Le libre accès aux archives liées à la colonisation française en Algérie risque d’être « entravé »

  

     ALGERLe libre accès aux archives liées à la colonisation française en Algérie risque d’être « entravé » par la mesure prise par le président français qui consiste à entreprendre un « travail législatif par et avec des experts de tous les ministères concernés », a estimé l’historien français, Gilles Manceron, qualifiant cette démarche « d’inquiétante ».

Dans un entretien paru dimanche dans le quotidien El Watan, Gilles Manceron a souligné que  » la déclassification au carton », comme l’a mentionné le communiqué du président Emmanuel Macron, « ne change pas grand-chose et continuera à entraver les recherches », ajoutant que cette mesure maintient « cette obligation d’un processus de déclassification, qui revient le plus souvent à donner le dernier mot à l’armée française pour décider aujourd’hui si tel ou tel document de l’époque peut être consulté ».

L’historien estime que l’inquiétant dans ce « travail législatif à mener par le gouvernement (français) pour renforcer la communicabilité des pièces, sans compromettre la sécurité et la défense nationales », c’est qu’il y a des institutions administratives au sein de l’Etat et des groupes nostalgiques de la colonisation au sein de l’armée aujourd’hui qui « désapprouvent » les annonces du président français « sur la nécessité de dire la vérité sur le passé colonial de la France et qui cherchent à empêcher la mise en œuvre de ces annonces ».

Ainsi, l’ouverture d’un chantier législatif sur la révision des délais de libre accès aux archives, selon Gilles Manceron, « peut déboucher sur la révision de la loi en vigueur sur les archives dans le sens d’une fermeture accrue » et fait surtout craindre qu’une « nouvelle loi vienne aggraver la loi en vigueur en revenant sur la liberté d’accès aux documents, qu’ils soient pourvus ou non de tampons « secret ».

Ces restrictions n’ont pas lieu d’être, selon l’historien qui a tenu à rappeler que la loi de 2008 « a veillé à imposer un délai plus long ou bien une interdiction d’accès à certains documents à protéger », considérant que tous les documents datant de pus de 50 ans « sont consultables de « plein droit » et ils doivent le rester ».


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M. Manceron a jugé que l’examen de ces documents est « indispensable » pour l’écriture de l’histoire des « pratiques qui ont été mises en œuvre par l’armée et l’administration coloniale » en Algérie.

L’accès aux documents concernant les disparitions forcées de la guerre de libération est « essentiel », ajoute l’historien, en évoquant également le dossier des essais nucléaires, sur lequel un « travail historique précis » doit être fait, pour pouvoir établir « l’ampleur des dégâts provoqués, ainsi que les danger persistent pour les populations aujourd’hui ».

Dans une déclaration publiée dimanche dans le même quotidien, l’universitaire français, Olivier Le Cour Grandmaison a souligné que le communiqué de presse de l’Elysée est « une opération politicienne et de communication destinée à faire croire que le Président tient ses promesse et, sans doute aussi à désamorcer une mobilisation remarquable par son ampleur et sa durée dans un contexte où la popularité du chef de l’Etat dans l’enseignement supérieur et la recherche est au plus bas ».

Selon cet universitaire, il faut continuer à interpeller « le président, son gouvernement et la majorité qui les soutient  » afin d’exiger l’application de la loi du 15 juillet 2008,  » celle-là même qui est encore violée par les propositions élyséennes ».

Pour le directeur de l’Observatoire des armements, Patrice Bouveret, la déclaration du président Macron doit être « traduite dans les faits et là en occurrence, il faut une modification législative », appelant les parlementaires français à « s’emparer de la question et supprimer cet article bloquant l’accès aux archives sur le nucléaire ».


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