La guerre éclair économique contre la Russie a échoué

       Le discours de Président Vladimir Poutinne lors de 25e Forum économique international de Saint-Pétersbourg (extraits)

 Lors du 25e Forum économique international de Saint-Pétersbourg, le président russe Vladimir Poutine a tenu un discours d’environ une heure. Dans la première partie de son discours, il a évoqué la situation économique mondiale en pleine mutation et le rôle de la Russie dans ce contexte. Dans la deuxième partie, il a énuméré très concrètement les plans de développement de l’économie russe, des plans qui rappellent également le concept d’économie sociale de marché et qui sont conçus pour l’ensemble de la société. Il s’est opposé au mot d’ordre d’autarcie de l’économie russe, soulignant au contraire l’importance essentielle des relations économiques internationales, mais, dans un avenir proche, guère avec les économies de l«Occident». Toutefois, il a surtout insisté sur la souveraineté de son pays, comme de tout autre pays, en matière d’ordre économique. Nous documentons des extraits de la première partie du discours et renvoyons à la traduction allemande de l’intégralité du discours, que s’est procurée Thomas Röper.1 Les intertitres ont été placés par Horizons et débats.

Il y a deux ans, lorsque je me suis exprimée au Forum de Davos, j’affirmais que l’ère d’un monde unipolaire était terminée. Le changement est un processus naturel de l’Histoire car il est difficile de réconcilier la diversité des civilisations et la richesse des cultures de la planète avec des stéréotypes politiques, économiques imposés aux autres par un seul centre de manière brutale et sans compromis.
L’erreur se trouve dans le concept lui-même. Comme le concept le formule: il y a un seul pouvoir puissant avec un cercle limité de pays alliés, proches. Ce sont uniquement les Etats forts qui prennent les décisions dans une seule direction. Mais cela ne peut pas fonctionner.
Après s’être déclaré victorieux dans la Guerre froide, les Etats Unis se sont auto-proclamés les messagers de Dieu sur terre dont leurs seuls intérêts sont considérés comme sacrés, mais pas d’obligations. Ils ont ignorés le fait que dans le monde entier, lors des dix dernières décennies, se sont développés de nouveaux centres puissants. Et ces centres ont développé des modèles et des institutions dynamiques. Il n’est plus possible d’ignorer leurs intérêts, Ils ont le droit de protéger et de défendre leur souveraineté nationale.

Changements fondamentaux

Je le répète, ces changements ont un caractère fondamental et indéniable. Je dirai qu’il est impossible de rester assis et d’attendre que tout se déroule comme avant. Mais cela ne va pas se produire comme cela.
Cependant il semblerait que certains leaders occidentaux restent centrés sur leurs illusions et s’accrochent aux idées du passé car ils pensent que la domination par l’Occident du système mondial est éternelle. Ils nient simplement la réalité, ils essaient de contredire le courant de l’Histoire en demeurant dans leurs propres illusions. En restant dans l’illusion d’avant, ce que l’on nomme le milliard d’or. Ils regardent le reste du monde comme leurs colonies et considèrent les habitants des pays comme des hommes de seconde catégorie.
De là provient leur désir de punir ceux qui ne rentrent pas dans les rangs, ceux qui ne veulent pas se soumettre. Mais en même temps ils violent leurs propres principes éthiques et remettent en question la souveraineté de certains états. Par exemple: la Yougoslavie, la Syrie, la Lybie et l’Irak, pour n’en nommer que quelques-uns. On essaie d’isoler les Etats qui vont à l’encontre de leurs opinions. Même le sport, même les jeux olympique, même la culture sont interdits en fonction de leur provenance et cela concerne aussi les sanctions contre la Russie qui sont infondées et déraisonnables. La rapidité avec laquelle elles sont appliquées est incroyable. Leurs sanctions sont sans précédent. Ils veulent tout simplement l’écroulement de l’économie russe. Ils essaient de frapper l’industrie, les finances et le niveau de vie des Russes.

Cuisant échec

Mais ils n’y arrivent pas. C’est évident. Ils n’y arrivent pas. Les entrepreneurs russes, les organes de pouvoir ont travaillé de façon unie. Les citoyens ont fait preuve d’unité également.
Nous avons réussi à stabiliser les marchés financiers, les marchés bancaires. Nous avons réinjecté des liquidités, nous avons assuré la stabilité des industries, nous assurer les lieux de travail pour les travailleurs. Et donc les pronostics de ces trente ans n’ont pas eu lieu mais nous comprenons d’où venaient ces prédictions concernant le cours du dollar qui allait augmenter, l’effondrement de notre économie. C’étaient des tentatives de pression psychologiques sur notre milieu d’affaires. Par ailleurs certains de nos milieux d’affaires et leurs dirigeants ont succombé à ce type de pression catastrophique. Nous devons souligner, encore une fois, que nous devons rester honnêtes et extrêmement réalistes dans nos conclusions. Nous devons croire en nos forces, c’est extrêmement important. Nous sommes forts, nous pouvons faire face à n’importe quelle tâche. Les acquis de plusieurs millénaires de notre pays le démontrent.
Trois mois après les sanctions, nous avons réussi à juguler l’inflation. Notre situation se stabilise. Nos finances sont stables. Nous avons un surplus de 3 milliards de roubles et donc cette situation positive concernant notre budget national a plus que quadruplé les prévisions. Donc nous avons eu la possibilité de reconsolider et de refonder nos marchés internes. Nous avons pris des mesures spécifiques, je vous l’ai déjà dit, de réinjecter des liquidités dans l’activité de nos entreprises, et tout ceci dans le deuxième trimestre de cette deuxième année. Aujourd’hui nos compagnies internationales ont beaucoup plus de souplesse de fonctionnement. En ce qui les concerne, ils pourront être repartis et reculés et nous pourrons faire autant pendant 12 mois à partir de l’année prochaine. Nous avons également baissé les taux d’hypothèque au mois de mai. Nous avons prolongé le programme de soutien pour permettre à la population russe de continuer à investir dans l’immobilier. Notre Banque centrale nationale continue à descendre les taux d’intérêt et je propose de continuer encore à descendre le taux d’intérêt à 7 %; je voudrai attirer votre attention sur le fait que l’action de ce programme initié durera et se terminera à la fin de cette année.

Une arme à double tranchant

Une fois encore, la blitzkrieg à l’égard de la Russie n’a pas eu de succès et, comme vous le savez, l’arme de sanction est à double tranchant, elle agit dans les deux sens aussi bien contre ceux qui l’inventent que ceux qui la subissent.
Nous savons qu’au niveau des leaders européens, à un niveau informel, des perspectives inquiétantes sont discutées. Ils affirment que non seulement les sanctions concernent la Russie mais aussi les pays de l’UE. Ils ont déjà menacées leurs propres économies par l’emploi de ces sanctions, aussi bien en Europe qu’aux Etats-Unis. Nous voyons de sérieux problèmes économiques et sociaux surgir; la nourriture, l’électricité, le fuel dont les prix augment, la qualité du niveau de vie et le mode de fonctionnement des entreprises baissent.
Nous avons procédé à quelques calculs. Selon les experts, depuis le début des sanctions, les pertes des Européens pourraient constituer un montant de 400 millions de dollars au cours de cette année. Ceci est le prix à payer des sanctions émises en dépit de tout bon sens.
Maintenant l’inflation dans les pays européens a dépassé 20%; l’inflation aux Etats-Unis est aussi inacceptable, la plus élevée depuis ces 40 dernières années.
Bien sûr, l’inflation en Russie se situe entre ces deux chiffres. Cependant nous avons déjà réussi à procéder à l’indexation de nos salaires ainsi que de nos retraites pour assurer le revenu minimal des couches les plus défavorisées de la population, et dans le même temps nous avons réussi à soutenir le système bancaire.
[…]

Principales différences

Ceci constitue notre principale différence avec les pays de l’UE, où l’inflation galopante est directement liée à une perte de revenus réels de la population et engloutit leurs économies. Les conséquences directes de la crise affectent les couches les plus défavorisées de la population.
Nous savons aussi que les pertes pour les entreprises européennes sont énormes, que l’économie européenne perd de sa vitesse de croissance pour plusieurs années. Les pays européens ont des problèmes systémiques profonds et qui vont s’accroitre.
Les conséquences directes des politiques européennes actuelles sont l’exacerbation, la fissure qui existent dans leurs sociétés et les diverses couches de leurs société. Aujourd’hui ces contradictions sont étouffées ou mises sous le tapis. Mais quand on observe les forces qui arrivent au pouvoir en Europe, c’est juste incroyable. Les participants changent mais le sens des politiques ne change pas.
On constate l’augmentation des courants populistes. On remarque la corruption des élites qui pourraient entrainer les changements. Aujourd’hui nous pensons que les nouvelles formations ressemblent aux anciennes. Les réels intérêts du peuple et des affaires nationales sont reléguées à la périphérie.

Conséquences graves

Une telle déconnexion de la réalité et des demandes de la société mènera à  l’émergence du populisme et des mouvements extrémistes et radicaux, des changements sociaux-économiques, des corruptions et des changements d’élites à court terme. […]
Les tentatives de sauver les apparences et le discours de taux acceptables au nom d’une pseudo-unité ne peuvent pas cacher cette principale situation: l’UE a perdu sa souveraineté politique et son élite bureaucratique est à la solde de ceux qui lui dictent ce qu’il y a faire et à ne pas faire. Les gouvernements trahissent ainsi leurs propres peuples, détruisent leurs économies et leurs entreprises.
Il y a ici d’autres sujets critiques. La détérioration de la situation économique globale n’est pas un évènement récent […] Elle n’est pas la conséquence d’une opération militaire déclenchée par la Russie dans le Donbass. Parler ainsi relève d’une distorsion des faits.
L’émergence de l’inflation dans les marchés de production et de consommation était bien là, des années auparavant de ces évènements survenus cette année. Le monde a été mené dans cette direction, progressivement, par des années de politiques macro-économiques irresponsables poursuivies par les pays du G7 qui ont pratiqué une politique d’accumulation des dettes pendant de nombreuses années. Cela s’est aggravé pendant l’épidémie de coronavirus en 2020 quand l’offre et la demande avaient diminué de façon drastique. […]
Parce qu’ils ne pouvaient pas ou ne voulaient pas essayer d’autres stratégies, les gouvernements des pays d’économie occidentale ont tout simplement accéléré le fonctionnement de la planche à billets.
La facilité d’une telle procédure a généré des déficits budgétaires sans précédent. […]
Les deux dernières années, la masse d’argent a augmenté de plus de 38% aux Etats-Unis; cela fait plus de 5,9 trillions de dollars. Quelques pays seulement peuvent dépasser ce nombre.
La masse d’argent a aussi augmenté dans l’UE, de façon dramatique. Elle a augmenté de 20%, soit 2,5 trillions d’euros.
Ces derniers temps, j’entends de plus en plus parler de la soi-disant – pardonnez-moi, je n’aime pas me mentionner moi-même, mais je dois le dire – nous entendons tous parler de la soi-disant «inflation poutinienne» en Occident. Quand je vois ça, je me dis toujours: à qui ces bêtises sont-elles destinées? Peut-être à ceux qui ne savent ni lire ni écrire. Les personnes sachant au moins lire comprendront ce qui se passe réellement.

Les vraies causes ne se trouvent pas en Russie

La Russie et nos mesures pour la libération du Donbass n’ont absolument rien à voir avec cela. La hausse actuelle des prix, l’inflation, les problèmes de denrées alimentaires et de carburant, d’essence et d’énergie en général sont le résultat d’erreurs systémiques dans la politique économique de l’actuel gouvernement américain et des euro-bureaucrates. C’est là que se trouvent les causes, et nulle part ailleurs.
Je vais dire aussi quelque chose à propos de notre opération: oui, elle a eu une certaine importance, mais les racines se trouvent précisément là, dans leur politique économique erronée. Pour l’Occident, le lancement de notre opération dans le Donbass est une bouée de sauvetage qui leur permet de faire porter le chapeau de leurs propres erreurs de jugement à d’autres, en l’occurrence la Russie. Mais toute personne ayant au moins une éducation de base comprend les véritables raisons de la situation actuelle.
D’énormes quantités d’argent ont été imprimées, et puis après? Où est passé tout cet argent? C’est évident: il a entre autres servi à acheter des biens et des services en dehors des pays occidentaux; c’est là qu’il est allé, cet argent imprimé. Ils ont commencé à tout «absorber», au sens propre du terme, à «absorber» les marchés mondiaux. Bien sûr, personne n’a pensé aux intérêts des autres nations, pas non plus des plus pauvres, qui ont dû se contenter des «restes», et cela à des prix astronomiques.
Fin 2019, les importations aux Etats-Unis s’élevaient à environ 250 milliards de dollars par mois, et elles ont entre-temps atteint 350 milliards de dollars. Fait remarquable, avec 40 %, l’augmentation a été proportionnelle au gonflement non couvert de la masse monétaire en dollars au cours des dernières années. Ils ont imprimé cet argent, l’ont distribué et utilisé pour siphonner toutes les marchandises des marchés des autres pays.

D’énormes déséquilibres dans les pays occidentaux au cœur du problème

J’ajouterai ceci: les Etats-Unis ont longtemps été un important fournisseur de denrées alimentaires pour le marché mondial, et ils ont raison d’être fiers de leur agriculture, de leur tradition en la matière, qui est un modèle pour beaucoup, y compris pour nous d’ailleurs. Mais aujourd’hui, le rôle de l’Amérique a changé de façon spectaculaire. Le pays est passé d’un statut d’exportateur net de denrées alimentaires à celui d’importateur net. En gros, ils impriment de l’argent et attirent des flux de matières premières en achetant des produits alimentaires dans le monde entier.
Un taux d’augmentation encore plus élevé des importations de marchandises est observé dans l’Union européenne. Il est clair que cette forte augmentation de la demande, à laquelle ne répond pas une offre de marchandises correspondante, a été le déclencheur de la vague d’inflation mondiale et de déficits. C’est de là que vient l’inflation mondiale. Ces dernières années, presque tous les biens sont devenus plus chers: les matières premières, les biens de consommation et surtout les denrées alimentaires.
Oui, bien sûr, ces pays, y compris les Etats-Unis, continuent d’exporter, mais l’équilibre entre les exportations et les importations s’est déjà déplacé dans l’autre sens: je crois que le chiffre des importations est déjà de 17 milliards supérieur à celui des exportations. C’est de cela qu’il s’agit.
Selon les Nations unies, en février dernier, l’indice mondial des prix des denrées alimentaires était 50% plus élevé qu’en mai 2020, et l’indice combiné des matières premières a doublé au cours de la même période.

Un nouvel ordre monétaire misant sur des valeurs réelles

Dans ce contexte d’ouragan inflationniste, de nombreux pays en développement se posent une question légitime: pourquoi échanger des matières premières contre des dollars et des euros qui perdent de leur valeur sous leurs yeux? Au final, l’économie d’unités imaginaires est inévitablement remplacée par une économie de valeurs et d’actifs réels.
Selon le FMI, les réserves mondiales de devises s’élèvent actuellement à 7100 milliards de dollars et 2500 milliards d’euros, et cet argent se dévalue d’environ huit pour cent par an. En plus, il peut être confisqué, volé à tout moment, si la politique de l’un ou l’autre pays ne plaît pas aux Etats-Unis. C’est devenu très réel pour de nombreux pays qui détiennent leurs réserves de devises dans ces monnaies.
Selon une analyse d’experts objective, il n’y aurait pas d’autre possibilité lors de tels déficits qu’une conversion des réserves mondiales en ressources réelles provenant bien sûr d’autres pays, telles que denrées alimentaires, énergie et d’autres matières premières. Ce processus devrait déjà avoir lieu ces prochaines années, et il est évident qu’il continuera à alimenter l’inflation mondiale en dollar.

Politique économique erronée de l’Occident –
bien avant l’opération dans le Donbass

En ce qui concerne l’Europe, l’échec de la politique énergétique, la confiance aveugle dans les énergies renouvelables et le négoce du gaz naturel en bourse, qui ont entraîné une forte hausse des coûts de l’énergie, ont en outre contribué à la hausse soudaine et importante des prix, que nous avons pu observer depuis le troisième trimestre de l’année dernière, là encore bien avant le début de notre opération dans le Donbass. Nous n’y sommes absolument pour rien. Ils sont eux-mêmes la cause de cet échec, les prix ont grimpé en flèche et ils cherchent à nouveau des coupables.
Les mauvais calculs de l’Occident ont non seulement entraîné une hausse des prix de nombreux biens et services, mais aussi une baisse de la production d’engrais, notamment d’engrais azotés à base de gaz naturel. Dans l’ensemble, entre le milieu de l’année dernière et février de cette année seulement, le prix des engrais au niveau mondial a augmenté de plus de 70 %.
Malheureusement, il n’y a actuellement aucun signe d’inversion de cette tendance. Ces circonstances les ont poussés à bloquer le travail de leurs entreprises et la logistique des livraisons d’engrais en provenance de Russie et de Biélorussie, ce qui n’a fait qu’empirer la situation.
Il n’est pas difficile de prédire la suite des événements. Une pénurie d’engrais signifie une baisse des rendements et donc le risque d’une pénurie de denrées alimentaires sur le marché mondial, ce qui entraînera des prix encore plus élevés, menaçant de famine surtout les pays les plus pauvres. Et cela pèsera entièrement sur la conscience du gouvernement américain et des euro-bureaucrates.
Je voudrais insister une fois de plus: ce problème n’est pas apparu aujourd’hui, ni au cours des trois ou quatre derniers mois, et ce n’était définitivement pas la faute de la Russie, comme certains démagogues l’expliquent aujourd’hui en essayant de rejeter sur notre pays la responsabilité de tout ce qui se passe dans l’économie mondiale.
[…] La situation s’est envenimée depuis des années, alimentée par les actions à courte vue de ceux qui ont l’habitude de résoudre leurs problèmes au détriment des autres, qui se sont appuyés et s’appuient encore sur le mécanisme d’émission monétaire pour acheter trop, attirer les flux commerciaux et ainsi aggraver les déficits et provoquer des catastrophes humanitaires dans certaines parties du monde. Je voudrais ajouter ceci: il s’agit essentiellement de la même politique coloniale prédatrice exercée par le passé, mais bien sûr sous une nouvelle forme, dans une nouvelle édition, beaucoup plus subtile et raffinée. On ne comprend pas tout de suite ce qui se passe.

l’approvisionnement en denrées alimentaires:
tâche la plus importante de la communauté mondiale

La principale tâche de la communauté mondiale consiste désormais à améliorer l’approvisionnement du marché mondial en denrées alimentaires, tout en répondant aux besoins des pays où la situation alimentaire est particulièrement précaire. Une fois qu’elle aura assuré son alimentation et son marché intérieurs, la Russie pourra augmenter considérablement ses exportations de denrées alimentaires et d’engrais. Nos réserves de céréales, par exemple, peuvent atteindre 50 millions de tonnes la saison prochaine.
Nous dirigerons nos livraisons en priorité vers les pays où les besoins alimentaires sont les plus importants et où il existe un risque croissant de famine. Il s’agit avant tout de pays africains et du Moyen-Orient. […]
La Russie est prête à contribuer à l’équilibre des marchés agricoles mondiaux, et nous saluons naturellement l’ouverture de nos collègues de l’ONU à un dialogue sur ce sujet. Ils comprennent l’urgence du problème alimentaire mondial. Le sujet d’un tel dialogue pourrait être la création de conditions logistiques et financières normales pour l’augmentation des exportations russes de denrées alimentaires et d’engrais. En ce qui concerne les exportations alimentaires ukrainiennes vers les marchés mondiaux, et je ne peux m’empêcher de mentionner qu’il y a malheureusement aussi beaucoup de spéculations à ce sujet, nous n’entravons rien. Ce n’est pas nous qui avons miné les ports ukrainiens de la mer Noire. Qu’ils nettoient les mines et qu’ils exportent. Nous veillerons à la sécurité des navires marchands, il n’y a aucun doute là-dessus.
Mais de quoi parlons-nous? Le ministère américain de l’agriculture estime que l’Ukraine a environ six millions de tonnes de blé, que nous estimons plus proches des cinq millions de tonnes, et sept autres millions de tonnes de maïs. C’est tout. Et quand on sait que le monde produit 800 millions de tonnes de blé, alors vous comprenez bien que cinq millions de tonnes pour le marché mondial, ça ne fait absolument aucune différence.
Pourtant, ils ont des possibilités d’exportation, et pas seulement via les ports de la mer Noire. Allez-y, exportez via la Biélorussie, qui est d’ailleurs l’option la plus économique. Via la Pologne, la Roumanie, tout ce que vous voulez. Il y a cinq ou six possibilités pour l’exportation. […] Mais aussi le risque que ces céréales soient utilisées pour payer les armes livrées. Ce serait alors assez triste.

L’attitude de refus occidentale à l’origine
de l’opération militaire dans le Donbass

Chers amis! Comme je l’ai déjà dit, le monde moderne traverse une période de changements profonds. Les institutions internationales s’effondrent et échouent. Les garanties de sécurité sont dévaluées. L’Occident a refusé par principe d’honorer les engagements pris par le passé. Il s’avère tout simplement impossible de conclure de nouveaux accords avec l’Occident.
Dans cette situation, dans un contexte de risques et de menaces croissants pour nous, la décision de la Russie de mener l’opération militaire était une décision forcée. Une décision difficile, bien sûr, mais une décision contraignante et nécessaire. C’est la décision d’un pays souverain qui a pleinement le droit, fondé d’ailleurs sur la charte de l’ONU, de défendre sa sécurité. C’était une décision visant à protéger nos citoyens et les habitants des républiques populaires du Donbass, qui subissent depuis huit ans un génocide perpétré par le régime de Kiev et des néonazis, lesquels bénéficient de la protection totale de l’Occident.
L’Occident n’a pas seulement tenté de mettre en œuvre le scénario «anti-russe», il a également participé activement au développement militaire du territoire ukrainien en inondant littéralement l’Ukraine d’armes et de conseillers militaires. Et il continue de le faire aujourd’hui. Pour être honnête, personne en Occident ne s’intéresse au développement de l’économie ukrainienne ou au bien-être de ses habitants; ils s’en moquent, mais ils n’ont jamais lésiné sur l’argent pour créer une tête de pont de l’OTAN à l’Est, dirigée contre la Russie, pour nourrir l’agressivité, la haine et la russophobie, et cela continue aujourd’hui. […]

Défense de la souveraineté politique et de l’identité nationale de la Russie

Au 21e siècle, la souveraineté ne peut pas être partielle, fragmentaire. Tous ses éléments ont la même importance, ils se renforcent et se complètent mutuellement. C’est pourquoi il est important pour nous de défendre non seulement notre souveraineté politique et notre identité nationale, mais aussi de renforcer tout ce qui fait l’indépendance économique du pays, son autonomie et son indépendance financière, personnelle et technologique. Les sanctions de l’Occident reposent sur la thèse erronée selon laquelle la Russie n’est pas souveraine sur le plan économique et qu’elle est très vulnérable. Ils étaient tellement occupés à répandre des mythes sur l’arriération de la Russie et sa faible position dans l’économie et le commerce mondiaux, qu’ils semblent y avoir cru eux-mêmes. En planifiant leur blitzkrieg économique, ils n’ont pas remarqué, ils ont tout simplement ignoré les faits réels, que notre pays a changé au cours des dernières années. Et ces changements sont le résultat du travail que nous avons planifié pour créer une structure macroéconomique durable, pour garantir la sécurité alimentaire, pour mettre en œuvre des programmes de substitution des importations, pour créer notre propre système de paiement, et ainsi de suite.
Bien sûr, les sanctions ont placé le pays devant de nombreux défis difficiles. Certaines entreprises continuent d’avoir des problèmes de fournisseurs. Toute une série de solutions technologiques ne sont plus disponibles pour nos entreprises. La logistique est perturbée.
Mais d’un autre côté, tout cela nous ouvre de nouvelles possibilités; nous le disons souvent, mais c’est vraiment le cas. Tout cela nous incite à construire une économie souveraine, dotée d’un potentiel technologique, productif, humain et scientifique complet, et non partiel.
Bien sûr, une tâche aussi complexe ne peut pas être résolue, comme on dit, en un claquement de doigts. Il faut poursuivre le travail de manière systématique et en pensant à l’avenir. C’est exactement comme cela que travaille la Russie, en mettant en œuvre des plans à long terme pour le développement des secteurs économiques et le renforcement du domaine social. Les défis actuels n’entraînent que des ajustements et des affinements de ces plans, mais ils n’en modifient pas l’orientation stratégique. 


1https://www.anti-spiegel.ru/2022/putins-abrechnung-mit-dem-westen-der-wirtschaftliche-blitzkrieg-ist-gescheitert/?doing_wp_cron=1656170257.7707030773162841796875du 18/06/22; la version anglaise du discours, autorisée par le cabinet présidentiel russe, y compris la discussion qui a suivi, se trouvent sur http://en.kremlin.ru/events/president/news/68669 du 17/06/2022
21000 roubles correspondent actuellement à environ 17 francs suisses. [Note de la rédaction]



                                                         


 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *