FABRICE BEAUR, UNE TRAJECTOIRE HORS DU COMMUN ET UNE VIE DE CONVICTIONS

Fabrice Beaur ne vous dit peut-être rien, mais c’est pourtant une personne qui a beaucoup fait pour la réinformation, tant pour le Donbass et la Russie, que sur beaucoup d’autres beaucoup d’autres thèmes, parfois très pointus. Raconter sa vie serait simplement une gageure, tant elle fut riche en événements et en rebondissements. Pour ceux qui ne le savent pas, c’est une des têtes pensantes qui furent derrière la fondation de nombreux espaces, en particulier actuellement le groupe Telegram Russosphère en défense de la Russie, qui réinforme les francophones et contrebat la propagande occidentale. Le groupe a d’ailleurs été attaqué par le journal Le Monde, ainsi que le Donbass Insider, dans un article récent, car ils n’ont plus d’autres alternatives que de tenter de discréditer ceux qui lutte pour dire une vérité qui est en marche. Il fut certainement l’un des premiers, voire le premier Français non combattant à se rendre dans le Donbass, en novembre 2014, où il rencontra les commandants historiques des premiers bataillons de l’armée républicaine et le futur Président Zakhartchenko, étant venu par ailleurs comme observateur des élections qui se déroulèrent à cette époque en RPD. Voici modestement son histoire et le portrait d’un Français courageux et atypique qui a voué l’essentiel de son existence à combattre pour des idéaux nobles et l’intérêt général.

Des premiers combats politiques à l’Eurasisme. Fabrice est d’origine bretonne mais a vécu toute la première partie de son existence dans la région parisienne. Très tôt dans l’adolescence, son intérêt pour la chose politique l’amena, essentiellement par la lecture, à construire sa pensée et à s’engager dans divers mouvements. Ces différentes formations étaient considérées par le système comme d’extrême-droite ou d’extrême-gauche, ce qui pour le commun des mortels brouille les pistes sur les vrais engagements pour lesquels il a combattu et combat toujours. D’extrême-droite ? Fabrice rigole à cette évocation car sa vision des choses est extrêmement éloigné du fascisme, encore plus du nazisme. D’extrême-gauche ou stalinien ? C’est exactement la même constatation dans ses réflexions, car comme il l’indique : « le problème est que jusqu’à présent dans l’histoire nous avons vu l’échec de la construction d’une Europe française, pendant l’épopée napoléonienne, puis un nouvel échec cette fois de l’Allemagne de faire une Europe allemande, puis enfin le même constat, avec des nuances, de l’échec d’une Europe soviétique donc quelque part russe. Nous avons besoin de construire une Europe liée à l’Asie, l’Eurasie, qui serait un système où nous aurions vaincu l’impérialisme américain, où nous aurions poussé dehors cette dernière et construit avec la Russie, et l’Europe entière un bloc d’États qui deviendrait la première puissance mondiale. Les États-Unis eux s’échinent depuis des décennies à empêcher ce rapprochement. Cette idée va plus loin d’ailleurs que l’Eurasisme, dans le reste du monde nous avons besoin de tous les pays pour retrouver notre liberté, c’est un combat pour la démocratie, une démocratie proche des peuples, directe et participative, c’est dans un sens là où l’on pourrait me considérer révolutionnaire. Toutefois je ne rêve pas du désordre ou du Grand Soir, simplement de construire une autre Europe qui ne soit plus dans les mains américaines et qui se lierait avec la Russie, non pas sous sa domination, mais bien en l’acceptant et l’assimilant comme une alliée. Le modèle russe est à méditer, son système de fédération où les différents peuples sont intégrés et peuvent s’épanouir dans leurs spécificités, tout en étant dans un grand tout est intéressant comme exemple. La création du bloc de l’Eurasie cela serait une alliance de nations, groupées et plus fortes ensembles, dans un système beaucoup large et vaste, qui est la seule réponse pour contrer l’impérialisme américain et son emprise à travers le Mondialisme, l’OTAN ou l’Union européenne ».

La lutte à mort contre un système inique et qui est étranger à l’Europe et à l’Asie. C’est la raison pour laquelle Fabrice milite depuis des années aux côtés de PCN-NCP, de Luc Michel (depuis les années 90), un Belge qui avec Jean Thiriart défendent cette grande idée très loin des tentatives médiatiques qui tentent de réduire leur combat aux oripeaux de l’extrême-droite ou de l’extrême-gauche. Il n’y a d’ailleurs pas de racialisme, ni de racisme, le mouvement à travers Luc Michel travaille depuis très longtemps en Afrique où il a des connexions profondes et ancrées. Selon Fabrice un énorme travail a été fait en direction des Africains pour les sensibiliser, ce qui explique en partie ce réveil auquel nous assistons sur ce continent de l’opinion publique des différents pays africains, beaucoup plus consciente des réalités des problèmes et des événements qui agitent le monde. De la même façon, l’idée n’est pas d’être dans une lutte de chapelles. Il n’y a pas de rattachement aux mouvements catholiques traditionnels, à ceux des monarchistes et maurassiens et pas plus avec les nationalistes en Europe. Fabrice explique : « le nationalisme peut présenter des avantages dans l’idée que l’OTAN et les USA pourraient être chassés de certains pays. Mais nous l’avons vu, cela ne dérangerait pas longtemps ces derniers. La réponse doit être plus globale, et s’élever à cette fameuse construction eurasiatique de Lisbonne à Vladivostok, où cette unité permettrait justement plus de démocratie, la reprise en main de nos destinées et l’éviction et destruction de cette domination américaine. C’est ici la clef. Dans les faits l’Union européenne aurait pu être un beau projet, mais comme nous le savons ce sont encore une fois les États-Unis qui sont aux commandes. L’idée américaine est d’empêcher justement ce rapprochement de l’Europe de l’Ouest avec la Russie, qui en finirait avec son hégémonie. L’UE n’est qu’une coquille vide qui de plus n’a aucun pouvoir de décisions, ces dernières sont prises ailleurs Outre-Atlantique ». Selon cette pensée, les ennemis à abattre sont clairs : l’OTAN, l’UE, la domination des États-Unis et ce que les Russes qualifient de Globalisme, mais qui est appelé en Occident Mondialisation. C’est un combat universel, une lutte à mort qui s’étend bien au-delà de l’Europe et de l’Asie. Fabrice le martèle : « Nous devons nous rassembler, le temps des États marchant isolément est terminé et c’est dans cette union, loin de la domination d’une seule Nation, que nous pourrons enfin vaincre justement nos ennemis ».

De l’aventure libyenne au Parti PCN-NCP. Fabrice Beaur s’est engagé très tôt dans le soutien à la Libye de Mouammar Kadhafi. Il fit ses premiers voyages dès le début des années 90, y revenant quasiment tous les ans pour des colloques, universités d’été et des conférences jusqu’en 2009 (MEDD). La grande idée était exactement la même, c’est à dire défendre les idées du Livre Vert, prônant une lutte révolutionnaire contre l’impérialisme américain, une vraie démocratie directe et participative, tout en prenant en compte que dans bien des pays, selon les spécificités, un état fort était souvent nécessaire, non pas pour opprimer, mais pour garder un équilibre et une direction. Les exemples sont nombreux, comme la Russie, l’Irak, la Syrie, la Chine, l’Inde, la Libye, l’Iran et bien d’autres, ce qui éclaire bien les raisons pour lesquelles les USA se sont lancés dans la destruction de certains de ces états, pour des raisons géopolitiques et bien sûr le contrôle des ressources, tout cela étant évidemment très lié. Dans ses très nombreux voyages en Libye Fabrice a vu le résultat concret sur place : « il y avait des comités révolutionnaires et des réunions de citoyens pour décider au niveau local. C’était une application concrète de cette démocratie directe. Et quoi qu’on en pense les femmes n’en étaient pas exclues. Dans un pays aussi compliqué que la Libye, avec ses aspects claniques, les résultats étaient bons et c’est la raison pour laquelle j’ai tenté en Europe d’organiser avec d’autres, des réseaux, des forums, des conférences, des réunions afin d’insuffler cette idée sur le continent. A l’époque j’ai été considéré certainement comme « un ami des terroristes », je fus même arrêté à la frontière après mon premier voyage, interrogé et suspecté. C’était une plaisanterie bien sûr, et plus tard lorsque je fis mon service militaire je fus empêché de me porter volontaire à des opérations. A jamais j’étais catalogué par les services français ! ». En effet, contrairement à l’image terroriste de la Jamahiriya libyenne, il faut rappeler que l’État libyen se dénommait Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste et se trouvait très éloigné de l’image qui en a été donnée en Occident. Si la religion officielle était l’Islam, le pays ne ressemblait nullement à ce que l’on a pu voir dans d’autres régions du monde et notamment dans le Califat islamique fondé sur des territoires en Syrie et en Irak (2014). L’idée du Livre Vert (1975) était d’ailleurs de proposer une alternative à l’impérialisme américain ou au communisme soviétique. Ce n’est pas un hasard si les populations manipulées l’ont brûlé en place publique sans vraiment connaître les enjeux (2011), et que la Jamahiriya fut détruite et Khadafi assassiné. Fabrice me dira d’ailleurs : « que l’on ne me parle pas de Sarkosy et de ses amis, j’ai perdu des amis en Libye qui étaient des gens de bien, ils ont été assassinés et liquidés, ce petit pays et ce petit peuple dérangeait trop l’OTAN et l’Occident et l’avait défié trop longtemps ».

La lutte pour la Démocratie. Aux côtés de Luc Michel et d’autres activistes venus de toute l’Europe, y compris de Pologne, Fabrice s’est ensuite rendu dans de nombreux pays avec l’ONG Eurasian Observatory for Democracy and Elections. Le but était de participer en tant qu’observateur, au bon déroulement d’élections, dans des pays aussi divers que la Transnistrie (2006), l’Abkhazie (2007), le référendum de Crimée (2014), et les élections de Donetsk et Lougansk la même année. Partout la volonté était de se rendre là où les projets de l’OTAN avaient été mis en échec, et où des peuples, souvent considérés comme insignifiants, voire méprisés, s’étaient levés pour refuser de subir cette hégémonie américaine et décider par eux-mêmes de leurs destinées, y compris le droit à se rattacher justement à la Russie. Car elle reste et est un des plus grands obstacles pour la domination totale des Américains. C’est justement par le financement du Maïdan par la CIA que tout ce qui s’est ensuivit par la suite a causé le drame du sort de l’Ukraine. Fabrice le dit, il fut dans la compréhension des événements à leurs commencements, ce qui justifiait sa présence en Crimée puis dans le Donbass. Aujourd’hui il vit en Russie depuis l’année 2010, installé dans le Sud et la région de Krasnodar, où il a ses marques et fondé une famille. « C’est pour nos enfants, pour tous les enfants que nous nous battons désormais, pour leur offrir un autre avenir que celui sinistre qui est proposé par l’hégémonie américaine », commentera-t-il derrière une série de mes photos sur Telegram. Il explique encore que désormais les combats politiques franco-français ne sont plus d’actualités, sont obsolètes et dépassés, ce qui est également mon avis : « Il faut se rassembler pour abattre la bête. La couleur du pelage des loups de la meute que nous sommes n’a pas d’intérêts. Toute personne qui lutte dans cette direction est mon allié, quelque soit sa sensibilité, car il en va non seulement de la victoire, mais de l’avenir de l’Europe, et du monde entier plus largement ». Sur ces paroles sages, le très long entretien en plusieurs épisodes que nous avons eu s’achève. L’espoir commun est que son message sera entendu, il n’est plus temps en effet de se quereller, et tous ceux qui ne l’auront pas compris servent en réalité d’autres intérêts que ceux qu’ils aimeraient hélas servir. C’est toute une vie de combat pour Fabrice, d’autres ne s’y sont engagés que plus tardivement ou tout récemment, après le mouvement des gilets jaunes, ou après l’arrivée du Covid, et même pour certains après l’opération spéciale russe. Mais peu importe, Fabrice Beaur a raison, l’enjeu est trop grand pour continuer les absurdes querelles politiques franco-françaises. Comment supporter plus longuement les étiquettes, par ailleurs parfois mensongères, qui nous sont imposées, apposées, ou qui ne nous laissent aucun choix lors d’élections finalement truquées dès le départ par l’improbable régime politique et système « démocratique » qui sévit en France depuis des décennies ?


Laurent Brayard pour le Donbass Insider


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