Algérie-Maroc: Toute honte bue !

     par Ghania Oukazi

Tout en rappelant qu’Israël a reconnu la prétendue et illégale souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental, le roi Mohamed VI ne s’est pas gêné pour appeler à normaliser ses relations avec l’Algérie.

Mohamed VI n’a, encore une fois, pas raté l’occasion de la fête de son trône pour se présenter comme «un homme de paix et de réconciliation» face à l’Algérie. Comme chaque année, il ne fallait pas s’attendre à autre chose qu’à «ce beau rôle» qu’il veut à tout prix se donner face à l’Algérie mais surtout vis-à-vis de la communauté internationale pour laquelle il veut prouver qu’il est «un homme de paix et de réconciliation». Il veut ainsi montrer et faire entendre que c’est l’Algérie qui est un mauvais voisin. La première occasion toute propice a été, en effet, la célébration de la fête de son trône durant laquelle il a prononcé un discours diffusé sur sa télévision nationale. Il a en évidence glissé sa demande «éternelle» de réouverture des frontières entre les deux pays fermées depuis 1994. Il l’a fait samedi soir en s’adressant aux Marocains et à l’opinion internationale en faisant fi de tous les points noirs qui émaillent les relations entre l’Algérie et son pays. Il a lancé : «Nous prions le Très-Haut pour un retour à la normale et une réouverture des frontières entre nos deux pays voisins et nos deux peuples frères». En une phrase, il estime avoir tout dit et réglé un contentieux des plus lourds qui a rendu les relations entre les deux pays exécrables. Grand provocateur qu’il est, tout autant que nombreux de ses subordonnés, Mohamed VI joue et veut gagner à propos de la question du Sahara Occidental. Aidé et soutenu par de grandes puissances, il a toujours ignoré la qualité de décolonisation qu’attribuent à cette question toutes les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. Son ministre des Affaires étrangères ainsi que son représentant aux Nations unies à New York déversent leur venin à propos de ce dossier même quand l’occasion ne leur est pas donnée. Ils en ont fait leur raison d’être «diplomate». Bourita a essayé, faut-il le rappeler, de torpiller le Sommet arabe qu’Alger a abrité le 1er novembre, n’était-ce la perspicacité des politiques et des diplomates algériens qui ont su déjouer toutes ses tentatives malhonnêtes.

Depuis ses frontières ouest fermées depuis 1994, jusqu’à sa rupture pure et simple de ses relations diplomatiques, en passant en évidence, par l’officialisation des relations entre Rabat et l’entité sioniste, l’Algérie a toutes les raisons pour affirmer que le Makhzen peut trahir à n’importe quel moment. Et c’est d’ailleurs toute honte bue que Mohamed VI a claironné dans son discours qu’Israël a reconnu la prétendue marocanité du Sahara Occidental. N’est-ce pas une provocation par laquelle il veut titiller l’Algérie alors qu’il sait qu’il a miné son voisinage avec elle en permettant à l’armée et aux services de sécurité et du renseignement israéliens de s’installer tout près de ses frontières ouest.

Avec cette invasion de l’entité sioniste à qui il a déployé le tapis rouge, il ose affirmer que «nous rassurons nos frères en Algérie, leur direction et leur peuple qu’ils n’auront jamais à craindre de la malveillance de la part du Maroc». C’est à se demander de quel rapprochement entre les deux pays parle-t-il, sous quelle forme et avec ou sans Israël. «Nous leur confirmons aussi tout le prix que nous attachons aux liens d’affection et d’amitié, aux échanges et aux interactions entre nos deux peuples», a-t-il continué de dire faisant semblant d’être innocent de tout ce qui dérange l’Algérie. Pourtant, Alger a toutes les raisons pour s’en méfier.


                                                                                          Invraisemblances

par Abdelkrim Zerzouri

Le roi du Maroc Mohamed VI a affirmé samedi, lors du discours traditionnel marquant son accession au trône, que «les relations avec l’Algérie étaient stables». Il a exprimé son souhait que «les choses reviendront à la normale et que les frontières entre les deux pays seront rouvertes». Optimisme béat ou vains mots qui se répètent à chaque discours traditionnel ? Malheureusement, la réalité est clairement loin, très loin, du discours. Non seulement les frontières entre les deux pays sont fermées depuis 1994, mais il y a également, depuis le 22 septembre 2021, la fermeture de l’espace aérien de l’Algérie à tous les avions civils et militaires marocains et à tous ceux immatriculés dans le royaume chérifien, et plus encore, il y a rupture des relations diplomatiques entre les deux pays depuis le 24 août 2021 et qu’on ne voit pas se remettre en place, ni dans les actes ni dans les intentions qu’on pourrait observer sur ce plan. Sauf à dire que «les choses reviendront à la normale», le roi Mohamed VI n’a pas évoqué ces problèmes qui sont, pourtant, plus importants à résoudre que la réouverture des frontières terrestres, voire des préalables à cette approche. Pourquoi le roi du Maroc présente-t-il une vision contraire à ce qui caractérise réellement les relations entre les deux pays ? Peut-on imaginer un seul instant l’Algérie s’inscrire dans cette perspective de la réouverture des frontières terrestres entre les deux pays alors qu’il n’y a aucun changement dans les attitudes du Maroc qui ont conduit à la dégradation des relations bilatérales ? Comme à son habitude quand il parle de la «main tendue» à l’Algérie, le roi Mohamed VI a usé d’un ton rassurant.

La sagesse n’est pas que paroles. En vérité, le Maroc «juge ses relations avec les pays étrangers selon le prisme de leurs positions sur la question du Sahara occidental» (dixit Mohamed VI). Des pays qui expriment une autre position sur cette question sont déclarés ennemis du Maroc, que dire alors de l’Algérie qui soutient ouvertement l’organisation d’un référendum d’autodétermination au Sahara occidental ? Le Maroc peut-il oublier «ce prisme» à travers lequel il juge ses relations avec le monde extérieur ? S’il ne le fait pas, impossible de croire ce que dit le roi Mohamed VI alors qu’en vérité il a complètement détaché le Maroc de son voisinage au profit d’une politique résolument tourné vers l’international.


                                          Mohamed VI souhaite une «normalisation» avec l’Algérie

                                                                  Quel «retour à la normale», Majesté?

    Le roi du Maroc Mohamed VI a de nouveau appelé, samedi soir, à un «retour à la normale» avec l’Algérie et, surtout, à la réouverture des frontières entre les deux pays, faisant mine d’ignorer la rupture des relations diplomatiques en 2021. Comme à chaque discours traditionnel marquant l’anniversaire de son accession au trône, il a «prié le Très-Haut» à cet effet, ressassant la rengaine d’une assurance royale selon laquelle les «frères en Algérie, leur direction et leur peuple n’auront jamais à craindre de la malveillance de la part du Maroc». À l’entendre, le monarque alaouite réitère chaque année la promesse selon laquelle il attache «tout le prix aux liens d’affection et d’amitié, aux échanges et aux interactions entre nos deux peuples».

Mais alors, dira-t-on, pourquoi ce discours du Trône, en forme de bilan intérieur et de feuille de route pour les prochaines échéances, reprend-il chaque fois la même litanie à l’adresse de l’Algérie, de son peuple et de ses dirigeants? En appelant sans cesse à un «apaisement» fictif, le roi du Maroc fait l’impasse sur les véritables causes de l’escalade qui a conduit à la situation actuelle, allant d’une série de diatribes mensongères et pathétiques, déversées à flots de médias et de manoeuvres diplomatiques, à une guerre narcotique exponentielle contre l’Algérie. Comme aussi, en 1994, les accusations outrancières, démenties par l’histoire, suivies d’agressions contre nos ressortissants et de spoliation de leurs biens, ainsi que l’imposition unilatérale du visa pour «protéger» le royaume. Le gel, unilatéral également, de l’UMA a mis fin aux aspirations des peuples de la région, y compris le peuple marocain auquel le peuple algérien est et restera profondément uni, par-delà les vicissitudes de la politique du Makhzen et de son suzerain sioniste. Non content d’avoir poursuivi cette politique hostile, le royaume du Maroc en est arrivé à l’impensable, celui de la normalisation et de la connivence avec l’entité sioniste, accueillie à bras ouverts avec des accords militaires et des visites tonitruantes de responsables sionistes, au moment où des dizaines de Palestiniens tombent, chaque jour, en martyrs. Voilà des années que le roi Mohamed VI reprend le même discours, à croire qu’il n’est guère informé des frasques de la diplomatie marocaine, de l’affaire Pegasus, de la corruption éventée jusque dans les rangs du Parlement européen et de bien d’autres sordides affaires.
Comme il semble avoir oublié les sorties ubuesques de l’ambassadeur Omar Hillale, à maintes reprises, dans de tristes tentatives de sape de l’action de l’Algérie, au sein des instances internationales. Les dérives de la diplomatie monarchique sont, désormais, confortées par les velléités de l’entité sioniste qui vise à transformer la région maghrébine en un nouveau terrain de confrontation. Quant à l’insistance forcenée de présenter l’Algérie comme une partie prenante du dossier du Sahara occidental, elle ne résiste pas aux faits et les faits sont têtus. La question du Sahara occidental relève de l’ONU et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, à commencer par le droit du peuple sahraoui à son autodétermination alors que le royaume du Maroc s’évertue, depuis des décennies, à empêcher la tenue du référendum dont est pourtant chargée la Minurso.
Tout le reste n’est que de la mauvaise littérature. Chaque année, avec la même opiniâtreté et la même démarche qui vise à cacher le soleil avec un tamis, le roi Mohamed VI reprend un discours éculé où on observe la même sémantique, la même rhétorique et la même obsession.
Appeler à la «sagesse», en faisant fi du jugement de la Cour européenne infirmant les accords avec l’UE, méconnaître la situation au Sahel et les souffrances du peuple palestinien martyr, notamment à El-Qods dont le roi marocain préside encore le Comité, ne sont, en définitive, que des effets de manche. Aussi, n’y a-t-il plus qu’à vous souhaiter, Majesté, comme le veut l’usage, une bonne santé et une meilleure lucidité, ainsi qu’une réelle prospérité au peuple frère marocain. /

Chaabane BENSACI


                                     Selon un expert en relations internationales: «La nouvelle Algérie dérange»

par R. N.

Selon Badis Khenissa, président de la Commission coopération et de la communauté nationale à l’étranger au sein de l’Observatoire national de la société civile, qui était hier l’invité de la radio nationale Chaîne 3, «la nouvelle Algérie dérange».

«Elle dérange parce qu’elle a renoué avec l’espoir», qu’elle «est en train de mener un redéploiement diplomatique au niveau du continent africain et sur l’échiquier international», et qu’elle a su «être un acteur majeur par le travail de fond de sa diplomatie qu’on peut qualifier de diplomatie bienveillante, altruiste et pragmatique». «Certains Etats ont du mal à assimiler, encore moins à se conformer, à l’émergence de l’Algérie. Ils devraient, parce que c’est exactement ce qui devrait se passer dans les années et les décennies à venir. Parce que l’Algérie entend bien faire entendre sa voix et celle des peuples qu’elle représente, parce qu’elle est consciente de cette responsabilité qui lui incombe au sein du Conseil de sécurité, mais également au sein de l’Afrique. Parce qu’il faut rappeler que l’Algérie a fait rempart de cette tentative de hold-up de l’entité sioniste au sein de l’Union africaine», affirme l’expert en relations internationales. Pour M. Khenissa, «l’Algérie a cette prise de conscience de cette action factuelle dont l’équation qui entend aujourd’hui s’inscrire et pérenniser son action politique et géostratégique». «Donc, oui, la France peut être animée par ce néocolonialisme qui lui colle à la peau, et qu’elle a du mal à s’en découdre. Elle a du mal à considérer que l’Algérie est devenue un acteur majeur et la porte de l’Afrique. Elle est devenue le porte-voix des sans voix. Donc, beaucoup d’agrégats d’actions de l’Algérie qui dérangent en premier lieu la France», affirme encore l’intervenant. Interrogé sur le «bras médiatique France 24», l’intervenant affirme : «Quand la France évoque ce recul en Afrique, elle l’évoque sous la houlette de la francophonie, mais c’est un recul politique. N’empêche que ce recul a été prémédité par l’attitude hautaine et condescendante de la France au regard de ces peuples africains qui sont spoliés depuis des décennies, voire des siècles, de leur droit au développement et de vivre dignement». Interrogé aussi sur l’attitude de la France vis-à-vis des médias russes, depuis le début de la crise de l’Ukraine, M. Khenissa relève «une incohérence» à se considérer comme «le berceau des droits de l’homme» et «cette attitude de la France qui est complètement à l’opposé».


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