La « Guerre contre le terrorisme », une escroquerie rondement menée

 

Par Caitlin Johnstone
Paru sur le blog de l’auteur sous le titre Tens Of Millions Of People Displaced By The ‘War On Terror’, The Greatest Scam Ever Invented


Unouveau rapport du projet « Costs of War » de l’université Brown a révélé qu’au moins 37 millions de personnes ont été déplacées à la suite de la supposée « guerre contre le terrorisme » menée par les États-Unis depuis le 11 septembre, une estimation basse d’un nombre qui pourrait en fait se situer entre 48 et 59 millions.

Ce chiffre, « au moins 37 millions », correspond par pure coïncidence au nombre exact d’Américains qui souffrent d’insécurité alimentaire parce que leur gouvernement dépense ses richesses et ses ressources pour tuer et déplacer des gens à l’étranger.

Cette révélation dérangeante, qui a été rapportée pour une fois par le New York Times, a causé des crises de nerfs chez toutes les « bonnes » personnes, le propagandiste de guerre néocon du Washington Post, Josh Rogin, s’exclamant : « Le @nytimes devrait avoir honte de présenter cela comme une « analyse ». Accuser les États-Unis du déplacement de 7 millions de Syriens est fou et malhonnête. C’est une façon de justifier la propagande anti-américaine. »

 

(Tweet : « Le @nytimes devrait avoir honte de qualifier cela d’ « analyse ». Blâmer les États-Unis pour le déplacement de 7 millions de Syriens est fou et malhonnête. C’est une façon de justifier la propagande anti-américaine. »

Bien sûr Josh, ce n’est pas comme si les forces extrémistes qui ont inondé la Syrie dans le but de renverser Damas avaient été soutenues par les États-Unis et leurs alliés et avaient vu le jour en conséquence directe de la déstabilisation régionale provoquée par l’interventionnisme occidental au nom de la lutte contre le terrorisme. Ah pardon, si, en fait, c’est exactement ce qui s’est passé.

« C’est l’une des principales formes des dégâts, avec bien sûr les morts et les blessés, qui ont été causés par ces guerres », a déclaré l’auteur principal du rapport, David Vine, au New York Times. « Cela nous dit que l’engagement des États-Unis dans ces pays a été catastrophique, horriblement dommageable d’une manière dont je ne pense pas que la plupart des gens aux États-Unis, à bien des égards, moi y compris, aient été le moins du monde conscients ».

Des dizaines de millions de personnes ont été forcées de fuir leur foyer en désespoir de cause, en raison de la violence et de la déstabilisation causées par les interventions américaines justifiées par la nécessité de lutter contre le « terrorisme ». Combien d’Américains ont en effet été confrontés à ce problème ou l’ont pris en compte ? A-t-on songé à l’ampleur et à la profondeur des souffrances que ces interventions causent à de véritables êtres humains aussi capables de souffrir qu’eux ? Se sont-ils demandé si la fin justifie vraiment la dévastation causée par les moyens ?

Et, ce qui est peut-être le plus important, se sont-ils demandé s’ils sont bien sûrs de savoir qui sont les véritables terroristes dans cette situation ?

 

(Tweet : « Au moins 37 millions de personnes ont été déplacées en conséquence directe des guerres menées par les États-Unis depuis le 11 septembre… sans compter les millions d’autres personnes qui ont été déplacées dans des pays où les opérations antiterroristes américaines sont moins importantes ».)

La « guerre contre le terrorisme » n’est qu’un terrorisme de masse à gros budget, et elle crée également un terrorisme de type ordinaire. Il a été démontré au delà de tout doute que les attentats-suicides à la bombe sont presque entièrement le résultat de l’interventionnisme occidental ; ils n’étaient tout simplement pas un problème en Irak et en Afghanistan avant les invasions américaines dans ces pays, par exemple. La « guerre contre le terrorisme » n’est pas seulement du terrorisme lui-même, c’est un fait établi qu’il crée en fait davantage du type de terrorisme qu’il prétend éliminer.

Et pourquoi ne le ferait-elle pas ? Pourquoi la destruction et la déstabilisation de nations entières n’inciteraient-elles pas les gens à vouloir se battre contre vous ? Il va de soi que c’est le cas, comme chacun peut le comprendre simplement en utilisant sa propre empathie et sa compréhension de la nature humaine. Comme l’a écrit Jonathan Marshall pour Consortium News en 2017 :

La nouvelle étude la plus importante sur les sources du terrorisme et de l’insurrection sur le continent, intitulée « Journey to Extremism in Africa » (« Voyage dans l’extrémisme en Afrique », septembre 2017), révèle que ce qui pousse de nombreux individus à rejoindre des groupes violents sont des incidents de violence parrainés par le gouvernement, comme le « meurtre d’un membre de la famille ou d’un ami » ou « l’arrestation d’un membre de la famille ou d’un ami ».

« Ces conclusions mettent en évidence la question de savoir comment les fonctions de lutte contre le terrorisme et de sécurité des gouvernements dans les environnements à risque se conduisent en matière de droits de l’homme et de respect des procédures », conclut le rapport, basé sur des entretiens avec plus de 500 anciens membres d’organisations militantes.

« Le comportement des acteurs de la sécurité de l’État s’avère un important accélérateur de recrutement, plutôt que l’inverse. . . Ces conclusions suggèrent qu’une réévaluation totale des interventions axées sur la sécurité de l’État est nécessaire, de toute urgence ».

De nombreux autres experts ont tiré des conclusions similaires des zones de conflit au Moyen-Orient et en Asie. En 2008, un rapport de la RAND Corporation intitulé Lessons for Countering Al-Qaida (Leçons pour contrecarrer Al-Qaïda) a mis en garde l’armée américaine contre le fait de « se laisser entraîner dans des opérations de combat dans les sociétés musulmanes, car sa présence est susceptible d’accroître le recrutement de terroristes »… La force militaire a généralement l’effet inverse de ce qui est prévu : Elle est souvent utilisée à outrance, elle aliène la population locale par sa nature autoritaire et offre une raison de recruter des groupes terroristes ».

De même, la Stimson Task Force on U.S. Drone Policy (L’équipe de travail Stimson sur la politique de drones des USA), composée d’anciens hauts fonctionnaires de la CIA, du ministère de la défense et du département d’État, a averti en 2014 que les frappes américaines avaient renforcé les groupes islamiques radicaux au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie du Sud.

Il ne fait tout simplement aucun doute que la « guerre contre le terrorisme » fait exactement le contraire de ce qu’elle prétend faire, et ce sur tous les plans imaginables. C’est un fait établi de manière absolue et incontestable.

Alors pourquoi continue-t-elle ? Pourquoi ce projet d’intervention et d’occupation à grande échelle non seulement se poursuit, mais s’intensifie alors que nous savons sans l’ombre d’un doute qu’il ne fait que créer davantage de misère, de déplacements et de terrorisme ?

Facile : parce que c’est exactement ce qu’il est censé faire.

 

(Tweet : Étape 1 : Détruire les nations et déplacer des dizaines de millions de personnes.
Étape 2 : Attendre que certaines de ces personnes vous haïssent et veuillent se défendre.
Étape 3 : Utilisez leur désir de se battre pour justifier la répétition de l’étape 1.)

La plus grande escroquerie jamais conçue est peut-être la façon dont l’empire centré sur les USA * a découvert qu’il pouvait tuer et déplacer des gens dans des régions géostratégiquement cruciales et riches en ressources sous couvert de lutte contre le terrorisme, puis, lorsque de la violence et de l’extrémisme découlent inévitablement de ce traumatisme de masse, il peut s’en servir pour justifier encore plus d’interventionnisme sous couvert d’encore plus de lutte contre le terrorisme. Il s’agit d’un cercle vicieux de violence sans fin, qui permet aux forces impérialistes d’envoyer toujours plus de troupes, de bases et de machines de guerre dans les zones qu’elles doivent verrouiller pour les aider à étouffer les nations qui leur désobéissent.

Plus l’interventionnisme est dévastateur, plus les gens veulent combattre les forces qui infligent cet interventionnisme militaire dévastateur. Plus les gens veulent combattre les forces qui infligent cet interventionnisme militaire dévastateur, plus l’interventionnisme militaire dévastateur peut être justifié auprès d’un public américain qui n’y est pas confronté ou qui n’en tient pas compte, même de loin.

Et le pétrole continue de couler. Et l’argent continue de s’accumuler. Et le cirque continue.

Nous sommes dirigés par des monstres.


Traduction Entelekheia
Photo : Afghanistan, Amber Clay / Pixabay

*Note de la traduction : Caitlin Johnstone emploie l’expression « Empire centré sur les USA » pour décrire le réseau des pays alliés (en fait vassaux) des USA, à savoir les pays de l’Otan et du Commonwealth britannique, les États du Golfe, certains pays d’Asie comme le Japon ou la Corée du Sud, etc.


 

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