C’est en lisant l’article de Massiva Zehraoui (Journal Le Soir d’Algérie du 17 août 2020) consacré à l’industrie automobile, intitulé : «Deux grands constructeurs souhaitent investir en Algérie» et notamment la déclaration du ministre de l’Industrie qui a déclaré, entre autres, que «les textes réglementaires et législatifs resteront inchangés car ils servent l’intérêt de l’économie nationale et non celui de parties spécifiques» qui m’a interpellé pour donner un avis sur ce sujet, qui tient en haleine une grande majorité de la population algérienne.
Ce qui est encourageant d’entendre, c’est l’intérêt que portent certains grands constructeurs automobiles au marché algérien. Cet intérêt n’est toutefois pas fortuit eu égard au volume financier que génère le marché intérieur et qui peut être évalué à plusieurs milliards de dollars. L’importation, uniquement, des kits CKD pour le montage des véhicules de tourisme et des véhicules utilitaires (camions et véhicules de transport de voyageurs) a atteint, en 2018, presque trois milliards de dollars pour les premiers et 732,14 millions de dollars pour les seconds (APS, 20 février 2019), cela sans compter les coûts des véhicules importés en produits finis, qui se chiffrent également à plusieurs milliards de dollars ainsi que le consommable (pièce de rechange et pneumatique) dont le montant a été de 521,6 millions de dollars durant la même année. En outre, la position géographique stratégique de l’Algérie offre d’énormes possibilités pour pénétrer le marché de l’Afrique central et de l’Ouest.
Monsieur le ministre de l’Industrie précise, à cet effet, que «beaucoup d’autres constructeurs non moins importants ne vont pas tarder à se manifester» en soutenant que «l’Algérie n’acceptera de collaborer que si les caractéristiques des projets proposés se plient aux conditions algériennes et que, par conséquent, elles sont adaptées à son économie».
S’il est clair que l’Algérie doit défendre de la meilleure manière qui soit ses intérêts, ces positions me paraissent s’inscrire dans la même ligne que celles antérieurement pratiquées et qui allaient dans le sens du découragement des vrais investisseurs et qui profitaient à des charognards sans scrupules uniquement par le fait qu’ils soient algériens et la suite est connue de tous le commun des mortels. Il faut souligner qu’il n’y a pas que l’Algérie qui offre un important marché de l’automobile et qu’il faut avoir à l’esprit que d’autres pays peuvent la concurrencer pour tout projet structurant qui s’affiche à l’horizon. Les exemples sont nombreux et doivent servir de référence pour ne pas tomber dans les erreurs commises dans un passé récent. On peut citer le projet Desertec qui a atterri de l’autre côté de nos frontières. Un jour, un fonctionnaire de l’Organisation internationale de l’alimentation et de l’agriculture (FAO) a, dans une discussion se rapportant aux projets que cette organisation internationale attribue aux pays membres, fait savoir qu’en raison de l’immobilisme et des contraintes administratives algériennes, les projets de la FAO survolent son territoire pour atterrir des deux côtés de ses frontières. La situation est très bien imagée et doit nous inciter à plus de flexibilité, sans pour autant se relâcher sur les fondamentaux. Une attitude captivante et non repoussante doit être de mise, sachant pertinemment qu’un IDE créera de l’emploi, apportera de la richesse et instaurera de bons mécanismes de gestion par sa rigueur et son management. La peur qu’on nous a toujours agitée vis-à-vis de l’investissement étranger a énormément desservi l’économie algérienne au profit de celle d’autres pays. Il faut dire qu’il y a un pays, que je ne voudrais pas citer et qui est connu de tous, qui a de tout temps freiné le développement de l’Algérie et l’a mise dans une position d’infériorité par rapport à ses voisins à qui il accorde tous les faveurs et les privilèges.
Le marché algérien constitue pour lui une chasse gardée. Il intervient à tous les niveaux intérieurs et extérieurs pour laisser l’économie algérienne à la traîne, en nous faisant miroiter, de temps à autre, des mirages qui nous laissent sur notre soif. Il n’y a qu’à voir les investissements qu’il a matérialisés dans le pays voisin de l’Ouest, en matière de construction automobile, entre autres, et ceux réalisés en Algérie, alors que les marchés de voitures et ses retombées extérieures sont sans aucune comparaison possible.
Ces attitudes doivent nous inciter à diversifier nos partenaires, en matière d’investissements extérieurs, ce qui est primordial si on veut à l’avenir avoir une économie prospère. Car c’est la seule manière de créer une compétition fructueuse pour le pays. L’ère où les supplétifs dirigeaient toutes les ressources algériennes vers un pays déterminé est à mon sens révolue du fait, d’une part, de la prise de conscience de la génération actuelle d’Algériens et de la disparition progressive des décideurs d’hier qui lui étaient fidèles. Ces derniers nous ont saturé l’esprit avec l’idée que nous avons une communauté algérienne importante dans ce pays et qu’il fallait la ménager, pour ne pas nuire à cette communauté. Il faut qu’ils sachent que les Algériens se trouvent, actuellement, partout à travers le monde, même dans les endroits les plus reculés de la planète et que cela relève de leur choix. En plus, ils sont en train de rendre d’énormes services à leurs pays d’accueil, bien que, pour certains d’entre eux, l’Algérie ait coupé dans sa chair pour les former et leur donner le savoir. Mais s’ils veulent ou sont obligés de revenir au pays, ils seront les bienvenus. Au moins, ils pourraient participer, avec les actes et non uniquement avec la parole, au développement de leur pays d’origine. Donc cessons de continuer à mettre sur la tête des décideurs algériens une épée de Damoclès que cela constitue un problème et admettre que cette stratégie a été développée, par certains cercles du pouvoir algérien, qui étaient au service de la mère patrie et que le général de Gaulle a incrustée dans le corps d’une Algérie indépendante, afin de plomber le développement du pays et le mettre au service du sien. Il faut, par conséquent, changer son fusil d’épaule et viser d’autres partenaires sincères qui s’inscrivent dans une politique économique ayant pour finalité un partenariat gagnant-gagnant. Ce qui est encourageant, c’est que monsieur le ministre parle d’industrie et non de montage automobile, ce qui est fondamentalement différent. En effet, l’expérience du montage que nous avons vécue pendant quelques années a montré ses limites et ses tares. Un véhicule revenait plus cher en montage qu’en production intégrale et ne dégageait aucune plus-value pour le pays et ses citoyens si ce n’est enrichir certains oligarques qui placent leur argent dans les paradis fiscaux et résoudre les problèmes économiques et sociaux des pays d’où sont importés les kits d’assemblage des véhicules qu’ils commercialisent.
Par contre, une véritable industrie automobile signifie la mise en place d’un tissu économique, qui intègre l’utilisation d’une matière première algérienne, un développement optimal des instruments de production (robotisation, entre autres), la mise en place d’une industrie de sous-traitance pour aller vers un taux d’intégration le plus élevé possible, l’intégration de mécanismes de gestion basés sur un management de haute facture, la création d’un nombre très important de postes d’emploi directs et indirects afin de résorber le chômage dans le pays. Il faut profiter de cette période durant laquelle l’industrie automobile traverse une crise de production et de commercialisation de voitures pour faire intéresser les plus grandes marques mondiales de construction automobile et ne pas se limiter aux traditionnelles marques françaises qui cherchent le beurre et l’argent du beurre. Comme Renault, qui fait du montage en Algérie et dont les véhicules produits sont interdits d’exportation vers d’autres contrées alors qu’une grande partie de ce qu’il produit au Maroc est destinée à l’exportation. De deux choses l’une, soit que les voitures montées en Algérie ne répondent pas aux normes internationales, ce qui est probablement le cas, quand on voit les malfaçons qui les caractérisent, soit ce constructeur ne voudrait pas qu’une partie des devises que cela génère revienne au Trésor public algérien. Les nouvelles dispositions législatives sont, pour certaines, très favorables à l’investissement dans le secteur de l’automobile, notamment l’abrogation de la règle 49/51, se rapportant à l’investissement, excepté pour certains secteurs stratégiques définis par l’article 51 de la loi de finances complémentaire de 2020. Cette disposition va très certainement ouvrir la voie à plus d’attractivité du pays aux IDE, faudrait-il que les lourdeurs administratives soient atténuées et que le foncier industriel, déjà affecté à des pseudo-industriels et non utilisé à ce jour ou détourné de sa vocation première, soit récupéré par l’État et mis à la disposition des véritables investisseurs.
Le dernier point sur lequel j’exprime une certaine opposition par rapport à la déclaration du ministre est celui relatif au statu quo que celui-ci a exprimé par rapport à certains textes réglementaires et législatifs, que j’ai évoqués en introduction. En effet, monsieur le ministre compte-t-il mettre en œuvre l’article 110 de la loi de finances 2020, relatif à l’importation de véhicules de moins de trois ans ? Si c’est le cas, il ne voit pas que cette disposition de loi a été introduite dans une conjoncture spéciale et qu’elle dessert l’économie algérienne au lieu de la servir comme il le dit. En effet, le gouvernement post-Hirak, en introduisant cette disposition dans la loi de finances 2020, comme la nouvelle loi sur les hydrocarbures, n’a pas mesuré les incidences économiques majeures qui pourraient découler de leur application ; il cherchait plutôt, par tous les moyens, d’apaiser les tensions qui s’exerçaient alors sur le pouvoir.
Par cet article 110 de la loi de finances 2020, le gouvernement a levé l’interdiction de l’importation de véhicules d’occasion de moins de trois ans en balayant d’un revers de main tous les problèmes qu’avait engendrés cette pratique dans un passé pourtant récent. Il a vite oublié le préjudice causé au pays, par l’importation des véhicules ZH dont 4 000 sont restés en souffrance dans le port d’Alger (déclaration à la télévision publique algérienne d’Ali Ferrah, ex-directeur général du port d’Alger), sans compter le nombre de ceux entrés en Algérie sans numéro de série. L’enquête diligentée par la justice algérienne, qui a duré dix longues années, a résolu quelques énigmes de l’affaire, qui a tenu l’opinion publique en haleine au début des années 1990. Pas moins de 156 personnes, faisant partie d’un réseau de trafic de voitures, étaient impliquées. Tout a commencé, au début des années 1990, quand les services des Douanes nationales ont saisi 150 véhicules immatriculés ZH en référence à la ville Suisse de Zurich. Ces véhicules, qui avaient été mis en circulation, dix ans auparavant, ne disposaient pas de cartes grises ; sauf que plusieurs centaines de ces voitures étaient sorties des ports et leurs propriétaires avaient réussi à avoir des cartes grises, ne comportant même pas un numéro de série. Ces véhicules, vétustes, constituaient un lourd fardeau pour les autorités suisses, dont ils voulaient se débarrasser, ce qui a poussé un concessionnaire du même pays, au fait du marché algérien, qui était ouvert à l’importation des véhicules d’occasion, de saisir l’opportunité et de les commercialiser en Algérie, à travers un réseau de trafiquants.
L’enquête effectuée par la justice algérienne, de l’autre côté de la Méditerranée avait révélé qu’un réseau de trafiquants opérait également à partir de la France, en complicité avec des agents des douanes françaises, qui dédouanaient des véhicules dont les numéros de série étaient falsifiés, moyennant des pécules de 8 000 francs français de l’époque par véhicule.
Ceci coïncide avec le scandale de la commercialisation de 1 400 limousines rares en Europe dont 364 ont été découvertes en circulation, en Algérie. Lorsque l’importation ne concernait que les véhicules de moins de trois ans, nombreux sont ceux rentrés en Algérie avec des numéros de série falsifiés et des cartes grises gonflées (véhicules ayant parfois plus de 3 ans), et ont été dédouanés et mis en circulation dans le pays.
La question qui mérite d’être posée : est-ce que ce gouvernement algérien voulait réintroduire ces mêmes pratiques dans le pays ? Ce qui est en soi un crime économique, et à qui profite l’importation de ces véhicules ? Ce qui peut être mis en évidence dans ce cas, c’est une volonté délibérée de tuer l’industrie automobile dans sa phase de montage en Algérie. Il est, certes, admis par tous que les véhicules montés en Algérie présentent de nombreuses carences et sont parfois à l’origine de nombreux accidents. N’est-ce pas là la résultante des décisions des différents gouvernements qui ont géré le pays, au cours des vingt dernières années ? Maintenant que la règle 49/51 fait aujourd’hui partie de l’histoire, ne faudrait-il pas arrêter cette mascarade qui risque de plomber l’investissement direct étranger dans le domaine de la construction automobile.
Ce qui est recherché, c’est de créer un climat favorable aux investissements qui pourraient être effectués par des constructeurs disposant de l’expertise et de l’expérience requises dans le domaine, afin de mettre fin aux pratiques du passé qui ont instauré une situation caractérisée par la mise sur le marché de produits de moindre qualité à des prix exorbitants (30% plus chers par rapport au marché international) et à l’origine de beaucoup d’accidents.
C’est d’ailleurs là l’un des arguments développés par le gouvernement, en lançant l’idée d’importation de véhicules de moins de trois ans, aussi il était question de permettre aux bourses moyennes de pouvoir acquérir ce moyen de transport. Certains parlementaires, de bas niveau, ont même proposé que l’âge de ces véhicules soit de moins de cinq années pour que leurs prix soient abordables et accessibles à tous les Algériens. Est-ce cela la solution, ou bien ouvrir le champ aux constructeurs automobiles étrangers, pour qu’ils mettent en place des usines modernes pour fournir aux consommateurs algériens des produits neufs, de qualité et à un prix semblable à celui pratiqué dans tous les pays du monde ? La réponse découle d’elle-même, car en plus, les IDE vont créer des usines, qui offriront des emplois qui résorberont le chômage, produiront de la richesse pour le pays et permettront aux citoyens algériens de disposer de véhicules de qualité, qui préservent les vies humaines et l’environnement ainsi que les caisses du Trésor public, en épargnant l’argent que pourraient engendrer les handicaps et les soins à prodiguer aux accidentés de la route. En plus, les véhicules de moins de trois ans viendront grossir le parc de voitures usagées et les cimetières de ferraille, comme celui de Draâ Ben Khadda (wilaya de Tizi-Ouzou), qui fleurissent à travers tout le territoire algérien offrant un paysage lugubre dans des endroits où la vue était précédemment féerique. Au moment où tous les autres pays du Vieux Continent cherchent à se débarrasser des vieilles voitures et les remplacer par des véhicules fonctionnant aux énergies renouvelables (biocarburants, électricité, hydrogène et autres), le gouvernement algérien voulait procéder au nettoyage des paysages européens de la ferraille, tout en leur offrant l’Algérie comme poubelle. En plus, l’importation des véhicules de moins de trois ans ne se fera certainement pas gratuitement, elle va engendrer le transfert de plusieurs milliards d’euros vers l’Europe, en général, et la France, en particulier, dans une conjoncture économique très difficile pour l’Algérie.
Le gouvernement algérien de l’époque avait dit que cet argent ne sortirait pas des caisses de l’État et que ce serait les particuliers qui disposent de comptes en devises dans les banques algériennes qui pourraient se servir de leur argent pour acheter ces véhicules à l’étranger. Certes, les devises destinées à l’acquisition de ces véhicules ne sortiront pas des caisses du Trésor public, ce sera les économies des ménages algériens qui serviront pour cela. Cet argent, qui pourrait se compter en milliards d’euros, ne pouvait-il pas être capté par l’État algérien, à travers des bureaux de change et utilisé pour promouvoir le développement de l’économie algérienne, en général, et la construction automobile, en particulier ? Jusqu’à quand on va continuer à enrichir les Européens, en général, et la France en particulier, et maintenir l’Algérie dans le sous-développement et son peuple dans la pauvreté ?
Cette mesure, qui est maintenant réglementairement possible, ne peut-elle pas être gelée pour éviter une saignée sur le plan financier et activer la mise en place de la construction automobile dans le pays ? Sa mise en œuvre nécessitera, comme précisé plus haut, la mobilisation d’importants moyens financiers, en monnaies convertibles, qui n’existent que dans le marché informel, du square Port-Saïd à Alger et les différentes places, des autres villes du pays. Donc, c’est le change parallèle qui aura de beaux jours devant lui si elle vient à être exécutée.
À ce niveau, se pose également la question : à qui profitera cette mesure ? Certains vous diront que c’est les cambistes qui se frotteront les mains, par contre, d’autres pensent que c’est plutôt les pouvoirs occultes qui vont blanchir leur argent et que les cambistes des places de change au noir ne sont en réalité que leurs employés. Sinon comment expliquer le fait que ce change parallèle, interdit par la loi algérienne, se fait au vu et au su des pouvoirs publics. En outre, pourquoi les pouvoirs exécutifs, qui se sont succédé, depuis trente ans, n’ont pas réagi à cette situation, alors que la loi sur la monnaie et le crédit avait prévu, dès le début des années 1990, l’installation de bureaux de change ? La réponse à cette question est toute simple, comme le dit le proverbe arabe «hamiyiha haramiha» (son protecteur c’est son voleur). De toute manière, ceux qui profiteraient le plus de cette mesure, si elle venait à être validée, seront les pays exportateurs de ces véhicules, particulièrement la France, qui vont se débarrasser de leurs véhicules amortis et engranger les milliards d’euros que leur procure leur vente, ce serait pour eux une aubaine en cette période de pandémie de Covid-19 et de crise économique. En effet, dans la majorité des cas, ce sera les véhicules de location et des entreprises, qui vont se rendre disponibles sur le marché de l’occasion, et chacun d’eux aura roulé plus de 500 000 kilomètres. Comme cela s’est pratiqué avant, ces véhicules seront relookés et leurs compteurs manipulés et remis à quelques dizaines de kilomètres pour faire croire aux acheteurs qu’il s’agit d’engins ayant peu servi. Ils payeront donc des voitures en bout de cycle, dont l’entretien nécessitera des stocks de pièces de rechange, qui seront également importées avec des devises cette fois fournies par le Trésor public.
Une enquête, menée par la chaîne de télévision algérienne, a montré, au moment où l’idée a été lancée, que les concessionnaires automobiles français ont fait augmenter les prix des voitures d’occasion, au point où un véhicule de moins de trois ans coûterait, en incluant les frais de transport et de douane, aussi cher qu’un neuf, acheté en Algérie.
L’euro va également subir, au marché noir, une envolée spectaculaire par rapport au dinar. Tombé à 180 dinars pour 1 euro, durant la période où les frontières étaient fermées, on constate qu’il est en phase d’une remontée ascendante en perspective du dé-confinement et de l’ouverture des frontières pour se situer au square Port-Saïd autour de 196 dinars en date du 16 août 2020. A quel niveau s’arrêtera cette évolution, en cas de l’exécution de cet article 110 ? Personne ne peut le prédire.
La dégringolade du dinar algérien se répercutera, très certainement, sur le pouvoir d’achat des ménages, du fait que plusieurs produits de consommation sont importés, grâce aux devises changées dans le marché parallèle. Une telle situation inflationniste se poursuivra pendant longtemps et mettra l’économie algérienne en péril, d’autant plus que les prix du pétrole et du gaz, principales ressources de devises du pays, sont en phase d’instabilité permanente et la balance du commerce extérieur est largement déficitaire.
En voulant blouser les Algériens par cette mesure pour les faire détourner de leurs revendications citoyennes n’était qu’un calcul de mauvais goût et constituait une preuve que ces dirigeants étaient loin de leur peuple et des réalités du terrain.
Le parc automobile actuel est déjà surdimensionné par rapport au réseau routier existant et cette ouverture pour l’importation de véhicules de moins de trois ans (-3 ans), adoptée par des parlementaires, en déphasage par rapport à leur temps, qui au lieu de protéger les citoyens et l’économie nationale, ont répondu au désir de ceux qui les ont cooptés pour des objectifs qui, heureusement, ne sont pas concrétisés et qui se retrouvent actuellement, à une exception près, tous derrière les barreaux.
Sans mesurer les conséquences de leur décision, ils ont voté cette disposition de la loi de finances 2020 qui maintenant constitue un lourd fardeau entre les mains de l’Exécutif actuel. Cette attitude surprenante des législateurs de la nation prouve leur incompétence politique et économique et met en évidence leurs aspirations personnelles et leur populisme.
L’importation éventuelle de véhicules de moins de «trois ans» va encore compliquer le problème de la circulation routière, particulièrement au niveau des grandes villes, où c’est déjà l’asphyxie. Les encombrements et l’insuffisance de parkings de stationnement se traduiront par d’importants retards sur les lieux de travail, un grand stress pour les conducteurs automobiles, des accidents avec d’énormes dégâts, et, par conséquent, une lourde facture pour le contribuable et l’État algérien. Ne serait-il pas mieux de continuer à investir dans le transport public, pour permettre aux citoyens algériens d’avoir plus de facilités dans leurs déplacements, sans se stresser et s’exposer à des risques, qui peuvent être très préjudiciables et parfois irréparables ? Les véhicules usagés consomment plus d’énergie que les véhicules neufs, il serait donc nécessaire d’importer un volume plus important de carburant, ce qui alourdirait la facture d’importation et augmenterait le déficit, déjà important, de la balance des paiements, qui a été de 15,82 milliards de dollars en 2018 (source Banque centrale d’Algérie).
On peut attendre quelques années pour voir une industrie automobile qui répond aux aspirations du peuple et d’ici là, on aura agrandi le réseau routier, et mis en place les mécanismes de renouvellement du parc automobile national.
B. C.
(*) Ex-vice-président de l’Assemblée populaire nationale. Ex-président de la Commission permanente de l’économie rurale, de l’agriculture, des ressources naturelles et de l’environnement du Parlement panafricain.