Le peuple sahraoui a été abandonné par l’Espagne en 1975, et s’est retrouvé seul face à l’envahisseur marocain. Cette guerre inégale s’est prolongée jusqu’en 1991, lorsque le Sahara Occidental choisit la légalité internationale et décida de s’en tenir à la résolution 1514 de l’ONU, qui garantit (en paroles) le droit à un référendum d’auto-détermination pour les Sahraouis. Pourtant, 29 longues années d’attente dans des campements au milieu du désert ont passé, et la trahison espagnole s’est poursuivie de la même façon sous tous les divers gouvernements qui sont passés depuis lors par la Moncloa.
Maintenant que le Maroc a violé le cessez-le-feu et que le conflit semble se réactiver, le gouvernement actuel de Madrid doit décider s’il fait honneur au qualificatif de gouvernement « le plus progressiste de l’Histoire », ou s’il suit l’exemple de Felipe González et se révèle comme un nouveau tour d’écrou donné au régime de 1978.
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C’est l’idée qu’on nous a mise en tête depuis la première minute : le pacte entre Unidas Podemos et le PSOE a constitué le gouvernement le plus progressiste de l’histoire de l’Espagne. Pourtant, si nous analysons la réalité, cette affirmation commence à paraître quelque peu excessive. Sans chercher plus loin, le gouvernement le plus progressiste de l’Histoire a, ces derniers mois, augmenté la dotation de la Maison Royale et des Corps et Forces de Sécurité de l’Etat, il a commencé à prendre les premières mesures pour la privatisation de l’Éducation, il a maintenu la Loi-Bâillon et n’a pas mené à terme la réforme du travail qu’il avait fermement promise, il a favorisé l’évasion d’un putschiste étranger, le Vénézuélien Leopoldo López, qu’il a accueilli, il a créé une espèce de centre de détention inhumain pour migrants dans un port des Canaries… et, bien sûr, il ne fait rien non plus pour l’ex-province espagnole maintenant attaquée par le Maroc.
Ainsi, le gouvernement de coalition PSOE-UP ressemble un peu plus chaque jour à celui de Felipe González. On lance beaucoup de consignes sociales, on parle beaucoup de progrès, de rendre au peuple sa dignité, d’en finir avec les injustices sociales et l’inégalité, de freiner la caste et les intérêts de l’oligarchie… mais on prend peu d’initiatives pour faire passer tout cela dans la réalité. Et je dis « peu », parce qu’on fait bien quelque chose. Il serait injuste de dire que, pendant le peu de temps qu’il a été au pouvoir, le gouvernement n’a rien fait de positif. On a fait beaucoup de choses intéressantes, et qu’il faut prendre en compte.
Toutefois, beaucoup d’entre nous gardent un goût amer à la bouche : ce ne sont que des touches isolées sur une immense toile qui est déjà peinte. Et l’exemple le plus évident du fait que le gouvernement le plus progressiste de l’Histoire n’est qu’un nouveau tour d’écrou donné au régime de 1978, c’est le traitement appliqué à la 53e province de l’Espagne.
L’art de retourner sa veste
Avant leur arrivée au gouvernement, des dirigeants aussi bien de Podemos que d’Izquierda Unida [ex-Parti Communiste], étaient de fermes défenseurs du droit à l’auto-détermination du peuple sahraoui, injustement oublié par l’Espagne et abandonné à son sort face à l’envahisseur marocain. En 2014, Pablo Iglesias participa à la 39e Conférence de Soutien au Peuple Sahraoui, où il assura que la question sahraouie était « un nouvel exemple de divorce entre la caste politique et les intérêts de la majorité de la population ». Il dit aussi que « la population espagnole est pro-sahraouie, mais il semble que ceux qui nous ont gouvernés sont pro-affaires, et que c’est là leur seule patrie », et il lança même un appel à la communauté internationale, en particulier à l’UE et au gouvernement espagnol », pour qu’ils assument leurs responsabilités », exigeant « qu’on fasse respecter la légalité internationale et les droits humains ». Il rappela aussi que « l’Espagne est toujours administratrice et souveraine du Sahara Occidental, et que, sur le plan juridique, le Maroc se trouve envahir un territoire colonial espagnol et exploiter illégalement ses ressources ». Iglesias alla jusqu’à parler des Sahraouis comme de « nos frères qui ne seront pas abandonnés », et il ne craignit même pas de conclure son discours par un « Vive la lutte du peuple sahraoui ! »
Autre ancien ferme défenseur de la cause sahraouie, Alberto Garzón [Izquierda Unida, ministre de la Consommation], qui exprima à plusieurs reprises son « ferme engagement auprès du peuple sahraoui et pour ses revendications à l’auto-détermination ». En 2015, Garzón accusa l’Espagne et l’Occident de « regarder ailleurs », devant le « génocide du Maroc » au Sahara, lors d’une réunion avec Mohamed Abdelaziz, alors Président du Sahara Occidental. En 2016, Garzón comme Iglesias réclamèrent dans un manifeste, avec d’autres personnalités, une date pour l’organisation du référendum au Sahara.
Rappelons que, dans son programme électoral de 2019, Unidas Podemos assurait dans son point 118 que « l’Espagne a une responsabilité historique à l’égard du Sahara Occidental, de ses habitants et de la solidarité entre nos peuples », assurant qu’« il soutiendrait par des actions concrètes le droit à la libre détermination du peuple sahraoui ».
Maintenant qu’Iglesias et Garzón font partie du gouvernement, il semble que cette insistance se soit diluée comme larmes dans le sable et, avec le temps, toutes ces proclamations se sont réduites comme peau de chagrin. Depuis leur entrée au gouvernement, le silence autour du Sahara Occidental a été presque absolu. Maintenant que le Maroc a pris la décision de réactiver le conflit en pénétrant dans le poste-frontière de Guerguerat (territoire libéré par le Front Polisario), tous deux se sont bornés à parler sur leur compte Twitter de la résolution de l’ONU du 13 février 1995 :
Pablo Iglesias
@PabloIglesias il « … réitère sa volonté de voir organiser, Conseil de Sécurité des Nations Unies |
Alberto Garzón
@agarzon En 1995, le Conseil de Sécurité |
Mais il est évident que ni Iglesias ni Garzón n’ont aucune espèce de compétence ni de responsabilité dans la politique extérieure de l’Etat espagnol, qui relève entièrement du Ministère des Affaires Etrangères et de la Présidence elle-même, tous deux entre les mains de leurs associés PSOE au gouvernement. Et nous connaissons bien la profonde amitié entre le PSOE et le Maroc, ce qui fait que toute initiative de Pedro Sánchez contraire aux intérêts de Mohamed VI serait une nouvelle extrêmement surprenante.
Le seul espoir de faire justice au Sahara Occidental repose ainsi sur la pression que pourraient exercer les membres les plus « progressistes » du gouvernement. J’aimerais devoir avaler mon chapeau, mais quelque chose me dit que cet espoir connaîtra la même fin que celui de mon père à l’égard du socialisme de Felipe González.
LE PSOE ET LE MAROC, UNE HISTOIRE D’AMOUR
Quelques tweets peuvent sembler peu de chose (et c’est bien le cas), mais, au gouvernement, celui qui a compétence là-dessus en fait encore moins. Pas une seule mention du droit légalement reconnu par l’ONU du peuple sahraoui à l’auto-détermination. Tout ce qu’a dit l’exécutif actuel à ce sujet, nous l’avons entendu vendredi dernier, 13 novembre, dans un communiqué du Ministère des Affaires Étrangères où le gouvernement de l’Espagne exhorte les parties à reprendre la processus de négociation et à avancer vers une solution « politique, juste, durable et mutuellement acceptable ». Cela fait joli, dit en langage diplomatique international. Mais, en langage courant, cela se traduit ainsi : « de notre côté, nous ne ferons rien, les choses restent comme elles sont ; mais nous sommes trrrès inquiets à l’idée que vous vous fassiez mal ; aussi, les uns et les autres, ne visez pas le visage ».
Communiqué 081
Soutien à l’ONU pour garantir un cessez-le-feu au Sahara Occidental
13/11/2020
Le gouvernement de l’Espagne soutient les efforts du Secrétaire Général des Nations Unies pour garantir le respect du cessez-le-feu décidé au Sahara Occidental et supervisé par la MINURSO. Ces derniers jours, l’Espagne a effectué des démarches dans ce sens, appelant à la responsabilité et à la retenue.
Le gouvernement souligne l’importance de la stabilité dans cette région stratégique, axe clé entre Afrique et Europe.
De même, il exhorte les parties à reprendre le processus de négociation et à avancer vers une solution politique, juste, durable et mutuellement acceptable conformément aux paramètres établis de façon répétée par les résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies.
Mais l’histoire de la trahison du PSOE envers le Sahara Occidental n’est pas nouvelle. Un des chapitres qu’on n’oubliera jamais dans les camps sahraouis eut lieu le 14 novembre 1976. À peine un an auparavant, l’Espagne avait fait cadeau du Sahara Occidental au Maroc et à la Mauritanie, en une histoire passionnante et triste où l’ancien monarque aujourd’hui en fuite Don Juan Carlos Ier joue un rôle important. En ce moment si troublé, avec une guerre si présente, Felipe González, alors secrétaire général du PSOE, se rendit dans les territoires libérés du Sahara Occidental (à cette époque, Twitter n’existait pas), où il prononça un discours passionné et intense en faveur du peuple sahraoui :
« Pour nous, il ne s’agit pas de droit à l’auto-détermination, mais de vous accompagner dans votre lutte jusqu’à la victoire finale (…) Plus notre peuple se rapproche de la liberté, plus fort et plus efficace sera le soutien que nous pourrons apporter à votre lutte. Le parti est convaincu que le Front Polisario est le guide qu’il faut vers la victoire finale du peuple sahraoui, et il est aussi convaincu que votre république indépendante et démocratique se consolidera à la tête de votre peuple et que vous pourrez rentrer dans vos foyers. Nous savons que vous avez l’expérience de bien des promesses faites et jamais tenues. Moi, je veux donc, non pas vous promettre quelque chose, mais m’engager devant l’Histoire. Notre parti sera avec vous jusqu’à la victoire finale ».
Felipe González, 1976.
Promesses non tenues de Felipe González
Après ces paroles, Felipe González ne remua pas le petit doigt pour le Sahara. Pire, il remua les deux mains contre lui pour ramasser l’argent et les faveurs venant de la monarchie alaouite qui opprime le peuple sahraoui, qui permirent à Felipe de passer ses vacances, une fois dans sa retraite dorée, dans la ville marocaine de Tanger, dans un petit palais à 2,5 millions d’euros, et de faire des déclarations dans lesquelles il exalta l’ « intégrité territoriale » du Maroc, justifiant l’occupation illégale du Maroc, et achevant ainsi la dernière étape de son voyage vers la trahison, la déloyauté et l’infamie qui marqueront à jamais dans notre souvenir ce vil personnage.
Mais la relation amoureuse du PSOE avec le Maroc ne s’arrête pas avec Felipe González. Le président « socialiste » suivant ne remua pas non plus le petit doigt pour le Sahara Occidental. Et il résolut la seule crise liée à cette question qu’il vécut au cours de son mandat en se mettant une fois de plus du côté du Maroc. Il s’agit de la grève de la faim menée dans l’aéroport de Lanzarote [dans les Canaries] par Aminetu Haïdar, une militante sahraouie arrêtée et expulsée d’El-Ayoun en 2009, après avoir été récompensée pour sa défense des droits humains. Sa grève dura plus de 30 jours, pendant lesquels son état de santé empira de plus en plus. La solution socialiste pour Aminetu Haïdar, trouvée par Zapatero et Moratinos, fut de lui donner le choix entre une requête d’asile politique, la nationalité espagnole ou la demande d’un nouveau passeport au Maroc. Mais A. Haïdar voulait seulement rentrer chez elle. La gestion de cette crise fut durement critiquée par le Front Polisario. Un an après cet épisode, Zapatero rencontra Mohamed VI, et au début de cette réunion, les micros captèrent une phrase du Président du Conseil d’alors, qui n’était pas destinée à être rendue publique, et qui résume parfaitement la situation : « Le plus important, c’est la photo ».
Cette année, et plus précisément le 17 juin dernier, le sénateur et responsable des Relations et de la Politique Internationale de Euskal Herria Bildu [coalition de gauche abertzale (patriotique) basque], Gorka Elejabarrieta, a demandé des explications au gouvernement espagnol sur la responsabilité de l’État espagnol à l’égard du Sahara Occidental, à travers ‘une question écrite. La réponse du « gouvernement le plus progressiste de l’Histoire » a été de s’en laver les mains, par des réponses telles que : « L’Espagne se considère déliée de toute responsabilité de caractère international en ce qui concerne l’administration du Sahara Occidental depuis la lettre envoyée au Secrétaire Général de l’ONU par le Représentant Permanent de l’Espagne auprès des Nations Unies » ; ou : « L’Espagne ne figure pas en tant que puissance administratrice sur la liste des territoires non autonomes des Nations Unies ».
Sénat
XIVe Législature
Registre général
Entrée 44.581
24/07/2020 14.46 Secrétariat d’Etat des relations avec les Cortes et des affaires
constitutionnelles
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT
(684) QUESTION ÉCRITE SÉNAT
684/18266 17/06/2020 37981
AUTEUR/E : ELIJABARRIETA DÍAZ GORKA (GPERB)
Réponse :
« En ce qui concerne l’information concernée, on signale que l’énoncé de la question fait allusion à une responsabilité supposée de l’Espagne sur le Sahara Occidental ; il est donc nécessaire de préciser que l’Espagne se considère déliée de toute responsabilité de caractère international en ce qui concerne l’administration du Sahara Occidental depuis la lettre envoyée au Secrétaire Général des Nations Unies par le Représentant Permanent de l’Espagne auprès des NN UU. Dans cette lettre, on informait que : « Le gouvernement espagnol, à la date d’aujourd’hui, met définitivement un terme à sa présence dans le Territoire du Sahara et estime nécessaire de déclarer officiellement ce qui suit : l’Espagne se considère dès maintenant déliée de toute responsabilité de caractère international en ce qui concerne l’administration provisoire établie pour ce territoire ».
Depuis cette date, l’Espagne ne figure pas comme puissance administratrice sur la liste des territoires non autonome des Nations Unies, ni dans les rapports annuels du Secrétaire Général des Nations Unies sur le Sahara Occidental ni dans aucune des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies qui traite cette question et la suit. Enfin, on signale que le Groupe de Travail sur les Disparitions Forcées des Nations Unies a demandé à plusieurs reprises à l’Espagne depuis 2014 si elle a des informations sur le lieu de séjour de Mohamed Sidi Brahim. Dans tous les cas, l’Espagne a répondu qu’elle n’a pas d’informations sur le lieu de séjour de M. Sidi Brahim.
Madrid, le 24 juillet 2020
LA RESPONSABILITÉ DE L’ESPAGNE À L’ÉGARD DU SAHARA
Cette manière cynique de l’Espagne de se laver les mains et de regarder ailleurs pendant des décennies se heurte frontalement à la réalité du conflit sahraoui et de son histoire récente. Si nous faisons une brève récapitulation, nous voyons que le Sahara Occidental fut réclamé en tant que territoire par l ‘Espagne en 1885, bien que l’occupation effective de l’intérieur du territoire n’ait été réalisée qu’en 1934. Du fait d’affrontements avec des nationalistes sahraouis, le gouvernement espagnol décida d’accorder au Sahara le statut de province espagnole en 1969 : à partir de là, il cessait d’être une colonie.
Et il fut une province jusqu’en 1975, date à laquelle les USA donnent le feu vert à un projet secret de la CIA, financé par l’Arabie Saoudite, pour arracher le Sahara espagnol à l’Espagne, du fait de son importance géostratégique, mais surtout parce que c’est une terre riche en phosphates, fer, pétrole et gaz. Comme dans tant d’autres zones du monde, sa richesse devint sa pauvreté.
C’est à ce moment de l’Histoire, en l’année 1975, alors que le dictateur Francisco Franco agonisait, qu’entre en scène la pièce maîtresse de l’histoire récente du Sahara Occidental : Juan Carlos Ier . Obsédé par l’idée de monter sur le trône, le Bourbon décide de jouer ses cartes et de s’aligner sur les USA pour qu’ils le soutiennent lors du processus de son couronnement après la mort de Franco. Une des conditions des USA est claire : c’est la cession du Sahara au Maroc. Juan Carlos accepte, et ainsi se met en route l’opération consistant à envahir la province espagnole au moyen d’une marche de 350 000 sujets marocains qui se feront passer pour d’anciens habitants de la zone. Il s’agit évidemment de la célèbre Marche Verte.
Les mines et les légionnaires espagnols furent retirés de la frontière. L’ONU, stupéfaite devant les événements, presse Hassan II de se retirer et de respecter la légalité internationale. Le Conseil de Sécurité se prononça, approuvant la résolution 380, dans laquelle « il déplore la réalisation de la marche », et « exhorte le Maroc à retirer immédiatement du territoire du Sahara Occidental tous les participants à la marche », ainsi qu’à lancer un nouvel appel au dialogue. Toutefois, tout était déjà décidé.
Haddamín M.Saíd@Haddamin_MSQué piden los saharauis a España? Muy sencillo: que adopte el ejemplo digno y grandioso de Portugal.
Haddamin M. Saïd
@Haddamin_MS
Que demandent les Sahraouis à l’Espagne ?
Très simple : qu’elle adopte le digne et grandiose exemple du Portugal.
Traduction
ARTICLE 293.
(Auto-détermination et indépendance du Timor Oriental)
1. Le Portugal continue à être lié par ses responsabilités, en conformité avec le droit international, de promouvoir et garantir le droit du Timor Oriental à la libre détermination et à l’indépendance.
2. Il appartient au Président de la République et au gouvernement de réaliser les actes nécessaires pour atteindre les objectifs mentionnés dans le paragraphe précédent.
Depuis lors, la légalité internationale et les droits humains de tout un peuple sont passés au second plan. Il ne sert à rien qu’aucun pays du monde ne reconnaisse la souveraineté marocaine sur le Sahara ; ce qui a primé dans ce conflit, c’est la préservation des relations entre le royaume du Maroc et le royaume d’Espagne, pour le bénéfice exclusif des dirigeants et des grands entrepreneurs des deux pays, et pour la plus grande souffrance du peuple sahraoui.
On pourrait dire que les choses en sont exactement au même point que lorsque l’immense Julio Anguita* dit à ce propos ce qui suit :
« LE GOUVERNEMENT ESPAGNOL EST RESPONSABLE DEVANT L’ONU DE TOUT CE QUI SE PASSE AU SAHARA »
Et ainsi passèrent les années et les décennies, avec un peuple abandonné et trompé, à la suite de promesses continuelles non tenues, et avec le dommage collatéral de se voir impliqué dans une guerre géostratégique et commerciale qui échappe à ses possibilités d’action. En bref, nous voilà déjà 45 ans après la trahison espagnole, malgré laquelle les Sahraouis ont encore misé sur la légalité internationale et la non-violence en 1991 avec la signature du Cessez-le-feu.
Depuis lors, l’ONU défend (en paroles) leur droit à un référendum d’auto-détermination à travers la résolution 1514. Pourtant, 29 années sont déjà passées depuis lors, et la situation reste la même : le Maroc réprime, emprisonne, torture, occupe et réduit au silence le peuple sahraoui sans aucune espèce de scrupule, et sans condamnation internationale. Mieux, il bénéficie du soutien de la France et des USA en tant que membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU, et de l’Espagne en tant que premier partenaire commercial, ce qui lui garantit de pouvoir faire ses quatre volontés, comme nous le voyons maintenant avec l’invasion du poste de Guerguerat.
Dans ce contexte, les jeunes Sahraouis savent qu’ils n’ont rien à perdre et ont évidemment appris qu’ils sont seuls dans cette guerre, ce qui les pousse irrémédiablement à vouloir prendre les armes contre l’agresseur marocain. Et il est certain qu’ils ont déjà beaucoup supporté.
Nous savons que le PSOE ne fera rien qui puisse gêner Mohamed VI. Le ministre de l’intérieur,
Fernando Grande-Marlaska va se rendre demain (vendredi 20 novembre 2020) à Rabat pour rencontrer Abdelwafi Laftit, son homologue marocain, dans le but de traiter le problème de la crise migratoire aux Canaries. Justement, la politique migratoire, avec les intérêts entrepreneuriaux et géostratégiques, est beaucoup plus importante que les droits humains et la responsabilité historique dans le conflit du Sahara, pour les gouvernements espagnols successifs.
Ainsi est-il possible qu’une des maigres chances de freiner l’escalade de violence actuelle au Sahara réside dans les pressions qu’on pourra exercer sur le gouvernement pour imposer une fois pour toutes la légalité et le respect des droits humains dans ce conflit. Et celui qui a la meilleure possibilité de le faire, c’est l’actuel associé au gouvernement du PSOE. Pablo Iglesias avait dit en son temps que c’est là une affaire de « dignité, de légitimité et de justice ». Nous allons maintenant voir si Alberto Garzón et lui sont cohérents avec leurs paroles, et s’ils suivent l’exemple de Julio Anguita ou celui de Felipe González. Pour le moment, leur silence les rapproche plutôt du second.
NdE
* Julio Anguita González ( 1941-2020 a été maire de Cordoue, secrétaire général du Parti communiste d’Espagne et coordinateur général d’Izquierda Unida.
Traduit par Rosa Llorens | ||
Edité par Fausto Giudice |
Merci à Tlaxcala
Source: https://www.eulixe.com/articulo/sociedad/gobierno-mas-progresista-historia/20201106184421021393.html