Mer de Chine méridionale : la bataille des notes diplomatiques se poursuit

   Par NGUYEN Hong Thao, professeur de l’Académie Diplomatique du Vietnam

Le Docteur Nguyên Hông Thao, Professeur en droit international de l’Académie de diplomatie du Vietnam, membre de la Commission du droit international des Nations Unies. Photo : VNA/CVN

La dernière série d’échange de notes diplomatiques a ressuscité le sentence arbitrale de 2016

La soumission conjointe par la Malaisie et le Vietnam d’un rapport et celle d’un rapport du Vietnam concernant l’extension des limites du plateau continental, respectivement, les 6 et 7 mai 2009 à la Commission des Nations Unies sur les limites du plateau continental (CLCS) ont lancé la première bataille juridique dans la mer de Chine méridionale (la bataille des notes diplomatiques 1.0). Selon le recensement, douze notes en tout se sont été échangées dans la période allant de 2009 à 2011 (trois émanant de la Chine, deux de la Malaisie, trois des Philippines, trois du Vietnam et une de l’Indonésie). En réponse, la Chine a réagi avec sa première publication officielle de la carte de la « ligne en neuf traits » dans le cadre des Nations Unies en mai 2009, ensuite son occupation et contrôle effectif du récif de Scarborough en 2012 et enfin en 2014 ses activités de réclamation de terre et de construction d’îles artificielles dans les îles Spratly qu’elle a occupées. Sous la pression chinoise, la question relative à la mer de Chine méridionale a été enlevé de la déclaration du Sommet de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) de 2012. Ces développements susmentionnés ont montré que la Chine n’avait presque pas de rivaux sur le terrain.

Cependant, l’intimidation chinoise et la bataille des notes diplomatiques 1.0 ont précipité les Philippines à s’engager dans la procédure d’arbitrage, prévue par l’Annexe VII de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM) contre la Chine en 2013. La sentence arbitrale de 2016 s’est prononcée en faveur des Philippines, mais l’attitude ambivalente philippine sous leur nouveau président et le rejet affirmatif de la Chine ont menacé ensemble invalider la sentence.

Une nouvelle soumission par la Malaisie d’un rapport concernant l’extension des limites du plateau continental en décembre 2019 constituait un tournant dans la bataille juridique dans la mer de Chine méridionale tout en ouvrant « la bataille des notes diplomatiques 2.0 » (par rapport à la première bataille dans la période de 2009 à 2011) avec une large participation d’autres Etats, y compris des pays à l’extérieur de la région. A cet égard, quinze notes verbales, deux lettres diplomatiques (adressées au Secrétaire Général des Nations Unies) et une déclaration se sont été échangées en huit mois (12/2019 -7/2020). Parmi les pays réclamants, on peut citer une déclaration du Ministère des Affaires étrangères du Bruneï, cinq notes et une lettre de la Chine, deux notes de la Malaisie, deux notes des Philippines et trois notes du Vietnam. Pour d’autres pays, il y avait une note de l’Australie et une lettre des Etats-Unis.

Le Secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a également renforcé la position des Etats-Unis à l’égard des revendications maritimes dans la mer de Chine méridionale avec sa déclaration du 13 juillet 2020. Laquelle a provoqué une série de déclarations d’alliés américains rejetant les revendications maritimes de la Chine dans la mer de Chine comme étant sans fondement juridique. La position de presque tous les pays de la région et ceux de l’extérieur est conforme à la sentence arbitrale de 2016 selon laquelle, toute revendication maritime incompatible avec la CNUDM est inacceptable, y compris la « ligne en neuf traits » et les « droits historiques ». Les éléments qui sont découverts à marée haute dans les îles Spratly ne peuvent pas générer de droits maritimes de plus de 12 milles marins, tout élément submergé ou tout haut-fond découvrant dans les îles Spratly ne peut pas faire l’objet des revendications territoriales. Le tracée des lignes de base droite archipélagique pour l’ensemble des éléments des îles Spratly est également rejeté. Toute activité de réclamations de terre ou toute autre forme de transformation artificielle ne peut pas changer le statut juridique naturel d’un élément prévu par la CNUDM. Par conséquent, tous les droits maritimes générés à partir du continent des Etats côtiers tels que ceux qui chevauchent Vanguard Bank (au large du Vietnam), Luconia Shoals (au large de la Malaisie), zone économique exclusive du Bruneï et Natuna (au large de l’Indonésie) ne peuvent pas être considérés comme zones maritimes contestées.

L’idée principale de ces notes diplomatique est que la sentence arbitrale de 2016 est définitive et sans appel et qu’aucune partie ne peut la modifier ou la négocier. Les Etas-Unis ont qualifié les revendications maritimes chinoises de « entièrement illégales ». L’Australie s’est opposée à l’affirmation de la Chine selon laquelle ses revendications de souveraineté sur les îles des Paracels et Spratly étaient « largement reconnues par la communauté internationale ». La Malaisie a fermement rejeté la « ligne en neuf traits » de la Chine tout en déclarant que la revendication chinoise sur les eaux maritimes dans la mer de Chine méridionale n’aient aucune fondement en droit international.

« La bataille des notes diplomatiques 2.0 » a encouragé les Etats réclamants à démontrer clairement leur position à l’égard de l’application de la CNUDM, des limites des revendications maritimes, du respect de la sentence arbitrale de 2016 et d’une possible solution finale acceptable. Cette évolution divise des Etats réclamants en groupes distincts ayant les positions opposées. Alors que la plupart des Etats – qu’ils soient des Etats réclamants ou non – considèrent la CNUDM comme la seule base juridique pour déterminer et régler les revendications maritimes, la Chine continue de mélanger la revendications des droits historiques avec le statut juridique complet pour les éléments dans la mer de Chine méridionale.

La position chinoise relative à la mer de Chine méridionale est de plus en plus isolée. La déclaration du président de la 36ème Sommet de l’ASEAN du 26 juin 2020 a exprimé une préoccupation profonde envers les « activités de réclamation de terre », les « récents développements » et les « graves incidents » dans la région. Les autres parties n’accepteront pas toute interdiction de pêche unilatérale ou la mise en œuvre du projet chinois de « Blue Sea » dans la mer de Chine méridionale. Les Etats riverains sont plus conscients de la nécessité d’exprimer clairement leur mécontentement à l’égard des comportements agressifs de la Chine au lieu de garder le silence au nom d’une paix fragile. Le Philippines ont déclaré que la sentence arbitrale de 2016 n’était pas négociable. Même la Malaisie a abandonné sa « diplomatie du silence » traditionnelle pour rejeter les revendications maritimes de la Chine sur la mer de Chine méridionale, y compris les questions maritimes et de souveraineté qui ne sont pas encore réglées par le droit international. La note diplomatique de la Malaisie va donc plus loin que la sentence arbitrale de 2016.

« La bataille des notes diplomatiques 2.0 » a ravivé l’importance durable de la sentence arbitrale de 2016. L’ordre fondé sur les règles dans la mer de Chine méridionale sera maintenu lorsque le sentence sera pleinement respecté par les Philippines et la Chine et que le droit international, y compris la CNUDM sera respecté par tous les Etats. Par la suite, tous les pays, à l’intérieur et à l’extérieur de la région, peuvent profiter des bénéfices du fait que la mer de Chine méridionale constitue une mer de paix, de stabilité et de prospérité./.

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a livré vendredi 19 juin l’un de ses réquisitoires les plus sévères contre la Chine, en exhortant l’Europe à choisir clairement « la liberté » plutôt que la « tyrannie » que veut lui imposer cet État « voyou ».  Photo : AFP/VNA/CVN

 

« Les États-Unis se félicitent de l’insistance des dirigeants de l’ASEAN à ce que les différends en Mer de Chine méridionale soient réglés conformément au droit international, dont la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM) » a écrit le secrétaire d’État américain Mike Pompeo dans son tweet. Photo : Net/CVN

 

Le secrétaire d’État américain Michael R. Pompeo a affirmé lundi 13 juillet que les revendications de Pékin sur les ressources offshore dans la plus grande partie de la mer de Chine méridionale (Mer Orientale) sont complètement illégales, de même que sa campagne d’intimidation pour les contrôler. Photo : AFP/VNA/CVN

 

L’Australie continuera de soutenir fermement la libre navigation en Mer Orientale, a déclaré le Premier ministre australien Scott Morrison le 16 juillet. Photo : AFP/VNA/CVN

 

Le ministère des Affaires étrangères du Brunei a publié lundi 20 juillet une déclaration sur la question de la mer de Chine méridionale (mer Orientale), qui a réaffirmé son engagement à maintenir la paix, la stabilité et la prospérité dans la région.

 

Les revendications maritimes de la Chine ne sont pas valables au regard du droit international, selon la Déclaration conjointe sur les consultations ministérielles Australie – États-Unis (AUSMIN) 2020 publiée mardi 28 juillet. De gauche à droite : la ministre australienne des Affaires étrangères Marise Payne, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo, et le secrétaire à la Défense américain Mark Esper, le 28 juillet à Washington. Photo : AFP/VNA/CVN

 

À coups de dragage et de remblais, la Chine transforme des récifs coralliens en ports, pistes d’atterrissage et infrastructures diverses. Photo : AFP/VNA/CVN

 

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