Énergie solaire photovoltaïque : nouvelle industrie, nouveaux risques ?

Énergie solaire photovoltaïque
La précarité des énergies fossiles et leurs effets sur l’environnement et la santé ont contribué à l’essor de l’énergie solaire photovoltaïque. Des chercheurs ont dressé un portrait des risques liés à la SST liés au cycle de vie des panneaux photovoltaïques, depuis l’extraction des matières premières nécessaires à leur fabrication jusqu’à leur recyclage.
L’énergie solaire photovoltaïque laisse une faible empreinte écologique. De plus, elle adhère favorablement aux principes du développement durable, en contribuant entre autres à l’économie verte, avec 820 000 emplois estimés dans le monde en 2011, dont plus de 5 000 au Canada et près de 2 000 au Québec. Cependant, trois zones d’ombre planent sur cette industrie : l’exploitation de matériaux potentiellement toxiques pour les travailleurs ; des procédés de fabrication et d’exploitation qui posent des problèmes de sécurité ; des risques écotoxiques potentiels, principalement à la fin de la vie des panneaux photovoltaïques.

Panneaux solaires photovoltaïques ?

Les panneaux solaires photovoltaïques fonctionnent grâce à des matériaux dits semi-conducteurs, comme le silicium ou le tellurure de cadmium. Ceux-ci absorbent la lumière du soleil et la transforment en énergie électrique. C’est l’effet photovoltaïque. Les photons de la lumière du soleil activent les électrons du silicium ou du tellurure de cadmium, générant ainsi de l’électricité de façon continue.
Source : www.solaire-infos.com

« Pour comprendre tous les emplois de l’industrie du photovoltaïque (PV), il faut en comprendre tout le cycle de vie : de l’extraction des matières premières jusqu’au recyclage, en passant par l’installation des panneaux. À chaque étape correspond un certain type d’emploi. La plupart sont traditionnels, comme les emplois d’ingénieur, de chimiste, de technicien en métallurgie, de couvreur ou d’électricien. On les retrouve donc dans d’autres types d’industries, mais il existe également des emplois spécifiques comme ceux de technicien en haute technologie pour l’assemblage des cellules photovoltaïques ou encore d’installateur photovoltaïque certifié », explique Bouchra Bakhiyi, agente de recherche au Département de santé au travail et santé environnementale de l’Université de Montréal. Avec Joseph Zayed, professeur associé au même département et responsable du champ de recherche sur la prévention des risques chimiques et biologiques de l’IRSST, elle a dressé le portrait des emplois de l’industrie photovoltaïque au Québec en ce qui concerne la santé et la sécurité des travailleurs.

Les risques du premier et du dernier maillon

Au début du cycle se trouvent les deux mines d’exploitation du silicium que compte le Québec. Ce minerai est utilisé dans plusieurs procédés industriels, dont la fabrication de panneaux photovoltaïques. À l’étape suivante se situe le seul fabricant québécois de tellurure de cadmium, un composé de cadmium et de tellurine, qui sert également à fabriquer des panneaux PV. À ces deux étapes d’extraction et de fabrication, les risques chimiques que les chercheurs ont identifiés sont les mêmes que ceux de toute autre industrie qui utilise ou transforme des produits de nature semblable. Selon Joseph Zayed, « les travailleurs de ces industries savent qu’ils doivent se protéger et porter des équipements adéquats, comme c’est le cas dans n’importe quelle industrie faisant une production de substances chimiques ».

Lorsqu’ils installent des panneaux photovoltaïques, les travailleurs doivent tenir compte du risque potentiel d’être exposés à l’amiante qui peut être présent à différents endroits de la structure du bâtiment, dont les combles, l’isolation des tuyaux et les finis architecturaux. Dans de tels cas, les moyens de prévention sont bien documentés et connus des travailleurs et des employeurs.

Le recyclage des panneaux photovoltaïque a été peu étudié et pour cause : il commence à peine. Une fois installé, un panneau PV peut durer de 20 à 30 ans. Or, au Québec, on en installe depuis une vingtaine d’années seulement. On sait cependant qu’à la fin de la vie utile des panneaux, les matériaux qui les composent peuvent être extraits pour être recyclés au moyen d’acides, de bases, de solvants, etc. Les travailleurs affectés à cette tâche peuvent donc être exposés à ces différents produits. Encore là, les moyens de protection sont les mêmes que pour tout travailleur exposé à des produits semblables dans un autre type d’industrie.

Les risques physiques et autres

En menant leur recherche, Bouchra Bakhiyi et Joseph Zayed ont pu constater que c’est lors de l’installation des panneaux sur des bâtiments que les risques pour les travailleurs sont les plus grands. Il s’agit alors de risques physiques. Les chutes de hauteur constituent le plus important d’entre eux, les panneaux étant installés sur des toits ou au sommet de façades. L’électrocution constitue le deuxième risque, suivi des coupures et des lacérations. Les risques ergonomiques sont aussi présents en raison du poids des panneaux que les travailleurs, harnachés, doivent déplacer et assembler, souvent dans des postures contraignantes. Finalement, des risques d’incendie et d’explosion, beaucoup plus rares, existent aussi.

« Il y a de plus en plus d’installateurs de panneaux photovoltaïques et il faut se préoccuper des risques qu’ils courent, affirme l’agente de recherche. Je pense qu’il faudrait les sensibiliser à ces risques et leur offrir de la formation à des fins de prévention. »

Selon Bouchra Bakhiyi, la première étape consisterait à documenter les pratiques organisationnelles du travail des installateurs. « À l’issue de notre enquête, nous avons obtenu des informations sur les principales activités des entreprises impliquées dans le domaine du photovoltaïque, mais nous en savons encore trop peu sur leur façon de travailler pour pouvoir déterminer les points obscurs en matière de sécurité et définir avec précision les besoins de formation. Nous allons contacter les entreprises concernées par l’installation de panneaux PV, des gens du bâtiment et des maîtres électriciens, qu’ils aient collaboré ou non à la recherche, pour leur faire connaître nos résultats. C’est une première étape de sensibilisation. »

Les risques électriques

Les électriciens qui travaillent dans l’industrie photovoltaïque commencent d’ailleurs à réclamer de la formation. Ils connaissent bien le courant alternatif, mais moins le courant continu que les panneaux photovoltaïques produisent. Dès qu’un de ceux-ci est installé, les rayons du soleil étant toujours présents – même s’ils sont invisibles à nos yeux –, le courant continu généré… ne cesse jamais. « On ne sait pas encore si le courant continu est plus dangereux que l’alternatif et les électriciens souhaitent savoir comment l’utiliser de façon sécuritaire. Cela fait partie des choses qu’il faut documenter », signale l’agente de recherche.

« Dans l’industrie photovoltaïque, il y a les risques conventionnels et les risques nouveaux, découlant de procédés de travail nouveaux. Il faut documenter ces nouveaux risques », conclut Bouchra Bakhiyi.


Pour en savoir plus

BAKHIYI, Bouchra, Joseph ZAYED. Les défis des emplois verts de l’industrie du photovoltaïque au Québec, Rapport R-817, 88 pages. www.irsst.qc.ca/-publication-irsst-defis-emplois-verts-r-817.html


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