Les espérances que nous plaçons en les députés de la nouvelle Algérie


«On dit des députés qu’ils sont honorables, comme on dit des académiciens qu’ils sont immortels.»
(Jean-Bernard, professeur de médecine, académicien)

Dans quelques mois, les Algériennes et les Algériens seront appelés aux urnes pour consolider le processus de démocratisation par l’organisation des élections législatives. Pour avoir subi depuis l’indépendance ces évènements sans conviction, les Algériens ne croient plus à rien et surtout, à raison, ils ont l’impression que l’APN n’est qu’une chambre d’enregistrement, sans état d’âme, de décisions prises ailleurs. Je voudrais contribuer modestement, en rappelant que, comme citoyen, j’ai été outré par la façon de faire des élections, par le bilan nul des députés, mais aussi par le scandale des salaires et aussi des retraites à vie pour avoir fait une mandature ! La mission noble du député a été, au fil des ans, démonétisée.

Je rapporte ci-après ce que j’écrivais en 2007, lors des élections ubuesques de 2007 : «Le peuple algérien a rendez-vous avec son destin. Il s’agit en l’occurrence de voter pour ses représentants à même de mieux le ‘’représenter’’ au niveau de l’Assemblée nationale. Comment, en effet, comprendre cette vaste conspiration du silence — gouvernement et opposition confondus — où chacun brasse du vent en tentant de faire croire, avec la complicité des médias et des spots publicitaires, à la régularité d’une élection libre, transparente et honnête? Point n’est besoin de douter, cette élection sera honnête car tout s’est joué avant. Le peuple n’est là que pour entériner une décision déjà prise, celle de remplir un hémicycle de personnes à qui il n’est surtout pas demandé de critiquer, d’autant que ceux qui critiquent n’ont aucune chance de figurer en position éligible sur les listes concoctées, on l’aura compris, loin de la base qui est traitée avec un solide mépris.»(1)

J’expliquais ensuite la consanguinité tribale de l’adoubement : «Pourquoi cela ? Une seule réponse vient à l’esprit, la position sociale qui fait de ‘’l’élu’’ des hommes et de Dieu un privilégié dont l’élection n’est pas liée à une quelconque compétence — qu’il peut éventuellement avoir, mais qu’il faut qu’il étouffe —, mais à une allégeance qui tire ses fondements  d’un un atavisme qui plonge dans la nuit des temps. Cet atavisme, appelé indifféremment ‘’accabya’’ par Ibn Khaldoun, ‘‘ben’amiss’’, ‘’arouch’’ ;   bref, qui fait appel à des expressions du terroir qui avaient toute leur pertinence dans l’histoire séculaire de l’organisation sociale des communautés tribales. Et pourtant, ce sont toujours les mêmes mécanismes qui légitiment ou délégitiment des candidats potentiels à l’orée de ce XXIe siècle. Nous ne vivons plus dans le passé mythique embelli pour l’occasion et nous refusons d’être fascinés par l’avenir. Ce qui intéresse les décideurs du pouvoir et de l’opposition, c’est d’installer l’Algérie dans les temps morts. Ce qui intéresse nos hommes politiques de tout bord, c’est la répartition symbolique et matérielle du pouvoir, certains diront du gâteau. Notre ‘’opposition’’ évanescente, quand on a besoin d’elle au quotidien sur les problèmes actuels et futurs, se manifeste et on s’aperçoit qu’elle existe, qu’elle a une base militante et, mieux encore, qu’elle organise des congrès ! Aucun des chefs de partis nés après le ‘’printemps de la liberté’’ en 1989  n’a quitté le pouvoir d’une façon sereine et apaisée. En définitive, nous avons des députés chefs de partis et députés depuis trois mandatures en attendant la quatrième et qui vous donneront mille raisons de garder la main : ‘‘Le parti a encore besoin de moi’’, ‘‘la relève n’est pas prête’’. Ils ne se sont jamais posé la question, pourquoi il n’y a pas de relève après près de vingt ans d’exercice absolu du pouvoir?»(1)

«Qu’attendons-nous réellement d’un député? Est-ce moralement justifié de voter pour des députés dont les missions réelles sont très en-deçà des attendus théoriques? Est-ce moral de voter pour quelqu’un que l’on ne connaît pas, dont on ne connaît pas le parcours autre que celui qui fait que cette personne a jailli du néant? Triste canular et tromperie sur la marchandise de la part des partis en quête de légitimité qui arrivent à débaucher des ‘’universitaires’’».(1)
«Pourtant, rien ne vaut un bon citoyen du terroir avec sa sagesse coutumière pour défendre les intérêts des citoyens. Nous sommes d’autant plus confortés dans cette analyse que nous sommes, certaines fois, dépités par la qualité des interventions des députés et la stérilité des débats qui nous apparaissent quelque peu hors histoire, hors sujet et surtout sentant à mille lieues la langue de bois. Quand on sait les foires d’empoigne qui prévalent pour constituer la liste des élus, on se demande où est le programme de ces élus? Sur quoi nous devons les juger pour leur donner nos voix et leur confier, d’une certaine façon, notre avenir, le temps d’une mandature ? Il vient que la colère gronde mais les velléités sont tuées dans l’œuf par des parasitages de toutes sortes, la technique de l’argent, la trahison par les Judas. Bref, la région aura un député confortablement élu, et souvent il n’a rien à voir avec la région et, par voie de conséquence, il a plus à rendre compte à celui qui l’a fait roi qu’à ceux qui ont voté pour lui. Allez leur parler, à ces militants, à ces citoyens qui subissent les affres du quotidien de termes savants de ‘’démocratie de proximité’’. Quant au vieux parti, laminé par l’usure du pouvoir, il n’arrive pas à distribuer la rente de la députation à tout le monde ; entre les barons, les redresseurs qui sont revenus au bercail et la réalité des kasmas qui représentent la réalité des problèmes et la légitimité, l’équation est difficile à résoudre. D’autant qu’il est plus qu’urgent de le réhabiliter pour le sortir du champ politique, le mettre comme repère identitaire pour tous les Algériens et leur faire rappeler que la Révolution de Novembre fut une aventure humaine qui a droit de cité dans le panthéon de la lutte des peuples au XXe siècle.»(1)

«En définitive, on continuera à se demander à quoi sert un député, quelle valeur ajoutée il apporte ? En dehors de la réponse classique : c’est un ‘’Élu de Dieu’’ et à ce titre, pendant cinq ans il est condamné à mener grand train avec un salaire 6 à 10 fois supérieur à celui d’un enseignant universitaire. Cinq ans, il passera son temps à voter des lois dont il ne connaît souvent ni les tenants ni les aboutissants, il doit veiller à ne pas déplaire à son parti, il doit, pour le bien de sa carrière, nouer des alliances.
Enfin, il sera amené à goûter — à son corps défendant — à toutes les petites joies de la vie telles qu’un passeport diplomatique, des indemnités invisibles, des devises, une immunité qu’il porte comme un fardeau. Il aura même le droit d’avoir le devoir de calomnier, mais pas trop, tout juste ce qu’il faut — pour apparaître dans l’opposition — son pays sur des chaînes étrangères, ce pays qui l’a fait roi. C’est ça la démocratie version Algérie. C’est cela être député dans cette Algérie de tous les paradoxes où le pouvoir fonctionne en roue libre pendant que l’immense masse des citoyens est préoccupée plus par la dureté au quotidien que par les joutes sans gloire de nos futurs élus.»(1)
C’est ce que j’écrivais en 2007 en tant que hirakiste, avant l’heure, au long cours, à propos des députés du temps où il n’était pas recommandé de dévier de la ligne des tenants du pouvoir.

Nous sommes en mars 2021 dans la perspective des élections législatives

Mais qu’est-ce qu’au juste un député dans l’absolu dans les autres pays ?  Quelles sont  ses missions ? Quels sont ses devoirs et quels sont ses droits pendant la mandature et après? Nous allons faire un benchmarking de ce qui se passe ailleurs. Comme lu sur le site Vie Publique.fr, «un député est un parlementaire qui, à l’Assemblée nationale, participe au travail législatif et au travail de contrôle du gouvernement. Le député détient des compétences diverses : il peut déposer des propositions de loi ; il peut proposer, par amendement, des modifications au texte examiné et prendre la parole ; après le vote d’une loi, un député peut, avec d’autres députés, saisir le Conseil constitutionnel pour la conformité du texte voté à la Constitution. Au titre du contrôle, le député peut interroger le gouvernement et en rapporteur spécial de la commission des finances, contrôler l’emploi de l’argent public. Les députés de l’Assemblée nationale sont élus pour cinq ans (sauf dissolution), au suffrage universel direct, représentent la nation tout entière et sont, à ce titre, détenteurs d’un mandat national».(2)
«Chambre basse du Parlement, l’Assemblée nationale est composée de députés, élus au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans lors d’élections législatives. L’Assemblée nationale peut mettre en cause la responsabilité du gouvernement en lui refusant sa confiance ou en votant une motion de censure. Pour se présenter à une élection et devenir parlementaire, il faut jouir de ses droits civils et politiques et n’être dans aucun cas d’incapacité prévu par la loi. La condition est de respecter l’éthique dans le financement des campagnes.»(3)

Les salaires des députés de par  le monde 

Une étude intéressante faite en Suisse compare les salaires des députés de plusieurs pays et donnent ensuite le rapport par rapport au salaire moyen. Nous lisons : «En tenant compte des indemnités et des allocations journalières, les salaires des députés sont variables d’un pays à un autre, un député italien peut gagner plus de 165 000 euros par an, alors qu’un citoyen italien ‘’normal’’ doit se contenter d’un salaire cinq fois inférieur (30 600 euros).
En mettant en relation le salaire moyen des citoyens lambda et des parlementaires, il apparaît que ce sont les députés brésiliens qui sont les mieux lotis. près de dix fois plus que le salarié moyen brésilien.
Les députés espagnols sont les moins bien rémunérés en Europe occidentale : leur salaire fixe est pratiquement identique au salaire moyen de leurs compatriotes.» En euros, les salaires annuels sont les suivants : «Italie : 167 220, États-Unis : 153 000, Allemagne : 109 000, France : 85 000, Suisse : 60 100, Portugal : 44 200, Espagne : 33 756, Tunisie : 17 000.»(4)
Combien gagnent alors les parlementaires par rapport aux salaires moyens dans leurs pays ? Les rapports sont les suivants : «Brésil : 10,6 fois,  Russie 5,6 fois, Italie 5,5 fois, Tunisie 4,5 fois, États-Unis 3,1 fois, Allemagne : 2,8 fois, France 2,2, Suisse 1,2, Espagne 1,1.»(4)

La retraite des députés : à quoi ont droit les députés sortants ?

Qu’en est-il des droits des députés sortants ? Nous allons prendre l’exemple de la France qui est à peu près du même type dans tous les pays démocratiques où l’effort de chacun est apprécié à sa juste valeur et  une fois le mandat terminé, le député redevient un simple citoyen qui doit renouer avec sa carrière d’avant. Sous la plume d’Audrey Travère du journal le Monde, nous lisons : «À peine éliminé, il faut déjà préparer la suite. Alors, après des années de vie politique, qu’ils soient en âge de partir à la retraite ou pas, le statut des députés offre des avantages qui leur sont exclusivement réservés. Pour les députés anciennement fonctionnaires, ils retrouvent immédiatement leur emploi au sein de la Fonction publique. Pour les autres issus du secteur privé, il existe une garantie de réintégration professionnelle : à la fin de leur mandat, ils sont assurés de travailler au même poste ou à un poste similaire à celui quitté au moment de l’entrée à l’Assemblée nationale. Pour les autres en recherche d’emploi, pas d’assurance chômage ; une aide spéciale leur est dédiée : ‘’l’allocation de retour à l’emploi des députés’’, attribuée après étude par la Caisse des dépôts.

Entre la fin du mandat et leur nouvel emploi, les élus peuvent prétendre à cette aide pour laquelle ils cotisent tous les mois à hauteur de 28 euros. Elle comporte quatre caractéristiques. Elle est limitée dans le temps : son versement ne peut excéder trois ans. Elle est dégressive : les six premiers mois, elle correspond à 100% de l’indemnité parlementaire. Par la suite, elle diminue tous les semestres, (…) Pour comparaison, tous les salariés du privé ont droit à ‘’l’allocation d’aide au retour à l’emploi’’ (l’ARE), dont le principe est qu’une journée de travail donne droit à une journée d’allocation et la durée d’indemnisation ne peut dépasser les deux ans (ou trois ans à partir de 50 ans).»(5)
«Les députés bénéficient d’un régime spécial. Dans les faits, au bout d’un mandat, un député est assuré de toucher une retraite de près de 1 200 euros par mois, soit un montant se rapprochant fortement de la pension médiane touchée par un Français après une carrière complète (1 334 euros). Pour ce qui est de l’âge minimum de départ à la retraite, il est de 60 ans actuellement, le nombre d’annuités est actuellement limité à 41,50, mais le plafond sera progressivement relevé à 43 annuités d’ici à 2033.»(5)

Et en Algérie ?

Le moins que l’on puisse dire est que nous sommes hors-normes ! Les conditions de rémunération des hauts cadres de l’État et des parlementaires algériens n’en finissent plus de susciter la polémique, les membres du Conseil national de transition [1994 à 1997] ont voté une loi à la faveur de laquelle ils perçoivent une retraite à vie.
Retraite dorée, salaires mirobolants, gros avantages et nombreux privilèges. Si on devait se baser sur une retraite à 300 000 Da, à défaut de connaître le salaire moyen, en s’indexant sur le SNMG à 20 000 DA, le député en Algérie perçoit 15 fois le salaire moyen d’un Algérien au SNMG.
Ce qui est le plus étrange et en plus des «invisibles» difficilement quantifiables, il est anormal qu’une mandature confère à son titulaire une retraite à vie avec le même salaire ! Il est hors de doute que si un nouveau texte plus juste  se calquait sur ce qui se fait de par le monde, nul doute que l’attrait pour la députation serait amoindri de cette dimension qui fausse la noble cause du député, à savoir encore une fois le mal de l’argent non mérité et qu’en tout état de cause, être député c’est avoir la vocation pour servir et non pas se servir.

Quels sont les droits fondamentaux que doit raisonnablement revendiquer un Algérien ? 

Je crois profondément qu’il y a un consensus global sur le fait que le premier des droits est celui de vivre dans la dignité, qu’il n’y ait pas de hogra, de la justice et plus largement des libertés. «Cet aspect a été largement consacré dans la proposition de Constitution. Mais il a aussi d’autres droits tout aussi déterminants pour l’épanouissement de l’Algérienne et de l’Algérien, celui de prétendre à juste titre à une vie décente, à une bonne éducation, à la possibilité d’aspirer par son labeur à un logement et aussi à des soins ; en définitive, aussi à la possibilité de trouver un emploi, l’État, en stratège, devant mettre en œuvre l’égalité des chances et les conditions de création de richesses.»(6)
«À côté des droits, quels sont les devoirs que nous avons vis-à-vis de notre pays ? Faisons-nous ce qu’il faut en termes de loyauté ? Pourquoi sommes-nous toujours, en règle générale, à trouver des excuses pour ne pas faire notre devoir ? Dans une célèbre conférence, le Président américain John Kennedy, s’adressant à des étudiants, leur tint ce langage : ‘‘Avant de demander ce que peut faire le pays pour toi, demande-toi ce que toi tu peux faire pour le pays.’’ C’est aussi cela que la dette de chaque citoyen pour son pays. Le citoyen devra honnêtement s’acquitter de sa tâche et le fil rouge de la défense et de l’unité du pays devrait être un horizon indépassable.»(6)
«Il nous faut nous occuper de tous les Algériens(e)s. Allons honnêtement parler aux besogneux et plus largement de ces Algériennes et Algériens qui n’ont pas le Smic de dignité. S’il est vrai plus que jamais que les invariants de liberté, de respect, d’alternance soient respectés, le besogneux a plus besoin d’un toit, d’un job, de se soigner, de pouvoir faire profiter ses enfants de l’École de la République. Les aspirations premières sont celles-là. Il nous faut veiller à ce que les élections se fassent dans la transparence. L’autorité en charge a la lourde responsabilité de crédibiliser les élections.»(6)

Conclusion
S’il est vrai que l’avenir de l’Algérie appartient à tous les Algériens, ils devront accompagner, à travers leurs engagements et leurs compétences, l’avènement d’une Algérie nouvelle en occupant, par des voies légales, notamment durant les législatives, tous les espaces de délibération où devra se dessiner en creux l’avenir de l’Algérie. Il n’y aura pas de place à l’aventure, pas de place aux interférences et aux partisans du «y-a-qu’à». l’Algérie nouvelle se construit pas des actes et par la loyauté à elle.
Un grand chantier fait de travail, de sueur, de nuits blanches, de résilience face à un monde qui ne fait pas de cadeau aux faibles nous attend tous autant que nous sommes. En 1984, Steve Jobs rencontre François Mitterrand et affirme : «Le logiciel, c’est le nouveau baril de pétrole.» La quête continue du savoir doit être la préoccupation essentielle de nos dirigeants qui doivent penser aux prochaines générations… Qu’on se le dise, l’Algérie est convalescente et a besoin de la bienveillance de tous ceux qui croient en elle. Il faut sauver l’Algérie de ses vieux démons mais aussi lui tracer une perspective de consolidation du vivre-ensemble.

Le graal, c’est arriver à redonner à l’Algérien cette fierté d’être Algérien et réconcilier ce peuple avec lui-même ; prôner en toute chose l’altérité. Ne voulant pas d’une autre patrie de rechange, il nous faut inventer un modus vivendi loin du miroir aux alouettes constitué par un mode de vie à l’européenne, débridé, loin de notre identité et loin aussi d’une métropole moyen-orientale qui est à des années-lumière de notre génie propre. Il ne faut pas compter sur le pétrole mais l’utiliser à bon escient, pas comme rente, mais comme moteur de la transition énergétique vers le développement humain durable en créant de la richesse, de l’emploi, en donnant une utopie à ces jeunes par le développement de grands chantiers.
Cette belle Révolution du 22 février 2019 que j’ai modestement accompagnée par mes écrits et mes multiples interventions ne devrait pas perdre son capital symbolique, pour ne pas être banalisée comme les révolutions arabes instrumentalisées. Pour moi, elle devrait être celle de l’humilité et de l’honnêteté. Nous avons à construire la deuxième République en mettant en place des institutions qui résistent aux hommes et qui, je le souhaite, propulsera notre pays dans la modernité. La Révolution tranquille du 22 février est, sans conteste, du bon côté de l’Histoire. Nous devons aller vers le vivre-ensemble mais aussi vers le faire-ensemble. Antoine de Saint-Exupéry nous donne le secret : «Force-les à bâtir ensemble une tour et tu les changeras en frères.»(6)

«Nous devons bâtir une nouvelle tour ensemble, une Algérie nouvelle basée sur le savoir, une autre révolution de Novembre basée sur le savoir.
En effet, une transformation profonde de nos organisations et nos modes de fonctionnement. Nous sommes à la veille d’un changement de paradigme… Le Covid déconstruit ce que la civilisation humaine a mis des millénaires à bâtir et est en train de voler en éclats. Parallèlement, le Big Data, qui est la capacité de manipuler de plus en plus facilement de très grandes masses de données, s’impose avec l’intelligence artificielle. Enfin, les changements climatiques, la transition énergétique pour sortir de l’ébriété énergétique actuelle pour aller vers la sobriété énergétique et le stress hydrique sont une réalité. Autant de chantiers qu’il nous faut aborder sans tarder.
Un système éducatif à l’abri des convulsions partisanes qui doit proposer ce qu’il y a de mieux pour cette jeunesse qui doit être la prunelle de nos yeux. On l’aura compris, seul le parler vrai et l’exemple permettront de convaincre cette jeunesse. La nation, ce plébiscite de tous les jours, pour reprendre Renan, constamment adaptable et servant constamment de recours et que Cheikh Nahnah avait résumé par une phrase célèbre : «Nous sommes Algériens min ta latta. Min Tlemcen li Tebessa oua min Tizi-Ouzou li Tamanrasset.» Cela devrait être notre credo. Il n’y a, de mon point de vue, que des Algériens qui sont ensemble depuis 1400 ans et qui ont connu le meilleur et le pire, comme l’a montré la glorieuse Révolution de Novembre.»(6)

«Imaginons, pour rêver, que les députés jeunes, car la jeunesse représente 75% de la population, se considèrent comme de simples citoyens qui s’astreignent à rendre compte pendant et après leur mandat, qu’ils acceptent de déclarer leur patrimoine avant et après. Imaginons aussi que cette nouvelle Assemblée vertueuse  décide de voter la loi sur la corruption, la loi sur le patrimoine, qu’elle décide de rendre sa légitimité sociale à l’université et aux enseignants et qu’elle décide enfin, par pure justice, de rétribuer ses députés, non pas en fonction d’une carrière fulgurante — celle de la campagne électorale —, mais avec pour tout salaire qu’une indemnité symbolique de représentation — ce sont quand même des élus du peuple  — en sus de leur salaire d’origine acquis celui-ci au prix d’un labeur de toute une vie».(6)
Si nous ne rêvons pas éveillés, nous allons nous dépêcher d’aller voter pour des élus qui prennent leur fonction véritablement comme une charge et un devoir. Alors, nous saurons que ces élus qui réellement nous représentent vont accompagner ce peuple pendant cinq ans avec ses joies et ses peines, ses espoirs et ses craintes de l’avenir. Alors on comprendra que quelque chose de fondamental a changé et que tout n’est pas irrémédiable. L’Algérie, à l’instar du phénix, va renaître de plus belle et plus déterminée qu’avant maintenant qu’elle est débarrassée de toutes les pesanteurs du passé.

«Cette Assemblée new look devrait avoir toutes les chances de partir du bon pied, notamment en donnant une représentation plus affirmée aux jeunes. L’Algérienne universitaire devrait pouvoir avoir la possibilité, à travers la discrimination positive, de montrer son savoir-faire. Il faut faire en sorte que les millions de diplômés se lancent dans cette utopie d’un nouveau Parlement capable d’être un immense centre de reflexion sur ce qu’il y a de mieux à faire pour sortir rapidement l’Algérie des temps morts. Seuls le savoir, l’honnêteté, l’éthique devraient prévaloir pour véritablement arriver à des élections transparentes qui seront, à non point douter, le signe d’un nouveau départ et une victoire de plus pour le Hirak historique, cette belle révolution du 22 février 2019, qui a étonné le monde par la singularité de sa démarche.»(7)


Par Pr Chems Eddine Chitour – École polytechnique, Alger.


1- Chems Eddine Chitour https:// www. lexpression .dz/chroniques/l-analyse-du-professeur-chitour/a-quoi-sert-un-depute-41518 09-04-2007
2- https://www.vie-publique.fr/fiches/19505-quest-ce-quun-depute-quel-est-le-role-dun-depute
3- https://www.vie-publique.fr/fiches/19511-les-conditions-pour-devenir-depute-ou-senateur
4- https://www.swissinfo.ch/fre/combien-gagnent-les-%C3%A9lus_parlementaires-de-tous-les-pays-pr%C3%A9sentez-vos-fiches-de-salaire/42142348
5- Audrey Travère https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/06/14/retraite-chomage-a-quoi-ont-droit-les-deputes-sortants_5144234_4355770.html
6- https://www.lesoirdalgerie.com/contribution/plaidoyer-pour-une-algerie-en-phase-avec-la-marche-du-monde-49926
7- Chems Eddine Chitour Le Hirak tel que je l’ai vécu : Plaidoyer pour l’Algérie du futur. Éditions OPU décembre 2020.


 

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