Sahel : fin de Barkhane au premier semestre 2022, confirme Emmanuel Macron

      L’opération antidjihadiste française Barkhane au Sahel, qui mobilise aujourd’hui plus de 5 000 militaires, s’achèvera « au premier trimestre 2022 », a précisé mardi le président français Emmanuel Macron après en avoir récemment annoncé la fin prochaine.

« C’est au premier trimestre 2022 que nous mettrons un terme à l’opération Barkhane en bon ordre, mais en continuant à agir » dans la région car « nous ne nous désengageons pas », a-t-il déclaré lors de sa traditionnelle allocution aux armées à la veille du défilé du 14 juillet. Il avait annoncé vendredi que le processus de fermeture de bases de la force Barkhane, dans le nord du pays, débuterait au « second semestre de l’année 2021 » et que les emprises de KidalTessalit et Tombouctou seraient closes « d’ici le début de l’année 2022 ».

Emmanuel Macron a d’ores et déjà annoncé une réduction progressive des effectifs militaires français au Sahel après huit ans de présence ininterrompue, au profit d’un dispositif allégé de 2 500 à 3 000 hommes « à terme ». Concrètement, la France va renoncer à essayer de sécuriser de vastes zones où les Etats n’arrivent pas à reprendre pied. Les missions seront désormais axées sur le contre-terrorisme, ainsi que sur l’appui aux armées locales pour les aider à monter en puissance et s’autonomiser, via les troupes européennes de la nouvelle force Takuba.

Pour la première fois, la Norvège enverra des troupes à Takuba au Mali. Dans les prochains mois, un plus petit nombre de soldats seront inclus dans le contingent suédois. La Norvège enverra aussi deux officiers au quartier général de la Force Takuba.

Participation de la Norvège

La Norvège va envoyer, au sein du détachement suédois, une petite contribution à cette unité de forces spéciales européennes chargée d’accompagner l’armée malienne au combat face aux jihadistes, a annoncé le gouvernement norvégien. « La Norvège va pour la première fois mettre des soldats à la disposition de Takuba au Mali », a indiqué le ministère norvégien de la Défense dans un communiqué mardi soir. « Au cours des prochains mois, un petit nombre de soldats seront envoyés au sein du détachement suédois ».

Membre de l’Otan mais pas de l’UE, le pays nordique deviendra ainsi la neuvième nation à participer au groupement initié par la France pour accompagner les forces maliennes dans le Sahel et appelé à jouer un rôle central dans le dispositif antidjihadiste après la réduction prévue de la présence militaire française.

Outre la France, Takuba regroupe déjà des forces en provenance de Belgique, d’Estonie, d’Italie, des Pays-Bas, de la République tchèque, du Portugal et de Suède, qui a envoyé quelque 150 soldats début 2021. Le Danemark a également promis une centaine d’hommes pour 2022. La Norvège a aussi proposé d’envoyer deux officiers au quartier général de Takuba.

« La situation au Mali est extrêmement difficile. C’est dans ces moments-là qu’une présence internationale revêt de la valeur », a fait valoir le ministre Frank Bakke-Jensen, cité par le communiqué. Faute d’un soutien politique suffisant au Parlement, Oslo avait repoussé l’an dernier une demande française de contribution militaire à Takuba.


Le décryptage – France, Sahel : où en est la menace terroriste ?  

Cinq ans après l’attentat de Nice, où en est la menace terroriste en France ? Quid de la situation au Sahel depuis le début de l’opération Barkhane ? Les réponses de Pierre Martinet, ex-agent de la DGSE, et Bams M’Bouillé Cissé, parlementaire malien.


       « Opération Orion » : L’armée française prépare ses soldats à un conflit de grande ampleur

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Un conflit armé d’envergure pourrait opposer les pays d’Europe et du monde dans les années à venir. C’est en tout cas une éventualité à laquelle l’armée française dans son ensemble se prépare.

La Défense met en œuvre un plan colossal de préparation de ses troupes, tout en mettant l’accent sur la modernisation des équipements de l’armée. L’objectif : être prêt en cas de « conflit de haute intensité ». Environ 10.000 soldats devraient participer à cette opération baptisée « Opération Orion ».

Un exercice militaire de grande ampleur nommé « Opération Orion » est prévu pour 2023, dans le but de se préparer à un éventuel conflit d’envergure dans les prochaines années. Cet exercice militaire, qui comptera environ 10.000 soldats – appartenant aux Armées de terre, de l’air, et à la Marine nationale – se déroulera dans les forêts et les plaines de la région Champagne-Ardenne, là où de grandes puissances se sont affrontées par le passé, ainsi que le relate le magazine britannique « The Economist », relayé par « Le Courrier international ».

« Nous devons absolument nous préparer à un monde plus dangereux »

Trois camps de l’armée devraient être concernés, à savoir celui de Suippes, de Mailly ainsi que celui de Mourmelon. Des exercices de poste de commandement, des scénarios hybrides, des simulations ainsi que des exercices de tir réel sont prévus. Des forces belges, britanniques et américaines pourraient d’ailleurs se joindre aux troupes françaises.

Le général Thierry Burkhard – chef d’état-major de l’armée de terre, qui remplacera le 21 juillet prochain le général Lecointre, démissionnaire – est chargé d’assumer les premières étapes de cette gigantesque transformation des armées françaises.

Il a déclaré : « Nous devons absolument nous préparer à un monde plus dangereux. »

D’après les experts, l’hypothèse d’un conflit majeur planerait, et les généraux français estiment qu’ils ont quelques années pour s’y préparer. En janvier 2021, dix groupes d’études ont de ce fait été mis en place par l’état-major français, de façon discrète. Ils sont chargés « d’analyser la capacité du pays à faire face » à ce type de « HEM », qui signifie « hypothèse d’engagement majeur ». Ces groupes de recherche se penchent entre autres sur la question de savoir si les citoyens français sont « prêts à accepter un niveau de pertes inconnu depuis la Seconde Guerre mondiale », souligne l’un des membres de ce groupe. Sans nommer de manière directe les adversaires de la France dans un éventuel conflit majeur, les experts évoquent des pays comme la Russie, la Turquie ou encore un pays d’Afrique du Nord.

Un budget de 5,7 milliards d’euros est prévu

Ainsi, un budget colossal de 5,7 milliards d’euros devrait être alloué à l’armée française afin d’améliorer ses équipements d’ici 2023, via le programme « Scorpion ». Selon Rémy Hémez, officier et chercheur français, l’équipement de l’armée devrait d’ici 2025 changer de manière considérable, comparé aux quatre décennies qui viennent de s’écouler. Ainsi, quasiment tous les véhicules motorisés et blindés de première ligne de l’armée devraient être remplacés. Le char Leclerc, qui a fait ses preuves depuis de nombreuses années, sera lui aussi modernisé. De plus, un nouveau système de communication numérique doit relier tous les véhicules de la flotte blindée.

Et dans ce vaste plan de transformation, toute la stratégie militaire française est également amenée à subir un énorme changement. Alors que l’armée était habituée à des opérations extérieures ne comptant que quelques milliers d’hommes, « les opérations futures pourraient impliquer des brigades, ou une division, soit entre 8.000 et 25.000 soldats », précise encore le magazine britannique.


Après la guerre franco-prussienne de 1870, l’Europe entra dans une période de paix [longue, pour l’époque] qui favorisa les progrès économiques et technologiques, ce qui fit écrire à Charles Péguy que « le monde a[vait] plus changé entre 1880 et 1914 que depuis les Romains ».

Cette époque est d’ailleurs considérée comme ayant été celle de la « première mondialisation ». Cependant, des deux côtés du Rhin, elle fut marquée par les « grandes manœuvres militaires » [« Kaisermanöver » en Allemagne], dont l’enjeu était d’affiner les tactiques, de tester les nouveaux matériels et d’affirmer sa puissance militaire. Comme celles qui, organisées en 1901 dans l’est de la France, mobilisèrent pas moins de 130.000 soldats, répartis entre les Armées A et B.

Comparaison n’est pas raison, dit-on. Mais la « Belle Époque » présente quelques traits communs à la période actuelle, avec un contexte international qui se durcit et des menaces ne cessent de s’accentuer. Et désormais, un conflit [ou d’un engagement] de haute intensité fait partie des hypothèses que l’on ne peut écarter d’un revers de main.

Lors de sa dernière audition au Sénat en qualité de chef d’état-major des Armées [CEMA], plaidant pour un maintien de l’effort budgétaire en matière de défense en dépit des difficultés économiques causées par la pandémie de Covid-19, le général François Lecointre a affirmé que :

« Nous avons tous le devoir de faire prendre conscience à nos concitoyens que le monde qui les entoure est un monde violent et qu’ils vont être rattrapés par cette violence très rapidement, quoiqu’il arrive, qu’ils le veuillent ou non. » Et d’insister : « On ne peut pas faire d’impasse sur la protection de nos intérêts stratégiques et sur le rang de la France dans le monde ».

Cela étant, si elle ne sera pas actualisée comme prévu en raison des incertitudes économiques pour ses deux dernières annuités, la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25 fera toutefois l’objet d’ajustements afin de prendre en compte de nouvelles priorités. Et cela, selon trois axes : « Mieux détecter et contrer », « Mieux se protéger » et « Mieux se préparer ».

Selon les explications du général Lecointre, « mieux se préparer » signifie qu’il « s’agit surtout de conforter l’effort de préparation opérationnelle des armées, en parallèle de ce qui est conduit en faveur de leur réparation et de leur modernisation ».

« Pour être tout à fait franc, je pense que, au moment de l’élaboration de la LPM, nous avions sous-estimé les besoins en ressources budgétaires dans ces domaines. Aujourd’hui, il nous apparaît nécessaire de les renforcer, en rehaussant la disponibilité des équipements requis pour assurer une plus grande homogénéité de l’entraînement opérationnel, en compensant des fragilités logistiques mises en évidence par la crise sanitaire dans le domaine du maintien en condition opérationnelle et en améliorant les moyens permettant la valorisation de l’entraînement : simulation, centres de préparation opérationnelle et exercices, qui sont coûteux », a détaillé le CEMA.

 

Justement, s’agissant des exercices, le général Lecointre a confirmé que la France allait renouer, en quelque sorte, avec les « grandes manœuvres »… mais avec des effectifs évidemment beaucoup moins importants que par le passé.

« Nous prévoyons […] d’organiser en 2023 un exercice, dénommé Orion, qui sera multi-milieux, interarmées, interallié, de niveau divisionnaire et qui impliquera 17.000 à 20.000 hommes et 500 véhicules de l’armée de Terre, deux porte-hélicoptères amphibies, le porte-avions Charles-de-Gaulle pour la Marine et 40 avions de l’armée de l’Air et de l’Espace », a résumé le général Lecointre.

« Il nous faut acquérir des moyens permettant de garantir la cohérence d’ensemble et la maîtrise par les armées de la force dans des environnements moins permissifs », a-t-il continué, avant d’estimer qu’il est aussi nécessaire de renforcer les « activités notamment de l’armée de Terre et de l’armée de l’Air et de l’Espace, en augmentant les heures de vol de chasse et les heures d’entraînement sur blindés, à partir de 2022. »

Pour le CEMA, de telles manœuvres sont une manière de « signifier notre détermination » Et elles constituent aussi une « autre façon de contrer des stratégies hybrides car dans cette confrontation de volontés, nous devons penser que chacune de nos actions peut être, et doit pouvoir être, interprétée par nos compétiteurs ou par nos ennemis ».

Or, a-t-il poursuivi, « être capable de conduire un exercice de haute intensité participe de cette volonté de signifier à nos compétiteurs que nous nous défendons, que nous agissons et que nous sommes capables de contrer ces actions. » Et d’enfoncer le clou : « Les exercices que cette préparation nous amène à réaliser constituent, en eux-mêmes, une forme de démonstration de puissance, donc de confrontation. »

Reste que, depuis maintenant plusieurs années, la Russie organise régulièrement des manœuvres de grande ampleur, comme cela sera encore le cas avec celles appelées « Zapad 2021 », qui auront lieu en Biélorussie en septembre prochain.


Au mois de mai 2020, le CEMAT a présenté sa vision stratégique qui donne le cap à l’armée de Terre pour les dix années à venir. À ce titre, l’ambition du CEMAT est que la France dispose d’une armée de Terre durcie, prête à faire face aux chocs les plus rudes, en rehaussant notamment le niveau de la préparation opérationnelle.

Dans un contexte général d’incertitude, l’armée de Terre doit plus que jamais être prête à produire d’emblée de la puissance militaire pour faire face à un péril inattendu et renforcer sa résilience.


L’Otan n’est pas non plus en reste, avec des exercices d’une ampleur qui n’avait plus été vue depuis la fin de la Guerre Froide.


Source :

https://www.defense.gouv.fr/web-documentaire/vision-strategique-2020/index.html#page=1

https://www.economist.com/europe/2021/03/31/the-french-armed-forces-are-planning-for-high-intensity-war

https://fr.theepochtimes.com/larmee-francaise-prepare-ses-soldats-a-un-conflit-de-grande-ampleur-1782139.html

http://www.opex360.com/2021/06/26/haute-intensite-la-france-va-renouer-avec-les-grandes-manoeuvres-militaires/


         L’Accord d’Alger ou le chaos

                              par Abdelkrim Zerzouri

  La France va se retirer militairement du nord du Mali d’ici au début de l’année prochaine. Rapide comme décision, qui poserait dans cette logique un problème d’aptitude à évacuer les bases militaires de Kidal, Tessalit et Tombouctou en un laps de temps si court? Certaines sources affirment que ce retrait est sur les tablettes du présidentfrançais Macron depuis 2019, et il s’est confirmé depuis le dernier coup d’état opéré par le colonel Assimi Goïta au mois de mai dernier.

En matière logistique, le terrain était, donc, préparé de longue date, et il ne fait que passer à l’exécution d’un plan mûrement réfléchi, reste seulement à se demander pourquoi le nord du Mali n’est plus sur la carte des intérêts de la France, présente militairement dans la région depuis huit ans, et qui semblait bien parti pour rester plus longtemps encore sous le couvert de la lutte contre les groupes terroristes au Sahel ? Parler du nord du Mali c’est automatiquement voir l’Algérie de l’autre côté de la frontière. Y a-t-il, ainsi, un quelconque lien entre la décision de la France de se retirer du nord du Mali et l’influence d’Alger dans cette région frontalière ? Jusque-là, personne n’a fait le lien entre cette volte-face de la France et cette influence dans la région qui ne peut échapper à l’Algérie. Pourtant, si on revient à l’interview accordée au début du mois de juin au magazine le Point, on peut clairement déchiffrer le message fort qui laisse entendre que ce qui se passe dans le nord du Mali passe sous la loupe de l’Algérie. L’Algérie ne laissera jamais le nord du Mali devenir un sanctuaire pour les terroristes, ni permettra une partition du pays, avait affirmé le président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, lors de l’interview en question. Y compris par le recours à une intervention militaire de l’Algérie au Mali ? La question a été posée au président Tebboune, qui a rappelé dans sa réponse que la Constitution algérienne autorisait désormais ce type d’intervention, nuançant ses propos, néanmoins, en soulignant que «la solution n’est pas là».

C’est l’accord de paix d’Alger ou le chaos. Pourquoi, alors, la France garderait-elle un déploiement militaire un jour de plus dans cette région ? Cela semble même comme un appel de la France au pouvoir en place à Bamako pour s’intégrer sérieusement dans les termes de l’accord d’Alger, signé en 2015 entre les autorités maliennes et la coordination des mouvements de l’Azawad. C’est l’unique voie de paix et de réconciliation au Mali, qui affirmerait l’autorité de l’Etat malien sur tout son territoire et barrerait la route aux groupes terroristes. En tout cas, la France qui devrait abandonner le nord du Mali, ne manquerait de concentrer ses efforts militaires dans les zones se situant à la frontière entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire, où les groupes terroristes exercent une très forte pression à l’ouest du continent africain, devenu presque une nouvelle zone de prédilection pour leurs activités, comme en témoignent les derniers attentats commis dans les pays en question. Mais, cela ne reste pas moins qu’un « assistanat » d’une portée très limitée, qui pourrait même œuvrer à l’élargissement et au renforcement des rangs terroristes sous l’argument de la lutte contre la présence militaire étrangère sur le sol. La solution idoine serait d’aider les pays ciblés par les groupes à se reconstruire et à affirmer leur autorité sur leurs propres territoires, comme le préconise Alger.


    La fin de l’opération Barkhane ? – Le monde vu d’en bas #15 

 Dans ce nouveau numéro du Monde vu d’en bas, le sociologue Saïd Bouamama analyse trois nouvelles questions de l’actualité: la place prépondérante des faits divers, le démarrage de l’exercice de l’Otan baptisé African Lion 21 et enfin, l’annonce par Macron de la fin de l’opération Barkhane au Sahel.


 

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