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Le gouvernement parallèle situé dans l’Est de la Libye, non reconnu par la communauté internationale, a officiellement remis hier mardi le pouvoir au nouvel exécutif unifié d’Abdelhamid Dbeibah, lors d’une cérémonie à Benghazi.
La passation s’est déroulée au siège du gouvernement parallèle, basé dans la deuxième ville de Libye et dirigé jusqu’à ce jour par Abdellah al-Theni. Le nouveau gouvernement unifié était représenté par Hussein Attiya al-Gotrani, un des deux vice-Premiers ministres de M. Dbeibah, accompagné de quelques ministres dont celui de l’Intérieur Khaled Mazen, venus de Tripoli, selon un journaliste de l’AFP. «La phase de divisions est terminée (…), le gouvernement d’union nationale est au service de tous les citoyens, quel que soit leur région», a déclaré M. Gotrani dans un bref discours relayé par la presse locale.
La Libye tente de s’extraire d’une décennie de conflit, depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi, un chaos marqué par l’existence ces dernières années de pouvoirs rivaux, en Tripolitaine (ouest) et Cyrénaïque (est). Le nouvel exécutif, qui doit permettre de clore ces divisions, est né d’un processus onusien mis sur orbite en février à Genève avant un vote de confiance «historique» du Parlement ce début de mois. Il doit mener la transition jusqu’à des élections nationales prévues le 24 décembre. Mardi dernier, le Gouvernement d’union nationale (GNA) de Fayez al-Sarraj, installé en 2016 dans l’ouest de la Libye, avait lui aussi remis le pouvoir au gouvernement d’Abdelhamid Dbeibah et au Conseil présidentiel. Lui aussi issu d’un accord politique parrainé par l’ONU, le GNA n’avait jamais obtenu la confiance du Parlement et se disputait depuis le pouvoir avec les autorités parallèles de l’Est. Cette région est contrôlée de facto par le militaire septuagénaire Khalifa Haftar, chef de l’autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL), qui n’a officiellement pas pris part aux pourparlers politiques. Un certain flou entoure son avenir politique, alors que sa légitimité est de plus en plus remise en cause, y compris dans son fief.
Nécessité du départ des mercenaires étrangers
La veille, lundi, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, s’est entretenu, par téléphone, avec le Premier ministre libyen par intérim, Abdelhamid Dbeibah au sujet de la nécessité de mettre fin au conflit en Libye et du départ des forces étrangères présentes dans ce pays «dans les plus brefs délais». Antony Blinken a évoqué avec Abdelhamid Dbeibah l’urgence de mettre fin au conflit en Libye «à travers un processus politique inclusif, assurant l’essentiel des services publics et garantissant la tenue d’élections libres et loyales le 24 décembre 2021».
Les deux parties ont également discuté de la nécessité de l’application des clauses de l’accord de cessez-le-feu, signé le 23 octobre 2020, dont celles prévoyant le départ des forces étrangères et des mercenaires hors de Libye «dans les plus brefs délais», selon un communiqué du département d’Etat américain. Selon la chaîne de télévision libyenne 218 TV, l’évacuation des mercenaires étrangers présents en Libye concernera dans une première phase les éléments armés venant de Syrie. Selon la même chaîne cette décision aurait été prise lors d’une réunion secrète, tenue à Tripoli, entre le nouveau gouvernement libyen et les services de renseignement turcs, en présence de l’ambassadeur turc.
Le gouvernement intérimaire a informé les autorités turques qu’il n’allait pas renouveler le contrat passé entre l’ancien GNA (gouvernement d’union nationale) de Faiz al Serraj et les mercenaires syriens et qu’il procédera à leur évacuation vers la Syrie à travers l’espace aérien turc, ajoute le média. Selon 218 TV, les forces turques continueront, cependant, à fournir une expertise et de la formation à l’armée libyenne conformément aux accords sécuritaire et militaire conclus avec l’ex-GNA. D’après des experts en sécurité, quelque 9.000 mercenaires syriens se trouvent en Libye. L’ONU évoque, quant à elle, quelque 20.000 combattants entre mercenaires et forces étrangères dans le pays. «10 bases militaires étrangères se trouvaient en décembre 2020 en Libye», avait indiqué récemment, l’ancienne représentante spéciale du SG de l’ONU en Libye, Stéphanie Williams. Sur un autre plan, le rapport d’un groupe d’expert de l’ONU publié il y a quelques jours a fait état de «l’inefficacité totale» de l’embargo sur les armes imposé par le Conseil de sécurité sur la Libye depuis 2011. (AFP et APS)
Libye / L’émissaire onusien Jan Kubis discute avec les nouveaux dirigeants
Au cours des discussions, les dirigeants du Conseil présidentiel «ont réitéré leur engagement à mettre en oeuvre la feuille de route du LPDF, notamment en favorisant un processus de réconciliation nationale global, l’unification des institutions souveraines, et surtout la tenue des élections.
L’envoyé spécial de l’ONU en Libye Jan Kubis a eu, mardi à Tripoli, des discussions avec plusieurs dirigeants libyens,notamment le président du Conseil présidentiel, Mohamed Younes Manfi, dans le cadre des efforts pour accélérer la mise en oeuvre de la feuille de route du Forum de dialogue politique libyen (LPDF), rapportent des médias. Arrivé lundi soir dans la capitale libyenne, l’émissaire onusien et chef de la Mission d’appui des Nations unies en Libye (MANUL), a été reçu par Mohamed Manfi et ses adjoints Abdullah El-Lafi et Musa Alkoni. M. Kubis était accompagné du sous-secrétaire général et de coordinateur de la MANUL, Raisedon Zenenga et de la Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice humanitaire des Nations unies pour la Libye, Mme Georgette Gagnon.
La visite de M. Kubis à Tripoli s’inscrit dans le cadre de ses engagements avec le nouveau gouvernement d’unité nationale intérimaire et divers acteurs libyens pour accélérer la mise en oeuvre de la feuille de route du Forum de dialogue politique libyen notamment en mobilisant le soutien et les ressources nécessaires pour organiser les élections nationales du 24 décembre 2021.
Au cours des discussions, les dirigeants du Conseil présidentiel «ont réitéré leur engagement à mettre en oeuvre la feuille de route du LPDF, notamment en favorisant un processus de réconciliation nationale global, l’unification des institutions souveraines, et surtout la tenue des élections le 24 décembre 2021», a-t-on souligné. La rencontre entre l’émissaire onusien et les dirigeants libyens a, en outre, porté sur «la nécessité d’accélérer la mise en oeuvre intégrale de l’accord de cessez-le-feu, y compris le retrait des combattants étrangers et l’unification des institutions de sécurité». Le Conseil présidentiel a également «réitéré la nécessité pour la Chambre des représentants d’accélérer le processus de nomination des postes de direction des institutions souveraines», a-t-on indiqué. Pour sa part, M. Jan Kubis a félicité les membres du Conseil présidentiel pour «le début officiel de leurs travaux», saluant aussi «leur engagement en faveur de la feuille de route du LPDF». Il a affirmé le «soutien unifié de l’ONU et de la communauté internationale au peuple libyen ainsi qu’aux nouveaux dirigeants pour qu’ils respectent leurs engagements dans les délais définis par le LPDF».
De plus, l’envoyé spécial de l’ONU a félicité le Premier ministre, M. Abdelhamid Debeibah, pour «le vote de confiance historique de la Chambre des représentants et le transfert sans heurts du gouvernement d’entente nationale». Il a informé le Premier ministre «des résultats de ses visites dans plusieurs capitales européennes et régionales ainsi que de ses activités de sensibilisation auprès d’un certain nombre de parties prenantes internationales et régionales de haut niveau», l’assurant du «soutien unanime» de la communauté internationale à son gouvernement pour, a-t-il précisé, relever les défis économiques, humanitaires, sécuritaires, des droits de l’Homme et du développement dans le pays.
Par ailleurs, MM. Kubis et Debeibah «ont convenu de l’importance de donner la priorité aux besoins de la population, y compris la réponse à la pandémie de COVID-19, et la fourniture de services essentiels». Ils ont souligné «la nécessité urgente d’approuver le budget national pour assurer la prestation de services, allouer des ressources à la gouvernance locale et organiser les élections nationales le 24 décembre 2021».
L’émissaire onusien a aussi rencontré la ministre des Affaires étrangères, Mme Najla AlMangoush, qui a exprimé «sa gratitude pour le soutien de l’ONU et de la communauté internationale à la Libye pendant cette période critique».
La ministre a aussi «souligné la nécessité d’une approche plus coordonnée pour s’attaquer aux causes profondes du conflit en Libye afin de lancer un processus global et réaliste de réconciliation nationale et de justice réparatrice».
L’envoyé spécial du SG de l’ONU, Antonio Guterres, organisera une série de réunions avec diverses parties prenantes libyennes dans les prochains jours, a-t-on fait savoir.
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LIBYE / Réunion spécial du Conseil de sécurité de l’ONU
Le Conseil de sécurité a organisé, hier mercredi, une réunion consacrée à la Mission d’appui des Nations-Unies en Libye (Manul) et aux sanctions imposées à ce pays. Cette réunion qui s’est tenue en visioconférence prévoit l’intervention du chef de la Manul, Jan Kubis et celle du président du comité du Conseil de sécurité chargé de la question des sanctions contre la Libye, T. S. Tirumurti.
Une séance de débats est prévue à la suite de ces interventions. Il s’agira également, lors de cette rencontre, de faire le point sur le mécanisme de suivi du cessez-le-feu en vigueur en Libye depuis le 23 octobre 2020.
Le délai d’application des sanctions imposées à la Libye concernant la vente illégale de produits pétroliers expirera le 30 avril prochain, au moment où le mandat du groupe d’experts chargés de faire le suivi de cette question touchera à sa fin le 15 mai prochain.
D’autre part, la résolution du Conseil de sécurité 2526, autorisant des représentants des Nations-Unies à inspecter des navires suspectés de violer l’embargo sur les armes en Libye, ne sera plus en vigueur dès le 5 juin prochain.
L’autorisation d’inspecter des navires suspectés de trafic d’êtres humains et de contrebande, en vertu de la résolution 2546 du Conseil de sécurité, expirera, quant à elle, le 3 octobre prochain.
De même que le mandat de la Manul touchera officiellement à sa fin le 15 septembre 2021. L’organisation des élections présidentielles du 24 décembre 2021, et le départ des forces étrangères et des mercenaires étrangers, figurent aussi parmi les préoccupations du gouvernement intérimaire libyen, et des membres du Conseil de sécurité.
20 000 mercenaires et combattants étrangers, 10 bases militaires
Ces points ont été, d’ailleurs, évoqués, lundi dernier lors d’un entretien téléphonique entre le secrétaire d’État américain, Antony Blinken et le Premier ministre libyen par intérim, Abdelhamid Dbeibah. Les deux parties ont discuté de la nécessité de l’application des clauses de l’accord de cessez-le-feu, signé le 23 octobre 2020, dont celles prévoyant le départ des forces étrangères et des mercenaires hors de Libye «dans les plus brefs délais», informe un communiqué du département d’État américain.
D’après des experts en sécurité, quelque 9 000 mercenaires syriens se trouvent en Libye. Selon certaines sources, ils seraient en train de quitter le pays. L’ONU évoque, quant à elle, quelque 20 000 combattants entre mercenaires et forces étrangères dans le pays. «10 bases militaires étrangères se trouvaient en décembre 2020 en Libye», avait indiqué récemment, l’ancienne représentante spéciale du SG de l’ONU en Libye, Stéphanie Williams.
Sur un autre plan, le rapport d’un groupe d’expert de l’ONU publié il y a quelques jours a fait état de «l’inefficacité totale» de l’embargo sur les armes imposé à ce pays par le Conseil de sécurité depuis 2011.
R. I.