Coronavirus: ce qui attend les Français avec la récession économique historique qui vient

Source : Huffington Post, Jean-Luc Ginder

Cela pourrait signifier à moyen terme un taux de chômage à 30%. Nous venons de passer dans un nouveau monde et il est urgent que nos dirigeants disent la vérité.

La crise financière et économique était annoncée. La crise sanitaire causée par le coronavirus n’en est pas la cause mais l’accélérateur.

« Cette situation aura pour conséquence une augmentation du chômage en France, réduira la consommation et bloquera l’investissement dans les activités productives » explique l’économiste Jean-Luc Ginder. / AFP

Depuis 2008, une course à l’endettement jusqu’à l’excès a été permise. Cette course folle a créé la bulle mondiale de dette publique de 254.000 milliards d’euros. Pour conséquence, une hausse des prix des actifs en lien avec la hausse du taux d’endettement privé et l’octroi de crédits à des personnes et agents de moins en moins solvables.

Cette bulle a éclaté le 12 mars. On a constaté la chute des bourses, pourtant le virus n’est pas passé du mode pathogène à destructeur de richesses. Il n’est que l’accélérateur de l’histoire économique mondiale. Cette crise était prévisible. Et nous sommes aujourd’hui au cœur d’une crise financière et économique mondiale. Crise que certains de mes confrères et analystes sous-estiment encore.

Cette situation aura pour conséquence une augmentation du chômage en France, en Europe et dans le monde, réduira la consommation, et bloquera l’investissement dans les activités productives.

Qui dit crise dit changement. Cette crise correspond à la fin de l’expansion économique. Nous sommes entrés dans une phase de récession fulgurante. D’un point de vue économique, l’offre et la demande de crédit se contractent à cause de la crise bancaire depuis le 12 mars 2020. On est depuis cette date en plein “credit crunch”.

Inexorablement, cette situation aura pour conséquence une augmentation du chômage en France, en Europe et dans le monde, réduira la consommation, et bloquera l’investissement dans les activités productives. Cette situation qui est historique sera la récession mondiale de tous les temps.

Nous venons de faire un saut dans un nouveau monde. Oui, nous venons de passer dans un nouveau monde et il est urgent que nos dirigeants disent la vérité aux Français.

Cette approche repose sur le fait que l’économie risque de ralentir et peut-être même de se figer jusqu’à la création d’un vaccin reconnu, jusqu’à un calme revenu pour la situation sanitaire, sans doute pour une période allant de 8 à 12 mois minimum. Nous ne reviendrons que plus tard à notre vie calme et normée. Quoi de plus pernicieux? Car, comme nous ne pouvons espérer que le marché financier s’auto-régulera, c’est bien au ralentissement de la demande par l’augmentation du chômage et la fragilité des banques que nous allons assister, en un mot à la décélération et la fragilisation des PMEs.

Nous ne reviendrons que plus tard à notre vie calme et normée.

Tout laisse à prévoir qu’en 11 mois, en France, 930.000 petites et moyennes entreprises seront en stagflation dans le domaine des services et de l’industrie, cela pouvant signifier à moyen terme un taux de chômage national à 30% avant une forte reprise de l’économie nationale post crise sanitaire.

Si nous devions suivre la logique de Keynes, à ce stade, une intervention de l’État pour préserver l’activité économique est attendue. Mais avec un endettement public français de 2358,9 milliards d’euros, soit 99,6% du PIB, même avec la meilleure volonté, la France ne peut voler au secours de son économie, des PMEs et des employés sur une période courte (moins de 1 à 3 mois). L’urgence économique et sociale ne pourra pas être soulagée longtemps.

Le virus n’est que le facteur déclencheur. Tout autre événement majeur aurait eu le même effet.

L’économie était déjà très fragilisée, les bourses étaient sur-cotées, le surendettement public a été ignoré. Tout était prévisible. Le virus corona en sera l’excuse. Pour moi, il est nécessaire de dire les choses telles qu’elles sont et non pas comme nous souhaiterions qu’elles soient. Le courage des institutions et du pouvoir politique est demandé par les concitoyens.

Nous venons de passer dans un nouveau monde économique qui ne pourra plus compter sur la croissance pour se stabiliser, mais qui reposera sur une profonde notion d’humanité et de valeurs morales

Nous venons de passer dans un nouveau monde économique qui ne pourra plus compter sur la croissance pour se stabiliser.

Comme déjà souligné dans une tribune que j’ai publiée en juin 2019, et intitulée “une crise financière trente fois plus puissante qu’en 2008 est imminente mais nous sommes dans le déni”, la fragilité des économies entières, des nations était connue et rien n’a été fait depuis 2008. Cette nouvelle crise économique sera 30 fois plus forte et se positionnera à 254.000 milliards d’euros.

Au travers des revendications des gilets jaunes s’exprimaient déjà l’émotion et le ressenti des Français, et cette mobilisation visait à dénoncer les effets néfastes pressentis de l’argent facile. Les plus fragiles de nos concitoyens savaient déjà dans leur quotidien que l’argent vaut de moins en moins. Maintenant la situation s’aggrave dramatiquement.

Nous allons tous en prendre conscience. Chacun paiera proportionnellement son écot à la société pour que la relance puisse être au rendez-vous.

Dans les jours à venir les bourses vont encore baisser. La France et l’Europe seront à l’arrêt pour de long mois dans l’attente d’un apaisement et la récession s’installera. La promiscuité et l’économie parallèle prendront un semblant de relais. Il est donc légitime et urgent que les marchés s’inquiètent vraiment, surtout si les banques centrales ne font rien, d’ailleurs, le peuvent-elles encore suffisamment?

Combien de temps pourrons-nous tenir en théorie?

Nous sommes arrivés à la limite élastique de la mondialisation. Si cette situation trouvait une solution dans les 15 jours à venir, il y aurait peu de conséquence économique, mais il y a fort à parier qu’elle va s’installer et qu’elle durera sous une forme ou une autre pendant 8 mois à 1 an.

Cette crise économique mondiale fera date car elle changera nos vies et nos modes de production et de consommation, et bouleversera nos institutions.

Nous n’observons à ce jour que les premiers effets micro-économiques secteur par secteur. Dans quelques semaines les effets macro-économiques apparaîtront. Les faiblesses systémiques sont visibles, les moyens financiers des nations sont ancrés aux dettes publiques. Quelle suite peut-on imaginer?

Comme vous, je suis très inquiet, mais je ne suis pas surpris.

Pourtant, en toute situation nouvelle s’inscrit un espoir et une nouvelle vision. Le futur monde prendra en compte le besoin d’une production locale, française et européenne. Cela générera dans un deuxième temps une explosion des offres d’emplois à tous les niveaux et une logique économique hors mondialisation. Une redéfinition de la valeur travail et surtout une prise de conscience de la valeur de la vie économique et de la vie tout court.

En toute situation nouvelle s’inscrit un espoir. Le futur monde prendra en compte le besoin d’une production locale, française et européenne. Cela générera dans un deuxième temps une explosion des offres d’emplois et un développement hors mondialisation.

Nicholas Taleb avait émis un jour le principe du “Cygne noir”, la puissance de l’imprévisible et de sa conséquence majeure. Le cygne noir s’appelle aujourd’hui virus corona.

Je mets à défaut cette théorie car la crise, conséquence elle, était annoncée, était prévisible.

Le virus n’est que l’accélérateur de l’histoire, de plus il sera peut-être l’élément qui aura permis de changer nos modèles économiques. Cela dépendra du choix de chacun de nous.

Source : Huffington Post, Jean-Luc Ginder


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