Gaza : les masques tombent

 

L’Opération « Déluge d’Al-Aqsa » lancée par la Résistance palestinienne le 7 octobre n’a pas seulement détruit le prestige de l’armée israélienne. Elle a démasqué l’hypocrisie de l’Occident, qui couvre les massacres atroces et sans précédent perpétrés à Gaza, ainsi que la duplicité de la plupart des prétendus « amis » occidentaux de la Palestine, qu’il s’agisse de forces politiques, de médias, de syndicats ou d’associations.

Par Le Cri des peuples

Le jour du 50e anniversaire de la guerre de Kippour, toutes les factions de la Résistance palestinienne ont lancé une spectaculaire offensive aérienne, terrestre et maritime qui a réussi à briser le siège de Gaza, s’emparant de nombreuses bases ennemies et libérant, fût-ce provisoirement, des localités occupées en 1948, une première dans l’histoire du conflit. En quelques heures à peine, des centaines de soldats de l’occupation ont été tués, et des milliers de colons ont pris la fuite (parfois à pied dans le désert), réduisant à jamais en miettes le mythe de la prétendue « armée la plus puissante du Moyen-Orient » et de ses services de renseignements réputés infaillibles : ceux-ci n’avaient même pas imaginé, pas même dans leurs scénarios les plus improbables, qu’une telle opération soit possible de la part du Hamas (Israël s’y était préparé au nord face au Hezbollah, qui a certainement transmis son expertise aux combattants palestiniens). A ce jour, Israël reconnait avoir subi 1 400 morts, 3 500 blessés et plus de 200 prisonniers, et les chiffres réels sont probablement plus élevés. Il s’agit d’ores et déjà de la pire humiliation de l’histoire de « l’entité sioniste », infligée non pas par une coalition d’armées nationales mais par une milice assiégée et asphyxiée depuis 16 ans dans le territoire le plus surveillé au monde.

Mais ce n’est pas seulement l’illusion de l’invincibilité d’Israël qui a volé en éclats : les alliés d’Israël, à savoir les dirigeants & élites des capitales occidentales, ont dévoilé au monde entier toute l’étendue de leur racisme, de leur cruauté et de leur hypocrisie, en apportant leur soutien inconditionnel à l’occupant et en faisant porter au Hamas la responsabilité de l’escalade et de toutes les pertes (y compris les morts palestiniennes), reprenant la rhétorique de l’armée israélienne. Ni les déclarations incendiaires de ministres israéliens sur les « animaux humains » palestiniens ou l’absence d’innocents à Gaza (pas même le million d’enfants, cible légitime pour l’occupant), ni le phosphore blanc, ni les crimes de guerre que constituent le fait de priver d’eau, d’électricité, de carburant, de médicaments et d’aide humanitaire plus de 2 millions de Palestiniens, ou de cibler délibérément des hôpitaux en sommant les personnels et patients de les évacuer en un temps record ou de se faire tuer, ni les bombardements massifs et délibérés sur des immeubles résidentiels qui ont rasé des quartiers entiers et causé plus de 5 000 morts (dont au moins 1 500 enfants) et des dizaines de milliers de blessés, ni, comble de l’infâme, l’ultimatum donné à plus d’un million d’habitants de Gaza-nord de se réfugier à Gaza-sud en moins de 24h (avec, en arrière-plan, les efforts pour déporter toute la population de Gaza dans le Sinaï égyptien), injonction qui relève du terrorisme d’État, qui est matériellement impossible à exécuter (surtout avec la pénurie de carburant et les routes dévastées) et qui constitue un crime contre l’humanité, n’ont ému « l’Occident civilisé », qui se refuse à toute condamnation de l’occupant et continue à lui apporter son soutien total sur les plans politique, médiatique et militaire, et met son veto au Conseil de l’ONU aux résolutions de cessez-le-feu. L’Europe a même restreint, réprimé voire interdit les manifestations de soutien à la Palestine, la France allant jusqu’à les bannir totalement et à considérer comme un acte antisémite le fait de brandir un drapeau palestinien. Après la première déchéance morale causée par la guerre en Ukraine, où l’Occident a expliqué sans vergogne que contrairement à celles des guerres de l’OTAN au Moyen-Orient, les victimes ukrainiens comptaient et devaient nous émouvoir car elles étaient « comme nous » (des blonds aux yeux bleus et non des basanés), la dernière feuille de vigne qui recouvrait le visage hideux de l’Occident est tombée, et il se dévoile au monde entier dans toute son abjection, applaudissant une boucherie quotidienne d’hommes, de femmes et d’enfants palestiniens. Derrière le paravent des droits de l’homme et du droit international, derrière les beaux costumes, le parfum et les prétentions de raffinement, derrière les appels à protéger les civils et à respecter le droit humanitaire, les gouvernants des pays occidentaux révèlent toute l’étendue de leur barbarie, indifférents voire hilares face au bain de sang et aux corps des bébés déchiquetés à Gaza.

Cependant, un des aspects les plus écœurants de ce grand dévoilement est la réaction des prétendus défenseurs de la cause palestinienne, qui, a de rarissimes exceptions près, se sont tous laissés submerger par la propagande pro-israélienne, que ce soit par faiblesse, par lâcheté, par la peur de la vindicte politico-médiatique (voire judiciaire, le NPA étant poursuivi pour apologie du terrorisme pour son premier communiqué exemplaire) ou par un racisme latent qui ne sacralise véritablement que les vies israéliennes. Les médias, personnalités et organisations considérées, voire revendiquées comme pro-palestiniennes ont rivalisé de zèle dans leurs communiqués condamnant l’attaque « terroriste » du Hamas et ses « crimes de guerre » allégués, présentant de facto Israël en position de victime qui ne ferait que se défendre (certes de manière « disproportionnée »), au mépris des données les plus élémentaires du conflit (Gaza est victime depuis 16 ans au moins du crime suprême selon le tribunal de Nuremberg, à savoir le crime d’agression, le blocus qui l’asphyxie étant un acte de guerre, sans parler des assassinats réguliers, de la colonisation de la Cisjordanie, de l’Apartheid, du nettoyage ethnique et des profanations de la mosquée Al-Aqsa, tant de casus belli contre lesquels le Hamas a légalement et moralement le droit de riposter) et sans considération pour le droit international qui consacre le droit des peuples occupés à se libérer par tous les moyens, y compris la lutte armée.

Voici un petit florilège politique, médiatique et syndical de la honte et de l’ignominie, qui a constitué une caution voire un encouragement impardonnables au massacre en cours à Gaza.

La France Insoumise

Le communiqué initial de LFI qui a tant fait couler d’encre était extrêmement timoré. Il ne prenait pas parti et renvoyait Israël et Palestine dos à dos (« Nous déplorons les morts israéliens et palestiniens. Nos pensées vont à toutes les victimes. »). Il appelait à un cessez-le feu, à la protection des populations civiles, au retour à la table des négociations et au respect des résolutions de l’ONU. Il a fait scandale parce qu’il ne condamnait pas explicitement le Hamas et n’employait pas le terme « terroriste », mais il faut bien souligner qu’il ne condamnait pas non plus Israël. La réaction de Jean-Luc Mélenchon sur Twitter était de la même veine, et se contentait de répéter des truismes dépassés (la solution à deux États est morte et enterrée, et aucune force au monde ne pourrait la ressusciter).

 

 

Mais de même que Mélenchon s’est dégonflé face à la guerre en Ukraine, condamnant la Russie comme seule responsable d’une agression non provoquée et s’alignant totalement sur l’OTAN qu’il prétendait faire quitter à la France s’il était élu Président, LFI a rapidement cédé à la meute, « condamn[é] l’attaque du Hamas contre Israël », ainsi que les « massacres », « actes abominables » et actes de « barbarie » que la résistance palestinienne aurait perpétrés (avec pour seule preuve les déclarations de l’armée israélienne, largement démenties depuis) et dénoncé « avec la plus grande force » ses « crimes de guerre qui visent à terroriser des populations civiles », se vantant de reprendre les mêmes mots que l’ambassadeur d’Israël à l’ONU. « Si notre soutien doit être total à la population israélienne, il ne peut pas être inconditionnel au gouvernement israélien », assure Manuel Bompard, coordinateur de la France Insoumise. Mais pourquoi donc soutenir un peuple largement raciste et suprémaciste, qui a toujours massivement soutenu les massacres à Gaza ? Pourquoi faudrait-il soutenir le gouvernement d’extrême droite et même fasciste de Netanyahou ne serait-ce que de manière conditionnelle, au lieu de seulement le condamner ? Manuel Bompard reconnait à Israël « le droit à la légitime défense » mais lui demande d’être « proportionné » : les Palestiniens n’ont-ils pas eux aussi le droit de se défendre ? Le Hamas, qui a causé un nombre de victimes israéliennes bien inférieur au nombre de Palestiniens régulièrement massacrés par Israël, n’a-t-il pas en ce sens agi de manière « proportionnée » ? On ne peut le nier que si on considère qu’une vie palestinienne vaut moins (et x fois moins) qu’une vie israélienne. Et est-ce que les actions du Hamas sont de la « résistance », demande une présentatrice ? Indignation de LFI : « Personne n’a utilisé cette expression à part elle. Flagrant délit de manipulation indigne qui participe des polémiques montées de toutes pièces contre LFI. » Le groupe NUPES s’est lâchement joint à la minute de silence pour les victimes israéliennes à l’Assemblée nationale : LFI affirme avoir demandé l’inclusion des victimes internationales et palestiniennes en vain, mais a tout de même participé à cet hommage scandaleusement unilatéral.

 

 

Mélenchon a couronné ce reniement par une déclaration condamnant le Hamas non seulement pour son attaque (alors qu’il admettait qu’il n’y avait pas encore de preuve de massacres dans les kibboutz, et faisait mine d’ignorer que les colons israéliens sont notoirement surarmés), mais également pour son identité même, à savoir un mouvement politico-religieux, amalgame qu’il considère comme une « abomination » même lorsqu’il est plébiscité par les populations concernées (rappelons que le Hamas a été élu dans des élections démocratiques et que sa résistance armée contre Israël est très massivement soutenue par les Palestiniens et les populations arabo-musulmanes en général). En rappelant sa haine de toutes les théocraties, Mélenchon n’a pas même remarqué la contradiction qu’il y avait à ne pas y inclure Israël, État fondé sur un amalgame total entre le politique et le religieux, avec une coalition au pouvoir comprenant des talmudistes fanatiques. Mélenchon a également souligné que s’il refuse d’employer le terme de terrorisme, c’est uniquement dans une perspective juridique, et parce que le qualificatif de « crime de guerre » est pire que celui de « terrorisme », et qu’il permettrait de trainer la Palestine à la CPI (sic: « Le Hamas a déclenché une opération de guerre contre Israël. Si nous voulons que les crimes de guerre soient jugés et poursuivis, il faut les appeler par leur nom. Cela est possible à la Cour pénale internationale. » Telle est donc la priorité de LFI : non pas ériger un Etat palestinien, mais traîner la Résistance palestinienne (et les dirigeants israéliens) devant les tribunaux.

En somme, la France Insoumise s’est abjectement soumise aux diktats de la doxa pro-israélienne, et a même surenchéri sur celle-ci, tout en se présentant comme sensible à la cause palestinienne, afin de manger à tous les râteliers. Elle ne revendique probablement une position de dissidence que pour « garder les votes des barbus » (et des voilées), comme l’a dit l’odieux Dupond-Maserati. L’ancrage de LFI dans des réflexes racistes et islamophobes est du reste démontré par le sort ignoble réservé à Taha Bouhafs.

Mediapart

« Les images sont insoutenables. » Ainsi commence un article placé en Une de Mediapart du 10 octobre, consacrée tout entière non pas aux massacres israéliens dans la bande de Gaza, à la destruction d’hôpitaux et d’immeubles résidentiels, à l’usage de phosphore blanc contre des zones civiles densément peuplées (un crime de guerre), à la crise humanitaire sans précédent annoncée par la privation d’eau potable, d’électricité, de gaz et de carburant imposée à plus de deux millions de Gazaouis pris au piège et n’ayant aucun endroit sûr où se réfugier afin de forcer leur déportation en Égypte (un crime contre l’humanité), mais bel et bien à ces fameux « crimes de guerre du Hamas ». Et les images en question ne sont pas celles de bébés palestiniens décapités, de corps de nourrissons et d’enfants sortis des décombres de Gaza, d’adieux déchirants d’un père, d’une mère ou d’un enfant à ses proches tués par les bombardements, de Palestiniens brûlés (morts ou vifs) à Gaza et en Cisjordanie, de leurs dépouilles profanées par des actes de mutilation ou de colons qui déshabillent complètement les cadavres de Palestiniens et se filment leur urinant dessus, mais simplement d’une israélienne capturée par le Hamas. L’article, intitulé Otages civils aux mains du Hamas : « Du jamais-vu dans l’histoire d’Israël », poursuit : Dans une vidéo partagée sur le réseau social X et filmée samedi 7 octobre peu après l’attaque terroriste [sic] du Hamas contre Israël, une femme, exhibée tel un trophée, gît, visage contre terre, inerte et quasi nue, à l’arrière d’un pick-up. Un milicien palestinien lui tire les cheveux, un autre lui crache dessus. Elle s’appelle Shani Louk. Sa famille l’a reconnue grâce à sa chevelure et à ses tatouages. »

 

 

Mediapart adopte clairement le point de vue israélien en parlant de « 11-Septembre israélien » et de « bain de sang », sur la seule foi des déclarations de l’armée israélienne (alors que des images montrent que des policiers israéliens tiraient depuis la rave party, ce qui contredit l’idée du massacre gratuit au profit de celle de civils « pris entre deux feux »), et en parlant d’ « images insoutenables » alors que la seule chose véritablement « insoutenable », dans la société israélienne, est la fin du mythe de la capacité de l’armée israélienne à protéger ses colons. De plus, Mediapart colporte insidieusement l’idée largement propagée que Shani Louk aurait été violée et ne serait plus en vie, et ce 3 jours après que les images soient devenues virales. Pourtant, on sait alors qu’elle était déjà en petite tenue durant la rave party dans le désert du Néguev, et que sa famille affirme avoir reçu des preuves qu’elle était encore en vie. Ainsi, Mediapart reprend la rhétorique du gouvernement israélien en parlant d’attaque « terroriste » (un terme qui n’est jamais utilisé pour les crimes israéliens), propage le trope des Arabes violeurs de Blanches et ment grossièrement en disant qu’un combattant du Hamas lui crache dessus (on voit très bien sur la vidéo en question que c’est un enfant qui le fait, ce qui est regrettable, mais très différent de ce qui est dit). De manière significative, c’est exactement ces mêmes déclarations que fera Marine Le Pen à l’Assemblée Nationale, qui ne retient elle aussi que cette image marquante du colon prisonnier des indigènes : le média d’Edwy Plenel (que Miterrand qualifiait d’agent des Etats-Unis) se place donc sur la ligne de l’extrême droite française et israélienne, en se basant sur la version des faits de l’armée d’occupation malgré l’absence de preuves, et en mettant en exergue des images tout à fait insignifiantes si on les compare à la vie quotidienne des Palestiniens sous l’occupation et son lot d’exécutions, de tortures, de viols bel et bien avérés de détenues palestiniennes, etc., ce au moment où Israël commet son plus grand massacre de civils à Gaza. Beaucoup plus loin dans l’article, sans aucun trémolo ou condamnation, il sera mentionné froidement que « Aucune électricité, aucune nourriture, aucune eau, aucun carburant » ne sera autorisé dans l’enclave, et que le ministre de la défense israélien a affirmé « Nous combattons des animaux et nous agissons en conséquence ». A ce sujet, Mediapart se garde de tout commentaire chargé émotionnellement tels que ceux utilisés du côté israélien (« insoutenable », « Plongées dans l’effroi depuis ce funeste jour de Shabbat », « aussi traumatisantes soient celles-ci »), montrant bien de quel côté bat son cœur (du côté des « humains », pas des « animaux ») et où sont ses priorités.

Bien pire, Mediapart a également mis en Une un article intitulé Massacres dans deux kibboutz : « Ils ont assassiné de sang-froid des enfants, des gens âgés », présentant comme un fait avéré les pires atrocités attribuées au Hamas, et ce encore une fois en se basant sur les seules déclarations de l’armée israélienne : sont ainsi cités, sans aucune remise en cause, « un responsable de l’armée israélienne » (« C’est quelque chose qui ressemble plus à un pogrom de l’époque de nos grands-parents »), « le général de division Itaï Virov » (« Ce n’est pas une guerre ou un champ de bataille, c’est un massacre »), « le colonel Olivier Rafowicz, un porte-parole de l’armée israélienne » (« Ce qui se passe actuellement en Israël, c’est la découverte de l’atrocité de massacres commis pendant deux jours par les terroristes islamistes du Hamas, dont le carnage du kibboutz de Bee’riDes centaines d’hommes, femmes et enfants ont été massacrés, déchiquetés, décapités par des hommes fous de haine. Cela a été répété dans des dizaines de lieux en Israël »), « Yossi Landau, commandant de Zaka » (« C’est incroyable le nombre de victimes qu’on a vues, ce qui a été fait à ces familles, à ces enfants. Ça fait trente-trois ans que je fais ce métier et je n’avais jamais vu ça »), « le ministre de la défense israélien, Yoav Galant » (« Tous ceux qui sont venus pour décapiter, assassiner des femmes et des survivants de l’Holocauste seront anéantis au plus fort de notre force et sans compromis. Ce que nous avons vu dans les villes était un massacre ») ainsi que les journalistes israéliens (I24News) et occidentaux (CNN) que l’armée a sélectionnés pour sa propagande, et qui ont docilement colporté (puis rétracté) l’histoire des 40 bébés décapités (« Ils ont tiré sur tout le monde, ils ont assassiné de sang-froid des enfants, des bébés, des gens âgés, tout le monde. »).

La conclusion de cet article est à l’avenant. A la fin de la dernière section, intitulée « Mal à l’état pur » (sic), on lit :

Depuis la Maison Blanche, le président des États-Unis, Joe Biden, a dénoncé les atrocités commises par le Hamas dans les communautés autour de Gaza, parlant de « mal à l’état pur ». « La brutalité du Hamas assoiffé de sang nous rappelle les actes les plus horribles de l’État islamique, a-t-il dit. Il s’agit de terrorisme qui, malheureusement, n’est pas nouveau pour le peuple juif. Cette attaque évoque des souvenirs douloureux, les cicatrices de mille ans d’antisémitisme et de génocide. »

Peu importe qu’aucune image ou vidéo ne vienne étayer ces affirmations dont la violence rappelle les pires diatribes nazies. Aucune mention du fait qu’en Israël, une censure militaire implacable filtre la moindre publication dans les médias, même en temps de « paix ». Nul doute n’est exprimé quant à la véracité de ces dires, alors même que la première phrase de l’article indiquait bien que le kibboutz avait été libéré après d’âpres combats (« Ce n’est que lundi, au bout de deux jours et demi de combats, que les troupes israéliennes ont pu reprendre le contrôle du kibboutz de la localité de Kfar Azza »), sans que l’hypothèse de la mort d’Israéliens durant les échanges de tirs ou dans les frappes israéliennes ne soit même évoquée (alors que des survivants israéliens ont affirmé que leurs propres forces étaient responsables de la mort de nombreux colons, et que la Doctrine Hannibal selon laquelle Israël préfère tuer ses ressortissants que les laisser tomber vivants entre les mains du Hamas est bien connue, et a été mentionnée dans l’article de Mediapart précédemment cité). Ainsi, foulant aux pieds l’éthique journalistique et faisant fi de la responsabilité énorme qui pèse sur les médias en un moment si critique, Mediapart n’a pas de scrupules à se faire le porte-parole de l’armée israélienne au moment où elle s’apprête à commettre un massacre sans précédent à Gaza, colportant pour ce faire des mensonges comme celui des bébés décapités qui ne peuvent que contribuer à faire accepter à l’opinion les « représailles » d’Israël contre le « mal absolu » qu’il faudrait extirper de Gaza. Ce canular était cautionné par Biden dans le discours ci-dessus (il prétendait avoir vu des photos), mais a depuis été rétracté par la Maison blanche qui a précisé qu’aucune preuve n’en a été fournie, et que Biden avait simplement répété les déclarations de l’armée israélienne (comme il le fera pour la frappe meurtrière contre l’hôpital Al-Ahli à Gaza, attribuée par l’occupant à une roquette du Jihad islamique). Du reste, dans les 680 noms de victimes israéliennes publiés par Haaretz, il n’y a aucun bébé. Mais jusqu’à ce jour, Mediapart ne juge pas nécessaire de publier un démenti (pas plus qu’il ne se repent de ses ignobles calomnies contre Julian Assange). Le journal est même allé jusqu’à censurer les commentaires qui remettaient en cause la réalité des faits allégués dans l’article et l’irresponsabilité qu’il y a pour un journal à les diffuser sans aucune vérification dans un tel contexte, les supprimant par dizaines sans même assumer cette censure, attribuée aux auteurs desdits commentaires (la seule mention est « Ce commentaire a été dépublié par son auteur·e. »).

Cerise sur le gâteau : ces deux articles sont rédigés par une certaine… Rachida El Azzouzi. Et dire que certains pensent que la France est raciste et que les Arabes ne peuvent pas y réussir…

CGT

« Samedi 7 octobre, le Hamas a déclenché une offensive d’une violence inédite, s’en prenant à de très nombreuses cibles civiles. La CGT condamne cette escalade qui endeuille et prend pour cible des millions de civils israéliens comme palestiniens et dessert la cause palestinienne. »

C’est en ces mots que commence le communiqué de la Confédération Générale du Travail publié le 9 octobre, et intitulé « Pour une paix juste et durable entre Israël et la Palestine ! » Il s’agit d’un véritable concentré de lâcheté, de mensonge et d’ignominie.

« Violence inédite » ? Mais tout ce que le Hamas a fait, même en prenant en compte les crimes qu’on lui attribue sans aucune preuve, Israël fait bien pire depuis des décennies ! Est-ce que les vies israéliennes comptent plus que les vies palestiniennes ? Pourquoi parler de « violence inédite » ou de « cap franchi », alors que la Palestine ne fait, dans le pire des cas, que reproduire de manière artisanale ce que l’occupation lui fait subir à une échelle industrielle depuis 1948 ?

C’est donc « l’escalade du Hamas » qui prendrait pour cible « des millions de civils israéliens comme palestiniens ». Les civils israéliens passent devant, bien entendu, au vu du taux de change très inégalitaire entre vies juives et vies arabes, mais même les victimes palestiniennes ne seraient pas ciblées par l’aviation et l’artillerie de l’occupation, mais par le Hamas lui-même ! Pure rhétorique israélienne selon laquelle c’est le Hamas qui est responsable de toutes les morts à Gaza, via le mythe des boucliers humains et autres mensonges.

Enfin, depuis le confort de ses bureaux en région parisienne, la CGT a l’arrogance inouïe de décréter ce qui sert ou « dessert la cause palestinienne », démontrant une mentalité empreinte de suffisance et de morgue coloniales.

 

 

Le dernier paragraphe du communiqué confédéral de la CGT rétablit quelques faits par lesquels il aurait fallu commencer, et desquels il fallait se contenter :

« Le gouvernement israélien dominé par l’extrême droite mène ouvertement une politique d’apartheid et poursuit inexorablement la colonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, au mépris de toutes les décisions internationales, fermant chaque jour davantage la porte à tout processus de paix, alors que Benyamin Netanyahou appelle à raser les villes de Gaza.

La CGT rappelle que le Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies (ONU), dans un rapport publié mardi 7 juin, condamne clairement la politique d’Israël sur la situation : « Les conclusions et recommandations liées aux causes profondes de ce conflit pointent dans leur immense majorité vers Israël, ce que nous analysons comme un indicateur de la nature asymétrique du conflit et la réalité d’un État qui en occupe un autre. »

La CGT, qui a fait porter au Hamas la responsabilité de cette « escalade » et de ses conséquences tout au long de son communiqué, est donc en totale contradiction. Mais ce n’est pas l’exigence de cohérence, ni de moralité, qui prime, mais bien celle de « hurler avec les loups ».

 

 

Le 18 octobre, la CGT a publié un nouveau communiqué intitulé « Stopper immédiatement le bain de sang à Gaza ! ». Malgré ce titre encourageant, son contenu est tout aussi affligeant que celui du communiqué précédent, voire davantage. Il commence en ces termes :

« Depuis 10 jours, la population de Gaza subit des frappes terribles en représaille [sic] des actes de terreur perpétrés par le Hamas le 7 octobre dernier. La CGT a condamné sans ambiguïté cette politique du pire qui dessert la cause palestinienne. Elle ne s’étonne pas de ce que le Hamas fasse ce type de choix, lui qui viole les droits des femmes et multiplie les arrestations arbitraires depuis près de 20 ans à Gaza, imposant une double peine à l’enclave, maintenue sous un blocus scandaleux par Israël depuis 2007. »

Alors  que la population de Gaza est génocidée depuis plus de 10 jours, et compte des milliers de morts, des dizaines de milliers de blessés et des centaines de milliers de déplacés, la CGT consacre toute sa première tirade à condamner le Hamas, seul le mot « scandaleux » condamnant Israël pour son blocus en toute fin de paragraphe. La même inversion accusatoire est à l’œuvre, via un renversement de la chronologie qui place Gaza en position d’agresseur et non de victime (les représaille[s] s’en trouvent légitimées en quelque sorte), avec d’un côté des « frappes terribles » et de l’autre côté des « actes de terreur » (accuser Israël de terrorisme n’est pas envisageable, même quand ils menacent 1 million d’habitants d’annihilation s’ils n’évacuent pas le nord de Gaza). La « politique du pire » n’est pas celle du gouvernement d’extrême droite de Netanyahou qui n’a laissé aucun autre choix à la population palestinienne, mais celle du Hamas, qui par ailleurs « viole les droits des femmes » (est-ce une référence au port du voile, signe d’arriération notoire pour les CGTistes, même quand il est librement porté ? Il ne manque qu’une référence aux droits de l’inexistante communauté LGBTI+ à Gaza pour parfaire le tableau…). Et toujours ce souci majeur de la CGT pour ce qui sert et dessert la cause palestinienne, qui est une des priorités de leurs bureaux de Montreuil : comme on le lit en fin de tract, « La CGT travaille actuellement à la construction d’un arc de forces le plus large possible en faveur d’un cessez-le-feu immédiat et d’une paix juste et durable pour cette région du monde. » Dans de telles conditions, les habitants de Gaza sont vraiment des ingrats d’avoir lancé cette offensive qui risque de faire capoter les plans de paix juste et durable savamment mûris, entre deux bières, par les experts de la CGT. Il suffisait de patienter quelques décennies de plus et le tour était joué, que diable…

Mais le pire est encore à venir. Quelques paragraphes plus loin, on lit :

La CGT exige de la France, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, qu’elle mobilise sans délai les ressources de sa diplomatie pour obtenir un cessez-le-feu immédiat et pour que l’anéantissement annoncé du nord de Gaza, par une offensive terrestre, maritime et aérienne de grande ampleur, ne se produise pas. Elle exige, aussi, que tout soit mis en œuvre pour venir en aide aux populations civiles. La générosité et les dispositions exceptionnelles (de protection temporaire notamment) mises en œuvre avec raison dans l’accueil aux populations ukrainiennes fuyant la guerre doivent également s’activer en direction des populations palestiniennes !

Non seulement ne lit-on aucune condamnation explicite de ce crime contre l’humanité en préparation, à savoir la déportation ouvertement planifiée de la population de Gaza vers le sud puis vers le Sinaï égyptien, mais après une timide demande à ce que cela « ne se produise pas », la CGT appelle à faciliter cette déportation par un accueil des populations palestiniennes expulsées, de la même manière que les populations ukrainiennes ont été accueillies massivement dans les pays occidentaux suite à l’intervention de la Russie.

La CGT, dont la Secrétaire Générale Sophie Binet a dénoncé le Hamas comme « terroriste » (elle avait également soutenu l’interdiction de l’abaya dans les établissements scolaires…), démontre une fois de plus qu’en dépit de divergences cosmétiques, elle est alignée sur la politique de l’OTAN et celle des capitales occidentales, une position qui n’a fait que se confirmer depuis qu’elle a quitté la Fédération Syndicale Mondiale (composée des pays du Sud) en 1995.

Précisons que du côté des associations, même musulmanes, même pro-palestiniennes comme l’AFPS, on a également jeté la pierre au Hamas.

Pourquoi ?

Au-delà de la pression politico-médiatique ouvertement sioniste et de son matraquage insoutenable du récit israélien, ainsi que des menaces judiciaires bien réelles d’inculpation pour apologie du terrorisme, qui peuvent expliquer l’aveuglement et/ou la lâcheté de toutes ces voix, il faut rappeler que les problématiques à l’œuvre en Palestine occupée recoupent largement celles de l’histoire du colonialisme. En particulier, il faut se souvenir de la position ambigüe des forces occidentales dites de gauche ou progressistes face aux luttes de libération nationale contre leur propre pays. Un extrait de la Préface de Jean-Paul Sartre aux Damnés de la terre de Frantz Fanon, consacré à la guerre d’Algérie, exprime tout ce qu’il y a à dire sur le « soutien » de LFI, Mediapart, la CGT et tant d’autres à la cause palestinienne :

« La gauche métropolitaine est gênée : elle connaît le véritable sort des indigènes, l’oppression sans merci dont ils font l’objet, elle ne condamne pas leur révolte, sachant que nous avons tout fait pour la provoquer. Mais tout de même, pense-t-elle, il y a des limites : ces guérilleros devraient tenir à cœur de se montrer chevaleresques ; ce serait le meilleur moyen de prouver qu’ils sont des hommes. Parfois elle les gourmande : “Vous allez trop fort, nous ne vous soutiendrons plus.” Ils s’en foutent : pour ce que vaut le soutien qu’elle leur accorde, elle peut tout aussi bien se le mettre au c*l.

Dès que leur guerre a commencé, ils ont aperçu cette vérité rigoureuse : nous nous valons tous tant que nous sommes, nous avons tous profité d’eux, ils n’ont rien à prouver, ils ne feront de traitement de faveur à personne. Un seul devoir, un seul objectif : chasser le colonialisme par tous les moyens. Et les plus avisés d’entre nous seraient, à la rigueur, prêts à l’admettre mais ils ne peuvent s’empêcher de voir dans cette épreuve de force le moyen tout inhumain que des sous-hommes ont pris pour se faire octroyer une charte d’humanité : qu’on l’accorde au plus vite et qu’ils tâchent alors, par des entreprises pacifiques, de la mériter. Nos belles âmes sont racistes. […]

Vous condamnez cette guerre mais n’osez pas encore vous déclarer solidaires des combattants algériens ; n’ayez crainte, comptez sur les colons et sur les mercenaires : ils vous feront sauter le pas. »

Oui, c’est bien de racisme (voire d’islamophobie) qu’il s’agit. Le martyre de la population palestinienne, qui perdure depuis des décennies, n’a jamais autant ému « nos belles âmes » occidentales que le soulèvement de Gaza contre les soldats et les colons, bien que la violence du Hamas et le nombre de victimes israéliennes soient bien moindres que ce qu’inflige régulièrement l’occupant à la population arabe. Quant à « sauter le pas » et à soutenir la résistance palestinienne, il est probable que « nos belles âmes » ne s’y résoudront jamais, puisque le massacre de plus d’un millier d’enfants, une frappe contre un hôpital ayant occasionné plus de 500 victimes civiles, le risque de mort imminente qui pèse sur des centaines de milliers de Palestiniens pris au piège et privés d’eau potable, d’électricité, de carburant et de médicaments, et le spectre d’un exode massif ne les ont pas ébranlées dans leur certitude que toute déclaration de « soutien » à la Palestine doit commencer par une condamnation des « crimes de guerre » du Hamas, organisation « terroriste » qui « prend en otage » la population de Gaza (peu importe que cela contredise les faits, cela donne bonne conscience).

Norman Finkelstein, fils de rescapés d’Auschwits et du ghetto de Varsovie, a contextualisé et commenté ces prises de position, et affirmé un soutien authentique à la lutte des Palestiniens. Une position si courageuse est si rare qu’il vaut la peine de la citer longuement :

« Mes parents étaient dans le ghetto de Varsovie jusqu’au soulèvement d’avril 1943. Le soulèvement du ghetto est normalement considéré comme un chapitre héroïque, ou le seul chapitre héroïque de l’extermination nazie. À l’occasion de cet anniversaire, il y a probablement 20 ou 30 ans, Amy Goodman, de l’émission Democracy Now ! a interviewé ma mère sur le soulèvement du ghetto de Varsovie. Et ma mère était très – disons-le comme ça – elle était très sceptique quant à toutes les louanges qu’on lui adressait. Elle disait, premièrement, « Nous étions tous destinés à mourir, et il n’y avait donc pas de grand héroïsme à essayer de résister alors qu’il n’y avait pas d’autre option, que nous allions être déportés et exterminés ». Deuxièmement, elle a dit que la résistance était largement exagérée, ce qui était en fait vrai. Il s’agissait d’une résistance minuscule à l’occupation nazie de Varsovie à l’époque. J’ai donc vu Amy Goodman, dont le visage a commencé à se décomposer parce que ma mère diminuait ce qui était censé être un chapitre héroïque ou le seul chapitre héroïque de cette horrible séquence d’événements. Alors Amy lui a demandé, « Y a-t-il quelque chose de positif dans ce qui s’est passé ? » Et je me souviens que ma mère a fait un commentaire, elle a d’abord parlé de l’ingéniosité, de l’ingéniosité des combattants du ghetto de Varsovie. Elle a décrit le fait qu’ils n’avaient ni matériel ni outils. Et ils ont construit ces catacombes très complexes – ce qu’on appelait des « bunkers » dans le ghetto – à mains nues. Je me souviens qu’elle avait utilisé le mot « ingéniosité ». Et puis, quand j’ai vu, vu ou lu l’ingéniosité des gens du Hamas à Gaza, l’endroit le plus surveillé sur la terre de Dieu, chaque coin et recoin est sous 10 000 technologies de surveillance israéliennes différentes. Chaque recoin de Gaza est soumis à 10 000 technologies de surveillance israéliennes différentes. Et pourtant, ils ont réussi, au milieu de tout cela, à contourner toute la surveillance israélienne et à mener cette opération – je rends hommage à cette ingéniosité ! Je rends hommage à la résistance d’un peuple qui a littéralement, ou presque littéralement, trouvé un moyen de résister à ce camp de concentration qui lui est imposé ou de le surmonter.

Et je ressens le même émerveillement – je suis encore totalement époustouflé – face au fait que le Hamas a trouvé un moyen de mettre à profit l’ingéniosité humaine et l’esprit de résistance, ainsi que tous les pouvoirs que chaque individu peut invoquer dans cette lutte pour la résistance pour vaincre un adversaire très redoutable ou imposer une défaite, même si elle ne s’avère pas durable, pour imposer une défaite momentanée à ces suprémacistes racistes et Übermenschen qui ne croient tout simplement pas que les Arabes sont assez intelligents, assez malins, assez ingénieux pour l’emporter.

Quant à la question des civils Israéliens et de leur mort, je ne sais pas ce qui s’est passé. J’écouterai patiemment et j’analyserai aussi équitablement que possible les preuves au fur et à mesure qu’elles seront disponibles. Je ne mettrai pas de « mais », je ne mettrai pas de « cependant », je me contenterai d’exposer les faits. Premièrement, je relisais l’autre jour La guerre civile en France de Karl Marx, qui décrit la période où les ouvriers parisiens prennent le pouvoir à Paris, forment une Commune, et où le gouvernement, le gouvernement officiel, assassine les prisonniers de guerre, les otages, et cela devient si brutal que les Communards, comme on les appelait, prennent environ 50 ou 60 otages. Le gouvernement n’a pas voulu céder, il n’a pas voulu céder, et les Communards ont tué les otages. 

Karl Marx a défendu cette action. Il l’a défendue. Il a dit que « c’était une question de… Les communards étaient traités avec un tel mépris. » Les communards cherchaient un moyen de résoudre pacifiquement ce problème. Ils ont demandé que l’un de leurs chefs, Blanqui, leur soit rendu, mais le gouvernement n’a pas voulu. Vous savez, John Brown [1800-1859, abolitionniste américain qui en appela à l’insurrection armée pour abolir l’esclavage] n’avait pas un casier judiciaire vierge. Lors d’une bataille au Kansas à propos d’un endroit appelé Osawatome, il a tué des otages. C’est ce qu’il a fait. Et lorsqu’il a été pendu, il a été très difficile de trouver quelqu’un pour le défendre. En fait, j’ai récemment appris, en lisant un article de Cornel West, que l’une des rares personnes à avoir pris sa défense était Herman Melville, l’auteur de Moby Dick, ce que j’ignorais. Mais il a tué des otages, il a été pendu et très peu de gens ont pris sa défense, mais très vite après, la guerre civile est arrivée. Et l’un des chants de marche de la guerre civile était « Le corps de John Brown gît dans la tombe ». Le jugement de l’histoire peut être très différent du jugement du moment. 

Il est tellement consternant, ce n’est pas seulement le mépris, c’est tellement consternant, la réaction de tous ces lâches, ces carriéristes et ces ordures qui utilisent leur micro appelé Twitter pour simplement dénoncer l’attaque du Hamas. La plupart des militants du Hamas, probablement ceux qui ont franchi la clôture, c’est la première fois qu’ils sortent de Gaza parce qu’on suppose qu’ils ont pour la plupart une vingtaine d’années. Le blocus dure depuis 18 ans. Ils ont grandi dans un camp de concentration. Ils veulent être libres. L’une des caractéristiques de la technologie actuelle est qu’ils peuvent voir à l’écran tous ces gens qui marchent librement. Ils veulent être libres. Ils ont rejoint le Hamas, ils se sont portés volontaires. Oui, en vertu du droit international, ils sont des combattants. Est-ce que je pense qu’ils sont des cibles légitimes parce qu’ils sont des combattants ? Vous ne me convaincrez jamais de cela. Vous ne me convaincrez jamais.

Je sais ce que dit la loi. Je sais ce que je suis légalement obligé de dire. Je sais ce qu’en tant qu’universitaire ou universitaire déclaré, je suis censé dire. Mais allez-vous me convaincre qu’une personne qui a grandi dans un camp de concentration et qui veut respirer de l’air libre, est – pour utiliser le langage du droit international – une cible légitime ? Je ne peux pas l’accepter. Je ne peux pas l’accepter. Je ne crois pas qu’un enfant né dans un camp de concentration soit une cible légitime s’il veut être libre. Je ne vois pas comment ce pourrait être le cas.

Jusqu’où sont-ils autorisés à aller pour sortir de ce camp ? Jusqu’où peuvent-ils aller ? Je pense que c’est une question légitime. Mais je vais vous donner un exemple. En 1996, la Cour internationale de justice (CIJ) a été invitée à rendre ce que l’on appelle un avis consultatif. La question posée à la Cour était la suivante : l’utilisation ou la menace d’utilisation d’armes nucléaires est-elle illégale au regard du droit international ? Comme vous le savez tous, le principe fondamental du droit de la guerre est la distinction entre les civils et les combattants, entre les sites civils, les bases militaires, etc. Donc, dans la mesure où les armes nucléaires, de par leur nature même, sont incapables de faire la distinction entre les civils et les combattants, entre les sites civils et les sites militaires, dans la mesure où elles ne peuvent intrinsèquement pas le faire, la question se pose évidemment de savoir si elles sont légales en vertu du droit international.

Cette question a fait l’objet d’une vaste délibération de la Cour suprême de la CIJ, qui a conclu que, dans presque toutes les circonstances, l’utilisation d’armes nucléaires était illégale au regard du droit international, pour les raisons que nous venons d’évoquer. Cependant, la Cour a déclaré qu’il y a un domaine dans lequel nous ne pouvons pas décider. Et le domaine dans lequel nous ne pouvons pas décider, a déclaré la Cour, est celui où la survie d’un État est en jeu. En d’autres termes, qu’en est-il si un pays est confronté à la perspective d’une attaque pouvant mener à la désintégration de l’État ? La CIJ a répondu que, peut-être, si la survie d’un État était en jeu, peut-être que le recours à l’arme nucléaire serait alors justifié.

Il ne faut pas oublier que la CIJ n’a pas délibéré sur la survie d’un peuple. Elle a délibéré sur la survie d’un État. Si la Cour internationale de justice – la plus haute instance judiciaire du monde – n’a pas pu décider si vous avez le droit d’utiliser des armes nucléaires pour défendre la survie de votre État, alors je dirais que vous avez clairement le droit d’utiliser la force armée pour protéger la survie de votre peuple. Ainsi, selon les normes actuelles du droit international, il m’est très difficile de condamner les Palestiniens, quoi qu’ils aient fait. Je trouve cela très difficile.

Quand je vois les Alexandria Ocasio-Cortez, les Ilhan Omar, les Bernie Sanders, quand ils “condamnent“ la révolte des détenus dans le camp de concentration, quand ils disent “Israël a le droit de se défendre quand les détenus franchissent les murs du camp“, je leur crache dessus. Ils me donnent la nausée.

Malheureusement, on peut compter sur les doigts d’une main – et même moins que les doigts d’une main – le nombre de personnes qui ont montré du cœur, de l’âme, de la compassion pour la population de Gaza, abandonnée de tous. »

Il est intéressant de noter que toutes ces « trahisons » de la cause palestinienne se font alors qu’aux yeux de l’opinion occidentale, imbibée de siècles de préjugés sur la « supériorité de l’homme blanc » et de décennies de propagande hollywoodienne sur la suprématie présumée des armées américaines et de leurs alliés, Gaza est sur le point de se faire anéantir, sa population sur le point de subir une déportation massive et définitive, et la cause palestinienne s’apprête à rendre son dernier souffle. On ne peut qu’imaginer le concert de hurlements, de cris d’orfraie et de vociférations qui émanera des capitales de « l’Occident civilisé » lorsque les forces de l’Axe de la Résistance (Iran, Irak, Syrie, Yémen, Hezbollah…) entreront en scène pour la Grande guerre de Libération de la Palestine, qui se finira inéluctablement par l’exode des 6 millions de colons sionistes vers l’Europe et l’Amérique, sur le modèle de la fin de l’Algérie française. Ce jour-là, qui est beaucoup plus proche qu’on se l’imagine, le silence assourdissant face à l’imminence du nettoyage ethnique total des plus de deux millions de Palestiniens de la bande de Gaza, et du parachèvement de celui des trois millions de Palestiniens en cours en Cisjordanie, sera remplacé par un tonnerre de récriminations enragées et impuissantes. Et les discours de haine de l’immigration se transformeront en une rivalité acharnée pour accueillir les « réfugiés » Juifs expulsés de Palestine, comme on a pu le voir pour l’Ukraine.

 

 

D’une certaine manière, on peut se féliciter de cette situation. Il est tant mieux que les masques tombent. La cause palestinienne est trop sacrée pour que les lâches, les opportunistes et les hypocrites puissent prétendre y avoir oeuvré par leurs déclarations de « soutien ». Il est bon que les imposteurs soient expurgés des rangs des défenseurs véritables de la cause palestinienne, et que n’y demeurent que ses partisans sincères. C’est peut-être la dernière condition de sa Libération.

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