Épidémie du nouveau coronavirus, échec de l’Opep+ et décisions de l’Arabie Saoudite : L’économie mondiale ébranlée

Frileux depuis plusieurs semaines, les marchés pétroliers ont été très sensibles à la décision de Riyad de baisser unilatéralement ses prix à la livraison, opérant la plus importante réduction en 20 ans.

Déjà très affectés par l’avancée de l’épidémie du nouveau coronavirus qui est en train de faire plonger l’économie mondiale dans une crise sans précédent, il était prévisible que les prix du pétrole baissent suite à la réduction de la demande, mais l’échec de la réunion de l’Opep+, jeudi dernier à Vienne, a accentué la chute avant que la décision de l’Arabie Saoudite d’augmenter sa production d’une part, et réduire les prix, d’autre part, ne précipite les marchés pétroliers dans le noir.

C’est l’effondrement depuis avant-hier. Hier matin, ils subissaient leur chute la plus sévère depuis la guerre du Golfe en 1991. Le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai valait 35,52 dollars à Londres, en baisse de 21,54% par rapport à la clôture de vendredi dernier.

A l’ouverture en Asie, il s’est effondré jusqu’à 31,02 dollars, un niveau plus vu depuis février 2016. A New York, le baril américain de WTI pour avril dévissait de 22,02% à 32,19 dollars. Vers 4h30 GMT, il est tombé jusqu’à 27,34 dollars.

Frileux depuis plusieurs semaines, les marchés pétroliers ont été très sensibles à la décision de Riyad de baisser unilatéralement ses prix à la livraison, opérant la plus importante réduction en 20 ans.

Cette décision a été prise dans la foulée de discussions de l’Opep+ (rassemblant l’Opep et ses partenaires, dont la Russie), qui se sont conclues sans accord vendredi, alors que l’épidémie de coronavirus provoque des craintes sur l’activité économique et donc la demande mondiale de l’or noir.

La Russie, deuxième producteur mondial de pétrole et qui n’est pas membre de l’Opep, s’était opposée à une nouvelle réduction de 1,5 million de barils par jour (b/j).

Cette mésentente avait déjà fait plonger les cours du brut de 10% vendredi dernier. Selon les agences de presse, l’Arabie Saoudite, premier exportateur mondial de pétrole, prévoit d’augmenter sa production de pétrole brut au-dessus de 10 millions de barils par jour (b/j) en avril, après l’expiration de l’accord actuel de réduction de l’Opep et ses alliés à la fin du mois en cours.

La production d’avril serait nettement supérieure à 10 millions de barils par jour, probablement plus près de 11 millions. L’Arabie Saoudite a pompé 9,7 millions de b/j au cours des deux derniers mois.

Le géant pétrolier d’Etat Aramco a fixé son prix de vente officiel pour le baril de brut léger à destination de l’Asie pour le mois d’avril à 3,10 dollars de moins que la moyenne d’Oman/Dubaï, soit une baisse de 6 dollars le baril par rapport au mois de mars, a déclaré samedi la société saoudienne dans un communiqué.

Le groupe a aussi réduit le prix de vente du baril de pétrole brut léger vers les Etats-Unis pour avril à 3,75 dollars de moins par rapport à l’ASCI, en baisse de 7 dollars le baril par rapport à mars. Le prix de vente du baril de brut léger à destination de l’Europe du Nord et de l’Ouest a été fixé à 10,25 dollars de moins que la référence de l’Ice Brent, en baisse de 8 dollars le baril sur un mois.

Ce qui s’apparente désormais à un véritable choc pétrolier, qui affecte sérieusement les économies des pays producteurs, notamment ceux qui sont frappés de plein fouet par des crises économiques et confirmé par les prévisions de l’Agence internationale de l’énergie (AIE).

Selon un rapport de cette dernière, la demande mondiale de pétrole devrait se contracter cette année, pour la première fois depuis 2009, en raison de l’épidémie du nouveau coronavirus.

La contraction, indique la même source, devrait être d’environ 90 000 barils par jour (bpj) par rapport à 2019, selon le scénario central de l’AIE, qui, compte tenu de «l’extrême incertitude», publie aussi un scénario plus pessimiste (-730 000 bpj) et un optimiste (+480 000 bpj).

Le scénario pessimiste de l’AIE

«Dans le scénario de base de l’AIE, la demande baisse cette année, pour la première fois depuis 2009, en raison de la contraction profonde de la consommation pétrolière en Chine et des perturbations importantes des voyages et du commerce dans le monde», indique l’agence basée à Paris dans son rapport mensuel.

Elle s’attend désormais à une demande mondiale de 99,9 millions de barils par jour en 2020, soit environ 90 000 de moins qu’en 2019. Cela représente une forte révision à la baisse par rapport à ses dernières prévisions publiées en février, qui tablaient encore sur une hausse de 825 000 bpj cette année.

«La crise du coronavirus affecte de nombreux marchés de l’énergie – y compris le charbon, le gaz et les renouvelables – mais son effet sur les marchés pétroliers est particulièrement grave, parce qu’elle empêche les personnes et les biens de circuler, un coup dur pour la demande de carburants dans les transports», a expliqué le directeur exécutif de l’AIE, Fatih Birol, dans un communiqué repris hier par les agences de presse.

«Cela est particulièrement vrai en Chine, le plus gros consommateur d’énergie au monde, qui a représenté plus de 80% de la croissance de la demande de pétrole l’an dernier», a-t-il encore souligné avant de s’inquiéter, dans un séminaire de presse sur internet, sur certains pays producteurs de pétrole «comme l’Irak, l’Angola ou le Nigeria» qui risquent, selon lui, d’être déstabilisés en raison de l’épidémie de coronavirus qui fait chuter les cours.

«Il y a d’énormes tensions sur l’équilibre financier de nombreux producteurs, alors que l’effondrement des cours du pétrole conduit leurs revenus à des plus bas historiques», s’alarme le directeur exécutif de l’AIE.


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