Egypte / Droits de l’homme : Une vision, plusieurs critères

     Trois facteurs peuvent entraîner la différence dans les mécanismes adoptés pour déterminer le sens précis des droits de l’homme : le culturel-civilisationnel, le socioéconomique et l’éthique-religieux. Explications.

Par Dr Moustapha Al-Fiqqi

Penseur et directeur de la Bibliothèque d’Alexandrie

La visite historique exceptionnelle effectuée par le président Al-Sissi en France, ainsi que le dialogue qui a eu lieu autour des droits de l’homme ont donné des arguments pour aborder cette question. D’abord, les discours sur les droits de l’homme sont une évolution naturelle du développement de l’humanité. Mais les causes relatives aux droits de l’homme sont malheureusement aujourd’hui devenues des valeurs et des idées, quoique nobles, exposées à une opération d’usurpation systématique au fil des années.

Les caractéristiques de la définition originale des « droits de l’homme » ont alors disparu et se sont éclipsées au milieu d’une mêlée de considérations politiques et d’interprétations opportunistes, employées au service de politiques bien déterminées. A l’heure où le monde célèbre le 72e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, proclamée en 1948, il faut se demander : Où étions-nous et où sommes-nous aujourd’hui ? Est-ce que la politique de « deux poids, deux mesures » constitue le nouveau modèle des droits de l’homme que tout le monde est enclin d’accepter au profit des forts ?

Est-ce que les droits de l’homme palestinien sont les mêmes que ceux de l’homme américain ? Est-ce que les droits de l’homme israélien sont les mêmes que ceux de l’homme africain ? La pluralité des normes, la contradiction des définitions et les ambitions des opportunistes ont effectivement créé une crise réelle des droits de l’homme. D’autant plus qu’il existe trois facteurs entraînant la différence des mécanismes adoptés pour déterminer le sens précis de la cause mondiale des droits de l’homme et qui sont basés sur trois considérations essentielles : culturelle-civilisationnelle, socioéconomique et éthique-religieuse. En discutant des trois facteurs, il faut cependant reconnaître qu’il y a un minimum de droits de l’homme autour desquels il existe un consentement général permettant de ne pas gâcher la cause en entier.

Dissemblances culturelles

Premièrement, les différences culturelles et la disparité entre les civilisations sont une réalité qui peut provoquer un certain changement entre les droits de l’homme dans un pays donné et un autre. De même, les communautés humaines diffèrent selon le cadre civilisationnel et culturel dans lequel elles vivent. Pour des millions d’humains, la princesse Diana est une sainte, bien qu’elle ait avoué avoir trahi son mari, le prince héritier de la Grande-Bretagne. Mais, selon les normes de la civilisation occidentale, cela n’a pas été incriminé. A l’heure où cet acte est considéré comme un grand péché selon les normes orientales. Il en est de même pour les causes de la vendetta, le concept du déshonneur et les aspects de perversion qui diffèrent selon les différentes appartenances des civilisations humaines et les rassemblements géographiques.

L’Egypte a lancé une stratégie de développement durable pour 2030 en vue de garantir à tous les citoyens, sans discrimination, une vie décente.

 

En deuxième lieu, la disparité des classes et la différence des niveaux de vie, ainsi que l’absence d’un minimum de revenu acceptable qui garantirait une vie décente influencent à leur tour largement le concept des droits de l’homme. L’Etat qui consacre ses efforts à l’amélioration du niveau de vie des couches défavorisées est un Etat qui respecte les droits authentiques de l’homme. D’autres Etats préfèrent braquer la lumière sur certains dépassements momentanés pour les situer à tort sous l’ombrelle des droits de l’homme. Il n’est pas question d’approuver de tels dépassements, mais il faut cependant reconnaître leur existence dans toutes les sociétés. La garantie d’un minimum de niveau de vie décente est l’un des droits fondamentaux de l’homme contemporain, étant donné que seules les personnes qui ne souffrent pas de faim peuvent profiter des libertés. Une personne souffrant de faim n’est pas libre, et les pauvres ne jouissent pas de la dignité humaine qu’ils devraient avoir.

Nous reconnaissons donc que les valeurs sociales diffèrent selon les niveaux de vie et les taux de revenus individuels des humains. Ce n’est pas vrai que la liberté se résume dans un bulletin de vote, une institution parlementaire et des députés qui courent dans tous les sens. Mais, c’est plutôt la garantie de la vie décente, de la nourriture pour tous en plus du droit à l’habillement, au logement, aux transports publics et à l’environnement propre. Des revendications qui sont difficiles à réaliser dans la plupart des Etats pauvres.

En troisième lieu, le facteur religieux et éthique a une forte influence et une répercussion inévitable sur la conceptualisation des droits de l’homme sur la carte d’une société déterminée. Ce qui peut être interdit par les religions célestes peut être accepté par les cultures terrestres, et ce que les religions célestes approuvent peut être criminalisé par les valeurs modernes d’autres sociétés. Prenons l’exemple de l’homosexualité, légale et acceptée dans les sociétés occidentales, tandis qu’elle demeure refusée voire prohibée dans les sociétés orientales, en particulier musulmanes. Ce qui est considéré comme un droit garanti dans une région déterminée devient à l’opposé un crime fâcheux religieusement et éthiquement au sein d’autres sociétés.

Ne vous ai-je pas dit que les causes des droits de l’homme, malgré la noblesse de leurs objectifs, peuvent détenir de fausses vérités et des interprétations multiples ?


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