Algérie / Hirak et Coronavirus : Appels à «une trêve sanitaire»

par M. Aziza

De nombreux appels pour une « trêve du Hirak », sont partagés sur les réseaux sociaux suite au développement de la situation épidémiologique du coronavirus en Algérie et dans plusieurs pays du monde, notamment dans les pays du pourtour méditerranéen.

Sur Facebook, plusieurs pages appellent à la sagesse invitant les citoyens à adopter d’autres formes de protestation. «Vous pouvez participer au ‘Hirak’ depuis vos balcons» ou «la 58ème action du ‘Hirak se fera à travers nos balcons», proposent les internautes. Et ce, au moment où de plus en plus de personnalités politiques et de la société civile ont invité les Algériens à marquer une pause du ‘Hirak’ en raison de l’enregistrement de quatre décès, en Algérie et plus d’une cinquantaine de cas confirmés. A noter que des personnalités très actives dans le ‘Hirak’ ont lancé des appels à renoncer, momentanément, aux manifestations publiques, marches et rassemblements. Mohsen Belabès, président du RCD a, à travers sa page Facebook , affirmé que : «faire prévaloir et prioriser la santé des Algériens est de la responsabilité de tous».

Le Pr Noureddine Melikechi, travaillant pour l’Agence spatiale américaine NASA, qui n’a jamais cessé de soutenir «la révolution populaire pour le changement» a appelé les Algériens à suspendre «temporairement» le ‘Hirak’ pour ralentir la propagation du coronavirus. Et d’affirmer à travers un tweet : «mes convictions sur le bien-fondé du ‘Hirak’ restent inchangées mais étant donné la nature, hautement contagieuse de Covid-19, j’exhorte mes compatriotes à suspendre, temporairement, le ‘Hirak’ et à éviter les foules». «Cela n’isolera pas définitivement les gens de Covid-19, mais ralentira sa propagation», écrit le physicien algérien en précisant qu’«une suspension momentanée du ‘Hirak’, n’est pas une faiblesse mais de la sagesse et de la maturité».

Le cas également d’Abdelaziz Rahabi qui a lancé, lui aussi, un appel aux Algériens pour la suspension temporaire des manifestations afin de faire face au risque de propagation du coronavirus. En affirmant que «l’Algérie vit un état d’urgence sanitaire non déclaré, imposé par la gravité du coronavirus et la fragilité de notre système de santé et le manque de respect des mesures préventives nécessaire comme les autres pays». Mais certains internautes s’obstinent en affirmant que «ni le coronavirus, ni la politique de répression n’arrêtera le ‘Hirak’». «On ne s’arrêtera qu’après la libération de tous les détenus sans exception !»

Est-ce que les étudiants s’aventureront, aujourd’hui, avec leur 56ème marche hebdomadaire pour le changement politique radical, dans les rues ?

>> Coronavirus: Les mises en garde du ministre de la Santé


Maintien de la prière à la mosquée pour les hommes

>> La décision «insensée» de la Commission nationale de la fatwa


Pour éviter le risque de propagation du coronavirus

>> Unanimité pour la suspension des marches du hirak


>> Coronavirus : Attention, même les jeunes aussi peuvent être gravement touchés


Lire aussi :

Amar Belhimer : « Le néo-Hirak fait du surplace et s’installe dans l’impasse »

Par Ryad Hamadi

Amar Belhimer, ministre de la communication et porte-parole du gouvernement, a estimé ce lundi 16 mars que la « raison exige la cessation » des marches et rassemblements, en raison des risques de propagation du Coronavirus.

« Le Hirak est intelligent et généreux. Il doit le rester et même l’être plus encore lorsqu’il y a péril majeur en la demeure. Ceux qui s’obstinent, dans un entêtement suicidaire, à le maintenir coûte que coûte et quoi qu’il en coûtera à la nation tout entière, ne doivent pas concourir à son échec, voire même à sa disparition. Ils devraient en être empêchés par la force de la raison citoyenne et par celle du droit qui est au-dessus de tous. La raison exige la cessation des marches et des rassemblements », a-t-il dit dans un entretien accordé à l’agence officielle.

« Et, une fois la crise grave du Coronavirus résorbée par la mobilisation de tout un peuple, rien n’empêchera alors le Hirak de reprendre son cours si d’ici là, des avancées démocratiques et sociales majeures n’auront pas été enregistrées », a-t-il ajouté, comme pour suggérer qu’il n’est pas hostile au mouvement mais qu’il faut faire prévaloir dans la conjoncture actuelle la voix de la raison.

D’ailleurs, le ministre n’omet pas de s’appuyer, dans son plaidoyer, sur les voix qui appellent à la « trêve » et à une « suspension » temporaire des marches. « En vertu des tentatives des forces antinationales de transformer le Hirak en mouvement insurrectionnel non armé visant la paralysie du pays, et au vu de ce qu’il représente aujourd’hui comme risque sanitaire majeur (Coronavirus, ndlr), des voix de la raison se sont élevées dans le pays et dans la diaspora notamment à travers les réseaux sociaux pour appeler à une pause salutaire, à une trêve préventive. Des leaders d’opinion lucides et réalistes appellent même à l’arrêt pur et simple des marches et des rassemblements. Car la pandémie du coronavirus est sérieuse, attestée par la rigoureuse OMS. Ces mêmes voix de la lucidité citoyenne et de la raison patriotique appellent à cesser les marches dans un contexte national aussi complexe et aussi périlleux, marches pour lesquelles elles ne trouvent plus aucune raison d’être car le Hirak est déjà victorieux », estime-t-il.

« Et il a gagné sur plusieurs fronts. Grâce à sa convergence initiale avec l’ANP, qui l’a accompagné et protégé, il a permis de faire barrage au 5e mandat d’un président cacochyme utilisé comme devanture politique par une caste mafieuse et des réseaux transversaux d’accaparement et de dilapidation des richesses nationales. Grâce à son insurrection pacifique et intelligente, il a révélé au pays et au monde la colossale et effroyable corruption du régime précédent et de ses insatiables clientèles. Et, toujours de son fait, le Hirak a favorisé l’avènement d’une opinion publique agissante, influente et désormais écoutée. De même qu’il a permis aux Algériens de s’approprier la politique en lieu et place de structures de médiation, d’intermédiation et de représentation défaillantes, discréditées et inaudibles. Et par-dessus tout, il a rendu possible le changement pacifique et ordonné », égrène-t-il.

Haro sur les commanditaires du « néo-Hirak»

Comme d’autres représentants du pouvoir, le ministre de la communication considère que le « Hirak » d’aujourd’hui n’est plus celui des premiers mois de la mobilisation, étant parasité par certains courants politiques dont le mouvement Rachad qu’il ne cite pas au demeurant.

« On ne reconnait plus au fil du temps qui passe le mouvement des origines. Un an après sa naissance favorisée par la tentative du passage en force du président déchu, alors incapable, pour un cinquième mandat destiné à préserver les intérêts mafieux d’une caste parasitaire aux commandes du pays, le néo-Hirak fait du surplace et s’installe dans l’impasse », soutient-il.

« A l’origine, mouvement transcourant et transgénérationnel, il a fini par être parasité par certains courants politiques qui l’ont rejoint pour mieux le faire dévier de sa vocation citoyenne, patriotique, démocratique et plurielle. Il est donc à craindre que le Hirak s’inscrive de plus en plus dans le prolongement de ces «bouleversements préfabriqués’ qui, au demeurant, révèlent chaque jour davantage leur caractère contre-révolutionnaire », dit-il allusion au « printemps arabes ».

« Des ONG qui ont pignon sur rue à Genève ou à Londres, des résidus irréductibles de l’ex-FIS et des revanchards mafieux de l’ancien système travaillent d’arrache-pied, y compris par derrière les barreaux ou à partir de leurs retraites dorées (forcées ou choisies), pour propager les mots d’ordre de désobéissance civile, de troubles et de recours à la violence. L’accumulation effrénée de ressources financières et le positionnement de leurs relais dans tous les appareils d’État et à tous les niveaux de décision, leur confère naturellement une force de frappe qui n’a pas encore été totalement contenue. Ils escomptent un retour aux affaires et aux commandes à l’aide de marches quotidiennes là où elles peuvent être tenues, appuyant des mots d’ordre hostiles à l’institution militaire et aux services de sécurité. Ce qui est en fait visé ce sont les institutions, l’ordre public, la stabilité et la souveraineté nationale », accuse-t-il.

Selon lui, ceux qui se mobilisaient au début du « Hirak » en faveur d’un renouveau démocratique ont été « efficacement exclus par la nouvelle secte autoproclamée « révolutionnaire ».

Dans ce contexte, il critique certains partis et certains médias qu’ils ne citent pas et qui se livrent, à ses yeux, à la manipulation, à travers notamment certains slogans comme la revendication d’ « indépendance » ou la minimisation du rôle de l’ANP dans la séquence historique vécue par le pays. Mettant en exergue ce qui a été accompli par les pouvoirs publics, notamment depuis l’élection présidentielle, Amar Belhimer appelle, compte tenu de la situation, les forces patriotiques à la « vigilance ». « Le temps est à la reconstruction. Aidons ce processus à aboutir dans les meilleurs délais ».


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *