Les États-Unis d’Amérique – Amis ou Ennemis du Monde Musulman ?

                  05.06.2020

   par ZZZ.

La question ainsi posée semble abrupte, manichéenne, voire simpliste, les États n’ayant pas d’amis mais des intérêts. Cependant quand on se rappelle de la phrase-choc de l’ex-Secrétaire d’État Hillary Clinton devant le Congrès US à propos du groupe terroriste Al Qaeda : « nous l’avons créé »[1], et lorsque le candidat Trump accuse en 2016 la même Hillary Clinton et le président Obama d’être à l’origine de la bande sanguinaire Daesh[2], le sujet mérite réflexion d’autant plus que des pseudo-experts soutiennent sans rire que l’Amérique est islamophile. Pour y voir plus clair, je me propose de définir les concepts déterminants que sont l’Islam, l’islamisme et le wahabisme avant de passer en revue la politique étrangère états-unienne récente et trancher ce débat.

    ISLAM, islamisme, wahabisme, halte à la confusion savamment entretenue !

Je suis certain qu’une grande partie des non-Musulmans confondent allègrement Islam, islamisme et wahabisme. Je ne les en blâme pas tant les manipulateurs professionnels de l’opinion maintiennent sciemment et perfidement cette confusion. L’Islam est une religion monothéiste et abrahamique qui reconnait tous les prophètes d’Adam à Mohamed (désigné par certains sous le nom de Mahomet 570- 632), en passant par –liste non exhaustive ni chronologique- Noé, Joseph, Elie, Moïse, Aaron, Jésus fils de Marie et, ô surprise, une prophétesse Elisée[3], Paix et Bénédiction sur eux.

L’islamisme autrement appelé « islam politique » est un mouvement politique fondé en 1928 en Égypte sous l’appellation des « frères musulmans ». Parmi ses fondateurs, citons Hassen el Banna dont l’un de ses descendants n’est autre qu’un certain Tariq Ramadan. Instrumentalisant cyniquement la religion et la naïveté de certains fidèles, cet appareil politique a pour objectif de conquérir le pouvoir et s’y agripper indéfiniment. Le meilleur exemple est celui de la Turquie actuelle de Erdogan.

Le wahabisme, quant à lui, est une idéologie fondamentaliste, fondée sur une lecture étriquée et pour tout dire obscurantiste du Coran par Ibn Abdelwahhab (1703-1792). Elle est appliquée avec brutalité par la dynastie des Saouds depuis leur prise de pouvoir définitive de l’Arabie en 1932. Voyons, à présent la politique extérieure états-unienne relative aux Musulmans au Proche-Orient et au-delà.

La politique étrangère US au Moyen-Orient ces trente dernières années

Il est impossible de ne pas évoquer le fameux pacte du Quincy en 1945 entre le président Roosevelt et le roi Saoud Abdelaziz qui scelle une alliance entre l’Amérique et le royaume wahabite en les termes suivants : protection militaire US en échange de la production et de la livraison de pétrole saoudien bon marché. Cependant, pour la clarté de mon propos, je me limiterais aux actions américaines des trois dernières décennies.

1. Le terrible aveu du général américain Wesley Clark de 2007[4] révèle l’ampleur du projet du Pentagone visant à envahir 7 pays, tous musulmans.13 ans plus tard, certes ces Nations n’ont pas été toutes envahies mais leur situation est peu enviable. Jugez-en :

  • l’Iran est étranglé par des sanctions occidentales sans fin,
  • l’Irak est sujet à l’instabilité chronique après les deux agressions US de 1991 et 2003,
  • la Syrie est harcelée depuis 2010 par des hordes terroristes d’obédience frériste ou wahabite et soutenues plus ou moins ouvertement par l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN),
  • le Liban est en cessation de paiement,
  • la Libye est de facto divisée en deux gouvernements, l’un basé à Tripoli, l’autre à Benghazi,
  • le Soudan a éclaté en deux pays distincts au Nord et au Sud,
  • la Somalie n’est plus un État digne de ce nom.

J’ajouterais à cette triste liste le Yémen ravagé par une guerre civile consécutive à l’attaque barbare initiée par – qui d’autre ? – le royaume wahabite voisin. Cette politique états-unienne pour le moins belliqueuse est inspirée par des politiciens issus d’un courant politique dit néo-conservateur. C’est un mouvement issu du trotskisme et qui par les méandres de l’Histoire se retrouve à l’extrême-droite de l’échiquier politique américain. L’obsession des néo-cons est la sécurité de l’entité sioniste, son corollaire : la destruction du monde musulman et accessoirement la poursuite de l’hubris impérial par le contrôle des lignes d’approvisionnement énergétique et l’anéantissement de toute force récalcitrante. M.Clark cite les sieurs Wolfowitz , Rumsfeld ou Cheney auxquels on peut adjoindre Richard Perle et la dynastie Kristol.

2. La théorie du « choc des civilisations » élaborée par S.Huntington lui-même influencé par Bernard Lewis, est de la même veine. Elle soutient que des blocs civilisationnels tel le monde musulman a vocation à faire la guerre aux autres civilisations. En somme, on agresse des pays musulmans et en cas de moindre résistance de la part de la victime, on crie à la fatalité d’un grand conflit. C’est la fameuse prophétie auto-réalisatrice.

3. Enfin, un rapide coup d’œil des mesures prises par Trump depuis son ascension au pouvoir nous éclaire davantage sur la tendance lourde de la politique US.

  • reconnaissance par les EUA de Jérusalem (est et ouest) comme capitale exclusive d’Israël et transfert effectif de l’ambassade US de Tel-Aviv à Jérusalem, troisième lieu saint de l’Islam ce qui équivaut à une déclaration de guerre à tout musulman qui se respecte,
  • abandon spectaculaire par les EUA de l’accord nucléaire entre les Cinq+1 et l’Iran, rare avancée à l’actif du président Obama,
  • reconnaissance par les US, au mépris de toute logique et du droit international, du Golan syrien comme étant un territoire israélien,
  • classement des Gardiens de la Révolution Iraniens (GRI) , pourtant principaux acteurs de la victoire sur Daesh, comme « terroristes »,
  • Assassinat révulsant et vicieux du chef des GRI, le général Souleimani au risque d’embraser toute la région.

Ainsi, celui qui se targuait d’assécher le marais nauséabond de Washington et des lobbies corrompus qui dictent la politique des EUA, a plus sûrement été asséché lui-même par le marais.

Futilité de la thèse de l’Amérique islamophile

À la lumière de ces faits, il est aisé de conclure à l’inanité des tenants d’une Amérique bienveillante vis-à-vis du Monde Musulman d’autant que ce sont les mêmes esprits sournois qui soutiennent mordicus le supposé différend Sunnites-Chiites. En vérité, tout le monde l’aura compris, la ligne de fracture n’est pas celle sus- mentionnée et attisée ad nauseam mais entre les partisans de l’Axe OTAN-Israël-sauvages extrémistes terroristes et leurs adversaires déterminés et valeureux : l’Axe de la Résistance id est l ’Iran et ses alliés régionaux (Chiites et sunnites confondus), la Russie et en arrière-plan et discrètement la Chine.

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[1] https://www.youtube.com/watch?v=XY-BWScpdZw

[2] https://www.bfmtv.com/international/trump-accuse-obama-et-clinton-d-avoir-cree-daesh-et-s-attire-les-foudres-des-democrates-1025347.html

[3] citée nommément dans la Sourate 38, verset 48 du saint Coran sous le nom de Yasaâ en arabe.

[4] https://www.youtube.com/watch?v=vE4DgsCqP8U

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