, et réfute donc définitivement la mort par suicide qui a été la thèse officielle jusqu’ici. Cette reconnaissance était attendue depuis si longtemps, notamment par son épouse, hélas disparue, et sa famille. Il s’agit là d’une véritable respiration qui arrive à point nommé, pour tous ceux qui s’intéressent à ces questions fondamentales. Symboliquement, un des nœuds de cette histoire est désormais défait. La France reconnaît, donc, officiellement, après avoir reconnu l’assassinat du mathématicien Maurice Audin, lui aussi, en 1957, un crime qui a été commis par son armée, en son nom et pendant la guerre d’Algérie.

Le communiqué de l’Elysée souligne : «La génération des petits-enfants d’Ali Boumendjel doit pouvoir construire son destin, loin des deux ornières que sont l’amnésie et le ressentiment. C’est pour eux désormais, pour la jeunesse française et algérienne, qu’il nous faut avancer sur la voie de la véritéì, la seule qui puisse conduire aÌ la réconciliation des mémoires.»

Ainsi, cette reconnaissance, la reconnaissance de manière générale, est un acte qui vise à construire un avenir serein pour tous, en France avant tout, en Algérie ensuite, pays qui devra, il va de soi, travailler également sur les zones d’ombres de sa propre histoire ainsi qu’à son examen de conscience, notamment pendant la guerre d’Algérie, même s’il est évident qu’il ne pourrait être question de confondre ici les victimes du système colonial et ceux qui l’ont mis en place.

Une question avant tout franco-française

Il convient de distinguer, avant tout, trois volets dans le combat nécessaire autour de la mémoire et de l’histoire qui concernent la colonisation et de la guerre d’Algérie : un volet algéro-algérien, un volet franco-algérien et un volet franco-français.

Un quatrième volet pourrait être universel et concernerait le rapport à la colonisation de manière générale et la marche inexorable vers sa criminalisation.

Il est important, donc, de ne pas mélanger ces trois volets afin de poser méthodiquement les problématiques qui sont déjà assez complexes, prises séparément, car nous constatons dans les discours généraux des médias et des commentateurs, une tendance à considérer que le travail sur ces questions, pourtant éminemment importantes en France, se limite à une réponse aux demandes algériennes (postulat, en dehors de son inexactitude, montre à quel point le déni pèse lourd). La colonisation et la guerre d’Algérie sont, encore une fois, des moments très importants de l’histoire française. Ils concernent donc la communauté française dans sa totalité, et ce indépendamment de l’Algérie. Il est nécessaire de dire et de redire, ici, qu’il n’est pas exact non-plus d’affirmer ou de considérer qu’en France, ces questions ne concerneraient que les immigrés algériens ou les Français d’origine algérienne comme on peut trop souvent l’entendre.

Du côté des Algériens, il est de toute évidence trop facile de se tourner vers la France, systématiquement, pour l’accuser et de refuser ainsi, comme l’ont fait les tenants des pouvoirs successifs, depuis bientôt soixante années, d’examiner sereinement une histoire endogène plus complexe et moins conforme au récit national lisse construit depuis l’indépendance. Reprécisons toutefois et à nouveau, car il le faut, que les victimes du système colonial sont bien les populations indigènes dans l’Algérie coloniale, et qu’il ne s’agit pas ici de renvoyer dos à dos ceux qui ont conquis cette terre en 1830 et «soumis», aliéné les populations autochtones ; avec les populations autochtones elles-mêmes qui sont les victimes dans cette histoire.

Convaincu que chaque partie (la française et l’algérienne) a pour devoir, avant tout, de faire son propre travail sur cette grande blessure de l’histoire, je propose ici d’examiner uniquement le point de vue franco-français.

Un geste historique et une avancée capitale vers une reconnaissance officielle plus globale

Le communiqué, désormais historique, de l’Elysée, daté du 2 mars 2021, autour de la reconnaissance de l’assassinat de l’avocat Ali Boumendjel, en 1957, contient également ces mots si importants : «Aucun crime, aucune atrocitéì commise par quiconque pendant la Guerre d’Algérie ne peut être excuseì ni occulteì.»

Nous assistons donc, de toute évidence, à une marche vers la reconnaissance pleine et entière des crimes de guerre et des crimes coloniaux, qui a été sans conteste inaugurée par le candidat Macron en 2017, quand il qualifia, à la télévision algérienne, la colonisation de «crime contre l’humanité», allant bien plus loin que tout officiel français du vingtième siècle.

J’ajoute, à titre d’exemple, que le 11 juin 2017, Emmanuel Macron, fraîchement élu président de la République française, a téléphoné à Josette AUDIN, veuve du mathématicien Maurice AUDIN, assassiné en 1957, lui aussi, après des séances de torture, pour lui dire qu’il pensait à elle (Maurice AUDIN a été arrêté, en effet le 11 juin 1957 dans son domicile algérois pour ne plus jamais y revenir). Cet appel téléphonique, antérieur à la reconnaissance officielle de l’assassinat de Maurice Audin, qui aura lieu le 13 septembre 2018, montre que le président français est, et ce depuis le début de son mandat, dans une démarche réfléchie et bien construite sur ces questions et que les avancées qui sont en train de se faire s’inscrivent dans une logique globale, à présent lancée.

Cette politique des «petits pas» est celle qui a été défendue par l’historien Benjamin Stora, à la suite des nombreuses critiques dont son rapport sur «Les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie» remis au Président Marcon, le 20 janvier dernier, a été l’objet. Critiques qui sont venues des deux côtés de la Méditerranée.

Ce qui est essentiellement reproché à Benjamin Stora

Si on exclut les critiques des nostalgiques de l’Algérie française, essentiellement positionnés à droite ou à l’extrême droite (parmi eux, certains historiens qui ne semblent visiblement pas avoir compris les mots de Jules Michelet) ainsi que certains défenseurs de la mémoire des harkis; si on exclut également les critiques et les insultes personnelles parfois nauséabondes allant jusqu’aux références (clairement antisémites) à la judaïté de Benjamin Stora (article sur le site ‘Algérie patriotique’ du 3 février intitulé : «L’histoire de l’Algérie expliquée à Benjamin Stora : les massacres du 8 Mai 45 et les milices juives») et qu’il faut dénoncer avec la plus grande force ; si on exclut un certain nombre de critiques intéressantes (y compris d’institutions positionnées à droite) sur les choix établis dans les préconisations de Benjamin Stora ; si on exclut tout cela, c’est essentiellement l’absence d’un appel à une reconnaissance globale des crimes de guerre et de crime coloniaux, voire de crimes contre l’humanité, que l’on reproche à un Benjamin Stora qui ne pouvait ignorer l’importance des mots qu’il a utilisés dans ce rapport.

Voici quelques exemples de prises de positions françaises : L’historienne Sylvie Thénault, affirme que «parler de réconciliation, n’a pas de sens» (Le Monde du 5 février 2021, et que ce qui manque, c’est «une condamnation […] forte, solennelle, officielle. L’enceinte judiciaire n’a pas pu en être le théâtre. L’amnistie a interdit la poursuite des crimes commis pendant la guerre.». L’universitaire Olivier Le Cour Grandmaison, qui accuse Benjamin Stora de s’être comporté comme un conseiller et non comme un historien (Médiapart du 28 janvier), est autrement plus direct, il appelle notamment les candidats à la présidentielle de 2022, à prendre un engagement solennel : «l’Etat français reconnaît les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité qu’il a commis et fait commettre par ses forces armées et la police au cours de la colonisation de l’Algérie (1830- 1962)».

L’historien Gilles Manceron, toujours dans Médiapart, cette fois-ci le 1er février, dresse un historique des évolutions des actes politiques sur ces questions pour constater que les avancées des années 2000, notamment grâce au travail extraordinaire de la journaliste Florence Beaugé et du journal «Le Monde», ont été balayés par les «atermoiements» du Président Jacques Chirac et les régressions marquées de ceux qui lui ont succédé, ce qui eut par conséquence qu’ «aucune déconstruction des mythes qui justifiaient l’empire colonial n’est intervenue, et l’extrême droite qui les cultive comme une rente a eu beau jeu d’étendre son influence, en même temps qu’ils se répandaient». Selon lui, c’est ce qui aurait amené Benjamin Stora à renoncer à réitérer «avec force» la demande «première et essentielle» de reconnaissance. L’anthropologue Tassadit Yacine de son côté, affirme dans les colonnes du quotidien algérien «L’expression» qu’elle est «surprise d’entendre parler d’excuses ou de repentance sans que la reconnaissance de cette colonisation spécifique et de cette guerre atroce, ponctuée par des massacres, des déportations, des enfumades, ne soit officiellement établie».

C’est donc le mot «reconnaissance» qui prend de plus en plus forme aujourd’hui, en France, dans les réactions critiques des universitaires et des historiens (en dehors, encore une fois, des réactions de ceux qui n’admettent, dans le fond, toujours pas le caractère inacceptable de réalité coloniale), vis-à-vis du rapport Stora, avant d’ailleurs ceux d’ «excuses» ou de «réparation».

Une reconnaissance qui se dessine comme le préalable à toute possibilité d’avancer au sein même de la société française, et qui est de surcroît une demande officielle (et légitime) des Algériens. Le rapport Stora aura donc servi et paradoxalement, de révélateur à cette nécessité absolue, même si le choix qui a été fait dans les préconisations de ce rapport est différent, très probablement pour tenir compte de la violence du clivage en France sur la question algérienne comme l’affirme Gilles Manceron.

Inutile ici de redire que «la repentance» ou «l’autoflagellation» sont des mots hors de propos; des inventions de ceux qui refusent mordicus de regarder en face cette lourde histoire. Ils ne correspondent, par ailleurs, aucunement, comme tous les observateurs aguerris le savent, à des demandes des Algériens.

Il reste que «la réconciliation» prônée par Benjamin Stora pose également problème : est-il possible de se réconcilier avec tous les courants, y compris les plus radicaux ? Est-il nécessaire par conséquent de faire cas de toutes les «communautés de mémoires» qui se sont formées, même de celles qui vivent dans le déni ? Pouvons-nous, comme le dit Sylvie Thénault, considérer que la guerre d’Algérie notamment, a vu l’affrontement de deux entités homogènes qui ont besoin, aujourd’hui, d’une réconciliation ?

La marche vers la reconnaissance des crimes commis au nom de la France pendant la colonisation et en particulier la guerre d’Algérie, a bel et bien commencé. Elle poursuit inexorablement son chemin, ce 2 mars 2021 sous l’impulsion du Président Macron, avec, symboliquement là encore, l’unique reconnaissance officielle par la France, préconisée par Benjamin Stora dans son rapport.


*Né en Algérie. Journaliste et cadre supérieur de l’Education nationale, il est également doctorant en anthropologie au Laboratoire d’Anthropologie sociale du Collège de France. Il est l’auteur de «Tassadit Yacine avec Mouloud Mammeri». Editions Non lieu.


      Comment l’histoire des massacres français en Algérie peut-elle être utilisée pour construire l’avenir ?

   

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a ouvert un nouveau champ pour construire l’avenir, en réécrivant l’histoire et en sensibilisant le public à la réalité du colonialisme. Le président algérien a annoncé que le nombre de martyrs tués par l’armée française en Algérie a atteint 5,5 millions en 132 ans.

Un monde qui revendique la civilisation peut-il tolérer un pays qui a tué la moitié de la population algérienne pendant sa période d’occupation? Est-il suffisant de s’excuser pour cela?

Le président Tebboune a expliqué que l’armée française visait le nettoyage ethnique de l’Algérie en tuant les peuples autochtones et en faisant venir des étrangers pour occuper leurs terres et piller leurs biens, et que cela constitue un crime contre l’humanité, et que la répression brutale et sanglante de la L’occupation française restera une tache sur le front des puissances coloniales, crimes qui ne sont pas soumis à prescription.

Le président Abdelmadjid Tebboune s’est engagé à tenir l’Etat français responsable de ses crimes en Algérie et à récupérer les crânes des chefs de la résistance au Musée de l’Homme à Paris.

Ce discours est exprimé par le président algérien par tous les Algériens, et il connaît le chemin de leur cœur, et qu’il obtient ainsi leur soutien et leur amour, car ils veulent ce discours fort qui ouvre un nouveau champ pour la formation des relations extérieures sur la base de la restauration des droits historiques et de la responsabilité de la France pour ses crimes.

Façonner l’opinion publique mondiale

Mais la question que nous pouvons nous poser ici est la suivante: pouvons-nous former une opinion publique mondiale contre les massacres commis par les puissances coloniales au cours des trois derniers siècles, et restaurer les droits des pays africains et asiatiques soumis au colonialisme.

Un monde qui revendique la civilisation peut-il tolérer un pays qui a tué la moitié de la population algérienne pendant sa période d’occupation? Est-il suffisant de s’excuser pour cela?

La réécriture de l’histoire et la révélation des faits pourraient constituer une nouvelle étape dans l’histoire de l’humanité et contribuer à atteindre un nouvel ensemble de valeurs et de droits de l’homme qu’il est possible de convenir de protéger.

La question des martyrs algériens doit être transformée en une question mondiale qui est adoptée par les médias, les écrivains et les savants libres du monde entier. Le crime de la France en Algérie n’est pas un problème entre l’Algérie et la France, mais un problème mondial avec lequel tous les peuples libres doivent interagir et déclarer leur rejet des crimes contre l’humanité.

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En outre, cette affaire peut contribuer à la construction d’une nouvelle culture mondiale qui affirme le caractère sacré de la vie humaine et tient responsable quiconque commet un crime contre l’humanité.

Influencer l’opinion publique française

Révéler les faits des massacres commis par la France en Algérie pourrait également contribuer à la formation de l’opinion publique en France qui fait pression sur le gouvernement français, l’oblige à présenter des excuses et à offrir une compensation à l’Algérie, et à rendre les crânes des chefs de la résistance à enterrer dans L’Algérie avec l’honneur approprié.

Si de Gaulle avait jamais eu le courage de retirer l’armée française d’Algérie après avoir réalisé la détermination des Algériens à résister jusqu’à l’indépendance, alors le peuple français a besoin d’un nouveau chef qui a l’intelligence de de Gaulle, et qui comprend le danger de l’hostilité persistante avec le peuple algérien

 

Mais la question ne doit pas s’arrêter là. Le peuple français doit fonder ses relations avec les autres peuples sur les principes du respect de l’indépendance des États, du respect de l’islam et de ses symboles, et de l’apprentissage que les crimes du colonialisme constitueront une barrière sans instaurer un échange de les intérêts entre États, qui sont des relations qui peuvent convenir aux pays Au XXIe siècle.

Ces relations ne peuvent s’établir alors que la mémoire collective est parsemée de scènes d’effusion de sang, de meurtres, de massacres, de sabotages et de destructions perpétrés par l’armée française.

Par conséquent, des excuses pour ces crimes et la reconnaissance de la honte qu’ils ont infligée à la France pourraient être dans l’intérêt des Français eux-mêmes.

Si de Gaulle avait eu un jour le courage de retirer l’armée française d’Algérie après avoir réalisé la détermination des Algériens à poursuivre la résistance jusqu’à l’indépendance, alors le peuple français a besoin d’un nouveau chef qui ait l’intelligence de de Gaulle, et qui comprend la gravité de l’hostilité persistante avec le peuple algérien.

La question ne concerne pas non plus le peuple algérien seulement, mais elle concerne toute personne qui veut construire un avenir dans lequel ces massacres ne se reproduiront pas, et dans lequel le droit de l’homme à la vie, l’indépendance des États et la dignité des les peuples sont respectés.

Par conséquent, le peuple français doit se rendre compte que sa capacité à construire ses relations avec les peuples à l’avenir doit commencer par revoir l’histoire des Noirs et abandonner le racisme et l’arrogance contre l’humanité.

Mais y a-t-il une possibilité d’influencer l’opinion publique française? La révolution de la communication nous ouvre un vaste champ pour découvrir les faits et influencer les attitudes des masses. L’année 2016 a vu le lancement d’une campagne électronique pour faire pression sur le gouvernement français pour qu’il restitue les crânes de martyrs pour l’enterrement en Algérie, et le journal Le Monde a adopté cette campagne, qui a été signée par un certain nombre d’historiens français. Cette campagne a contribué au retour des crânes de 24 martyrs, mais il reste encore de nombreux crânes que le peuple algérien a hâte d’enterrer sur le sol algérien.

Dépasser les crimes nazis

Le peuple français doit également réécrire son histoire. L’Allemagne nazie a occupé la France et les combattants algériens ont contribué à la libération de la France de l’occupation nazie. Mais les crimes de la France sont-ils moins cruels et brutaux que ceux des nazis? L’historien algérien Mustafa Nouaiser répond à cette question en disant: Lorsque nous ouvrirons le dossier de la France en Algérie, nous ne serons pas surpris, mais choqués. La France a non seulement décapité mais aussi brûlé des gens, tué les Algériens avec de la fumée, et que certains les historiens ont comparé ce que la France a fait en Algérie avec les crimes d’Adolf Hitler, ils ont constaté que les crimes de la France dépassaient ceux des nazis.

C’est pourquoi l’historien Mustafa Nuweiser a appelé à ce que ce type de crime brutal soit porté à l’attention de l’opinion publique mondiale. Nous souscrivons à l’appel de Mustafa Nuweiser, et nous pensons que les médias doivent clarifier les faits à l’humanité afin de pouvoir construire son avenir sur de nouvelles bases, et accepter de punir quiconque commet des crimes contre l’humanité.

Si l’Amérique, la Grande-Bretagne et la France ont construit leur alliance pendant la Seconde Guerre mondiale contre l’Allemagne nazie sur la base qu’elles commettaient des crimes contre l’humanité, alors le crime de la France en Algérie n’est pas moins brutal et cruel que les crimes des nazis.

Etudier le journalisme européen

Réécrire l’histoire de la colonisation française de l’Algérie et des massacres commis par l’armée française nécessite d’étudier la presse européenne et américaine, tout au long des XIXe et XXe siècles, où l’on peut découvrir de nombreux faits. Là où le journaliste français Michel Abbate dit qu’en 1854 les journaux britanniques, allemands et français ont critiqué le comportement de l’armée française contre les musulmans, le décrivant comme étant au niveau de la barbarie.

Mais on peut aussi découvrir de cette étude que la presse française n’a pas joui de la liberté que prétendait la France, et n’a pas été en mesure de révéler les faits sur les massacres commis par l’armée française en Algérie et en Afrique, et qu’elle n’a pas le droit du peuple à savoir, et qu’il a adopté le discours. Le fonctionnaire français, qui se caractérise par le racisme et la justification du colonialisme, est le résultat de la responsabilité de l’homme blanc dans l’humanité civilisée. Cette urbanisation a été l’anéantissement des villages algériens , et la décapitation des Algériens et les exposer au Musée de l’Homme.

Il y a aussi de nombreux faits que le monde a besoin de connaître, dont les plus importants sont: Quels types d’armes ont été utilisés pour anéantir les Algériens? Il est prouvé que la France a utilisé des armes chimiques et des armes de destruction massive et d’extermination.

Ces armes ont été les résultats les plus importants de l’urbanisation européenne, de la révolution industrielle et du projet des Lumières qui ont ébloui les intellectuels arabes occidentalisés.

Torture

L’un des résultats de la civilisation française a été l’utilisation de la torture en Algérie, et Macron a officiellement reconnu que l’État français autorisait l’utilisation de la torture pendant la guerre d’Algérie. Ce crime contre l’humanité s’ajoute aux crimes de la France, et révèle le niveau de civilisation, de civilisation et d’illumination qu’elle a atteint.

Cela signifie que les crimes de la France en Algérie ne sont pas illustrés par le nombre de martyrs, qui a atteint 5,5 millions d’Algériens, comme l’a annoncé le président algérien Abdelmadjid Tebboune. Mais il y a beaucoup d’Algériens qui ont été torturés, exilés, déplacés et pillés de biens .

Des millions de femmes et d’enfants ont été déplacés après que l’armée française a pillé leurs biens et les a expulsés de leurs villages. Ils ont été forcés de se réfugier dans les montagnes, mais il ne les a pas quittés, il les a donc exterminés par le feu et la fumée.

À la lumière de cela, nous devons commencer l’étape de la résistance par l’histoire, à laquelle participent les professionnels des médias, les médias et les chercheurs de tous les domaines scientifiques, les centres de recherche et les universités, afin que les faits sur l’histoire du colonialisme et les crimes commis par elles sont révélées, éduquent notre peuple et le motivent à continuer la lutte pour construire l’avenir et à se libérer de la dépendance intellectuelle et culturelle vis-à-vis de l’Occident.

L’histoire peut devenir l’arme la plus importante de résistance et de construction de l’avenir, et l’histoire de la lutte des Algériens contre le colonialisme français peut nous ouvrir la voie à la fermeté, quelles que soient la force et la cruauté de l’ennemi.



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