Baisse de population historique en Chine

     Texte rédigé par l’équipe de Perspective monde


Après environ 60 années de croissance démographique continue, la Chine aurait connu une baisse d’environ 850 000 habitants en 2022. Elle reflète une tendance lourde identifiée depuis longtemps par les analystes, tendance qui devrait s’accentuer au fil des ans et avoir des impacts sociaux et économiques importants sur l’empire du Milieu.

La famine provoquée par le Grand bond en avant de la fin des années 1950 avait fait reculer la population chinoise entre 1960 et 1961. Par la suite, le pays connait une croissance ininterrompue. Le cap du milliard est franchi au début des années 1980, à peu près en même temps que le gouvernement adopte la politique de l’enfant unique. Elle mène à une stabilité entraînant son retrait en 2015. Des mesures sont même adoptées afin d’encourager les familles chinoises à avoir plus d’enfants : incitatifs fiscaux, congés de maternité, primes, etc. Elles semblent toutefois avoir peu d’impacts sur les couples qui, pour des raisons sociales et économiques variées, continuent d’avoir peu d’enfants. Le taux de fertilité de 1,28 observé en 2020 est même nettement inférieur à celui des pays occidentaux. Il s’ajoute au vieillissement de la population chinoise, une personne sur 5 ayant plus de 60 ans en 2020. Cette situation entraîne des problèmes de main-d’œuvre, mais aussi d’organisation sociale puisque les parents âgés ne peuvent compter que sur un enfant pour les aider. En janvier 2023, le Bureau national des statistiques identifie un tournant majeur. En effet, la Chine aurait subi une baisse de population en 2022, soit environ 850 000 personnes sur 1,4 milliard. Cela signifie que l’Inde serait peut-être déjà, ou sera bientôt officiellement, le pays le plus peuplé du monde. Les Chinois ne sont pas les seule à constater cette tendance à la baisse qui existe aussi au Japon et en Corée du Sud. Les prévisions à la baisse des prochaines années inquiètent néanmoins les autorités, tant sur le plan social qu’économique, qui abordent la question lors du XXe Congrès du Parti communiste en octobre 2022. Ce virage historique est toutefois bien reçu par ceux qui se soucient de la surpopulation du globe et de l’accroissement de la consommation de matières premières et de biens manufacturés.

       

Dans les médias…

Philippe Paquet, « Six cents millions de Chinois en 2100? »

«…quand le Parti communiste, inquiet d’un vieillissement de la population qui mettrait en péril le développement du pays, a commencé à assouplir sa politique à partir de 2013 pour autoriser les couples à avoir deux, puis maintenant trois enfants, il a affronté des réticences inattendues. Le coût de la vie et de l’éducation, en particulier, les explique en grande partie. Désormais, les femmes font aussi des études supérieures et veulent mener une carrière professionnelle. Elles se marient plus tard, ou ne se marient pas. Les jeunes se contentent d’un enfant, de deux au maximum, quand ils ne préfèrent pas acheter plutôt un animal de compagnie… Le nombre de femmes en âge de procréer a également diminué de 5 millions entre 2016 et 2021, autre méfait d’une politique démographique qui a conduit à un grave déséquilibre des sexes (parfois de l’ordre de 140 garçons pour 100 filles). Le taux de fécondité a parallèlement chuté à 1,15 enfant par femme, bien en dessous des 2,1 % nécessaires au renouvellement des générations. Pour la Chine, c’est là une bombe à retardement. »

La Libre Belgique (Belgique), 18 janvier 2023, p. 15.

Sébastien Falletti, « Pour la première fois, la population chinoise décline »

«…Le vieillissement menace le dynamisme économique et les finances des ménages, forcées d’épargner pour se prémunir des risques. « En Chine, le niveau de protection sociale n’est pas élevé, et le soin des personnes âgées devient un problème majeur alors que le nombre des seniors de plus 60 ans a dépassé 260 millions. Les gens ordinaires doivent épargner pour assurer l’avenir plutôt que de consommer » , juge Chan Kung, fondateur d’Anbound, un think-tank indépendant, à Pékin. L’anémie démographique pèsera également sur la main-d’oeuvre, avec à la clé une hausse des coûts du travail, qui fut longtemps un des atouts de « l’usine du monde » pour attirer les multinationales, et s’installer au coeur des chaînes de production mondiales. Ces statistiques sombres pèsent également sur les perspectives stratégiques du géant, engagé dans un bras de fer au long cours avec les États-Unis, sur fond de tensions croissantes en Asie-Pacifique, ainsi qu’avec son rival indien dans l’Himalaya. Elles posent un défi au président Xi Jinping, chantre d’un « rêve chinois » de renaissance nationale, alors que la légitimité du Parti communiste a reposé sur la prospérité grandissante de la population depuis l’ouverture économique des années 1980, affirmant la supériorité de son modèle face aux démocraties occidentales. »

Le Figaro (France), 18 janvier 2023, p. 5.

Mathilde Karsenti, « Chine : pourquoi la baisse de la population a de quoi inquiéter Pékin »

«…La diminution de la population chinoise et son vieillissement posent en outre un problème pour la croissance économique du pays. « Car à terme, il y aura tout bêtement moins de travailleurs et donc un déficit de main-d’oeuvre. Elle remet aussi en question la soutenabilité générale du système. Si on veut maintenir un certain niveau de productivité, il faut dégager des marges de surplus permettant d’investir et de maintenir la croissance positive », confie l’économiste François Chimits. Plus généralement, la Chine a effectué la transition démographique la plus rapide de l’Histoire. Or, aucun pays n’a réussi à rattraper les économies avancées en vieillissant. « Mais la Chine a jusque-là fait mentir un certain nombre des connaissances empiriques sur l’économie, il faut donc rester vigilant », admet l’économiste. Enfin, le vieillissement de la population peut entraîner des difficultés sur le plan géopolitique. La proportion de jeunes susceptibles de faire la guerre sera moindre et elle devra en plus s’occuper des personnes âgées : »cela limite doublement vos ambitions », relève François Chimits. »

L’Express (France), 18 janvier 2023.

Kelly Ng, « Should China worry about its shrinking population? »

«…This will involve making hard political decisions, said George Magnus, an independent economist and associate at the China Centre at Oxford University. For instance, it should consider national legislation to raise retirement ages, Mr Magnus said. The current retirement age for most men in China is 60, while the OECD average is 64.2. The number stands at 55 for female civil servants and 50 for female blue-collar workers. However, previous calls to raise the retirement age have sparked backlash in China, with older workers not wanting to delay access to their pensions. China is already pursuing automation through robotics and artificial intelligence, but the impact on productivity is still unclear, Mr Harris (l’économiste Andrew Harris) said. Another solution would be to bolster the population through immigration, although this is not an option that the Chinese Communist Party has favoured historically, he noted. Although China can no longer rely on its demographic dividend to fuel its economy, that may not be a bad thing if it manages to seek growth from other sources such as productivity, some observers say. »

BBC (Royaume-Uni), 20 janvier 2023. 

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