Algérie / Le 8 mai institué journée nationale de la mémoire

02.06.2020

  par R.N.

Le Conseil des ministres, réuni dimanche, par visioconférence, sous la présidence présidée par M. Abdelmadjid Tebboune a examiné et approuvé l’exposé présenté par le ministre des Moudjahidine et des Ayants-droit sur l’avant-projet de loi portant institution de la Journée nationale de la mémoire le 8 mai, en application de la décision du président de la République à l’occasion de la commémoration du 75e anniversaire des massacres du 8 mai 1945. Dans son intervention subséquente, le président de la République s’est incliné à la mémoire des martyrs de la glorieuses Guerre de libération nationale et de la Résistance populaire depuis l’occupation coloniale de notre pays, soulignant que l’intérêt accordé à la mémoire nationale sous tous ses aspects n’était pas motivé par des considérations conjoncturelles mais qu’il s’agissait d’un devoir national sacré ne tolérant aucun marchandage et qui restera en tête des préoccupations de l’Etat afin d’immuniser la personnalité nationale, par fidélité aux martyrs de la glorieuse Révolution de Novembre et aux moudjahidine.

Les Algériens sont en droit d’avoir une Journée nationale de la mémoire, a dit le Président, soutenant que notre histoire et notre fierté nationale ne sauraient faire l’objet d’aucun marchandage. Soulignant que l’amour de la patrie, l’attachement à la Déclaration du 1er Novembre et la vénération des martyrs constituent le dénominateur commun entre les Algériens, il a appelé à hisser le drapeau national au fronton de toutes les maisons lors des occasions historiques. Ainsi, le Président a instruit le ministre de la Communication à l’effet d’accélérer les procédures nécessaires au lancement d’une chaîne de télévision de haut niveau et de renommée internationale, consacrée à la mémoire nationale.

Il a salué à cette occasion tous les pays frères et amis qui ont apporté aide et assistance à la glorieuse révolution armée, citant, notamment en Europe l’Allemagne fédérale et les citoyens français qui se sont soulevés contre la politique coloniale de leurs gouvernements et sont morts pour cette cause ou ont été torturés par les tortionnaires du colonisateur. A ce titre, M. Tebboune a instruit le ministre des Moudjahidines et des Ayants-droit d’accorder davantage d’intérêt à tous ceux qui ont aidé l’Algérie dans sa révolution armée et de rétablir des liens directs avec eux.


Au bout de la logique mémorielle

par Abdelkrim Zerzouri

La question mémorielle revient à l’ordre du jour dans l’agenda du gouvernement. Reste à se demander si le sujet tiendra la route solidement ? Certaines questions sont réactualisées depuis près de quarante ans, comme la demande des archives, d’autres viennent et reviennent au gré des humeurs politiques, pour finir par se tasser, sans ne jamais aboutir à rien, à l’enseigne de la loi portant criminalisation du colonialisme français, proposée au mois de février 2009 par 125 députés, et autour de laquelle le débat n’est point épuisé jusqu’à ce jour, ainsi que la récupération des crânes des martyrs exposés au musée de l’Homme de Paris et le dossier des disparus de la guerre. Faisant toute une histoire de cette question mémorielle. Il est nécessaire de comprendre que les dossiers mémoriels ont un caractère passionnel des deux côtés de la rive méditerranéenne, et que la chape de plomb qui recouvre ce puits de l’histoire reste encore et toujours pesante. Et les contours des réponses à cette question mémorielle, qui fait naître la controverse à chaque fois qu’on l’évoque, n’ont jamais été complétés, parfois à cause de la démarche algérienne, elle-même, qui n’arrive pas à réaliser ses desseins par manque de clairvoyance et de volonté politique, et dans d’autres circonstances, toute approche dans ce sens est torpillée par les nostalgiques de l’Algérie française. Riche de cette expérience, le gouvernement algérien emprunte une nouvelle conduite, contre laquelle on ne peut qu’avaler sa contrariété, soit l’entame de la construction de cette mémoire sans rien solliciter de l’autre partie. Le dernier Conseil des ministres en a, en effet, tracé les grandes lignes, avec une clarté, un dévouement et une détermination qui laissent entendre que, cette fois-ci, l’initiative est sérieuse et qu’elle sera constante. Désormais, tiendra à le souligner dans cet ordre d’idées le président de la République, il s’agit d’un devoir national sacré qui ne tolère aucun marchandage et qui restera en tête des préoccupations de l’Etat.

A commencer par l’institution de la Journée nationale de la mémoire le 8 mai, qui viendra rappeler chaque année les atrocités commises par le colonialisme français. Et le président Tebboune tiendra à mettre les points sur les «i» en soutenant que notre histoire et notre fierté nationale ne sauraient faire l’objet d’aucun marchandage. Ainsi que le lancement envisagé d’une chaîne de télévision thématique de haut niveau consacrée à l’« Histoire» de l’Algérie.

Et il faut bien croire dans ce nouvel état d’esprit que la France a tout intérêt à faire preuve de coopération dans le règlement des grands dossiers liés à la mémoire, pour participer à l’instauration de relations bilatérales normalisées, comme tiennent à le souligner à chaque occasion les autorités algériennes. Le président français, Emmanuel Macron, qui a qualifié la colonisation française de «crime contre l’humanité», doit aller au bout de la logique mémorielle.


07.07.2018

   >> Mémoire nationale

  Par Nouredine Benferhat – La commémoration est le moyen de transmission d’un patrimoine qui implique l’idée de quelque chose qui nous a été transmise par ceux qui nous ont précédés.

La commémoration, «c’est l’histoire de la mémoire nationale, de ses rites, de ses mythes», selon Pierre Nora. C’est une reconnaissance de la grandeur de ceux qui ont produit l’objet du patrimoine. C’est une construction du passé à travers les lieux qui sont constitués des symboles les plus divers de la mémoire collective nationale ; des guerres puniques à Saint-Augustin, de l’islamisation du pays à la période ottomane, de la résistance à l’occupation coloniale à la Guerre de libération, en passant par les camps de regroupement.

La commémoration consiste à réveiller l’engouement pour le passé à travers les livres d’histoire, les documentaires-fiction, les musées et les mémoriaux qui consistent à rendre hommage aux grandes figures de la nation et à célébrer les grandes victoires. «Les lieux de mémoire s’attachent moins aux discours tenus par les morts sur les vivants qu’à celui que tiennent les vivants sur les morts.» (Mona Ozouf)

La commémoration, ce sont aussi les symboles matérialisés par les manifestations et les objets de vénération où s’incarnent la mémoire nationale et le lien avec les hommes du passé. Les grands événements historiques – 1er Novembre, 5 Juillet, etc. – doivent être célébrés, de même que les batailles de l’Emir Abdelkader, de Bouamama, d’El-Mokrani, etc. Comme il faut rendre hommage aux personnages historiques et aux grands hommes de la culture et du savoir.

L’Algérie doit instituer des Journées du souvenir matériel et immatériel pour incarner cette mémoire nationale, car la commémoration est un devoir de mémoire.

En effet, la mémoire collective est un élément essentiel de l’identité, elle est liée à la construction nationale. Elle est le pivot central de l’existence sociale et la seule manière de faire triompher l’esprit sur le néant et, par-là, d’établir la chaîne des générations. Elle participe de la construction de l’identité sociale. «La mémoire ne cherche à sauver le passé que pour servir au présent et à l’avenir.»

Nous assistons depuis quelques années à une multiplication des mémoires – régionale, religieuse – et à une multiplication des témoignages. Les témoins cherchant à légitimer leur propre vision du passé sans être soumise à la critique classique du témoignage.

Il devient urgent de se réapproprier la mémoire au-delà des fidélités et des mémoires particulières, particulièrement la mémoire collective religieuse dont les gourous cherchent à imposer une autre lecture de l’histoire de la nation. Comme le dit le sociologue des mémoires Maurice Halbwachs, «la mémoire religieuse n’admet aucune autre mémoire».

Dans cette période où le citoyen a besoin de repères, il devient urgent de déterminer la matrice constitutive de l’espace politique nationale et de valoriser les sciences humaines en insistant sur le rôle de l’historien.

L’historien a un rôle primordial dans sa mission de la construction de la conscience historique et sa participation de la construction de la mémoire collective sinon des mythes. Mais aussi dans l’analyse de la façon dont le passé n’a pas réussi à se cristalliser dans le présent, en alliant la fonction civique et éthique dans une dialectique passé-présent, le passé servant à éclairer l’action à entreprendre.

N. B.


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