Par Arezki Ighemat, Ph.D in economics Master of Francophone Literature (Purdue University, USA)
“America has two possible futures: one rooted in joy, compassion, equality and common good; the
other rooted in anger, domination, ego, and greed” (posted in “Democrats, Facebook, 10 August 2024).
“When I return to the White House, I will fire the radical Left accreditors that have allowed our colleges to become dominated by Marxist Maniacs and lunatics” (Agenda 47: Trump’s Dystopian Nightmare Plan for America Revealed », Forward Kentucky, 22 December 2023).
“In our vision of the future, we see a place where every person has the opportunity not just to get by,
But to get ahed—a future where no child has to grow up in poverty, where every senior can retire with
Dignity, and where every worker has the freedom to join a union” (Shaunee Miranda, VP Harris tells
teachers union she’s‘fighting for the future’, blasts Project 2025, Alabama Reflector, July, 25, 2024).
INTRODUCTION
Jamais, probablement, dans l’histoire politique américaine une élection présidentielle n’aura été aussi décisive que l’élection du 5 novembre prochain. Cette élection intervient, en effet, à un moment où les Américains n’ont jamais été aussi désunis et divisés sur l’avenir de leur pays. L’enjeu majeur de l’élection prochaine est entre, d’un côté, le maintien et la survie de la démocratie américaine et, de l’autre, l’établissement d’une aristocratie/plutocratie. Autrement dit, entre, d’une part, la préservation et la défense des libertés fondamentales et la protection des acquis sociaux des Américains—telle est la vision du Parti Démocratique et des candidats à l’élection prochaine—et, d’autre part, la suppression de ces libertés et l’élargissement du fossé entre les « Have » et les « Have Not »–qui est la vision du Parti Républicain et de ses candidats, l’ancien président Donald Trump et le candidat à la vice-présidence, J.D Vance. Cette guerre entre les deux visions, qui peuvent être symbolisées par les deux slogans : l’un est « Make America Great Again » (MAGA), déjà utilisé par les candidats républicains lors de la campagne de 2016 et repris dans la campagne actuelle, et les multiples slogans non encore officialisés avancés par les candidats démocrates, qui pourraient se résumer à « Make America Happy Again » (MAHA). Cette guerre des visions se fait généralement simultanément avec une autre forme de guerre, plus personnelle, consistant pour les partis et les candidats à s’attaquer mutuellement sur les traits et les actes personnels des candidats. Entre maintenant et le 5 novembre, chaque camp fera tout pour déterrer les moindres anecdotes et problèmes que le camp opposé a pu avoir dans le passé proche ou lointain et qui pourraient être utilisés pour le décrédibiliser. Certains observateurs considèrent que le résultat de l’élection présidentielle est déterminé autant par la guerre personnelle que par la guerre des visions. Quelle sera, dans la campagne actuelle, celle des deux guerres qui va décider du sort de l’élection ? Nous ne le saurons que le 5 novembre prochain. Pour donner quelques pistes de réflexion, nous examinerons successivement : (1) le projet « Make America Great Again » (MAGA) ; (2) le « Projet 2025 » et l’Agenda 47 » (ces deux derniers étant la source d’inspiration du projet MAGA) ; (3) le projet « Make America Happy Again » (MAHA) ; et (4) la guerre personnelle entre le Parti Démocratique et le Parti Républicain.
LE PROJET « MAKE AMERICA GREAT AGAIN” (MAGA)
Le mouvement MAGA (Make America Great Again), qui avait été créé lors de la campagne électorale de Trump en 2016, est fondé sur l’idée que l’Amérique était autrefois un grand pays, mais qu’il a perdu de son aura en raison des mauvaises politiques menées par les démocrates. Ce slogan a été inspiré d’un slogan similaire utilisé par l’ancien président Ronald Reagan en 1980 et intitulé « Let’s Make America Great Again » (Rendons l’Amérique Grande A Nouveau !). Dans son livre « Time to Get Tough : Make America Great Again”, publié en 2015, Trump avait déjà parlé de ce slogan. Dans une précédente édition de ce livre (2011), Trump a utilisé un slogan légèrement différent : « Make America #1 ». Les partisans de ces slogans, avec à leur tête Trump, pensent qu’ils sont en mesure de redorer le blason des Etats-Unis si leurs candidats venaient à être élus. Un des dérivés de ces slogans est celui de « America First » (L’Amérique d’Abord) qui implique l’application de politiques protectionnistes et la prise en compte des intérêts des Etats-Unis avant ceux des autres pays. « America First » implique aussi des politiques de restriction, voire l’arrêt, de l’immigration, notamment celle provenant des pays du « Global South », et plus particulièrement des pays arabo-musulmans. Ce slogan signifie aussi que les Etats-Unis réduisent, voire mettent fin, à leur implication financière et politique dans les alliances internationales (OTAN, et organisations des Nations-Unies). Les Républicains, et surtout Trump, pensent que la contribution financière des Etats-Unis à ces alliances et organisations internationales est trop élevée et que les autres pays membres ne participent pas assez. Sur le plan international, les promoteurs de MAGA sont pour un soutien financier, militaire et diplomatique inconditionnel à Israel et ferment les yeux sur les politiques d’agression, d’annexion et de colonisation d’Israel. Il faut rappeler que Trump, lors de son premier mandat (2016-2020), avait pris deux mesures montrant ce soutien indéfectible à Israel : (1) la décision de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israel et le transfert de l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem, et (2) la contraction des Accords dits d’Abraham par lesquels les Emirats Arabes Unis, Bahrain et le Maroc ont rétabli leurs relations diplomatiques avec l’Etat d’Israel. Trump voudrait, s’il était élu, réaliser le même accord—dont il avait lancé l’idée lors de son premier mandat—entre l’Arabie Séoudite et Israel. Sur le plan intérieur, comme sur le plan international, le projet MAGA est également contre toute politique de protection de l’environnement. Les promoteurs de MAGA pensent, en effet, que cela irait à l’encontre du développement économique. C’est ainsi qu’ils sont partisants de l’exploitation maximale des énergies fossiles et des gaz de schiste. Dans le domaine économique, les tenants de MAGA promettent de réduire les impôts en faveur des grandes entreprises. Sur le plan judiciaire, Trump promet aussi une revanche contre tous ceux qui l’ont trainé devant les tribunaux et tous ses opposants politiques, y compris le président Biden et sa famille.
LE PROJETS-SOURCES DE MAGA : LE « PROJET 2025 » ET « AGENDA 47 »
Plusieurs analystes et experts de la politique américaine pensent que le projet MAGA est inspiré essentiellement de deux projets plus larges : le « Projet 2025 » et « Agenda 47 ».
Le « Projet 2025 »
Ce projet est celui d’une transition présidentielle initiée par « The Heritage Foundation », un think tank américain fondé en 1973 à Washington D.C visant à promouvoir le rôle et l’influence du Président—et de l’Exécutif en général—dans les domaines économique et politique et l’impact de la religion chrétienne dans les affaires publiques. Le Projet envisage, entre autres : (1) de prendre le contrôle du Département de Justice (DOJ), du FBI (Federal Bureau of Investigation), du Département du Commerce, de la FCC (Federal Communications Commission) ; (2) de démanteler le Département de la Sécurité Intérieure (DHS) ; (3) réduire la règlementation concernant le changement climatique ; (4) favoriser les énergies fossiles sur les énergies renouvelables ; (5) entreprendre de vastes réductions de taxes, notamment en faveur des entreprises ; (6) abolir le Département d’Education et le transfert ou l’élimination de ses programmes ; (7) réformer le « National Institute of Health » (NIH) pour l’aligner sur des vues plus conservatrices ; (8) réduire Medicare et Medicaid, deux programmes d’aide médicale à la population ; (9) s’opposer à la pratique de la contraception et de l’avortement ; (10) s’opposer à la protection des personnes à orientations sexuelles LGBT ; (11) mettre fin à la diversité, équité et inclusion prévus par le programme DEI (Diversity, Equity and Inclusion) et celui appelé « Affirmative Action » (favorisant les minorités sociales comme les Afro-Américains, les Latinos, etc) ; (12) détenir et déporter les immigrants se trouvant illégalement aux Etats-Unis ; (13) déployer les forces de l’armée en cas de protestations populaires ; (14) appliquer la peine de mort dans les cas jugés nécessaires ; (15) contrôler la Chambre des Représentants et le Sénat du Congrès. Il faut souligner que « The Heritage Foundation », qui a fondé le « Projet 2025 », est étroitement lié à Trump et est géré par un certain nombre de groupes conservateurs ayant des liens avec Trump. L’actuel directeur de cette Fondation, Kevin Roberts, considère que son organisation a pour mission « d’institutionnaliser le ‘Trumpisme’ », c’est-à-dire « un populisme d’extrême droite, le néo-nationalisme, l’autoritarianisme et le néo-fascisme ainsi que l’anti-immigration, la xénophobie, le nativisme, le racisme, le « conspirationnisme » l’isolationnisme, le nationalisme chrétien, la misogynie, et l’anti-LGBT. Une autre caractéristique du Trumpisme est l’utilisation des émotions, des sentiments et des outils modernes de la communication et des médias sociaux pour agir sur ces émotions. Le sociologue américain Philip S. Gorski (Yale University) a écrit à ce propos « Media intimidation, mass propaganda, voter suppression, court packing, and even armed paramilitaries—many of necessary and sufficient conditions for an authoritarian devolution –are gradually falling into place” (L’intimidation médiatique, la propagande de masse, la suppression des votes, le remplissage des tribunaux, et même l’usage des milices armées–plusieurs des conditions nécessaires et suffisantes pour un gouvernement autoritaire—sont mises en place graduellement » (voir Philip S. Gorski, The Flag and the Cross : White Christian Nationalism and the Threat to American Democracy, Oxford University Press, 2022, et « Return of the Strong Gods : Nationalism, Populism, and the Future of the West, Regnery Gateway, 2021).
« Agenda 47 »
« Agenda 47 » est un projet pour élire Trump comme 47è Président en novembre prochain. Cet Agenda propose un certain nombre d’actions pour réaliser cet objectif : (1) mettre fin au système actuel de gouvernement ; et (2) placer les Etats-Unis sur le même palier que la Russie et les autres régimes autocratiques. Les principales actions envisagées sont : (a) la criminalisation de l’homosexualité ; (b) réduction, voire élimination totale des libertés académiques, notamment en mettant en place des programmes d’endoctrinement des élèves en leur inculquant l’idéologie de droite. A ce propos, Trump a déclaré « When I return to the White House, I will fire the radical Left accreditors that have allowed our colleges to become dominated by Marxist Maniacs and lunatics” (Lorsque je retournerai à la Maison Blanche, je virerai tous les radicaux de Gauche qui ont permis à nos collèges de devenir dominés par les maniaques et lunatiques Marxistes) (voir « Agenda 47 : Trump’s Dystopian Nightmare Plan for America Revealed » (Forward Kentucky, 22 December 2023) ; (c) réduction du financement des agences fédérales chargées de la protection de l’environnement (EPA, OSHA, CPSB, IRS, Department of Labor, etc). ; (d) mise au silence des médias critiques et réduction, voire suppression de la liberté de presse ; (d) transformation du pays en un Etat policier (par exemple, par la création de camps de concentration où seraient placés les millions de sans-papiers et les ennemis politiques de Trump ; (e) corruption du gouvernement fédéral (Trump envisage de remplacer les hauts fonctionnaires du gouvernement par des personnes qui lui sont loyales dans le cadre d’un programme intitulé « Schedule F » qu’il a mis en place par le décret du 21 octobre 2020 et qui a été supprimé par le Président Biden) ; (f) institution de la police fédérale comme sa police privée de Trump, notamment pour poursuivre les « Libéraux », les membres du mouvement « Black Lives Matters », et même le Président Biden et sa famille ; (g) construction de « Freedom Cities » (villes de libertés) où les milliardaires possèderaient les villes et appliqueraient des lois spécales ; (h) élimination de la démocratie en Europe et dans le monde, notamment en réduisant la contribution des Etats-Unis à l’OTAN et les organisations internationales de l’ONU (voir Thom Hartman, The Hartman Report, quoted in « Agenda 47 »).
LE PROJET « MAKE AMERICA HAPPY AGAIN’ (MAHA)
Les democrates—représentés par la candidate à la Présidence Kamala Harris et le candidat à la Vice-Présidence Tim Waltz—n’ont pas encore un slogan officiel définitif de campagne. Ils ont avancé plusieurs slogans depuis le début de leur campagne–« We are not going back » (Nous ne retournerons pas en arrière) ; « For the People (Pour le Peuple) ; « When we fight, we win » (Lorsqu’on se bat, on gagne)—mais aucun de ces slogans n’a encore été officiellement retenu. Un autre slogan a également été avancé et qui, à notre point de vue, aurait beaucoup de chance d’attirer les électeurs est celui de « Make America Laugh Again « (Faire Rire l’Amérique à Nouveau, MALA). Nous pensons qu’un slogan similaire mais peut-être plus générique serait « Make America Happy Again », MAHA) (Rendre l’Amérique heureuse à nouveau). En effet, ce qui manque à l’Amérique, ce n’est pas tant la « grandeur »–elle est déjà la première puissance sur le plan économique et politique—mais plutôt de faire que les Américains soient plus heureux car, ce qu’ils ont connu avec le gouvernement de Trump (2016-2020), c’est surtout la tristesse, la déception, la peur, la haine et la division de la famille et de la société américaine. Le nouveau slogan « Make America Happy Again » pourrait leur donner de l’espoir qu’ils ne connaîtront plus le climat morosité instauré par Trump et qu’ils pourront à nouveau avoir confiance en leur gouvernement et en l’avenir de leur pays. Trump a, en effet, instillé ou aggravé, pendant son premier mandat : la division sociale entre les « Have » et les « Have Not », les « Républicains et les Démocrates », les « Blancs et les personnes de couleur » ; la haine ; l’anxiété ; l’insécurité ; l’inégalité et le désintérêt des Américains pour tout ce qui est politique. Ce nouveau slogan, MAHA, ne signifie pas, bien sûr, l’arrêt de la politique de développement économique qui a toujours été un facteur primordial du gouvernement américain, quelle que soit sa couleur politique. Il s’agit plutôt de créer les conditions d’une ambiance socio-politique plus apaisée où les Américains retrouveraient leur confiance vis-à-vis de leur gouvernement et de leurs institutions et n’expérimenteraient plus les inquiétudes qu’ils avaient ressenties lorsque Trump était Président et les appréhensions qu’ils ont sur son retour éventuel au pouvoir. En effet, si les Américains attachent une importance majeure à leurs conditions économiques, ils sont aussi soucieux de conserver leurs libertés fondamentales collectives et individuelles et la défense de leur modèle démocratique de gouvernance. Ils ont toujours en mémoire ce qui s’est passé le 6 janvier 2020 lorsque Trump et ses partisans avaient lancé un assaut contre le Capitole—le siège du Congrès et le symbôle de la démocratie américaine—en vue de faire annuler les résultats de l’élection de Joe Biden. C’est probablement dans ce contexte qu’il faut comprendre le slogan avancé par Kamala Harris « We are not going back » (Nous ne retournerons pas en arrière). Les Américains ne voudraient pas, en effet, retourner à ce passé récent plutôt sombre, mais élire un gouvernement qui créerait un climat de détente intérieure et extérieure et qui défendrait les libertés et unirait, et non diviserait, le pays. C’est là le sens de l’autre slogan avancé par les démocrates : « Make America Laugh Again » ou encore celui que nous proposons, « Make America Happy Again ». Harris et Waltz semblent avoir compris l’importance de tels slogans en affichant, lors de leurs meetings de campagne, une attitude et des visages souriants par opposition à ceux de leurs compétiteurs Trump et Vance qui ne sourient jamais et qui donnent l’impression d’une volonté de vengeance contre leurs ennemis politiques. Cette apparence extérieure peut paraître secondaire, mais elle joue un rôle primordial car elle représentent l’espoir pour les Américains qu’ils auront un avenir meilleur. L’autre avantage qu’ont Harris et Waltz est qu’ils font souvent campagne ensemble, ce qui est un signe de leur unité de vue et d’action. Les candidats démocrates donnent un autre signal positif par rapport aux candidats républicains lors de leurs meetings de campagne : ils parlent des sujets qui préoccupent les Américains—le niveau de vie, l’égalité sociale, la justice, la politique d’immigration, les droits des femmes, notamment le droit à l’avortement, les droits des LGBT, etc—alors que les candidats républicains centrent leur campagne sur les critiques et attaques personnelles contre les démocrates (noms, ethnicité, croyances religieuses, traits physiques et mentaux, etc). Kamala Harris a résumé la différence entre un nouveau gouvernement Trump/Vance et un gouvernement Harris/Waltz de la manière suivante : « In this moment, I believe we face a choice between two visions for our nation : one focused on the future, the other focused on the past […] And, with your support, I am fighting for our nation’s future” (En ce moment, je crois que nous sommes en face d’un choix entre deux visions pour notre nation : l’une focalisée sur le futur, l’autre sur le passé […] Et, avec votre appui, je me battrai pour le futur de notre nation) (Kamala Harris, speech at the Sorority Zeta Phi Beta, 24 July 2024). Les démocrates ont, en effet, un défi à relever : ils doivent convaincre les Américains qu’ils vont travailler pour eux « For the People », comme le dit l’autre slogan. Ils doivent lutter aussi bien sur le plan intérieur que sur le plan extérieur pour répondre à leurs aspirations. Au plan intérieur, les candidats démocrates doivent acter pour : (1) maintenir et améliorer le statut économique de la population, notamment des couches travailleuses ; (2) améliorer le système de santé, notamment Medicare et Medicaid ; (3) protéger l’environnement en promouvant les énergies nouvelles ; (4) réformer le système d’immigration en renforçant les contrôles aux frontières et trouver des solutions justes pour les immigrants en situation irrégulière ; (5) réduire les tensions inflationistes dans le cadre de la loi dite « Inflation Reduction Act » adoptée par Biden, etc. Au plan extérieur, les démocrates doivent adopter des politiques innovantes pour résoudre les deux conflits majeurs qui empoisonnent l’environnement international : le conflit Russie-Ukraine et le conflit Israelo-Palestinien. Pour le conflit Russo-Ukrainien, Harris a promis de poursuivre l’aide financière, militaire et diplomatique à l’Ukraine. Lors de la Conférence de Munich sur la Sécurité du 16-18 février 2024 : « We will work to secure critical weapons and resources that Ukraine so badly needs » (Nous travaillerons pour fournir l’armement et les ressources critiques dont l’Ukraine a un grand besoin). Concernant le conflit Israelo-Palestinien, Harris entend poursuivre la politique de Biden d’aide financière, militaire et diplomatique inconditionnelle à Israel, mais elle tempère quelque peu cette position en déclarant : « We cannot look away in the face of these tragedies. We cannot allow ourselves to become numb to the suffering. And we will not be silent” (Nous ne pouvons rester en dehors de ces tragédies. Nous ne pouvons pas rester sourds devant la souffrance. Et nous ne serons pas silencieux). Le troisième grand dossier sur lequel les candidats démocrates doivent se pencher est celui de l’OTAN. A ce sujet, Harris a déclaré : « NATO is central to our approach to global security. For President Bident and me, our sacred commitment to NATO remains ironcad. And I do believe, as I have said before, NATO is the greatest military alliance the world has ever known” (L’OTAN est centrale pour notre approche à l’égard de la sécurité globale. Pour le Président Biden et moi, notre engagement sacré envers l’OTAN demeure en fer. Et je crois, comme je l’ai déjà dit auparavant, l’OTAN est la plus grande alliance militaire que le monde ait jamais connu) (Tami Luhby and Way Mullery, What Kamala Harris has said so far on key issues in her campaign, CNN Politics, August 4, 2024).
LA GUERRE PERSONNELLE ENTRE LES DEMOCRATES ET LES REPUBLICAINS
Dans toutes les élections présidentielles américaines, les candidats de chaque parti non seulement critiquent les décisions et les idées économiques et politiques des candidats opposants, mais ils s’attaquent aussi sur des questions plus personnelles. Depuis que Kamala Harris a été nominée comme candidate démocrate à la présidence, Trump n’a pas arrêté de l’attaquer sur son prénom, ses origines ethniques, ses croyances religieuses, ses tendances idéologiques, et autres traits physiques et mentaux. Il a commencé par son prénom qu’il prononce de plusieurs manières—kamabla (pour souligner le fait qu’elle est du genre ‘bla bla bla’) ; il l’appelle aussi « Laffin Kamala » (pour indiquer qu’elle est toujours en train de rire sans raison) ; « ka-Maah-la », « Lyin Kamala » (Kamala la menteuse), etc. Il questionne aussi son origine ethnique. Dans ses rallyes de campagne, il pose la question : « Is she Indian or Black ? ». Il faut savoir que Kamala Harris a un père Jamaicain (économiste renommé) et une mère Indienne (chercheuse en cancérologie du sein). Trump taxe Kamala Harris de « libérale » et d’appartenir à l’extrême gauche : « She, and her mate, Tim Waltz, are from Radical Left Lunatic » (Elle et son coéquipier, Tim Waltz, appartiennent à la Gauche Radicale Lunatique). Il ajoute : « que Harris et Waltz sont « The most Radical Left duo in American history” (Harris et Waltz sont le duo le plus Gauche/Radical dans l’histoire américaine). Il poursuit, disant : « This is a ticket that would want this country to go communist immediately, if not sooner” (Ce sont des candidats qui voudraient que ce pays devienne immédiatement, ou plus tôt, communiste). Trump pose aussi la question de savoir quelles sont les croyances religieuses de Kamala Harris : confession Hindoue de sa mère ? Confession chrétienne de son père ? Confession Juive de son mari ? Les démocrates et les Républicains s’attaquent aussi sur les scandales sexuels dont les candidats peuvent être accusés. Trump pourrait exploiter la relation que le mari de Kamala Harris, Douglas Emhoff, avait eue avec la babysitter de sa fille avant son mariage avec Kamala. Selon certaines sources, en effet, le mari de Harris avait eu une relation avec Najen Naylor, la babysitter de sa fille Ella Emhoff et avait mis Naylor enceinte. Cette relation a été la raison de la séparation de Douglas Emhoff avec sa première femme, Kerstin Emhoff. Trump a aussi attaqué Kamala Harris sur son quotient intellectuel. Dans une série de posts sur les réseaux sociaux, il qualifie Kamala Harris de « Low IQ » (Bas quotient intellectuel), de « dumb » (stupide) et « lacking mental capacity » (manque de capacité mentale).
De leur côté, les candidats démocrates ripostent à ces attaques et accusations personnelles. Les démocrates accusent Trump de ne chercher que son intérêt personnel et celui de sa famille et de ses amis politiques. Ils l’accusent aussi d’être raciste vis-à-vis des minorités Afro-américaine et latino-américaine. Trump est aussi taxé de coureur de jupons. Dans ce dernier contexte, l’affaire la plus citée est la relation que Trump a eue avec la star du cinéma pornographique Stormy Daniels. Les démocrates reprochent aussi à Trump d’avoir des relations privilégiées avec Vladimir Putin (Russie), Xi Jimping (Chine) et Kim Jong Un (Corée du Nord) qu’ils qualifient de dictateurs et autocrates. Les démocrates accusent aussi Trump pour son refus de reconnaître le groupe LGBT (gays, lesbiennes, transgender, etc). Enfin, les candidats démocrates pourraient utiliser l’argument que Trump avait utilisé contre Biden, à savoir son âge et sa sénilité. En effet, Trump est désormais, à 78 ans, le candidat le plus âgé (il aurait le même âge que Biden, 82 ans, à la fin d’un deuxième mandat s’il était élu). Trump pourrait aussi se voir rappeler qu’il a fait l’objet de plusieurs condamnations dans diverses affaires criminelles (affaire Stormy Daniels, fraude fiscale, assaut contre le Capitole, etc). Trump, et son coéquipier, pourraient se faire reprocher leurs attitudes tristes et leur expression toujours lugubre lors de toutes leurs apparitions et discours et les opposer aux attitudes et expressions plutôt joviales de ses concurrents.
CONCLUSION
Les Démocrates et les Républicains ont toujours eu des positions divergentes pendant les périodes électorales et ils ont toujours fait des campagnes offensives pour attirer les électeurs et élire leurs candidats respectifs. Cependant, probablement jamais dans l’histoire américaine les tensions n’ont été aussi vives et virulentes que dans la campagne actuelle. Et pour cause. L’enjeu est de taille : les Américains ont à choisir en novembre prochain entre des candidats qui promettent de sauver la démocratie américaine—ou ce qu’il en reste—et ceux qui ne cachent pas qu’ils entendent instaurer un régime quasi monarchique. Les stratégies que chaque camp entend utiliser pour réaliser son objectif sont, elles aussi, différentes : les démocrates essaient de convaincre les Américains qu’ils vont travailler à répondre à leurs préoccupations quotidiennes et à leur quête de de bonheur, de sécurité et de tranquillité. Pour cette fin, ils expliquent les politiques qu’ils ont l’intention de mettre en œuvre dans les domaines de l’économie, santé, éducation, environnement, droits des femmes et des minorités, émigration, politique étrangère, etc. Les Républicains, de leur côté, utilisent plutôt une stratégie visant à attaquer les candidats démocrates sur leurs aspects et actions personnels : leurs noms, leur appartenance ethnique, leur orientation idéologique, leur religion, etc. Un autre enjeu de cette élection est que la candidate démocrate est à la fois une femme et une personne de couleur. Il y a eu, dans le passé, une candidate-femme (Hillary Clinton) et un Président de couleur (Barak Obama), mais jamais ces deux caractéristiques n’avaient été celle d’une seule personne à la fois. Comment les Américains vont réagir à cette spécificité ? En d’autres termes, cette double caractéristique de la candidate démocrate va-t-elle être considérée comme un atout ou, au contraire, un désavantage ? Seule l’histoire nous le dira. Cependant, à en juger aux sondages effectués récemment par plusieurs médias, Kamala Harris semble avoir la faveur d’une grande frange des démocrates et d’une partie de l’électorat Républicain, notamment des femmes et des personnes de couleur. L’autre facteur qui pourrait être aussi pris en compte dans cette élection : l’âge de Trump. Certains commencent déjà par signaler la baisse de l’énergie et le manque de présence de Trump dans les rallyes de campagne et ses hésitations dans ses speeches. On voit bien que les jeux sont loin d’être faits, surtout que d’ici le 5 novembre, d’autres affaires, d’autres scandales pourraient surgir, d’un côté, comme de l’autre, et qui pourraient totalement bouleverser la donne.