«C’est le combat armé qui déterminera la cause sahraouie», rétorque le Front Polisario à Trump – exclusif

       Par

La décision de Trump de reconnaître la marocanité du Sahara occidental est un «non-événement» et «contraste avec le statut de superpuissance des États-Unis, membre permanent du Conseil de sécurité, qui devrait […] veiller au respect du droit international», a affirmé le Polisario à Sputnik. Il a souligné sa détermination à continuer le combat armé.

Dans un entretien accordé à Sputnik, Oubi Bouchraya Bachir, membre de la direction du Front Polisario chargé de l’Europe et de l’Union européenne, a réagi à la décision de Donald Trump de reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Selon lui, c’est «un coup d’épée dans l’eau» qui n’aura aucun effet sur l’évolution du conflit entre les deux parties. Il a par ailleurs fustigé le troc par le Maroc «de la position US sur la question sahraouie avec la normalisation de ses relations avec Israël».

«Le Front Polisario condamne dans les termes les plus forts la décision du Président américain sortant qui va à l’encontre de la sécurité et de la stabilité dans la région et à contre-courant de la position traditionnelle des États-Unis, rappelée ces derniers jours par le secrétaire d’État Mike Pompeo», a affirmé le responsable. «Cette décision contraste avec le statut de superpuissance des États-Unis, membre permanent du Conseil de sécurité, qui devrait normalement veiller au respect du droit international».

 

Aussi, M.Bachir a souligné que la démarche de Trump «aura un impact négatif sur l’évolution de la solution politique au conflit au Sahara occidental, car elle va certainement encourager davantage l’occupant marocain à continuer dans sa politique d’obstruction et de manque de coopération avec les efforts onusiens». «La même politique qui a conduit le 13 novembre à l’effondrement du processus politique et de l’accord de cessez-le-feu de 1991, suite à l’intervention militaire marocaine au passage frontalier de Guerguerat, situé dans la zone tampon démilitarisée».

«Les causes sahraouie et palestinienne», un même combat

Abordant la question de l’accord entre le Maroc et Israël, le représentant du Polisario a rappelé que depuis des mois des rapports faisaient état d’une intense activité diplomatique du gendre et conseiller du Président américain pour le Moyen-Orient, Jared Kushner, pour conclure un accord tripartite entre Washington, Rabat et Tel-Aviv. Le but était d’obtenir une reconnaissance américaine de la marocanité du Sahara occidental en échange d’une normalisation des relations entre l’État hébreu et le royaume chérifien.

«Cette démarche du Maroc n’est pas du tout surprenante et a le mérite, enfin, de démasquer auprès des peuples marocain, arabes et musulmans l’hypocrisie de 60 ans de fausse solidarité du royaume avec le peuple palestinien et sa cause juste contre l’occupant israélien», a expliqué le diplomate.

«À ce titre, les causes sahraouie et palestinienne se rejoignent parfaitement sur le droit des deux peuples à l’indépendance, à l’autodétermination et à l’édification d’un État souverain et viable dans le cadre du droit international et de la charte des Nations unies, face à deux colonisateurs expansionnistes qui ne reconnaissent pas leurs frontières et qui bafouent le droit des peuples à la liberté et à la dignité».

 

Exercices à tirs réels Bouclier 2020 à Oran
© PHOTO / SPUTNIK VIA LE MINISTÈRE ALGÉRIEN DE LA DÉFENSE NATIONALE

En février, interpellé sur cette question par des élus islamistes du Parti de la justice et du développement (PJD), le chef de la diplomatie marocaine Nasser Bourita a martelé devant les membres de la commission des Affaires étrangères à la Chambre des conseillers que «le Sahara [occidental, NDLR] restait la première cause du Maroc et non la Palestine». Il a par ailleurs souligné que les Palestiniens avaient signé en septembre 2013 les accords de paix d’Oslo avec Israël, d’après le site Yabiladi.

Trump a donné «un coup d’épée dans l’eau»

Suite à l’intervention du 13 novembre des Forces armées royales (FAR) marocaines pour prendre le contrôle du passage frontalier de Guerguerat, le Président de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), Ibrahim Ghali, a signé un décret mettant fin à l’engagement de la RASD à respecter l’accord de cessez-le-feu avec le Maroc signé en 1991 sous les auspices de l’Onu.

Dans ce contexte, Oubi Bouchraya Bachir a affirmé que la démarche américaine «ne changera strictement rien ni au statut et la nature du conflit au Sahara occidental, tel que rappelé par le porte-parole du secrétaire général de l’Onu, ni à la légitimité du combat armé que mènera le peuple sahraoui pour sa liberté sous la bannière du Front Polisario».

Dans un communiqué publié par l’agence Maghreb arabe presse (MAP), le palais royal marocain a salué «la position constructive des États-Unis [qui] vient renforcer la dynamique de la consécration de la marocanité du Sahara». Par ailleurs, au sujet de la question palestinienne, la note a souligné que «le Maroc soutient une solution fondée sur deux États vivant côte à côte dans la paix et la sécurité, et que les négociations entre les parties palestinienne et israélienne restent le seul moyen de parvenir à un règlement définitif, durable et global de ce conflit». La même source a souligné «la nécessité de préserver le statut spécial» de la ville de Jérusalem-Est, la capitale naturelle de l’État palestinien.


    Ould Salek: la décision de Trump « nulle juridiquement » et « irréfléchie politiquement »


Lire :   Les USA reconnaissent la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental

  Moscou estime que les USA violent le Droit international avec leur décision sur le Sahara occidental

  Trump aurait promis «3 milliards de dollars» au Maroc, notamment via une société de Mohamed VI pour l’accord avec Israël


    Normalisation des relations entre le Maroc et Israël: Choc et indignation !

                     par Abdelkrim Zerzouri

 Maigre consolation pour le président américain sortant, Donald Trump, qui a réussi à forcer la main au Roi Mohamed VI au prix d’une reconnaissance pleine de la marocanité du Sahara Occidental contre une reprise renforcée et des contacts officiels avec Israël, rompus lors de l’Intifadha, dans le début des années 2000, avec l’objectif pressant de l’établissement des relations diplomatiques entre les deux pays. Car ce n’était pas le Maroc qui intéressait Trump dans cette fin de règne chaotique mais bien l’Arabie Saoudite, qu’il voulait rallier au camp des pays arabes ayant conclu une normalisation de leur relations avec Israël, en l’occurrence les Emirats Arabes Unis, Bahreïn et le Soudan.

Vraisemblablement, le grand coup, le dernier baroud d’honneur du président américain avant de quitter la Maison Blanche, le 20 janvier 2021, qui ambitionnait d’hameçonner l’Arabie Saoudite dans ce jeu perfide de transactions diplomatiques «donnant-donnant» au détriment du droit des peuples oppressés, avait échoué. Peut-être qu’on a jugé qu’il n’était pas encore temps de couronner cette mission «historique» du succès suprême, car il fallait que d’autres pays arabes, le plus grand nombre possible, rejoignent cette normalisation pour la rendre comme un fait accompli pour l’opinion des peuples arabes, encore réfractaires à cette idée. Même le Maroc refuserait cette officialisation des contacts et des relations diplomatiques avec Israël s’il n’y avait pas cette offre sur un plateau de la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental, ainsi que l’ouverture d’un consulat américain dans la ville de Dakhla. C’est le seul argument qui pourrait faire taire, d’une façon ou d’une autre, toutes les oppositions marocaines internes.En tout cas, la roue est lancée, et l’on parle de l’ouverture imminente de bureaux de liaisons entre le Maroc et Israël, et la mise en service de liaisons aériennes entre les deux pays. Israël prend ce cadeau de fin d’année, offert par Trump, comme un exploit de la politique du gouvernement Netanyahu, ainsi que le Maroc qui gagne un soutien de taille dans la défense de la cause qu’il considère comme faisant partie de son identité nationale, en l’occurrence la marocanité du Sahara Occidental.

«Ces transactions n’ont pas fait que des heureux»

Le Roi du Maroc Mohamed VI a exprimé dans ce contexte, « en son nom et au nom de l’ensemble du peuple marocain, au président américain sa profonde gratitude aux États-Unis d’Amérique pour cette prise de position historique». Ainsi que le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, qui a remercié Donald Trump, non sans promettre qu’ «Israël n’oubliera jamais ce qu’il a fait».

Hélas, hormis la satisfaction affichée par l’Egypte et Abu Dhabi, en sus des deux pays engagés dans la normalisation, ces transactions n’ont pas fait que des heureux. Pis encore, ce dernier arrangement sur le dos des Sahraouis et de la stabilité de toute la région a provoqué choc et indignation non seulement de la part des Palestiniens, qui rejetteraient toujours de tels «accords inacceptables», mais également du gouvernement sahraoui, d’une partie de la communauté internationale, de l’ONU et jusque dans les rangs des sénateurs américains. Le sénateur républicain James Inhofe, qui a auparavant applaudi les efforts du président américain sortant en faveur de la normalisation des relations entre Israël et les pays arabes, se déclare cette fois-ci choqué, déçu et attristé que «les droits du peuple sahraoui aient été ainsi bradé s», a-t-il souligné dans un communiqué. Non sans déplorer également que le «Président aurait pu conclure cet accord sans brader les droits d’un peuple sans voix», a déploré ce grand défenseur du Polisario au Sénat.

L’ONU réaffirme sa «position inchangée»

Comme on pouvait s’y attendre également, le gouvernement sahraoui et le Front Polisario ont condamné fermement la décision du président américain sortant, Donald Trump, de reconnaître la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental occupé, la qualifiant de «violation flagrante de la charte de l’ONU et de la légalité internationale». Appelant «les Nations unies et l’UA à condamner cette décision irréfléchie et à faire pression sur le Maroc pour mettre un terme à la colonisation du Sahara Occidental», tout en mettant en avant «la poursuite de la lutte armée avec tous les moyens et les sacrifices possibles». Le porte-parole du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a, lors d’un point de presse, réaffirmé sa «position inchangée» sur le Sahara Occidental après la décision du président américain Donald Trump de reconnaître la prétendue souveraineté du Maroc sur ce territoire, estimant que la solution à cette question «peut toujours être trouvée sur la base des résolutions du Conseil de sécurité». Notons que la résolution 690 (1991) du Conseil de sécurité a chargé la Minurso d’organiser un référendum libre et équitable au Sahara Occidental et en proclamer les résultats. Reste encore à souligner que dans sa décision, le président américain sortant a totalement négligé la réaction d’Alger, qui soutient la résolution onusienne pour l’autodétermination du peuple sahraoui.

Les internautes algériens expriment avec force leur colère face aux derniers développements des évènements. Un grave impair commis par un président en «sursis». Devrait-on miser sur la prochaine administration américaine pour remettre les pendules à l’heure ? Une nouvelle administration qui aurait beaucoup à faire pour effacer un lourd héritage laissé par Trump.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *