Libye / Hypocrisie diplomatique !

par Abdelkrim Zerzouri

Les sommets consacrés au règlement de la situation en Libye se suivent sans parvenir à faire taire les armes. Car, les combats qui ont repris en Libye, le dimanche 26 janvier, entre les forces du Gouvernement d’union nationale et celles du maréchal Khalifa Haftar, signent de facto la fin du fragile cessez-le-feu conclu lors de la conférence internationale qui s’est tenue à Berlin, le 19 janvier dernier. Soit une reprise des hostilités le jour même de l’arrivée du président Tayeb Erdogan à Alger, dans le cadre d’une visite d’Etat de deux jours à l’invitation du président Abdelmadjid Tebboune !

Une visite articulée autour des relations bilatérales et, bien évidemment, la situation en Libye, qui a été au centre des entretiens entre les deux chefs d’Etat. Est-ce, donc, un message aux deux présidents qui s’efforcent, aux côtés des efforts de tant d’autres pays, ainsi que l’ONU et l’UE, de trouver une solution politique au conflit libyen ? Le langage des armes a-t-il repris le dessus pour livrer un message aux deux présidents, qui ont conclu dans une «totale convergence» des points de vue qu’il est «impossible de parvenir à un résultat dans le dossier libyen avec des solutions militaires» ? Parce que la solution militaire est prônée par l’Armée nationale libyenne autoproclamée de Khalifa Haftar, qui a refusé de signer l’accord de cessez-le-feu, le message des deux présidents, algérien et turc, ne peut que concerner cette partie, et c’est cette partie qui nargue leur conclusion, leur faisant savoir qu’elle tient, elle, à la solution militaire. L’Armée nationale libyenne autoproclamée de Khalifa Haftar concentre, d’ailleurs, toutes ses critiques, toute sa propagande d’informations de guerre sur les troupes militaires turques, plutôt de mercenaires syriens, déployées sur le sol libyen, qu’on veut chasser de leur pays, clame-t-on, avant de parler de cessez-le-feu ou de pacte de paix avec le Gouvernement d’union nationale de Sarraj. Rappelons que le président turc affirme, de son côté, qu’il n’a pas déployé de forces militaires en Libye, et qu’il y a seulement envoyé des conseillers militaires et des instructeurs, dans un but de formation. Le gouvernement de Tripoli se défend, de son côté, de faire appel à ses alliés, dont la Turquie, pour lui apporter leur appui militaire tant que l’Armée nationale libyenne autoproclamée de Khalifa Haftar, elle-même, est appuyée sur le plan militaire par d’autres pays, l’Egypte notamment. Il s’agit bel et bien d’une guerre par procuration, où il est très difficile de trouver un semblant d’équilibre soit-il. Paix improbable dans ce climat de tensions extrêmes soutenues par les parties libyennes et de nombreux autres pays. Très éphémère de parler de paix et de cessez-le-feu quand des pays qui ont participé à la conférence de Berlin continuent de nourrir le conflit en livrant des armes aux belligérants. Car, cette reprise des combats survient au lendemain d’une condamnation, par la mission de l’ONU en Libye, des «violations continues et flagrantes» au cours des derniers jours de l’embargo sur les armes par «plusieurs pays » qui, plus scandalisant, ont pour certains d’entre eux pris part au sommet de Berlin et plaidé pour un règlement politique de la crise libyenne, selon les affirmations d’un communiqué de la mission onusienne en Libye. Hypocrisie diplomatique contre des barils de pétrole, la tentation ne donne pas beaucoup à réfléchir.


>> L’après Berlin et la crise libyenne



>> Mercenaires étrangers en Libye : Macron accuse Erdogan de ne pas respecter sa parole



Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *