Discours de Rohani à l’ONU : l’Iran dit « non » à toute négociation sous la pression de sanctions

30.09.2019

Le Président Iranien Hassan Rohani a prononcé un discours à l’Assemblée Générale des Nations Unies.

Il a dit que l’Iran avait respecté ses engagements pris dans le cadre de l’accord sur le nucléaire de 2015, ajoutant que « la patience de l’Iran a ses limites ».

Rohani a critiqué l’approche américaine en faveur de négociations : « ils nous invitent à négocier, alors qu’ils se retirent du traité. »

« Nous répondons “non” à toute négociation sous la pression de sanctions », a déclaré le président iranien.

Voici mot pour mot le discours prononcé par le président iranien Hassan Rohani à l’Assemblée Générale des Nations Unies (AGONU 2019) :

Au nom d’Allah, le Plus Miséricordieux, le Plus Compatissant,

Monsieur le Président,

Je voudrais vous féliciter pour votre élection méritée en tant que président de la 74ème Assemblée Générale des Nations Unies et souhaiter succès et bonne chance à votre Excellence et à l’honorable Secrétaire Général.

Pour commencer, je tiens à commémorer le mouvement de recherche de liberté de Hussein (Que la Paix Soit Avec Lui) et rendre hommage à tous ceux qui de par le monde se battent pour la liberté sans courber l’échine devant l’oppression et l’agression, et qui endurent toute la difficulté du combat pour les droits, ainsi qu’à la mémoire de tous les martyrs opprimés par les frappes et bombardements terroristes au Yémen, en Syrie, en Palestine Occupée, en Afghanistan et ailleurs dans le monde.

Mesdames et Messieurs

Le Moyen-Orient en proie à la guerre, aux effusions de sang, aux agressions, à l’occupation et au fanatisme sectaire des extrémiste religieux ; et dans de telles circonstances, le peuple opprimé de Palestine en est la principale victime. La discrimination, l’expropriation des terres, l’extension des Kibboutz et les massacres continuent d’être perpétrés contre les Palestiniens.

Les projets imposés par les États-Unis et les sionistes tels l’Accord du Siècle, reconnaissant Beit-ul Moqaddas [NdT : Jérusalem] comme la capitale du régime sioniste et l’unification du Golan syrien avec d’autres territoires occupés sont voués à l’échec.

Face aux plans destructeurs des États-Unis, les interventions de la République Islamique d’Iran en matière d’assistance et de coopération régionale et internationale sur la sécurité et l’antiterrorisme ont été particulièrement décisives. Un exemple frappant de cette approche est celui de notre coopération lors du Processus d’Astana avec la Russie et la Turquie au sujet de la crise syrienne et de notre plan de paix pour le Yémen, en vue de notre coopération active avec les envoyés spéciaux du Secrétaire Général des Nations Unies et de nos efforts pour faciliter des pourparlers de réconciliation entre les belligérants au Yémen, qui ont eu pour résultat l’accord de Stockholm sur le port d’Hodeyda.

Chers Participants

Je viens d’un pays qui a résisté au terrorisme économique le plus impitoyable, et qui a défendu son droit à l’indépendance et au développement scientifique et technologique. Le gouvernement américain, tout en imposant des sanctions extraterritoriales et des menaces envers d’autres nations, a déployé beaucoup d’efforts pour priver l’Iran des bénéfices d’une intégration à l’économie mondiale, et a eu recours à la piraterie internationale en dévoyant le système bancaire international.

Nous, Iraniens, avons été les pionniers des mouvements en faveur de la liberté dans la région, tout en recherchant la paix et le progrès pour notre nation ainsi que pour nos voisins ; nous n’avons jamais capitulé face à l’agression et la contrainte étrangère. Nous ne pouvons avoir confiance quand des gens qui se vantent d’avoir appliqué les sanctions les plus dures de l’histoire contre la dignité et la prospérité de notre nation nous invitent à la table des négociations. Qui peut croire que le meurtre silencieux d’une grande nation et la pression exercée sur la vie de 83 millions d’iraniens, particulièrement des femmes et des enfants, soit encouragé par des officiels du gouvernement américain, fiers de telles pressions et pour qui ces sanctions – contre un éventail de pays comme l’Iran, le Venezuela, Cuba, la Chine et la Russie – sont une véritable drogue. La nation iranienne n’oubliera ni ne pardonnera jamais ces crimes et ces criminels.

Le discours du président Hassan Rohani à l’Assemblée Générale des Nations Unies 2019

Mesdames et Messieurs

L’attitude du gouvernement américain actuel envers l’accord sur le nucléaire ou le JCPOA ne viole pas seulement les dispositions de la Résolution 2231 du Conseil de Sécurité des Nations Unies mais constitue également une violation de la souveraineté et de l’indépendance économique et politique de tous les pays de la planète.

En dépit du retrait américain du JCPOA et ce pendant une année, l’Iran est resté totalement fidèle à tous ses engagements nucléaires en accord avec le JCOPA. Par respect de la résolution du Conseil de Sécurité, nous avons offert à l’Europe l’occasion de remplir ses 11 engagements pris pour compenser le retrait américain. Cependant, malheureusement, nous n’avons entendu que de belles paroles sans constater de mesures effectives.

Il est maintenant devenu clair pour tous que les États-Unis tournent le dos à leurs engagements et que l’Europe est impuissante et incapable de remplir ses engagements. Nous avons même adopté une approche pas-à-pas en mettant en œuvre les paragraphes 26 et 36 du JCPOA et nous restons fidèles aux promesses tenues dans l’accord. Cependant, notre patience a des limites. Quand les États-Unis ne respectent pas le Conseil de Sécurité des Nations Unies, et quand l’Europe affiche son impuissance, la seule façon de procéder est de s’appuyer sur la dignité, la fierté et la force de la nation. Ils nous appellent à la négociation pendant qu’ils sortent des traités et des accords. Nous avons négocié avec le gouvernement américain actuel à la table de négociation au format 5+1 ; cependant, ils n’ont pas respecté l’engagement pris par leur prédécesseur.

Au nom de mon pays et de mon État, je voudrais annoncer que notre réponse à toute négociation sous sanctions est négative. Le gouvernement et le peuple d’Iran sont restés solides face aux sanctions les plus dures au cours de l’année et demie passée et ne négocieront jamais avec un ennemi qui cherche à obtenir la reddition de l’Iran au moyen des armes que sont la pauvreté, la contrainte et les sanctions.

Si vous voulez une réponse positive, et comme annoncé par le Chef de la Révolution Islamique, la seule façon d’entamer les pourparlers est de revenir aux engagements et au respect des engagements.

Si vous êtes sensibles au nom du JCPOA, eh bien, vous pouvez revenir à son cadre, et respecter la Résolution 2231 du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Lever les sanctions afin d’ouvrir la voie à l’ouverture des négociations.

Je voudrais être très clair: si vous vous contentez du minimum, nous nous contenterons également du minimum; pour vous comme pour nous. Cependant, si vous en voulez davantage, vous devrez également payer davantage.

Si vous respectez votre parole selon laquelle vous n’avez qu’une exigence pour l’Iran, à savoir la non-production et la non-utilisation d’armes nucléaires, alors cela pourrait être facilement obtenu grâce à la supervision par l’AIEA et encore davantage grâce à la fatwa du dirigeant iranien. Au lieu de faire semblant de négocier, vous devriez retourner à la réalité des négociations. La photo souvenir n’est que la dernière étape de la négociation, pas la première.

Nous en Iran, en dépit de toutes les obstructions du gouvernement américain, restons sur le chemin de la croissance et de la prospérité économique et sociale. L’économie de l’Iran en 2017 a enregistré le plus fort taux de croissance au monde. Et aujourd’hui, malgré les perturbations provoquées par l’ingérence étrangère au cours de l’année et demie passée, nous sommes revenus sur le chemin de la croissance et de la stabilité. Hors pétrole, le PIB de l’Iran est redevenu positif dans les derniers mois et la balance commerciale du pays reste positive.

Chers Participants

La doctrine de sécurité de la République islamique d’Iran est basée sur le maintien de la paix et de la stabilité dans le Golfe Persique et sur la liberté de naviguer en sécurité dans le détroit d’Ormuz. De récents incidents ont sérieusement mis cette sécurité en danger. La sécurité et la paix dans le Golfe Persique, en mer d’Oman et dans le Détroit d’Ormuz pourraient être assurées grâce à la participation des pays de la région et la libre circulation du pétrole et des autres ressources énergétiques pourrait être garantie pourvu que nous considérions la sécurité comme un cadre protecteur partout dans tous les pays.

Devant la responsabilité historique de mon pays à maintenir la sécurité, la paix, la stabilité et le progrès dans le Golfe Persique et le détroit d’Ormuz, je voudrais inviter tous les pays directement concernés par les développements dans le Golfe Persique et le Détroit d’Ormuz à la Coalition pour l’Espoir, c’est-à-dire l’Effort de Paix d’Ormuz [NdT: Espoir se traduit par HOPE qui est l’acronyme de HOrmuz Peace Endeavor, ou Effort de Paix d’Ormuz].

Le but de cette Coalition pour l’Espoir est de promouvoir la paix, la stabilité, le progrès et le bien-être pour tous les habitants de la région du détroit d’Ormuz et d’accroître la compréhension réciproque et les relations amicales et paisibles entre eux.

Cette initiative comprend différents sujets de coopération tels que la fourniture commune de sécurité énergétique, la liberté de naviguer, et la libre circulation du pétrole et autres ressources en entrée et sortie du détroit d’Ormuz et au delà.

La Coalition pour l’Espoir [NdT Coalition For HOPE] est repose sur des principes importants tels que le respect des objectifs et principes des Nations Unies, le respect mutuel, l’égalité, le dialogue et la compréhension, le respect de l’intégrité territoriale et la souveraineté, l’inviolabilité des frontières internationales, le règlement pacifique des différends, et surtout, deux principes fondamentaux de non-agression et non-ingérence réciproque dans les affaires intérieures de chacun. La présence des Nations Unies semble nécessaire pour la création d’un bouclier international pour soutenir la Coalition pour l’Espoir.

Le Ministre des Affaires Étrangères de la République Islamique d’Iran fournira davantage de détails sur la Coalition pour l’Espoir aux états bénéficiaires.

Mesdames et Messieurs

La formation d’une coalition et d’une initiative de sécurité sous quelque titre que ce soit dans la région avec la suprématie et le commandement de forces étrangères est un exemple clair d’ingérence dans les affaires de la région. La sécurisation de la navigation est contraire au droit à la liberté de navigation et au droit au développement et aggraverait les tensions, compliquerait la situation et accroîtrait la méfiance dans la région tout en compromettant la paix, la sécurité et la stabilité régionales.

La sécurité de la région sera assurée lorsque les troupes américaines se retireront. La sécurité ne doit pas être assurée par des armes et des interventions américaines. Les États-Unis, après 18 ans, ont échoué à réduire les actes de terrorisme. Tandis que la République Islamique d’Iran a réussi à mettre fin au fléau de Daesh avec l’aide des nations et des gouvernements voisins. La voie ultime vers la paix et la sécurité au Moyen Orient passe par la démocratie interne et la diplomatie externe. La sécurité ne peut être achetée ou fournie par des gouvernements étrangers.

La paix, la sécurité et l’indépendance de nos voisins sont notre paix, notre sécurité et notre indépendance. L’Amérique n’est pas notre voisine. C’est la République Islamique d’Iran qui vous est voisine et on nous l’a appris depuis longtemps : le voisin vient en premier puis la maison. En cas d’incident, vous et nous resterons seuls. Nous sommes voisins les uns des autres et pas des États-Unis.

Les États-Unis sont situés ici, pas au Moyen-Orient. Les États-Unis ne sont le défenseur d’aucune nation; ni le gardien d’aucun État. En fait, les États ne donnent pas procuration à d’autres États et ne confient pas la garde à d’autres États. Si les flammes du feu du Yémen se sont propagées aujourd’hui jusqu’au Hedjaz, le belliciste devrait être recherché et puni ; plutôt que de formuler des accusations envers des innocents et envenimer la situation.

La solution pour la paix dans la péninsule arabique, la sécurité dans le golfe Persique et la stabilité au Moyen-Orient doit être recherchée au sein de la région plutôt qu’en dehors. Les problèmes de la région sont plus grands et plus importants que les États-Unis ne sont en mesure de résoudre. Les États-Unis n’ont pas réussi à résoudre problème en Afghanistan, en Irak, et en Syrie, et ont soutenu l’extrémisme, le talibanisme et le daeshisme. Un tel gouvernement est manifestement incapable de résoudre des problèmes plus complexes.

Chers Collègues,

Notre région est au bord de l’effondrement, car une seule bévue peut entraîner un grand embrasement. Nous ne tolérerons pas l’intervention provocatrice des étrangers. Nous répondrons avec détermination et fermeté à toute forme de transgression et de violation de notre sécurité et de notre intégrité territoriale. Toutefois, la solution alternative et appropriée pour nous est de renforcer la consolidation entre toutes les nations ayant des intérêts communs dans le Golfe Persique et dans la région d’Ormuz.

Voici le message de la nation iranienne :

Investissons dans l’espoir d’un avenir meilleur plutôt que dans la guerre et la violence. Revenons à la justice; à la paix; au droit, à l’engagement et à la promesse et à la table de négociations.

Je vous remercie pour votre attention.

Source : Iran Front Page News, équipe éditoriale, 25-09-2019

Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.


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