Libye / Les «erreurs» du général à la retraite

Les forces du GNA mènent 12 raids aériens contre l’ANL de Haftar

Le conflit n’est pas né de la seule volonté de puissance de Khalifa Haftar. Il trouve son origine, ses mécanismes et ses ambitions dans le rôle que plusieurs pays, occidentaux et arabes, jouent en vue de conforter leurs intérêts pétroliers et stratégiques dans une Libye en proie à leurs convoitises.

Haftar entouré de son état-major
Haftar entouré de son état-major

Quatre mois après le lancement de l’offensive du général à la retraite Khalifa Haftar contre la capitale, les troupes de l’Armée nationale libyenne autoproclamée (ANL) n’ont pas eu le temps de digérer leur cuisante défaite avec la perte de la ville de Gharyan, à une centaine de km de Tripoli. Non seulement les défections sont de plus en plus nombreuses alors que le chef de guerre pensait tout le contraire, convaincu que son arrivée triomphante précipiterait la dislocation des milices loyales au gouvernement d’union nationale ( GNA ) reconnu par la communauté internationale, mais l’offensive éclair entamée depuis son fief de Benghazi vire au cauchemar. Les milices de Misrata, Zintan et Zawiya, notamment, conservent leur mainmise sur les faubourgs de Tripoli et sur l’aéroport international de Mitiga, même si les combats font rage non loin de là, dans le quartier d’El Aziziya. Acculée dans ses retranchements, l’ANL qui ne dispose plus que de la seule base de Tarhuna pour assurer une logistique cruciale, après la perte de Gharyan, découvre que les forces du GNA ne sont pas aussi fragiles que le prétendait Haftar au moment où il ordonnait une guerre sans merci contre Tripoli. Selon certaines sources, les « erreurs » du général à la retraite ont fini par provoquer des fissures au sein de son état-major, certains généraux n’hésitant plus à critiquer cette opération brutale contre la capitale du pays, pour une question de leadership et déplorant le grave préjudice causé à tout le peuple libyen avec un conflit fratricide. Or, ce conflit n’est pas né de la seule volonté de puissance de Khalifa Haftar. Il trouve son origine, ses mécanismes et ses ambitions dans le rôle que plusieurs pays, occidentaux et arabes, jouent en vue de conforter leurs intérêts pétroliers et stratégiques dans une Libye en proie à leurs convoitises. Khalifa Haftar apparaît, dès lors, comme un pantin que ces pays utilisent en lui fourguant des armes et un destin politique. Seulement, l’homme a mal calculé son coup et il risque, à vouloir tout gagner, de perdre toutes ses plumes. Pas plus tard que vendredi dernier, les forces loyales au GNA ont confirmé avoir effectué une dizaine de frappes aériennes contre les positions des troupes de Haftar et cela dans l’est du pays. Les raids avaient pour cibles « les positions et les routes d’approvisionnement de la milice de Haftar dans les villes d’Asbi’ah et de Shwerif », selon la déclaration du porte-parole des combattants du GNA Mohamed Gonono. Celui-ci a, en outre, souligné que la prise de Gharyan a eu de graves conséquences pour l’ANL, dont les approvisionnements en renforts et en munitions se trouvent considérablement amoindris. 
La découverte, dans cette base, d’un important arsenal de guerre ( véhicules blindés, missiles antichars de fabrication française Javelin, drones made in China ) livré, selon toute vraisemblance, par les Emirats arabes unis a contribué à souder davantage la population de la Tripolitaine qui refuse, désormais, l’arrivée d’un nouveau dictateur. Surtout que celui-ci a laissé dans les affrontements de Gharyan des centaines de prisonniers…soudanais et tchadiens enrôlés de gré ou de force dans les rangs de l’ANL et dont les images ont été diffusées par les milices de Misrata. Quatre mois se sont donc écoulés, depuis l’envol de Khalifa Haftar à la conquête de Tripoli, au cours desquels le rêve a tourné au cauchemar, la population libyenne, au nord comme au sud, ne croyant plus à sa prétendue volonté d’« éradiquer les milices mafieuses infiltrées par les groupes terroristes » et découvrant, avec tristesse, que son seul objectif est de devenir le nouveau Guide d’une Libye dépecée.

Chaabane BENSACI



 

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