France / «Pour des raisons sociologiques, idéologiques et politiques, l’appareil judiciaire a rallié l’actuel pouvoir»

Par Jean-Baptiste Mendès

3.000 blessés et mutilés depuis le début de la mobilisation des Gilets jaunes, il y a plus d’un an, mais aucune lourde condamnation prise à l’encontre des forces de l’ordre. Une situation qui, selon l’avocat Régis de Castelnau, crée auprès des policiers un sentiment d’impunité. Entretien.

Deux policiers s’acharnant sur un homme à terre à Paris le 5 décembre, la mort de Steve Caniço à Nantes le 21 juin, l’éborgnement de Manu le 16 novembre, deux CRS qui brutalisent deux personnes le 5 décembre dans une voiture au Havre, le pompier Olivier Beziade touché d’un tir de LBD à la tête le 12 janvier à Bordeaux, autant d’exemples frappants de violences commises par les forces de l’ordre depuis le 17 novembre 2018, à la naissance des Gilets jaunes. Au 4 octobre 2019, le ministère de l’Intérieur dénombrait 4.439 blessés, dont 1.944 chez les policiers, et 2.495 chez les manifestants.

Quelle a été la réponse judiciaire face à ces actes de violence? Plus de10.000 gardes à vue et 3.200 condamnations à l’encontre des Gilets jaunes. Et pour les forces de l’ordre? Seulement deux policiers ont été renvoyés en correctionnelle, le premier est accusé d’avoir giflé un manifestant et attend son jugement. Le second est jugé pour avoir lancé un pavé, le procureur a requis trois mois de prison avec sursis.

Si le ministère de l’Intérieur et le Préfet de Police de Paris sont certainement à blâmer pour leur gestion des manifestations, notamment celle du 8 décembre durant laquelle Le Monde a bien analysé le basculement de la doctrine du maintien de l’ordre, les magistrats ne sont-ils pas également responsables de ces violences, en ne réprimant pas suffisamment ces violences policières, pouvant donner lieu à un sentiment d’impunité? C’est en tout cas ce que pense Régis de Castelnau, avocat en droit public et auteur du blog Vu du Droit. 

Sputnik France: Dans votre billet «Violence de la répression contre le mouvement social: la Justice première responsable» sur votre blog Vu du droit, vous écrivez que les magistrats sont les premiers responsables des violences policières, nourries par le sentiment d’impunité. Pourquoi?

Régis de Castelnau: «Pour une raison très simple. Pour ces missions de maintien de l’ordre, la police (et la gendarmerie d’ailleurs) dispose de prérogatives de puissance publique que l’on recouvre du terme général de “violence légitime”. Cela ne vise pas que les violences matérielles ou physiques, mais également le pouvoir sur les corps. Le pouvoir d’appréhender, d’arrêter, de garder à vue, d’interroger, etc., etc. Pour le maintien de l’ordre, il dispose également de la possibilité d’user de violence matérielle et physique. Mais ces prérogatives sont strictement encadrées par la loi. Et celui qui doit contrôler a posteriori l’usage qui a été fait de cette violence, c’est le juge.

L’organisation du maintien de l’ordre relève de la responsabilité du ministre de l’Intérieur, mais son contrôle relève bien du juge. C’est d’autant plus vrai que le Code pénal prévoit un certain nombre d’infractions qui sont spécifiques aux agents publics que sont les policiers. Et lorsque ceux-ci commettent des violences illégitimes et par conséquentes illégales, le fait qu’ils soient des agents publics est une circonstance aggravante et l’infraction sera punie plus sévèrement. Et qui donc doit prononcer la sanction et appliquer le Code pénal? Le juge.

Or, depuis le début du mouvement des Gilets jaunes, nous avons assisté à un nombre incroyable de violences policières, sans précédent depuis la guerre d’Algérie. Les témoignages et surtout les vidéos ont rendu compte de ces exactions. Face à cela, les parquets, qui sont les autorités de poursuite de la République composés de magistrats, ont refusé systématiquement d’engager des procédures sérieuses. Et quand ils ont été contraints de le faire, les juges d’instruction désignés, qui sont des juges du siège, sont restés pour le moins passifs. Jusqu’à présent, le bilan de cette activité judiciaire est absolument atterrant. Une seule procédure devant le tribunal correctionnel de Paris, pas une garde à vue, pas une mise en examen, pas une condamnation et des dizaines et des dizaines de classements sans suite scandaleux après des procédures d’enquête qui n’en étaient pas.

Comment voulez-vous que les forces de l’ordre mobilisées en permanence, exaspérées et harassées, n’aient pas eu le sentiment qu’elles avaient tous les droits? Qu’au bout d’un an de ce mouvement social, après que la presse internationale ait fait part de son effarement, que la presse nationale finit par prendre le relais, et que même le pouvoir ait reconnu du bout des lèvres l’existence de ces violences, rien ne se soit amélioré, comme l’ont montré les scandaleux débordements du 5 décembre? Ainsi s’établit de façon indiscutable un total sentiment d’impunité au sein des forces de l’ordre où certains se croient absolument tout permis.

Cette défaillance massive de ceux qui sont chargés de contrôler la violence policière et de protéger nos libertés a ouvert la boîte de pandore. La confiance de la population dans la police est anéantie pour longtemps, sauf évidemment chez les bourgeois apeurés des seizième et huitième arrondissements de Paris. Il en est de même pour la confiance dans la Justice, qui était déjà très fragile.»© SPUTNIK .Le CRS, lanceur de pavé, jugé «pour répondre à la soif de sang populaire»Sputnik France: Dans les faits, les policiers sont-ils réellement «protégés» par les juges? Que pensez-vous du procès du policier jugé pour avoir lancé un pavé, durant lequel le procureur a requis trois mois de prison avec sursis?

Régis de Castelnau: «Le bilan chiffré est là pour rétablir la réalité de cette protection. Il n’y a pas eu besoin d’ordre, ou de consignes particulières, ces comportements de l’appareil judiciaire se sont effectués très naturellement. Par le refus, l’inertie, voire le blocage qui fait que les dossiers s’accumulent et il y a toutes les chances qu’ils ne soient jamais traités normalement. Cette attitude a probablement été spontanée, comme naturelle, après l’acceptation de la répression de masse contre les Gilets jaunes eux-mêmes et son effarant bilan de 3.000 condamnations dont 1.000 peines de prison ferme prononcée en quelques semaines. Le 1er décembre 2018, grande première –sans que cela ait arraché beaucoup de plaintes aux organisations syndicales de magistrats–, la Garde des Sceaux en personne s’était rendue au parquet de Paris pour fouetter les troupes et mettre en route la répression voulue par le pouvoir.

La procédure, dont vous faites état est jusqu’à présent la seule. Un policier jusqu’alors irréprochable et qui dans un mauvais réflexe a renvoyé une pierre qui n’a touché personne. Une photo établissait irréfutablement le geste idiot, quoique très grave, qui n’avait provoqué aucune blessure. Pas d’amputation, pas d’œil crevé, pas de décès comme les autres affaires qui se sont multipliées. C’est comme par hasard ce cas emblématique qui a été choisi et au cours d’une audience minutieuse et un peu ridicule, on a jugé le moins coupable de tous ceux qu’on avait vus par ailleurs déchaînés, qui a écopé d’une peine ridiculement faible, mais ce qui a permis de prétendre que la justice française appliquait aux policiers le principe: “Dura lex sed lex”. Tout ça ne peut tromper personne.»

Sputnik France: Dans le même registre, que vous inspire la condamnation à trois mois de prison avec sursis de Jean-Mélenchon lors des perquisitions mouvementées au siège de la France Insoumise?

Régis de Castelnau: «C’est une autre facette de l’entreprise d’instrumentalisation de la Justice à des fins politiques. Cette fois-ci, on l’utilise contre l’un des représentants les plus emblématiques de l’opposition politique au pouvoir d’Emmanuel Macron. On se rappelle que son organisation, La France Insoumise, avait fait l’objet d’un rodéo judiciaire diligenté par le Parquet national financier, mobilisant pour 17 perquisitions simultanées, pas moins de 20 magistrats et 100 policiers. Ce raid a été considéré pour ce qu’il était, comme une opération purement politique.

Jean-Luc Mélenchon –qui avait entièrement raison sur le fond– s’y est opposé avec fureur. Il a donc été poursuivi avec plusieurs de ses militants pour des motifs futiles, alors que l’illégalité probable de la perquisition n’a pas pu être jusqu’à présent soumise aux juridictions compétentes. On notera qu’il subit la même peine de trois mois de prison avec sursis pour un niveau sonore probablement trop élevé, qu’un policier chargé du maintien de l’ordre qui transgresse sa mission et bombarde des manifestants usant de leur liberté constitutionnelle de manifestation, au risque de blesser gravement. Cette similitude en dit long…»

Sputnik France: Quel est le rôle de l’IGPN et son efficacité? Devrait-il y avoir une indépendance vis-à-vis du ministère de l’Intérieur?

Régis de Castelnau: «Comme toutes les grandes administrations, le ministère de l’Intérieur possède en son sein une Inspection générale. Dans la mesure où la police est chargée sous le contrôle des juges du respect de la loi dans le pays, il est clair que son rôle est essentiel. Mais il faut rappeler que si elle a des pouvoirs d’enquête importants, elle n’a aucun pouvoir décisionnel. Elle est l’outil d’investigation permettant de mettre en cause la responsabilité disciplinaire des agents. Le fait que les parquets lui confient des investigations dans les enquêtes préliminaires qui sont de leur responsabilité est une commodité, mais pas une obligation. Avec ce qui se produit depuis un an, on va ajouter que c’est une facilité. L’IGPN est complètement déconsidérée aujourd’hui, avec ce que l’on a pu apprendre sur sa conduite d’un certain nombre d’enquêtes. C’est actuellement pour ces violences policières contre le mouvement social, une machine à étouffer. Ce qui doit bien arranger certains parquets qui n’ont aucune envie de faire du zèle.»

Sputnik France: Pourquoi la Justice serait-elle un instrument politique du pouvoir?© AP PHOTO / CHRISTOPHE ENA«Non seulement la justice est instrumentalisée, mais elle l’a accepté», estime Régis de CastelnauRégis de Castelnau: «Le régime d’Emmanuel Macron est assez particulier. Tout d’abord, il y a eu une fusion entre le pouvoir exécutif dirigé par le chef de l’État et le pouvoir législatif, l’Assemblée nationale, une chambre d’enregistrement à la dérive. Pour des raisons sociologiques, idéologiques et politiques, on peut dire que l’appareil judiciaire a rallié l’actuel pouvoir. Le président a donc fusionné en sa personne les trois pouvoirs qui devraient être constitutionnellement séparés.

L’autorité judiciaire a accepté spontanément les trois missions que souhaite le bloc élitaire dont Emmanuel Macron est l’incarnation: tout d’abord, protéger les amis du Président d’avatars qui pourraient être gênants comme l’ont montré les affaires Pénicaud, Ferrand, Benalla, Kholer, Sztroda, Emelien, etc. Ensuite, mettre la pression judiciaire contre l’opposition politique à l’aide du PNF et du Pôle d’Instruction financier. Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et dans une certaine mesure Gérard Collomb par exemple, en savent quelque chose, contre qui ont été dirigées un certain nombre de procédures pénales. Enfin, il y a la répression de masse contre le mouvement social, le but étant de réprimer, d’intimider, et d’empêcher toute contestation sérieuse de la mise en œuvre du projet macronien. Le pire est qu’on a l’impression qu’il n’a même pas été nécessaire au pouvoir exécutif d’exprimer ses besoins et que les magistrats se sont mis spontanément à sa disposition.»

Sputnik France: Selon vous, la Justice est-elle idéologique à l’encontre des Gilets jaunes?

Régis de Castelnau: «Je crois que c’est très clair. Le corps des magistrats, aujourd’hui majoritairement féminisé à 70%, est sociologiquement très homogène. Ajoutons qu’il est aussi endogamique et très corporatiste. Les élèves magistrats rentrent à l’École Nationale de la Magistrature entre 23 et 25 ans, ils en sortent au bout de trois ans avec un permis de juger et dotés d’une expérience sociale réduite que le mode de fonctionnement qui les amènent à se vivre comme un corps professionnellement et culturellement à part ne va pas permettre d’approfondir. La brutale réaction aux quatre coins de la France de la Justice à l’encontre des Gilets jaunes procède d’une appréhension, voire d’une aversion vis-à-vis des couches populaires, que les magistrats souvent ne comprennent pas et n’ont pas envie de comprendre. Cet aspect est également renforcé par cette part qualifiée “de gauche” que l’on retrouve dans les militants et les électeurs du Syndicat de la Magistrature. Une formation syndicale marquée par une forte culture du “gauchisme culturel sociétal”, où le social n’a guère de place et où la France périphérique apparaît comme un ramassis de beaufs et de “petits blancs”. Compte tenu de la violence de la répression judiciaire des Gilets jaunes, que ce soit au niveau des procédures choisies et des peines infligées, il me semble que ceux qui s’en sont chargés n’ont pas eu beaucoup d’états d’âme.»


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Violence de la répression contre le mouvement social : la Justice première responsable

par Régis de Castelnau
Le LBD a été utilisée plus de 9.200 fois depuis le début du mouvement des « gilets jaunes » et est à l’origine de nombreuses blessures graves lors des manifestations © AFP / Pascal GUYOT

La grande journée du 5 décembre dont personne à part quelques militants déguisés en journalistes, n’a pu nier qu’elle était un grand succès a pourtant encore été marquée par d’intolérables violences policières. Aux quatre coins de la France, des caméras nous ont montré des forces de l’ordre utiliser sans aucun complexe une violence parfois sans frein faisant rejaillir sur l’ensemble du corps de la police un déshonneur qui mettra très longtemps à se dissiper.

Depuis un an, des policiers dévoyés, s’en donnent à cœur joie et utilisent tranquillement des méthodes dignes de milices de nervis, contre des manifestants voulant user de leurs libertés constitutionnelles. Le tout sous le regard des caméras, des témoins, et de la presse étrangère effarée, sans que cela émeuve beaucoup la presse mainstream. À longueur de plateaux et de colonnes, les éditocrates se relaient pour stigmatiser les violences des manifestants et rester muets sur l’effarant bilan d’un an de violences policières. Et Emmanuel Macron aura beau dire «ne parlez pas de ‘répression’ ou de ‘violences policières’, ces mots sont inacceptables dans un Etat de droit.», le catastrophique Castaner « qu’il faut arrêter de parler de violences policières » et Laetitia Avia proférer sur Mediapart devant un Plenel complaisant cette vilenie : «apportez-moi une violence constatée et je serais la première à la condamner », il n’est personne pour douter de l’existence de ces violences. Et pas grand monde ne peut se faire d’illusions sur leur caractère politiquement délibéré et organisé, probablement sur ordre comme l’a démontré l’opération de la place d’Italie le 16 novembre dernier avec le comportement du préfet de police de Paris dans Jean-Luc Mélenchon dit à juste titre « qu’il a des méthodes de psychopathe ».

Sous la pression des réseaux où circulent témoignages des exactions, et commentaires de la presse étrangère, une partie de la grande presse nationale s’est sentie contrainte changer un peu son fusil d’épaule et de rapporter de façon beaucoup plus exacte ce qui se passe. Mention spéciale au journal le Monde qui a commencé à se pencher sur ces dérives avec honnêteté.

L’impression désastreuse laissée par l’installation de cette répression violente se nourrit bien sûr, de son bilan épouvantable en termes de décès, d’amputations, de blessures souvent gravissimes, mais aussi et surtout de cette impression d’une violence complètement débridée, utilisée absolument sans complexe et nourrie par un sentiment d’impunité qui pousse à la surenchère.

© Sputnik . Julien Mattia

Comment en est-on arrivé là ?

Pour une raison très simple : ceux dont c’est la mission de contrôler l’utilisation par les forces de police de la violence légitime de l’État, ce sont les magistrats du service public de la justice. Ce sont eux qui sont chargés de notre protection face à ces débordements. Toutes ces violences dont le remarquable travail réalisé par David Dufresne nous permet d’avoir idée de l’importance, sont autant d’infractions sévèrement réprimées par le code pénal.

Il y a les violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique prévues et réprimées par les articles 222-7 et suivants du code pénal. Une lecture rapide montre bien que les violences volontaires comme le fait d’éborgner en visant la tête avec un LBD ou un lance-grenade sont des crimes relevant de la cour d’assises ! Comment qualifier autrement que de « tentative de meurtre » l’attentat dont a été victime le malheureux Olivier Beziade, pompier volontaire bordelais le 12 janvier 2019. Et il y a bien sûr aussi des violences volontaires moins importantes pour lesquelles dans toutes les incriminations du code, le fait qu’elles soient commises par des forces de l’ordre sont des circonstances aggravantes ! Ce sont donc bien les violences policières que le législateur a entendues réprimer particulièrement.

Malheureusement la réponse judiciaire qui était du devoir des magistrats compétents est simplement un désastre, fruit d’une défaillance majeure dans le fonctionnement de la Justice française.

Il y a cependant une chose curieuse dans les débats autour des violences policières depuis un an, c’est que la plupart de ceux qui les condamnent pointent la responsabilité du ministre de l’intérieur et de son chef installé à l’Élysée et celle bien sûr les auteurs directs de ces violences. On parle aussi beaucoup du rôle de IGPN comme organisme disciplinaire interne préposé à l’étouffement et à l’impunité. Mais très peu des premiers responsables, ceux qui magistrats des parquets et juges du siège ont la responsabilité par la répression de ces violences illégales. Et dont la mission est de protéger notre intégrité physique et nos libertés à commencer par celles constitutionnelles de manifestation et d’expression. Or, c’est justement cette étonnante défaillance qui a permis au président de la république et à ses amis de lâcher les chiens, dans le but avéré de réprimer, de brutaliser, d’estropier, d’intimider et d’empêcher la contestation de la politique voulue par ce pouvoir minoritaire. On n’oubliera pas non plus les 5000 gardes à vue manifestement abusives, qui étaient autant de séquestrations arbitraires couvertes par les parquets quand elles n’étaient pas directement organisées par eux.

On a déjà dit ici à plusieurs reprises que l’autorité judiciaire avait en grande partie rallié le pouvoir macroniste et s’était mis à sa disposition. L’élection circonstancielle d’Emmanuel Macron en 2017 a amené au pouvoir un homme et un groupe décidés à imposer au pays une politique dont majoritairement il ne veut pas. Des trois outils de répression dont dispose le pouvoir, à savoir les médias caporalisés, les forces de police, et l’autorité judiciaire, c’est bien celui-ci qui est le plus important et aujourd’hui le plus utile.

Sa fonction est triple :

•            protéger les amis du pouvoir et leur éviter autant que faire se peut les soucis judiciaires. L’expérience a bien montré le rôle que devait remplir le nouveau procureur de Paris choisi par Emmanuel Macron.

•            Instrumentaliser la justice à des fins politiques contre les opposants institutionnels, Marine Le pen et Jean-Luc Mélenchon en savent quelque chose…

•            mener une répression de masse contre le mouvement social des gilets jaunes. Le bilan inouï de 3000 condamnations distribuées en quelques mois dont 1000 peines de prison ferme, est là pour en établir la réalité. Il suffit aussi d’entendre les communiqués chiffrés de victoire d’Édouard Philippe et de Nicole Belloubet devant le Parlement. Mais ce que l’on a tendance à oublier c’est la deuxième facette de ce pouvoir de répression, caractérisé par le refus obstiné, d’abord des parquets, de poursuivre efficacement les violences policières.

On ne va pas ici , faute de temps et de place, faire la liste de tous les exemples qui documentent cette réalité, nous contentant de revenir sur deux d’entre eux, tellement emblématiques de cette dérive, qui se sont précisément déroulés le jour de la grande manifestation syndicale.

Il y a tout d’abord cette vidéo où l’on voit dans une rue de Paris, deux policiers en uniforme adopter un comportement de nervis pour s’acharner brutalement sur un homme à terre. Elle a fait le tour des réseaux provoquant enfin le scandale politique que mérite ce genre d’agissements. Alors on nous dit que le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire, mais compte tenu justement du scandale, il ne pouvait faire autrement. On rappellera cependant que l’enquête préliminaire n’est pas contradictoire et qu’elle est secrète. Qu’elle est à priori confiée à l’IGPN dont on sait maintenant, et notamment depuis l’affaire Canico ce qu’il faut en penser. Jusqu’à présent lorsque les parquets ont été contraints et forcés de prendre de telles initiatives cela a débouché sur des classements sans suite aussi massifs qu’invraisemblables. Pas une suspension, pas une garde à vue, pas une mise en examen jusqu’à présent. Juste sur plusieurs centaines d’affaires, une seule audience de jugement assez ridicule pour donner le change. Ce n’est pas avec cette initiative que le parquet de Paris dirigé par le magistrat choisi par Macron va redorer son blason.

Il y a ensuite un épisode qui s’est déroulé au Havre et filmé par deux jeunes garçons assis dans leur voiture garée sur un parking. Deux policiers en furie se précipitent vers eux et malgré les objurgations des deux personnes qui n’opposent aucune résistance, ils dégradent violemment le véhicule et en extirpent brutalement les deux occupants. Malheureux, il y avait un gilet jaune sur le tableau de bord ! Ils ne savaient pas que dans la France de Macron cela justifie cette intervention violente ? Eh bien, il s’est trouvé un membre du parquet local pour couvrir la garde à vue infligée à la suite, et histoire de faire bon poids pour habiller le tout, les deux gamins se sont vus délivrer une citation en correctionnelle !

Mais revenons pour conclure sur la petite séquence de l’interview complaisante de la députée LREM. Il y avait pire finalement que les déclarations Laetitia Avia. L’attitude de cette dirigeante du Syndicat de la Magistrature venant benoîtement dire qu’elle avait peur d’aller à la manifestation du 5 décembre à cause des violences policières.

Vous avez raison Madame, user de sa liberté constitutionnelle de manifestation est devenu désormais dangereux. Mais qu’avez-vous fait depuis un an, votre organisation syndicale et vous même pour réellement dénoncer et combattre ces violences ? Vous nous dites les avoir dénoncés depuis plusieurs mois, la consultation de votre site démontre pour le moins une certaine parcimonie. Mais surtout, qu’ont fait vos collègues pour poursuivre fermement et ainsi prévenir toutes ces violences illégales ? Quand avez-vous critiqué cette défaillance de la Justice, de votre Justice, dans le contrôle des violences policières, défaillance qui les a permises ?

Et comment pouvez-vous accepter que le principal outil de répression dont se sert Macron contre le mouvement social soit celui du corps auquel vous appartenez ?


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