Algérie / Femmes au cinéma, femmes de cinéma : Une table ronde et des interrogations

par Mohamed Bensalah

Existe-il une approche spécifiquement féminine du 7e art? Les films réalisés par des femmes sont-ils fondamentalement différents des films réalisés par les hommes ?

Les chromosomes auraient-ils leur mot à dire en matière de création artistique ?

Les cerveaux des artistes fonctionnent-ils différemment selon l’origine biologique ?

Les conférencières à la salle Frantz-Fanon, dimanche 10 novembre. © D.R.
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La 10e édition du Festival international du cinéma d’Alger (Fica) a offert l’opportunité de poursuivre un débat largement entamé lors de rencontres internationales précédentes durant lesquelles nombre de questionnements sont demeurés sans réponse. La table ronde inscrite au programme dimanche matin 10 novembre à Riad El Feth a, à tout le moins, permis à un panel de femmes cinéastes (Amina Bedjaoui-Haddad, Anna Bucca, Apoline Traoré, Jacqueline Gozland et Nadia Meflah) de poser quelques jalons d’une thématique qui reste à approfondir. La féminisation de la vie sociétale est un fait incontestable. Il n’en demeure pas moins que l’arrivée de la femme dans un domaine exclusivement public, comme celui du cinéma, pose encore problème. Qu’en est-il en Algérie, pays où le 7e art a très tôt été considéré comme un outil de libération et un moyen d’émancipation?

Si en littérature, tout un chacun s’accorde à reconnaître que le «génie féminin» s’exprime parfaitement dans le domaine de l’expression cinématographique, la donne semble différente même dans les pays occidentaux où la gent féminine est considérée comme libérée. Le constat fait à ce jour est que, contrairement aux écrivaines et aux romancières, les femmes cinéastes n’ont pas fondamentalement bousculé l’ordre des choses dans le domaine du 7e art. Elles ont, certes, remis en question les idées reçues mais sans remettre fondamentalement en question les formes narratives, sans inventer de nouveaux codes cinématographiques, ni de nouvelles syntaxes. Choquantes, déterminées ou secrètes, elles ont donné simplement leur point de vue sur le monde. L’allemande Margaret Von Trotta, l’africaine Sarah Maldoror, la sénégalaise Safi Faye, tout autant que la romancière Margueritte Duras, qui finira par réaliser ses propres films, toutes ces pionnières ont, par l’image et le son, apporté leurs témoignages avec plus ou moins de succès. Leur cinéma, qualifié de «féminin», parce que réalisé par des femmes, reste cependant à définir. Pour paraphraser Fellini, on dira que le cinéma des femmes est plutôt en chacun d’entre nous («Cité des femmes»).

Cela dit, peut-on, à l’instar de la littérature, parler d’une écriture, d’une narrativité filmique, d’une intelligence discursive spécifique au monde féminin? La thématique, la stylistique, l’expressivité divergent-elles fondamentalement, selon que l’on ait affaire à l’œuvre d’un réalisateur ou d’une réalisatrice? Les cinéastes femmes ont-elles renouvelé l’écriture filmique, les représentations, l’art de concevoir la fiction ou le documentaire cinématographique? Leur approche des réalités et des problèmes quotidiens est-elle vraiment différente à l’écran? Autant d’interrogations préoccupantes qui taraudent l’esprit de nombre d’acteurs culturels qui partagent le même rêve, la même mémoire d’origine, le même attachement au terroir.

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De tout temps, les femmes ont rêvé de conquérir l’espace cinématographique. Femmes et cinéastes…, les deux attributs, rarement accolés, ont-ils fini par se rejoindre? Longtemps cadenassée, la création cinématographique, éternel bastion masculin, a fini par s’ouvrir au «sexe faible». Affectées traditionnellement aux postes de scripts, de monteuses ou de maquilleuses, les femmes ont fini par accéder à l’écriture filmique et à la création cinématographique. Né dans des conditions difficiles, le cinéma réalisé par des femmes s’affirme, en se faisant le porte-voix des blessures cachées, des douleurs grandes et petites qui tissent la vie ordinaire. Elles filment le quotidien dans sa nudité, sans emphase, sans fioriture. A travers leurs récits et leurs témoignages, c’est toute l’expression d’une inquiétude commune qui suinte.

Le cinéma se décline-t-il au féminin? Alors que la littérature sur la femme dans le monde arabo-musulman est d’une richesse inouïe, dans le domaine du cinéma, il n’en est pas de même. Bien avant que les femmes ne passent derrière les caméras, combien d’hommes ont réalisé d’excellents films sur la situation faite aux femmes, ont témoigné de leur combat et de leur résistance face aux discriminations, aux ostracismes, au nihilisme et à la bêtise humaine. Traité de manière documentaire ou sous forme de fiction, le vécu des femmes dans la société algérienne apparaît de manière constante dans la filmographie du pays. Prenons l’exemple de notre pays. Dans Elles d’Ahmed Lallem (1966), comme dans L’Obstacle et Les premiers pas de Mohamed Bouamari, les femmes ont librement témoigné de leurs combats et de leurs espoirs au lendemain de l’indépendance. Même constat dans Leila et les autres (1977) de Sid Ali Mazif. Ce dernier a mis en parallèle deux situations : celle de Mériem, une jeune femme soumise à un mariage forcé qu’elle refuse, et celle de son amie Leila qui se bat contre l’injustice dans le travail. Nadir Moknèche montre dans Viva l’Algérie des femmes intégrées dans l’espace social, des femmes qui travaillent, sortent en ville, dansent… et refusent l’effacement que leur impose la société.

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Une des raisons qui a incité les femmes à investir le domaine de la création est peut-être la nécessité de réagir contre ces caricatures flagrantes faites d’elles. Pour contourner les obstacles, les cinéastes en herbe, maghrébines où d’origine maghrébine, ont d’abord investi le terrain de l’écriture avant de pénétrer, quasiment par effraction, les arcanes machistes du monde cinématographique. Leurs œuvres, impertinentes ou sages, revendicatives ou superficielles, ambitieuses ou ambivalentes, laissent découvrir la vigueur d’une pensée, la couleur d’un style ou le sérieux d’une histoire. Loin, très loin d’égaler leurs consœurs européennes et anglo-saxonnes qui disposent de plus de moyens logistiques et d’un contexte plus favorable à la création, les femmes maghrébines s’en sortent, malgré tout, avec de brillants faits d’armes avec, comme dénominateur commun, une même passion de créer et d’affirmer leur existence. Au Maghreb, avant que d’autres ne la rejoignent dans le domaine de la réalisation, la romancière Assia Djebar est considérée comme étant la première à être montée au créneau dès 1978 pour apporter sa propre vision du monde en signant deux grandes œuvres : La montagne des femmes du Mont Chénoua 1976, une description de la condition des femmes montagnardes, suivie de La Zerda ou les chants de l’oubli, une réflexion sur les conflits imposés aux peuples sous tutelle. En Tunisie, dès 1982, Nejia Ben Mabrouk, Fatma Skandrani, Sophie Ferchiou et Selma Baccar ont suivi le même chemin. Leurs productions parlent d’elles-mêmes. A travers leurs films, les réalisatrices se racontent, racontent leurs histoires, celles de leurs parents et ce faisant, traduisent les libertés confisquées, les souffrances, les douleurs et les atrocités trop longtemps contenues. Témoignant d’un vécu, elles montrent tout simplement la vie de leurs compatriotes, femmes et hommes ordinaires.

Si les réalisatrices partagent le même rêve, la même mémoire d’origine et le même attachement au terroir, on se surprend à chercher la touche féminine qui caractérise ces créations artistiques. Peut-être s’inscrit-elle dans cette sensibilité, dans cette sensualité qui émerge de leurs images? De l’autre côté de la mer, la diaspora s’active. Yamina Benguigui, Djamila Sahraoui, Rachida Krim et Yasmina Adi, entre autres, ont réalisé nombre de films d’inégale importance. Alors que Barakat, film éclairant de Djamila Sahraoui, esquisse de très beaux portraits de femmes, l’une jeune, l’autre âgée, avec leur ironie et leur désenchantement, dans un contexte de violence islamiste. Le téléfilm Aïcha, un job à tout prix, réalisé par Yamina Benguigui, née Zohra Belaïdi) n’est guère une réussite. L’auteure du fabuleux Mémoires d’immigrés (une série de 3 documentaires réalisés en 1997) s’est complètement fourvoyée avec cette production d’une mièvrerie flagrante, à tous les niveaux, thématique, mais aussi technique et artistique.

De nouvelles cinéastes ont pris le relais des pionnières. La génération de Farida Benyazid, Moufida Tlatli ou Yamina Chouikh tente de briser les carcans et d’ouvrir la voie de l’audace. Figures de proue, ces dernières ont permis au cinéma du Maghreb de devenir visible à l’intérieur et à l’extérieur des frontières. A travers Rachida, Yamina Chouikh a tenté de montrer, sans fioritures, le sordide quotidien des femmes prises dans la tourmente du terrorisme aveugle. En pleine violence terroriste, la réalisatrice a apporté son témoignage acerbe sur les années noires en décrivant la brutalité à vif, la barbarie, à travers la vie d’une enseignante brisée par les affres de prophètes autoproclamés. Cette fiction, terriblement proche de la réalité, reflète avec tact et doigté les pressions subies par les femmes algériennes dans leur quotidien au cours de cette «quinzainie» sanglante. Le résultat, deux décennies plus tard : un film culte, prégnant, envoûtant qui laisse apparaître une sensibilité et une grâce dignes des grands cinéastes. De son côté, Tlatli Moufida a, à travers Les Silences du Palais, cherché à mettre en avant une thèse sur les individus, leur part d’ombre, tout en évoquant remarquablement leur tristesse et leur part d’ombre. Pour échapper à la chape de plomb, à l’emprisonnement des femmes, dont il est toujours difficile de s’extraire, le chant, la musique, comme moyen de consolation, venu du fond des âges, comme raison d’espérer pour oublier la vie qui malmène les êtres fragiles. Ces préoccupations on les retrouve d’ailleurs dans son film suivant, La Saison des femmes et dans le film Les Secrets de Raja Amari. Dans L’enfant endormi, la réalisatrice marocaine Yasmine Kassari raconte l’histoire d’une jeune mariée, Zeinab, qui voit son époux quitter le pays pour la clandestinité le lendemain de ses noces. Enceinte, elle attend le retour de son mari et fait endormir son fœtus. Le temps passe, mais le mari ne revient pas… Le film, qui met en scène dans les rôles principaux Rachida Brakni et Mounia Ousfour, a remporté plusieurs prix internationaux. Nadia Cherabi dont l’œuvre documentaire (Amaria et El haouta) répond aux palpitations de la société algérienne, comme aux interrogations de la génération née durant ou après la guerre imposée par les islamistes aux civils. Pour porter l’univers immense de son pays, Nadia Cherabi se concentre sur la condition féminine en Algérie et, par extension, dans l’ensemble du monde arabe. L’idée de son premier long métrage L’Envers du miroir ne venait pas d’elle, mais de Sid Ali Mazif, le cinéaste dont les thèmes ont toujours traité de la femme. Ce film, d’une force rare, raconte avec dextérité une certaine naïveté et quelques larmes (inutiles), l’histoire bouleversante d’une jeune fille abusée par son beau-père. On peut ne pas aimer le film, mais ce dernier, en posant un problème tabou, donne l’occasion de réfléchir sur la violence qui se déchaîne au sein de la famille.

Les messages transmis par la nouvelle génération de femmes, Yasmine Chouikh (Jusqu’à la fin des temps), Leila Habchi, Fatma Zohra Zamoun (Parkour-s), Rahyana (A mon âge, je me cache pour fumer), Najwa Najjar, Amel Kateb… sont sans ambiguïté. Leur participation massive dans l’actuel mouvement populaire témoigne de leur engagement et de leur rôle déterminant dans la révolution en cours contre le système inique actuel. « C’est la femme qui vit la crise économique dans sa maison avec ses enfants. C’est elle qui supporte le drame de la harga, du chômage et de la déperdition scolaire. C’est elle qui vit aussi le plus la souffrance des emprisonnements. Ce n’est donc point étonnant qu’elle profite du Hirak pour exprimer ses préoccupations et celles des familles algériennes », soutient le sociologue Nacer Djabi. Rappelant leur combat (lors de la dernière rencontre à Oran -17, 18 et 19 octobre), les féministes algériennes se proclament contre toutes les discriminations faites aux femmes et réitèrent leur rejet du code de la famille qui consacre, ont-elles soutenu, «la permanence de l’oppression des femmes». De grandes perspectives de films s’annoncent donc. Récits ou témoignages sur le vécu des femmes, expression d’une inquiétude commune aux deux sexes, ces productions féminines révèlent en fait les blessures cachées, les douleurs grandes et petites, qui tissent la vie ordinaire. Les femmes ont réussi à transformer les arts en moyen de lutte pour se libérer des affres du quotidien, des injustices, du totalitarisme et des oppressions de toutes sortes. Tel semble être le leitmotiv des femmes cinéastes du Maghreb. Porte-voix des mémoires, leurs films qui naissent dans des conditions difficiles et même parfois au forceps, prennent souvent l’allure d’une critique sociale et/ou politique, situant l’identité et le statut de la femme au cœur de la réflexion. Ce qui fait dire à une jeune cinéaste : «Il nous faut tenir compte des aspirations féminines, nous attaquer à la primauté de l’homme dans le couple, dénoncer les difficultés de la condition féminine».



Amina Bédjaoui-Haddad

Amina Bédjaoui-Haddad est née en 1977. Diplômée de l’Université d’Alger en communication, elle est également formée en production cinématographique au CIFAP de Paris. En 2009, elle fonde la société de production MHP. En 2014 et 2015, elle produit les courts métrages Je te promets et Zeus. Elle se consacre actuellement à la production du documentaire Unis vers Kateb.


Anna Bucca

A 48 ans, Anna Bucca est enseignante et militante associative à Palerme. Elle est coordonnatrice de la commission de politiques culturelles d’ARCI Sicilia et participe à la commission culturelle de l’ARCI, une organisation d’associations en Italie. Elle travaille à l’animation de la vie associative et milite pour la participation citoyenne à la vie culturelle et politique.


Apolline Traoré

Apolline Traoré est née en 1976 au Burkina Faso. Productrice et réalisatrice, elle vit dans son pays natal, après un long séjour aux Etats-Unis où elle a étudié et réalisé plusieurs courts et longs métrages. Ses œuvres les plus reconnues sont celles d’après son retour à son pays, telles que Moi Zaphira (2013) et Frontières (2018), qui décrocha deux prix au Fespaco 2017. Déjà auréolée de plusieurs prix, Desrances est son dernier film.


Jacqueline Gozland

Jacqueline Gozland est née à Constantine,en Algérie. Elle afait des études supérieures d’histoire et de cinéma.Elle réalise et produit avec Béatrice Jalbert des films courts et longsmétrages fictions et documentaires, sélectionnés et primés dans de nombreux festivals nationaux et internationaux, dont Cannes. Parmi ses prix : Prix Villa Médicis Hors les Murs ; Participation à l’exposition «Générations, un siècle d’histoire culturelle des Maghrébins en France».


Luciana Castellina

Luciana Castellina est née en 1929 à Rome. Diplômée de droit, elle est journaliste et écrivaine. Elle a également été membre des Parlements italien et européen. Elle est actuellement présidente honoraire de l’ARCI, grande association de gauche en Italie. Parmi ses derniers livres : Euro hollywood (2007), La Scoperta del mondo (2011) et Amori Communisti (2018).


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TABLE RONDE AUTOUR DE “FEMMES DE CINÉMA ET FEMMES AU CINÉMA”

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Plusieurs professionnelles du cinéma ont évoqué lors de cette rencontre leur expérience personnelle et les difficultés auxquelles elles font face dans un univers masculin. 

Le 10e Fica (Festival international du cinéma d’Alger, dédié au film engagé), qui s’étale jusqu’au 16 novembre, est inscrit pour cette édition sous le signe “Les migrants, les femmes et le continent africain”. À cet effet, une table ronde a eu lieu dimanche à la salle Frantz-Fanon sous la thématique de “Femmes de cinéma et femmes au cinéma”, animée par un panel de professionnelles. Réalisatrice, productrice, écrivaine ou encore militante, les conférencières sont revenues tout au long de leurs interventions sur la place de la femme dans ce milieu masculin, leur combat ainsi que leur engagement pour faire entendre leur voix à travers l’image. Modérée par Nadia Meflah dans sa présentation, elle a d’emblée expliqué que “cette rencontre réunit des femmes d’expérience qui travaillent le récit, l’engagement et la constitution d’un point de vue libre et citoyen. Nous avons à cœur d’entendre les paroles, les témoignages et les regards croisés de ces femmes”. Tout en poursuivant : “Cette table ronde donne un aperçu sur la pluralité des réalités des femmes engagées dans le cinéma, devant et derrière la caméra dans toutes les disciplines.

Aussi, ‘femmes au cinéma’ nous interpelle sur les questions de l’image, de la représentation des imaginaires, des fantasmes et des clichés.” Sur l’intitulé de la rencontre, la modératrice a indiqué : “Nous avons à la fois une position, une interprétation et une interpellation de ce qui relève des femmes qui travaillent et sont engagées dans le cinéma. Le cinéma est une industrie, c’est très vaste comme sujet, car nous avons ce qui relève de l’industrie du regard, des rapports de pouvoir, d’égalité sociopolitique et économique, et en même temps de ce qui relève des imaginaires.” Questionnées sur leur rapport à cet intitulé, chacune des conférencières a évoqué son expérience et regard personnel sur ce sujet. Pour Jacqueline Gozland (réalisatrice), ayant quitté l’Algérie depuis des décennies, son parcours de cinéaste est “lié à (son) histoire”. “Je fais partie de la communauté juive, et la représentation par l’image est interdite, il a fallu tout combattre pour faire sortir une image.” Nostalgique de son pays natal, “l’exil de ma terre a été fondateur du désir de me lier aux femmes du monde”, a-t-elle indiqué. Tout en donnant pour exemple le rassemblement de 82 femmes sélectionnées sur 1688 hommes au festival de Cannes, pour “montrer qu’elles étaient présentes.

C’était fort, mais le drame est qu’elles doivent se battre pour que l’œuvre sorte et apparaisse sur les écrans. Quand on montre nos films, on existe”. De son côté Apolline Traoré (réalisatrice), dans son intervention, est revenue sur les thématiques de ses films. “J’ai choisi de parler de la femme africaine, car j’ai jugé bon que nous ayons une autre façon de présenter la femme à l’écran. Il y a eu beaucoup de sujets élaborés par des hommes avec une certaine identité, une certaine vision, et je me suis sentie assez frustrée par rapport à quelques images sur la femme africaine”, a-t-elle précisé. Cette dernière, stigmatisée comme une “femme au foyer”, la réalisatrice voulait montrer la “force” de cette femme et sa force en société. Au sujet des films, elle a martelé que l’œuvre d’une réalisatrice est remis en question par rapport à la personne. Alors que pour un homme, la critique observe seulement la qualité de la production. 

Pour sa part, Amina Haddad Bedjaoui (productrice), qui prépare en ce moment un film sur Kateb Yacine, a signalé que l’expérience algérienne est différente. “Sur le terrain, je ne sens pas la catégorisation entre hommes et femmes, et cela s’explique par beaucoup de choses : cela est dû au seuil des entraves et des limitations à la liberté de créer et de faire des films.” Et de renchérir : “Nombre de difficultés qui mettent en travers des faiseurs de films fait qu’on ne se distingue pas et on ne se sous-distingue pas entre hommes et femmes.” À propos de l’intitulé, elle a cité pour exemple trois femmes qui bataillent dans leurs domaines respectifs : Drifa Mezenner, une réalisatrice qui “utilise l’image et le son pour se faire le témoin oculaire des révolutions algériennes” ; Leila Touchi, comédienne qui s’est “investie durant des années pour créer un cinéclub dans sa ville Tipasa” et Laila Aoudj, directrice artistique des RCB, qui a eu “un élan de courage de contrer une des difficultés majeures : la censure, par la projection de deux films frappés d’interdiction de projection”. 


Hana MENASRIA



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