L’émergence des sociétés militaires privées : la terre à l’heure du néolibéralisme

    La dernière tentative de coup d’État contre le président du Venezuela Nicolas Maduro n’a pas été menée par une agence liée au gouvernement américain, mais par une société militaire privée, basée aux États-Unis. Elle est symptomatique de la montée en puissance fulgurante de ces acteurs sur l’échiquier géopolitique.

Plus d’un million de personnes travaillent aujourd’hui pour une société militaire privée dans le monde. Blackwater (américaine) en Irak ou Wagner (russe) en Libye [1] : ces compagnies ont pignon sur rue en zone de conflits.

La privatisation de missions habituellement prises en charge par l’État ne touche dorénavant plus seulement le secteur économique, mais également les questions de défense et la gestion de la politique extérieure. La libéralisation des structures étatiques a rendu possible l’éclosion de ces sociétés. Censées combler les défaillances des armées, elles prennent aujourd’hui une importance croissante dans la conduite des affaires militaires.

LES RAISONS DE CETTE EXTERNALISATION

Le recrutement s’explique d’abord par la symbolique qui ressort de la réputation et de l’image de ces entreprises. Lors d’un conflit chaque mort de soldat est l’apport d’une nouvelle pierre à l’édifice des opposants de la guerre. Plus les victimes sont nombreuses, plus les gouvernants doivent gérer une opinion publique qui leur devient défavorable. A contrario, la mort de contractants n’est pas comptabilisée officiellement. La capture ou le décès de mercenaires en zone de guerre est un coût bien plus tolérable pour eux en terme d’image publique.

En plus de cela, les bavures et les éventuels cas de corruption sur le sol étranger leur sera bien moins reproché (ou seulement par ricochet). Ils peuvent donc s’ériger comme des parangons de vertus tout en menant des missions en sous-main dans le monde entier. Cette présence militaire informelle leur permet de conserver un ancrage dans des zones de conflits, dont ils se sont pourtant officiellement retirés.

La deuxième raison touche à l’impératif de rentabilité. Externaliser et donc déléguer des opérations est bien moins coûteux pour les États. Comme l’évoquait Sami Makki dans le Monde Diplomatique, le département de la défense américain estimait ainsi, en 2002, « qu’il pourrait économiser plus de 11 milliards de dollars entre 1997 et 2005 grâce à l’externalisation » [4]. Des sommes colossales donc, qui achèvent de convaincre nombre de gouvernements. L’évolution de ces organisations et la multiplication de leurs missions rendent même ces économies bien plus importantes aujourd’hui.

UNE EXPLOSION DU RECOURS AUX SOCIÉTÉS MILITAIRES PRIVÉES

Après l’Irak, on observe une évolution progressive de ces entreprises. En se développant, elles vont assurer la prise en charge d’opérations toujours plus variées : interventions anti-pirates en Somalie, lutte contre le terrorisme au Sahel, opérations humanitaires… Suivant les Anglo-saxons, les autres grandes puissances vont se décider également à investir massivement dans ce type de compagnies. Des sociétés chinoises se sont par exemple implantées en Afrique, ce sera le cas pour la Crimée ou plus tard la Libye pour les Russes… (France Info a d’ailleurs tenté d’établir un bref état des lieux des opérations de sociétés militaires privées en Afrique [8]). Le nombre de contractants sur les zones de conflit n’est plus anodin. Au début de la guerre en Irak en 2003 on pouvait comptabiliser 1 contractant privé pour 10 membres de l’armée américaineet ce sera même le double quatre ans plus tard. En terme de comparaison le ratio n’était que de 1 pour 100 lors de la première guerre du Golfe.

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