Algérie-Maroc : Que Rabat présente «ses excuses au peuple algérien, après les relations pourront reprendre»

«Que le Maroc présente d’abord ses excuses au peuple algérien, après les relations pourront reprendre et il n’y aura aucun problème», a déclaré Abdelmadjid Tebboune, candidat à l’élection présidentielle algérienne.

© AFP 2019 RYAD KRAMDI

Lors de son passage au Forum d’El Hiwar («Le Dialogue») à Alger, l’ex-Premier ministre et candidat à la présidentielle algérienne du 12 décembre Abdelmadjid Tebboune est revenu sur la question de la fermeture de la frontière avec le Maroc et sur sa possible réouverture sous condition.

«La frontière n’a pas été fermée à cause du conflit au Sahara occidental, il faut arrêter de déformer la réalité», a affirmé M.Tebboune, ajoutant que «la réouverture de la frontière avec le Maroc est tout à fait possible, un jour ou l’autre, à condition que les autorités marocaines, pas le peuple, présentent leurs excuses au peuple algérien».

Pourquoi l’Algérie a-t-elle fermé la frontière?

Selon le présidentiable, c’est la réaction marocaine au lendemain des attentats terroristes, qui ont visé en 1994 des hôtels à Marrakech, qui a poussé le chef de l‘État algérien, le général à la retraite Liamine Zeroual, à prendre la décision de fermer la frontière. Rabat avait imposé un visa aux Algériens désireux de se rendre sur le territoire marocain.

«Il y a eu un attentat terroriste à Marrakech[en 1944, ndlr] et tout de suite les autorités marocaines avaient réagi à chaud en affirmant que les responsables étaient des Algériens», a expliqué le candidat. «À ce moment, l’Algérie était déjà sous embargo [en raison de la déferlante terroriste dans le pays, ndlr], et le Maroc a de son côté accentué cette situation» en imposant un visa, a-t-il ajouté.

Cependant, outre la position d’Alger qui a réfuté toute implication dans ces attentats, M.Tebboune a rappelé «qu’une semaine plus tard, un ministre de l’Intérieur d’un des pays européens [l’Espagne ou la France, ndlr] qui ont une importante présence au Maroc avait affirmé qu’il était en possession de preuves que les Algériens n’avaient à rien à voir dans les attentats de Marrakech, et que les responsables étaient des Marocains».

Au moment des faits, l’Algérie présidait l’Union du Maghreb arabe (UMA) et «figurez-vous qu’elle n’a pas été informé par la décision marocaine au préalable», a souligné le présidentiable, précisant que «les autorités algériennes ont pris connaissance de la décision marocaine [d’imposer un visa, ndlr] à la télévision, comme tout le monde».

Selon Abdelmadjid Tebboune, durant les jours qui ont suivi les attentats de Marrakech et suite à la décision des autorités marocaines, près de 350.000 Algériens «ont été humiliés et se sont retrouvés coincés au Maroc» avant d’être «rapatriés par des bateaux et des bus mobilisés par l’Algérie».

Les autorités marocaines avaient même imposé un visa au ressortissants français d’origine algérienne «ce qui n‘est jamais arrivé dans les relations internationales entre pays», s’est-il offusqué.

La position marocaine

Le ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération internationale Nasser Bourita s’est exprimé dans un entretien donné à France 24 sur les relations bilatérales entre les deux pays et leur importance dans la construction de l’Union du Maghreb arabe (UMA).

M.Bourita a déclaré qu’en tant que citoyen maghrébin, «il regrette avec amertume […] qu’un problème [le conflit du Sahara occidental, ndlr] créé du temps de la guerre froide, soit encore présent et qu’il ralentisse les relations bilatérales et le Maghreb arabe».

Le 6 novembre 2018, à l’occasion du 43e anniversaire de la Marche verte, le roi Mohammed VI avait proposé dans son discours à la nation aux autorités algériennes de relancer les relations bilatérales en créant un «mécanisme politique conjoint de dialogue et de concertation» destiné à permettre de régler les différends entre les deux pays.

Détaillant les missions qui seront assignées à cette structure, le roi Mohammed VI avait souligné qu’«en vertu de son mandat, ce mécanisme devra s’engager à examiner toutes les questions bilatérales avec franchise, objectivité, sincérité et bonne foi, sans condition ni exception, selon un agenda ouvert». «Il pourra constituer le cadre pratique d’une coopération centrée sur les différentes questions bilatérales, notamment celle qui a trait à la valorisation des opportunités et des potentiels de développement que recèle la région du Maghreb», avait-il ajouté.

Il y a-t-il un avenir ensemble?

Toujours à l’occasion de son passage au Forum d’El Hiwar, l’ex-Premier ministre a expliqué qu’il avait «une forte envie de rétablir les relations entre les deux pays».

«Les relations entre l’Algérie et le Maroc sont vieilles de milliers d’années et il ne faut pas sous-estimer l’avenir», a-t-il déclaré. «Il y’avait entre nous des relations économiques très fortes et nous n’étions pas forcément les premiers bénéficiaires», a-t-il ajouté.

Par ailleurs, il a indiqué qu’il y existait actuellement dans le monde des ensembles géopolitiques et «aucun pays ne peut être suffisamment fort à lui seul, sauf s’il appartient un l’un de ces ensembles». Ainsi, «l’UMA qui contient près de 90 millions de consommateurs et de producteurs» peut devenir un acteur international important dans tous les domaines, a-t-il lancé.

Enfin, Abdelmadjid Tebboune a regretté l’état lamentable dans lequel se trouve actuellement l’UMA et s’est demandé «qui est en train d’agir pour casser la relation algéro-marocaine, qui tente de briser les relations entre l’Algérie et la Tunisie, et entre l’Algérie et l’Égypte?». «Que le Maroc présente d’abord ses excuses au peuple algérien, après les relations pourront reprendre et il n’y a aucun problème», a-t-il conclu.


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