“We must protect our borders from the ravages of other countries making our products, stealing our companies, and destroying our jobs. Protection will lead to prosperity and strength” (Donald Trump, Inaugural Address, January 20, 2017)
“Today, I worry that we live in two Americas: one ‘Red’ and one ‘Blue’—and each side despises the other” (Bernard Goldberg, America’s Bitter Divide is the True Existential Threat, The Hill, February 9, 2020).
Par Arezki Ighemat *
La devise de Trump est “Divide and Conquer» (diviser pour régner). Il applique cette devise aussi bien à l’intérieur des Etats-Unis qu’à l’extérieur dans ses relations avec le reste du monde. Selon un grand nombre d’analystes politiques, aucun autre président américain n’a «réussi» à diviser l’Amérique et le monde avec autant d’audace et d’intensité. Pour réussir son pari, Trump utilise deux principaux slogans. Le premier – «Make America Great Again (MAGA)» – sert à diviser le pays à l’intérieur. Le second slogan – «America First» – est utilisé pour diviser le monde et le dominer. Par le premier slogan, Trump veut faire croire aux Américains que l’Amérique a perdu sa toute-puissance d’antan et qu’il faut donc lui faire retrouver son âge d’or. Par le deuxième slogan, il veut faire croire à qui veut l’entendre que les intérêts des Etats-Unis n’ont pas été suffisamment défendus par les gouvernements précédents et qu’il est donc temps que ces intérêts passent en priorité par rapport à ceux des autres nations avec lesquelles les Etats-Unis ont des relations économiques. L’objet du présent article est d’analyser comment ces deux slogans sont mis en pratique par Trump pour réaliser ses desseins hégémoniques et comment ils sont perçus par les Américains et le reste du monde.
“Make America Great Again” ou la creation des “(Dis)-United States of America”
De nombreux analystes politiques considèrent que l’Amérique est plus que jamais divisée entre : les gens de couleur et les Blancs, les Républicains et les Démocrates, les immigrants et les indigènes, les riches et les pauvres, les Chrétiens et les autres religions, la presse favorable («True» press) et non favorable («Fake» press). S’agissant de la dichotomie entre gens de couleur—Noirs, Hispaniques et Asiatiques—et Blancs, c’est surtout le racisme entre Noirs et Blancs qui est le plus visible, comme en témoignent les évènements récents de Minneapolis (Minnesota) avec le meurtre de George Floyd et celui de Rayshard Brooks à Atlanta (Georgia). Si le racisme n’est pas quelque chose de nouveau aux Etats-Unis, il s’est grandement accentué, selon beaucoup d’observateurs, après l’arrivée au pouvoir de Trump. En effet, Trump ne condamne jamais les assassinats de noirs par les Blancs. Par exemple, lors des évènements de Charlotesville (Virginia) organisés par des suprémacistes blancs et néo-nazis sous la bannière du mouvement appelé «Unite the Right Rally» les 11 et 12 août 2017 et qui a conduit à 5 décès (3 du côté des protestataires et 2 du côté des forces de l’ordre) ainsi que 33 blessés, Trump n’a pas condamné le groupe organisateur. Au lieu de cela, il se contente de dire «I think there is blame on both sides. You had a group on one side that was bad and you had a group on the other side that was also violent” (Il y a lieu de blamer les deux côtés. Vous avez d’un côté un groupe de mauvais gars et de l’autre un groupe de gens violents). Lors des meurtres plus récents de George Floyd et de Rayshard Brooks, Trump n’a pas non plus condamné les policiers coupables. A l’inverse, il prend toujours la défense des policiers. Cela a fait réagir plusieurs personnalités américaines politiques et des arts comme George Clooney, la star américaine du cinéma, qui a déclaré «Racism is America’s pandemic. It infects us, and in 400 years, we’ve yet to find a vaccine” (Le racisme est la pandémie de l’Amérique. Elle nous infecte et, en l’espace de 400 ans, on en est encore à chercher un vaccin contre cette pandémie) (George Clooney, Occupy Democrats, Facebook post, June 2, 2020). Le deuxième schisme qui a été accentué par Trump est celui entre Républicains et Démocrates.
Ce schisme s’était dernièrement manifesté lorsque la Chambre des Représentants (à majorité démocrate) avait «impeached» Trump, l’accusant de deux charges très lourdes (abus de pouvoir et obstruction de la justice) et où le Sénat (à majorité républicaine) avait voté contre, blanchissant complètement Trump de ces deux charges. Trump ne rate aucune occasion, dans ses tweets et rallyes, pour critiquer et dénigrer les démocrates, allant jusqu’à déclarer que «A vote for any Democrat in 2020 is a vote for the rise of radical socialism and the destruction of the American Dream—frankly, the destruction of our country” (Tout vote pour un démocrate en 2020 est un vote en faveur de la montée du socialisme radical et de la destruction du rêve américain—et plus encore, de la destruction de notre pays) (voir Bill Schneider, Donald Trump: The Great Divide, The Hill, July 28, 2019). Une telle déclaration—qui est contraire aux principes démocratiques inscrits dans la Constitution—ne peut qu’encourager et accentuer la division qui existe déjà entre les deux partis. Ceci a fait dire à Madeleine Albright, ancienne Secrétaire d’Etat de Bill Clinton, «President Trump is the most un-American, un-democratic president in American history. He thinks he’s above the law. He has no sense of empathy and no moral compass” (Le president Trump est le president le plus non-Américain et le plus non-démocratique de l’histoire de l’Amérique. Il pense qu’il est au-dessus de la loi. Il n’a aucun sens de la compassion et de la morale) (Madeleine Albright, Fascism : A Warning, HarperCollins Publishers, 2019). Le troisième type de division que Trump a encouragé est celle entre immigrants et «indigènes». Le problème est qu’il ignore—ou feint d’ignorer—que l’Amérique est «a nation of immigrants». La phrase a été pour le première fois utilisée par J.F. Kennedy dans son fameux speech devant l’«Anti Defamation League» en 1963. Kennedy explique que «C’est un grand privilège d’être un citoyen d’une grande république, de réaliser que nous sommes tous des descendants de 40 millions de gens qui ont quitté d’autres pays, d’autres scènes familières, pour venir ici aux Etats-Unis construire une nouvelle vie, et trouver une opportunité pour eux-mêmes et leurs enfants». Rappelons que la devise des Etats-Unis, telle qu’adoptée en 1776, et qui est inscrite sur le sigle américain avec l’aigle au milieu et les 13 raies verticales «rouge et blanc», est «E. Pluribus Unam» (voulant dire «De plusieurs, on a fait un»). En d’autres termes, la phrase peut être traduite «Nous venons de plusieurs endroits pour former une nation. Cette devise fait référence aux 13 colonies qui ont formé la nation américaine au départ. Rappelons au passage que créateur de ce sigle est l’artiste et philosphe Swisse-Américain Pierre Eugène du Simitière (voir Theotis Robinson, Donald Trump’s Election Strategy is Set on Dividing America, July 26, 2020).
Contrairement donc à cette devise, Trump a tout fait et continue de faire pour rendre la citoyenneté américaine de plus en plus difficile à acquérir. Un autre domaine où Trump a accentué la division est le domaine économique, entre riches et pauvres. Depuis qu’il est arrivé, il n’a fait que prendre des mesures en faveur des entreprises américaines, notamment les plus grandes d’entre elles. Il a réduit leurs taxes à plusieurs reprises. Et, comme lui et sa famille sont propriétaires d’une grande entreprise dans le domaine de la construction et du loisir, il en sera bien sûr le premier bénéficiaire. C’est ce que les économistes et politiques appellent «Crony Capitalism» (Capitalisme des amis). Elizabeth Warren, ex-candidate aux élections présidentielles de 2020, définit ce capitalisme comme suit «Nous pouvons le définir comme le retour au capital généré non pas par l’innovation et la prise de risque, mais plutôt par le truchement d’une sainte alliance entre les businessmen et les classes politiques. Au lieu d’une concurrence authentique, ils utilisent le pouvoir de l’Etat pour légiférer, réguler, accorder des permis, des licences gouvernementales, des réductions spéciales de taxes et autres avantages en vue de s’enrichir les uns les autres» (Elizabeth Warren, It’s Not Capitalism, it’s Crony Capitalism, by Barry Ritholtz, Ritholtz.com, March 1, 2019). A l’opposé, Trump a mis fin au programme dit «ObamaCare» qui a permis à 40 millions d’Américains à revenus faibles d’avoir une assurance-maladie à bon prix. Comme résultat, 11% de la population américaine se retrouvent, du jour au lendemain, sans assurance-maladie. Trump a divisé aussi l’Amérique sur la base des religions. En tant que suprémaciste, il considère que le Christianisme est la religion favorite. A l’opposé, il considère la religion musulmane comme une religion créatrice de problèmes comme le terrorisme, l’intolérance, etc. Il a proposé, par exemple, un «travel ban» dans le but d’interdire aux citoyens de sept pays musulmans d’entrer aux Etats-Unis. Il a aussi en ligne de mire un groupe de femmes de confession musulmane membres de la Chambre des Représentants parce qu’elles critiquent sa politique d’immigration. Il a même déclaré «They can leave if they are not happy in this country” (elles peuvent quitter les Etats-Unis si elles ne sont pas heureuses de vivre ici). A propos de l’Islam, Trump a déclaré «I think Islam hates us. There is a tremendous hatred there…We have to get at the bottom of it” (Je pense que l’Islam nous déteste. Il y a beaucoup de haine dans cette religion…Nous devons aller au fond de ce problème). (Voir CBS News, December 6, 2015). D’un autre côté—parce qu’une partie de sa famille est de confession juive et qu’un de ses plus grands amis est le Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahu—il place la religion juive au même niveau que la religion chrétienne et considère les gens de confession juive comme des amis. Enfin, un autre domaine où Trump a semé la division en Amérique est celui de la presse et de la liberté d’expression. Alors que la liberté de presse est protégée par le First Amendment de la Constitution, Trump fait la distinction entre la presse qui lui est favorable et celle qui lui est défavorable. Il qualifie cette dernière, tantôt de «Fake News», tantôt de «opposition party», tantôt de «true enemy of the people». Il a aussi supprimé les conférences de presse quotidiennes de la Maison Blanche qu’il dirige désormais lui-même. Pendant ces conférences de presse, il s’attaque particulièrement à certains journalistes de certaines chaînes de télévision comme CNN, CNBC, CBS et des plus grands journaux américains comme le New York Times et le Washington Post. Il ira jusqu’à déclarer «Je ne les tuerai jamais mais je les hais…Certains sont de grands menteurs et des gens dégoûtants» (American Civil Liberty Union, ACLU, October 13, 2017). A l’opposé, il vante les chaînes qui le flattent comme Fox News.
«America First» ou la création de «(Dis)-United Nations»
Dans le domaine de la politique extérieure, Trump applique la devise «America First» (L’Amérique D’abord). Cette politique —qui est apparue dans la période de l’entre-deux-guerres (1918-1939) et qui était initiée par le «America First Committee» – a été reprise en 2016 par Donald Trump comme son slogan de campagne. Elle prône les notions de nationalisme, exceptionnalisme, isolationnisme, unilatéralisme et protectionnisme. Dans son discours inaugural du 20 janvier 2017, Trump a déclaré «From this day forward, a new vision will govern our land. From this moment, it’s going to be “America First” (A partir de ce jour, une nouvelle vision gouvernera notre terre. A compter de ce moment, ce sera ‘l’Amérique d’abord. Le slogan «America First» remonte au nativisme des années 1840-1850 et est basé sur une politique anti-immigrants. Selon cette idéologie, tous ceux qui ne sont pas «Blancs» et ne sont pas nés aux Etats-Unis ne doivent pas être considérés comme des citoyens à part entière. Ce slogan s’adresse au segment de la population blanche qui pense qu’elle a perdu sa puissance et dominance d’antan. Il rappelle un autre slogan utilisé auparavant et portant le nom de «100% American» qui signifie 100% de sang anglo-saxon. Un slogan similaire a également été utilisé dans le même sens : le «One-drop-Rule», qui est une règle raciste signifiant qu’une goutte de sang noir fait que quelqu‘un est Noir et donc sujet à l’esclavage. Tous ces slogans sont aujourd’hui cristallisés dans la formule «America First». Celle-ci vise trois grands domaines : la réforme des relations commerciales avec le reste du monde, la révision des règles gouvernant les organisations internationales et les relations privilégiées que Trump a avec certains pays.
Concernant les relations commerciales, quatre objectifs principaux ont été fixés par Trump : rééquilibrer les relations commerciales des Etats-Unis avec le reste du monde, la renégociation des accords commerciaux entre les Etats-Unis et le monde, le respect des règles américaines en matière de commerce extérieur, et la défense des intérêts américains au sein des organisations internationales. S’agissant du premier objectif — rééquilibrer les relations commerciales en relation avec la sécurité nationale — Trump déclare que la politique commerciale des Etats-Unis doit être basée sur ses intérêts nationaux et doit être en harmonie avec sa stratégie en matière de sécurité nationale. Trump veut mettre fin aux traités commerciaux qui, selon lui, rendent les concurrents plus forts ou rendent les Etats-Unis plus faibles. Pour réaliser cet objectif, il met en application le deuxième élément de sa doctrine : la renégociation de certains accords commerciaux internationaux qui, selon lui, sont «périmés» et «non équilibrés». Il veut des accords qui soient plus équilibrés — ce qui, pour Trump, veut dire favorables aux Etats-Unis — et des accords qui créent de l’emploi pour les Américains. C’est pourquoi il a renégocié les accords comme le traité dit NAFTA (North American Trade Agreement) signé avec le Canada et le Mexique et qui s’appelle désormais USMCA (United States-Mexico-Canada Agreement). Déjà, pendant sa campagne électorale, Trump avait déclaré, parlant de NAFTA «We will either negociate it or we will break it» (Nous allons soit le renégocier, soit le rompre» (voir Mark Thomas, Is Donald Trump right to call NAFTA a disaster ?, CBS News, October 5, 2015). L’autre traité international qu’il a rompu est le TPP (Trans-Atlantic Partnership Agreement) passé par Obama le 4 février 2016 entre les Etats-Unis et les pays suivants : Australie, Brunei, Canada, Chili, Japon, Malaisie, Nouvelle Zélande, Pérou, Singapour, Vietnam. Lors de sa campagne électorale, Trump a qualifié ce traité de «insanity». Le 23 janvier 2017, Trump s’est retiré de ce traité sous prétexte de protéger les travailleurs américains de la concurrence des pays où les salaires sont considérés trop bas. Le troisième objectif sous-jacent dans la doctrine «America First» est le respect des règles américaines en matière de commerce extérieur. Trump veut que les lois américaines en matière de commerce international soient appliquées de façon équitable—entendez par là qui soient favorables aux Etats-Unis. Une de ces lois est le «Trade Act de 1974. Selon la section 301 de cette loi, le président peut prendre des «retaliatory actions» (actions de représailles), incluant l’imposition de tarifs douaniers et de quotas «si un pays partenaire dénie aux USA son droit ou si ce pays prend des mesures injustifiées, non raisonnables et discriminatoires». Un autre objectif de la doctrine «America First» consiste à défendre les intérêts américains au sein de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce). Depuis qu’il est arrivé au pouvoir, Trump n’a pas arrêté de critiquer l’OMC. Il considère que cette organisation n’est plus «able to keep up with modern economic challenges» (elle n’est pas en mesure de s’adapter aux défis économiques modernes). Pour cela, pense-t-il, elle doit être réformée. Une des mesures qu’il a commencé à prendre dans cette direction est de bloquer la nomination des membres devant participer aux discussions devant aboutir à la réforme de l’organisation. Il a aussi menacé d’imposer des tarifs entre 15 et 35% sur les produits importés par les USA. Et lorsque son entourage lui a dit que cela est contraire aux règles de l’OMC, il a déclaré «Then, we’re going to negotiate or we’re going to pull out» (dans ce cas, nous allons soit négocier, soit nous retirer) (Voir Vicki Needham, Trump suggests leaving WTO over import tax proposal, The Hill, July 24, 2016). La deuxième grande réforme contenue dans la devise «America First» est la restructuration des organisations internationales. Parmi ces organisations, trois sont particulièrement ciblées : l’ONU, l’UNICEF et l’OTAN. A propos de l’ONU, Trump a déclaré «They are weak, incompetent and not a friend of democracy… of freedom… of the United States… and of Israel” (L’ONU est faible, incompétente, et n’est pas une amie de la démocratie…de la liberté…des Etats-Unis…et d’Israel). Concernant l’UNICEF et l’OTAN, il menace, et a commencé à mettre cette menace à exécution, de réduire la quote-part financière des Etats-Unis à ces deux organisations. A propos de l’OTAN, Trump a indiqué que «NATO costs us a fortune, and yes, we’re protecting Europe with NATO, but we’re spending a lot of money” (L’OTAN nous coûte une fortune, et oui, nous protégeons l’Europe, mais nous dépensons beaucoup d’argent). Trump reproche aux membres de l’OTAN de ne pas payer les 2% de leur PNB à l’organisation alors que ses membres affirment le contraire.
La troisième grande caractéristique de «America First» est constituée par les relations «privilégiées» que Trump entretient avec certains pays à régimes non démocratiques, pour ne pas dire dictatoriaux et où les droits de l’homme ne sont pas respectés. Ces pays sont : la Russie, la Corée du Nord, l’Arabie Séoudite et Israel. La question que se posent beaucoup d’observateurs politiques est : pourquoi Trump entretient-il des relations privilégiées avec des pays où il y a un déficit démocratique? Pour ce qui est de la Russie, alors que les analystes et les services d’intelligence américains ont prouvé qu’elle est intervenue dans les élections de 2016 pour favoriser Trump au dépend de Hillary Clinton, Trump a déclaré, lors de sa rencontre à Helsinki avec Putin : «Le Président Putin m’a dit que son gouvernement n’est pas intervenu dans les élections de 2016 et je ne vois pas de raison de ne pas le croire sur paroles». De façon similaire, il a déclaré que les relations avec le leader Nord Coréen Kim Jong Un sont «excelllentes». Pour ce qui est de l’Arabie Séoudite, Trump qualifie les relations avec Mohamed bin Salman «d’exceptionnelles» et cela en dépit de l’assassinat de Jamal Khashoggi, le journaliste Américano-Séoudien, prétendument par les services secrets Séoudiens le 2 octobre 2018 à Istamboul, Turquie. Trump justifie les relations privilégiées avec l’Arabie Séoudite en disant «Saudi Arabia is a great ally and has agreed to spend and invest 450 billion in the USA” (L’Arabie Séoudite est un grand allié et a accepté de dépenser et d’investir 450 milliards de dollars aux Etats-Unis). Cette déclaration a soulevé des réactions très fortes de la part des membres du Congrès américain parmi lesquels celle du Sénateur Ron Paul, pourtant favorable aux thèses républicaines, qui a déclaré «I am pretty sure this statement is ‘Saudi Arabia First’, not ‘America First’» (Je suis presque convaincu que cette déclaration est plus «L’Arabie Séoudite d’abord» que «L’Amérique d’abord») (voir Jonathan Golberg, Trump has an odd definition of «America First», Tribune Content Agency, November 22, 2018). L’autre pays avec lequel Trump a des relations de faveur est Israël. Tout le monde sait qu’Israël a toujours joui aux Etats-Unis d’un statut privilégié et ce quelle que soit l’idéologie politique du président au pouvoir. Cependant, Trump montrera, par ses paroles et actes, qu’il porte Israël dans son cœur. L’un de ses actes les plus fracassants et inquiétants en même temps a été la décision qu’il a prise le 6 décembre 2017 de reconnaître officiellement Jérusalem comme la nouvelle capitale d’Israël et de transférer, en conséquence, l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem.
Conclusion
Sur la base de ce qui a été dit ci-dessus, il est clair que Donald Trump a réussi à diviser non seulement les Etats-Unis mais aussi le monde dans son ensemble. Les devises qu’il a utilisées sont «Make America Great Again» pour ce qui de la division des Etats-Unis et «America First» pour ce qui est de la division du reste du monde. Ces deux devises peuvent être rattachées à la devise générale classique utilisée par les empereurs et les dictateurs, à savoir «Divide et impera» (diviser pour régner). En raison du malaise et de l’embarras qu’il a créés aussi bien à l’intérieur des Etats-Unis qu’à l’extérieur, Trump est, selon certains historiens et analystes politiques, de loin le président le plus mal-aimé (pour ne pas dire le plus haï) de tous les présidents que les Etats-Unis aient eus. Même les Bush (père et fils)—que beaucoup d’Américains et de citoyens du reste du monde ont largement récusés, notamment pour leur implication dans la guerre du Golfe et leurs mensonges concernant la question des armes chimiques en Irak—paraissent en quelque sorte des «anges» à côté de Trump. La grande question qui se pose aujourd’hui aux Etats-Unis et dans le monde est :«Trump va-t-il gagner l’élection de novembre 2020 et obtenir un second mandat de 4 autres années ? Pour beaucoup d’analystes, ce «scénario-catastrophe» aurait pour conséquence de diviser davantage encore les Etats-Unis et semer un plus grand trouble dans le monde. Pour certains, en dépit des déboires qu’il a eus—«l’impeachment de Trump le 18 décembre 2019, et plus récemment, la pandémie, la crise économique et la montée du racisme—Trump a encore une chance de gagner en 2020, et cela en dépit de tous les efforts que font les démocrates pour le déloger et éviter le «nightmare» (cauchemar) d’un nouveau mandat pour le président actuel. L’autre question est : «Les crises récentes—pandémie, récession économique et montée du racisme—vont-elles avoir raison de Trump et sa politique divisionniste ?». Car un autre mandat de Trump ferait courir le risque que souligne Bernard Goldberg dans la citation indiquée au début de cet article «Today, I worry that we live in two Americas, one ‘Red’ and one ‘Blue’—and each side despises the other» (Aujourd’hui je crois que nous vivions dans deux Amériques, l’une rouge et l’autre bleue où chacune déteste l’autre).
- Arezki IGHEMAT, Ph.D en économie. Master of Francophone Literature (Purdue University, USA)