La réalité de l’accord de 1968 et l’œuvre positive de l’Algérie pour la France

       

        Par le Professeur émérite
Chems Eddine Chitour École polytechnique, Alger

«Lorsqu’on voit ce que l’occupation allemande a fait comme ravage dans l’esprit français, on peut deviner ce que l’occupation française a pu faire en cent trente ans en Algérie.»
(Jean Daniel Le temps qui reste, 1972.)

Résumé
L’Europe s’ensauvage ! Elle qui se dit le sanctuaire des droits de l’Homme. Elle a peur de l’étranger, du mélanoderme, surtout s’il appartient à une religion qui sent le soufre. Deux petits exemples : le 8 juin, une personne agresse des enfants dans un parc L’horreur ! Heureusement, il n’y eut que des blessés. Au lieu de juger l’acte, on juge, à tort, la religion. Le ban et l’arrière-ban de la droite extrême se déchaînent : pas besoin d’enquête, le jugement est sans appel : haro sur l’Arabe l’islamiste musulman, le terroriste ! Résultat des premières investigations : nous avons affaire à un déséquilibré chrétien qui s’est écrié «au nom du Christ !» — cela nous change du «Allah Akbar» — dont la famille est installée en Suède ! Le deuxième exemple d’ensauvagement concernant la chasse aux migrants nous vient de Grèce. «Sur une vidéo récente, on voit des hommes – présentés comme étant des gardes-côtes grecs – qui essaient de faire couler un Zodiac à bord duquel se trouve un groupe de réfugiés syriens. Il y a également eu une vidéo qui montrait des citoyens grecs sur la plage criant en direction de réfugiés entassés dans une embarcation pour leur dire de rentrer dans leur pays. Depuis des années, on voit de telles vidéos tournées dans différents pays, de la Hongrie au Liban, de la Grèce à la Bulgarie. Elles montrent des Syriens frappés, humiliés, emprisonnés, leurs maisons ou campements incendiés. Et parfois, cela va jusqu’au meurtre.(…)» Le cri de désespoir d’un journaliste syrien : «Qu’avons-nous fait pour que le monde nous traite ainsi ? Quel crime avons-nous commis pour être ainsi mis au supplice ?»(1)
Dans cette contribution, nous traiterons de l’accord de 1968 entre l’Algérie et la France. Nous parlerons de ses racines en mettant tout à plat dans un devoir d’inventaire serein et montrerons comment l’Algérie, pendant 132 ans, a fait preuve d’œuvre positive. Qu’elle continue à dispenser au XXIe siècle en face d’une France qui parle de coopération avec des réflexes du bon vieux temps des colonies. Il est dans l’intérêt des deux pays d’aller véritablement de l’avant, d’abord, dans un inventaire lucide de ce qui s’est passé, mais ensuite dans une nouvelle construction apaisée dans l’égale dignité des deux peuples qui peuvent contribuer, ensemble, à regarder vers le futur comme le recommande la nouvelle configuration mondiale.

Les tirs groupés des droites populistes contre l’accord de 68
En France, le débat sur l’immigration a réveillé certaines haines de la droite et de l’extrême droite. Le grain à moudre de cette vindicte est offert par l’ancien ambassadeur en Algérie qui, dans un brûlot, a déversé tout ce qu’il pense de l’Algérie pendant son passage chez nous.
«L’Europe se droitise. Plusieurs pays de cette zone ont basculé ces dernières années. L’immigration est devenue la première préoccupation des nouveaux gouvernants de France, qui a, jusque-là, fait exception. En effet, la droite et l’extrême droite font pression pour voter une loi très restrictive sur l’immigration. Il manque à l’appel Eric Zemmour, Marine Le Pen. C’est dans ce climat que plusieurs personnalités politiques appellent à la remise en cause de l’accord de 1968 entre l’Algérie et la France. En effet, après l’ancien ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, qui a appelé à la suppression de l’accord de 1968 avec l’Algérie, c’est au tour d’un ancien Premier ministre d’abonder dans le même sens. Il est temps de remettre en cause l’accord de 1968 avec l’Algérie. Xavier Driencourt, deux fois ambassadeur en Algérie, a appelé les autorités françaises à annuler l’accord de 68 même s’il faut aller au clash avec l’Algérie. Le diplomate n’a pas exclu qu’Alger réagisse à une telle décision par la rupture pure et simple des relations diplomatiques avec Paris, mais il a estimé nécessaire que la France franchisse un tel pas.» le président du Sénat, Gérard Larcher, a estimé qu’il fallait «rééxaminer» l’accord signé en 1968 avec l’Algérie sur les questions migratoires. «Sur certains points, les Algériens sont favorisés par rapport aux autres étrangers (notamment en matière de regroupement familial) ; sur d’autres, ils sont perdants.»(2)
Cependant, pour le moment, le gouvernement français a de son côté fait savoir que la révocation du texte n’est pas à l’ordre du jour.

Histoire de l’émigration algérienne en France
L’émigration est fondamentalement différente des autres migrations. Le compagnonnage de 132 ans de déni de la personnalité, de violence donne quelques «avantages» à replacer dans leur contexte. Le texte suivant donne brièvement la situation. Il me souvient la parole d’Abba Eban, ancien ministre des Affaires étrangères, interrogé sur l’expansion Israélienne : «Les frontières d’Israël sont celles d’Auschwitz.» La contribution suivante décrit l’historique. «La présence algérienne en France s’inscrit sur plus d’un siècle d’une histoire singulière. Les Algériens nourrissent un flux migratoire précoce et important de coloniaux vers la métropole dès la seconde moitié du XIXe siècle. Ni français ni étrangers jusqu’en 1962, les Algériens sont tour à tour ‘‘indigènes’’, ‘‘sujets français’’ puis ‘‘Français musulmans d’Algérie’’. Cette immigration qui ne dit pas son nom connaît pourtant bel et bien les difficultés de l’exil. Hommes seuls en métropole mais pas célibataires, ils sont bien souvent mariés par leurs familles avant leur départ, comme une façon de s’assurer leur retour au village. Leur salaire ne leur permet que de survivre en métropole, les sommes durement épargnées devant assurer la subsistance de leurs familles. Mais c’est la Grande Guerre qui amorce un mouvement migratoire représentatif vers la France. Près de 100 000 travailleurs d’Algérie auxquels s’ajoutent 175 000 soldats coloniaux sont recrutés entre 1914 et 1918. Les pouvoirs publics renvoient après l’Armistice tous les travailleurs et soldats dans leurs colonies dès 1921, plus de 35 000 ‘‘sujets’’ algériens sont recensés en France, leur nombre atteint plus de 85 000 en 1936, le nombre des Algériens présents sur le territoire métropolitain passe de 211 000 en 1954 à 350 000 en 1962. (30 000 familles en 1962). L’apogée répressive intervient le 17 octobre 1961, au soir d’une manifestation de 22 000 Algériens durant laquelle 11 538 personnes sont arrêtées et plus d’une centaine tuées.»(3)

Les conditions qui ont prévalu en 1968 pour l’accord
On aura rien compris à l’accord de 1968 si on ne connaît pas sa genèse, c’est-à-dire qu’il a été prévu dans les accords d’Evian et ce qu’il est devenu par la suite à force de retouches, comme quoi, la «normalité» entre l’Algérie et la France est que la circulation des personnes entre les deux rives soit facilitée, à cause de l’importance de la dimension humaine de la relation algéro-française et surtout de l’existence de textes qui garantissent cette mobilité.
«Le président algérien a cité les Accords d’Évian et l’accord de décembre 1968 régissant les conditions d’entrée et de séjour des Algériens en France. Cette mobilité a été ‘‘négociée et il convient de la respecter’’, a estimé le président soulignant qu’il y a ‘‘une spécificité algérienne, même par rapport aux autres pays maghrébins’’. L’accord de 1968 a été négocié dans une conjoncture particulière. Six ans après l’indépendance de l’Algérie, il fallait encadrer la nouvelle situation induite pour des dizaines de milliers d’Algériens se trouvant en France et qui, avant 1962, étaient français. Le statut de l’Algérie était en effet différent des autres colonies françaises. Elle était subdivisée en 3 départements. La garantie des intérêts des citoyens français et algériens après l’indépendance était prévue dans les Accords d’Évian. Dans le préambule de l’accord de 1968, il est indiqué que le texte entre «dans le cadre de la déclaration de principe des Accords d’Évian relative à la coopération économique et financière» et vise à «apporter une solution globale et durable aux problèmes relatifs à la circulation, à l’emploi et au séjour des ressortissants algériens sur le territoire français». Il faut noter le besoin de main-d’œuvre de la France, en plein dans les Trente Glorieuses et qui avait engagé alors d’importants chantiers d’infrastructures. Il prévoyait d’ailleurs l’entrée en France d’au moins 35 000 travailleurs par an.»(4)

La fin de l’émigration officielle décidée par l’Algérie
Devant une montée de xénophobie à Marseille suite à l’assassinat d’un conducteur de bus, le gouvernement du président Boumediene décide, le 19 septembre 1973, de suspendre l’émigration de main-d’œuvre avec la France. La décision algérienne intervient dans un contexte où la France avait déjà fait adopter en 1972 la circulaire Marcellin-Fontanet mettant fin aux régularisations de sans-papiers : «En 1973, écrit Marie Thérèse Têtu, l’Algérie devance la France dans la suspension de l’immigration de main-d’œuvre salariée. Dans un contexte français marqué par le racisme à l’égard des Algériens, la décision algérienne met fin à cent ans d’une libre circulation des travailleurs commencée durant la période coloniale. Les immigrés algériens en France sont, selon les données de l’Insee de 2011, au nombre de 702 811, soit près de 13 % de l’ensemble des immigrés ; c’est la nationalité la plus nombreuse. Depuis la fin de la libre circulation entre la France et l’Algérie en 1965, puis l’arrêt de la migration économique en 1973, seuls les migrations familiales et les va-et-vient ‘‘touristiques’’ entre les deux pays se sont poursuivis jusqu’à l’instauration des visas en 1986. Les conditions drastiques de délivrance de ces visas n’ont pas mis un frein à la tradition migratoire des Algériens mais les ont poussés à emprunter la voie de la migration irrégulière : dépassement de la durée de validité des visas de tourisme ou même traversée des frontières maritimes ou terrestres sans passeport ni visa L’implantation ancienne d’une communauté algérienne en France a permis de développer et stabiliser un axe migratoire, un espace franco-algérien à l’intérieur duquel des circulations autant spatiales, matérielles que symboliques s’opèrent en dépit des obstacles administratifs ou des politiques d’intégration de la France. Les migrations, désormais irrégulières, peuvent toujours s’appuyer sur la présence d’une importante population d’origine algérienne répartie sur tout le territoire français.»5)
Les «30 Glorieuses» finissant, la France veut se débarrasser de ses «tirailleurs béton». Pour renforcer le flux du retour le 30 mai 1977, une note ministérielle de M. Lionel Stoléru, secrétaire d’État au travail, instaure pour la première fois l’aide au retour en faveur des travailleurs étrangers désireux de regagner leur pays d’origine. Le bénéficiaire s’engage à renoncer à son droit au séjour et reçoit en contrepartie un pécule de 10 000 F complété par une indemnité forfaitaire de voyage. C’était une façon de faire partir même ceux qui sont en famille. A la fin de février 1984, 50 000 départs d’Algériens avaient été enregistrés.

Le chantage du visa
Les Algériens font face à un fardeau financier important lorsqu’il s’agit d’obtenir des visas Schengen. Selon cette étude, l’Algérie a enregistré la dépense la plus élevée en visas Schengen en 2022 sur le continent africain, s’élevant à 15 787 992 $. L’an dernier, l’Algérie a été le pays où le taux de refus de visas Schengen a été le plus élevé, en grande partie à cause d’un différend avec la France. S’appuyant sur des données de SchengenVisaInfo, site d’information, TSA constate que 48,2% des demandes algériennes ont été rejetées, alors que chez les voisins tunisien et marocain, ce taux est de 30%. À la fin de septembre 2021, Paris avait en effet décidé de réduire de 50 % l’octroi de visas. En tête du classement des pays dont les demandes de visa Schengen sont le plus refusées figurent l’Algérie avec 48,2%, le Maroc 28,20%, la Tunisie 29%, l’égypte 18.61%.

Les atouts de la France dans le rapport de force avec l’Algérie
La droite et l’extrême droite revendiquent depuis plusieurs années la suppression de l’accord de 1968 entre la France et l’Algérie. Et parmi les personnalités les plus hostiles à cet accord, l’ancien ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, qui a affirmé que la France ne peut engager un rapport de force avec l’Algérie. La France pourrait-elle remettre en cause les accords de 1968 avec l’Algérie ? «En dehors des visas, la France n’a pas d’atout pour faire pression sur l’Algérie. Le pouvoir algérien peut même faire pression sur nous avec le gaz qu’il nous vend, les seuls atouts dont nous disposons, c’est effectivement les visas, la question migratoire. Sur le plan économique, nous ne pesons pas énormément en Algérie. L’Algérie a beaucoup plus de moyens de pression.»(6)

Ce que fut la colonisation de l’Algérie
La phrase de Jean Daniel résume à elle seule la tragédie de la colonisation. Et la dette atemporelle de la France. En réponse au négationnisme des «nostalgériques» partisans par petits-enfants interposés du bon temps des colonies. La colonisation française ne fut pas un long fleuve tranquille. Nous allons décrire la spécificité de la relation Algérie-France que certains veulent banaliser. Tout au long de ces 132 ans, l’œuvre coloniale ne fut pas positive. Cette œuvre incontestable ne profita objectivement qu’à la population européenne et à la métropole, car il faut savoir que tout a été fait pour qu’il n’y ait pas d’industrie, l’Algérie fut pourvoyeuse de matières premières (blé, agrumes, liège, minerais, alfa, vin, dattes…) et bien plus tard en pétrole qui a financé une partie des frais de la «pacification» en Algérie. Certes, nous l’avons écrit, à titre individuel, des instituteurs, des médecins, des Européens admirables tentèrent d’alléger les souffrances des Algériens, mais ils furent en petit nombre.
Nous leur serons à jamais reconnaissants.

Les rares Algériens instruits furent, selon la belle expression de Jean El Mouhoub Amrouche, des voleurs de feu. Moins d’un millier d’Algériens formés en 132 ans, c’est cela la vraie réalité de l’œuvre positive de la colonisation. Nous avons eu comme héritage un pays exsangue où le taux de scolarité était à peine de 20%.(7)

L’œuvre positive de l’Algérie à travers l’histoire
La remise en cause de l’accord de 1968 est une provocation politicienne. L’occasion m’est donnée de présenter la singularité, voire la spécificité de la relation Algérie-France par le douloureux compagnonnage sanglant et arbitraire qui a démarré un matin de 1830 et qui s’est prolongé pendant 132 ans. À son corps défendant, l’Algérien a servi de chair à canon dans les guerres françaises, de sujet et d’émigré taillable et corvéable dont on se sert comme d’un kleenex Ceci nous donne le droit d’un devoir d’inventaire pour rafraîchir la mémoire de tous ces politiciens français pour beaucoup plus «récents sur le sol français» que les Algériens mais qui en rajoutent dans la plus pure tradition du «plus royaliste que le roi». Pour l’histoire, le maréchal Clauzel qui voulut, en vain, démonter l’arc de Triomphe de Djemila est symptomatique de tout le butin que renferment les musées de France et de Navarre qu’il faudra bien un jour restituer au même titre que les restes mortuaires, notamment des crânes des patriotes algériens. Nous allons brièvement rappeler quelques faits indéniables connus et insuffisamment reconnus, voire niés par la France envers les indigènes sujets de l’Empire.

Les régiments de tirailleurs algériens qui ont versé leur sang pour la France
L’historien Pascal Blanchard écrit à propos des «engagés malgré eux» : «Longtemps occultée, la participation des populations coloniales aux efforts de guerre de la France est aujourd’hui un véritable enjeu de mémoire au cœur des luttes politiques et juridiques des anciens combattants et des sans-papiers. Ces derniers ont contribué à sortir de l’oubli des milliers d’hommes dont les sacrifices ne sont toujours pas reconnus. Il reste que l’image du tirailleur libérateur de la France occupée ne permet pas d’appréhender, dans toute sa complexité, l’histoire des troupes coloniales.» Pour l’histoire, des Algériens furent recrutés dans les troupes françaises depuis 1837 (les fameux turcos), on parle justement de ces zouaouas (Berbères) recrutés par tous les moyens — la famine, la peur — que l’on appela les Zouaves au point que la statue du Zouave du pont de l’Alma indique les crues de La Seine. Ils furent ensuite envoyés lors de la guerre du Levant en 1865… Ensuite, ce fut la guerre de Crimée, la guerre de 1870 : parmi les plus braves, on cite les Algériens qui arrivèrent à enlever une colonne à Wissembourg, moins d’une centaine de rescapés sur les 800. Après le cauchemar de Verdun et du Chemin des dames, des milliers d’Algériens y laissèrent leur vie. Du fait de la conscription obligatoire, pratiquement chaque famille eut un soldat engagé, qui mourut ou qui revint gazé ou traumatisé à vie.(8)
Lors de la Seconde Guerre mondiale, les troupes coloniales payèrent un très lourd tribut lors des combats de mai et juin 1940. Plus tard, les troupes alliées, en débarquant en Italie, furent cependant bloquées à Monte Cassino. On fit appel, une fois de plus, aux troupes coloniales françaises constituées de tirailleurs algériens et marocains. Elles défoncèrent, au prix de pertes très lourdes, les lignes allemandes le 22 mai 1944. 450 000 soldats participèrent au débarquement allié en Provence le 15 août 1944. L’opération a été menée par les forces américaines et françaises sous les ordres du général de Lattre de Tassigny, «jeunes de l’Algérie, du Maroc et de la Tunisie, fils de l’Afrique occidentale ou de l’Afrique équatoriale, de Madagascar ou de l’océan Indien, de l’Asie, de l’Amérique ou des territoires du Pacifique, tous se sont magnifiquement illustrés dans les combats de notre libération. Ils paieront un très lourd tribut à la victoire», avait déclaré le président Jacques Chirac lors du 60e anniversaire du débarquement en 2004 à Toulon. En effet, l’armée française, éclatée après la débâcle de 1940, se reconstitue sur le continent africain (…) Dirigée par le général de Lattre de Tassigny sous le nom d’armée B équipée par les Américains à partir de printemps 1943, c’est «une armée profondément originale, une armée qui compte moitié d’Européens et moitié de musulmans et de coloniaux». Fin 1944, elle compte près de 600 000 hommes, dont les deux tiers sont venus d’Afrique du Nord. On y compte quelque
176 000 ‘‘Européens’’ et 233 000 ‘‘musulmans’’, selon la terminologie utilisée à l’époque» (9). Il y eut 140 000 soldats algériens. 14 000 morts et 42 000 blessés. Ce sont, en partie, ces soldats qui revinrent au pays, pour voir leurs familles massacrées un jour de mai 1945.

Les tirailleurs béton
L’apport de l’Algérie par sa participation décisive à l’œuvre de reconstruction de la France dévastée, tout ceci, assurément, est objectivement à mettre sur le compte de l’œuvre positive de l’Algérie pour la France Les «Trente Glorieuses» réussirent aussi grâce à l’apport des Algériens qui, après avoir versé leur sang pour la France, aidèrent massivement pour sa reconstruction jusqu’au jour où le président Giscard d’Estaing décide de les «expulser». Ce fut le «million Stoléru» pour solde de tout compte d’un siècle d’humiliation et de rapine. On lit dans un communiqué : «Si aujourd’hui la grosse artillerie politico-médiatique est sortie pour la reconnaissance des tirailleurs venus des colonies, il n’en est pas de même pour les guerriers du BTP, des mines ou de la sidérurgie… La France n’arrive toujours pas à sortir de son hypocrisie coloniale. C’est trop facile de vouloir toujours réécrire l’Histoire… Cela devient insupportable qu’une telle omerta règne dans notre pays sur le sort réservé aux vieux travailleurs immigrés maghrébins.» (10)

Les immigrés au grand cœur
Que dire aussi de ces immigrés qui, malgré leurs conditions sociales désastreuses, eurent le courage de risquer leur vie pour sauver des Français juifs abandonnés aux Allemands par la majorité des Français fidèles au maréchal. Le tract suivant résume mieux que cent discours l’empathie de ces «Justes». Nous lisons : «Hier à l’aube, les Juifs de Paris ont été arrêtés. Les vieux, les femmes et les enfants. En exil comme nous, travailleurs comme nous. Ils sont nos frères. Leurs enfants sont comme ‘’ nos propres enfants’’ – ‘’ammarach nagh’’. La mosquée de Paris avec M. Mesli et le recteur Benghebrit jouèrent un rôle important en sauvant près de 1500 Juifs rééditant le geste de l’Émir en Syrie un siècle plus tôt en sauvant plus de 5 000 chrétiens. Il y eut même des immigrés au grand cœur dans la résistance en sauvant des pilotes anglais.(11)

La dimension culturelle et scientifique
Au moment où la langue française perd de plus en plus de locuteurs, l’Algérie a continué à la «soutenir» en utilisant le français. Malgré le peu de francophones à l’indépendance, d’une façon ou d’une autre, 36 millions d’Algériens parlent, pensent et achètent français. Et ceci, sans faire partie de la francophonie et ses relents de France Afrique C’est dire si l’Algérie continue à contribuer pour le rayonnement de la langue française. Un autre cadeau sera celui de l’académicienne écrivaine éclectique Assia Djebar, sans compter toute l’activité culturelle que l’Algérie offre à la France en continuant à enseigner dans le supérieur en français rendant rapidement opérationnels les milliers de diplômés universitaires.

La nouvelle immigration voulue par la France : «l’immigration choisie»
Depuis la présidence Sarkozy, tout est fait pour réduire l’immigration de papa. Mélanie Travet écrit : «La France doit accueillir des étrangers auxquels [elle] peut donner un travail, qui ont besoin de se former en France ou qui répondent à ses besoins économiques.» C’est ainsi que dans une lettre de mission de 2007, Nicolas Sarkozy rappelait l’un de ses thèmes favoris de campagne : celui de l’«immigration choisie». Même diplômé, il ne fait pas bon être étranger. Augmentation soudaine et radicale du plancher des ressources requis pour venir étudier en France, délivrance de visas au compte-gouttes. La fabrique à sans-papiers marche à nouveau à plein régime : depuis le décret du 6 septembre 2011, les candidat·e·s au visa ou au titre de séjour étudiant doivent désormais justifier de plus de 7 680 euros de ressources annuelles (contre 5 400 euros en 2010). Sélection sur la fortune et la nationalité. Les étudiant·e·s sont depuis bien longtemps les victimes «collatérales» de la fermeture des frontières. Ces jeunes doivent également se soumettre au tri effectué par les agences CampusFrance, chargées de sélectionner les «meilleurs» éléments. «Pour le ministère de l’Immigration, il s’agissait sans doute de la mesure la plus emblématique de l’immigration choisie, permettant d’attirer en France la crème de l’immigration professionnelle, chercheurs, ingénieurs, artistes, intellectuels, médecins (…) Dans un premier temps, le chiffre de 5 000 cartes à délivrer par an a circulé.»(12)

L’hémorragie de la sève des diplômés
C’est dans ce cadre que l’Algérie a depuis1968 perdu des cadres et des travailleurs. Comme en février 2022, lorsque 1200 médecins formés en Algérie ont réussi d’un coup l’examen d’équivalence qui leur permet d’exercer dans les hôpitaux français. On parle de 15 000 médecins algériens qui exercent uniquement en France. Reste à mesurer les pertes pour le pays, avec le départ d’un nombre aussi important de médecins formés aux frais de l’État. D’après les chiffres fournis par la Banque mondiale, l’Algérie ne compte que 1,7 médecin pour 1 000 habitants en 2018, contre 6,5 pour la France, 4,9 pour l’Union européenne et 3,8 pour l’ensemble des pays de l’OCDE. 47,64 % contre 41,73 % en 2017, dont plus de 50,8 % de femmes pour l’Algérie, les Tunisiens, pour leur part, représentaient 19,2 % des inscrits en 2018 (21,11 % en 2017).
Selon les données de CampusFrance pour l’année scolaire 2021-2022, plus de 400 000 étudiants dans les universités françaises venaient de l’étranger. Parmi eux, ils étaient plus de 100 000, soit plus d’un quart, à venir du continent africain. On dit que l’Afrique a perdu, depuis les années 90, plus de 1 million de diplômés. Le Maghreb monopolise les premières places. Graduellement, les candidats à l’émigration sont de plus en plus des universitaires. Rien à voir avec «les tirailleurs béton des années 60 et 70 et qui ont construit les infrastructures de la France. C’était à plus de 70 %, sans qualification professionnelle, ils étaient orientés vers les emplois les plus pénibles et les plus salissants. Nous discutons de nouvelles populations de candidats à l’émigration universitaire. Ils n’ont plus besoin du pays qui les a formés pour faire leur «trou en France». C’est leur compétence qui parle pour eux. Quant aux rares harragas, ils nous sont renvoyés (OQTN). Nos jeunes universitaires reviennent à l’Etat à environ 100 000 $ par an, selon les normes de l’Unesco, sans compter le pécule que le diplômé prend avec lui, autour de 7500 euros. L’Algérie dispose de 31 000 étudiants chaque année. Pour un turn over de 3 ans, c’est au moins 10 000 diplômés qui enrichissent la France et qui auront coûté chaque année au pays 1 milliard de $ Cette dette que la France contracte depuis 1968 s’apparente aussi au mythe de Sisyphe toujours recommencé qui fait que l’Algérie ne capitalise pas le savoir. C’est un chantier à ouvrir.
Une certaine France n’a pas encore déprogrammé le logiciel de la mentalité de l’empire colonisateur avec l’esprit dominateur, celui des races supérieures avatar que l’on doit à Jules Ferry, le père de l’école républicaine en France et des écoles gourbis en Algérie. Il est clair que la psychose de l’invasion immigrée brandie par les politiciens nostalgiques de l’empire de l’AOF, AEF, voire d’une «Reconquista» à rebours, du Grand Remplacement est insensée et suicidaire, à terme, pour ces pays. Que valent ces fameux accords de décembre 1968 que l’on brandit comme une menace qui pourrait porter préjudice à l’Algérie ? Les accords de 1968 étaient des accords winn winn, à la demande de la France. L’Algérie aidait par sa main-d’œuvre le développement de la France après l’avoir aidée à recouvrer sa liberté.
Il ne peut pas y avoir de solde de tout compte d’un passé sans devoir d’inventaire. C’est un fait, l’immigration algérienne est en train de changer. Ce n’est plus le chibani natif des Aurès, de Kabylie ou de Sétif, ce sont de plus en plus des jeunes instruits qui rendront caduque cette épée de Damoclès brandie au-dessus de l’Algérie. Au nom du sang versé, il ne peut être question de banaliser l’apport des immigrés dans l’histoire tumultueuse algéro-française de près de deux siècles. Jacques Chirac affirmait à raison qu’un Français sur dix a des racines algériennes. Pour toutes ces raisons, il faut au contraire trouver une solution de compensation pour les milliers de diplômés qui participent au rayonnement de la France. C’est cela l’ouverture d’un nouveau chantier du savoir qui pourra, avec le temps, permettre de compenser le mal absolu de la colonisation. Il faut ouvrir une nouvelle page, celle de la confiance dans un vrai partenariat, sans a- priori ni condescendance.
C. E. C. 

1.https://www.courrierinternational.com/article/temoignage-syrie-quavons-nous-fait-pour-que-le-monde-nous-traite-ainsi
2.https://www.arabnews.fr/node/389586/france 07 juin 2023
3.https://www.histoire-immigration.fr/caracteristiques-migratoires-selon-les-pays-d-origine/l-immigration-algerienne-en-france
4.https://www.olcnbvc4jz.com/immigration-en-france-lalgerie-tient-a-laccord-de-1968/
5.Marie-Thérèse Têtu https ://www. gisti. org/spip. php ? article4512 décembre 2011
6.https://www.operanewsapp.com/dz/fr/main/les-atouts-limit%C3%A9s-de-la-france-dans-le-rapport-de-force-avec-l-alg%C3%A9rie?
7.https://www.lexpressiondz.com/chroniques/l-analyse-du-professeur-chitour/loeuvre-positive-de-lalgerie-envers-la-france-156138
8. Chems Eddine. Chitour L’Expression – Jeudi 12 octobre 2006
9.https://www.lepoint.fr/afrique/debarquement-de-provence-les-soldats-venus-d-afrique-en-premiere-ligne-14-08-2019-2329922_3826.php
10.Chibanis: Les tirailleurs du béton oubliés par hypocrisie. millebabords.org 27 06 2006.
11..Aurélie Champagne: http://www.rue89. com/2011/09 /27/les-hommes-libres-lhistoire-oubliee-des-arabes-occupes-22366527/09/2011
12. MelanieTravethttps://www.gisti.org/spip.php? article 4508.


       Les Algériens savent-ils vraiment quels droits leur octroie l’accord de 1968 ?

Les préfectures françaises respectent-elles les droits des Algériens ? D. R.

Au regard de la multiplication des intervenants au sujet de l’accord algéro-français de 1968, il semble que l’on s’achemine vers une demande de révision de celui-ci par Paris. Commencée par l’ancien ambassadeur de France à Alger, le très remonté Xavier Driencourt, la campagne a vu deux autres responsables politiques aborder le sujet, en abondant dans le même sens que le diplomate «à la retraite», l’ancien Premier ministre Edouard Philippe et l’actuel président du Sénat, Gérard Larcher, que l’ambassadeur d’Algérie en France a rencontré au Palais du Luxembourg ce vendredi.

Que se sont dit les deux hommes ? Saïd Moussi a-t-il demandé des explications à son interlocuteur à la demande des autorités algériennes ? Nous n’en saurons rien, tant le communiqué laconique de l’ambassade d’Algérie ne mentionne aucun détail de cette rencontre dont on ne sait pas si elle était programmée de longue date ou si elle intervient suite à la déclaration du membre des Républicains.

Beaucoup a été dit sur l’accord algéro-français de 1968, signé, côté algérien, par le défunt Abdelaziz Bouteflika et, côté français, par l’ambassadeur de l’époque à Alger, Jean Basdevant. Mais combien d’Algériens connaissent le contenu de ce document que nous publions intégralement avant qu’il soit remisé aux archives.

Cette version de l’accord intègre toutes les modifications introduites par le troisième avenant, signé le 11 juillet 2001.


AP


«Accord franco algérien du 27 décembre 1968

Entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l’emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles.

Dans le cadre de la déclaration de principe des Accords d’Evian relative à la coopération économique et financière,

le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire,

soucieux d’apporter une solution globale et durable aux problèmes relatifs à la circulation, à l’emploi et au séjour des ressortissants algériens sur le territoire français ;

conscients de la nécessité de maintenir un courant régulier de travailleurs, qui tienne compte du volume de l’immigration traditionnelle algérienne en France ;

animés du désir :

– de faciliter la promotion professionnelle et sociale des travailleurs algériens ;

– d’améliorer leurs conditions de vie et de travail ;

– de favoriser le plein emploi de ces travailleurs qui résident déjà en France ou qui s’y rendent par le canal de l’Office national de la main-d’œuvre, dans le cadre d’un contingent pluriannuel déterminé d’un commun accord ;

convaincus de l’intérêt de garantir et d’assurer la libre circulation des ressortissants algériens se rendant en France sans intention d’y exercer une activité professionnelle salariée ;

sont convenus de ce qui suit :

Article 1er

(Abrogé par l’avenant du 22 décembre 1985)

Article 2

(Abrogé par l’avenant du 22 décembre 1985)

Article 3

Un effort spécial sera réalisé, avec des moyens accrus en faveur des travailleurs algériens, d’une part pour développer l’enseignement aux adultes, la préformation et la formation professionnelle ainsi que l’accès aux divers cycles de la promotion du travail, d’autre part pour améliorer, d’une manière continue, les conditions de vie et de logement de ces travailleurs.

La commission mixte, instituée à l’article 12 du présent accord, est chargée de suivre l’ensemble des réalisations dans ces différents domaines.

Article 4

Les membres de la famille qui s’établissent en France sont mis en possession d’un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu’ils rejoignent.

Sans préjudice des dispositions de l’article 9, l’admission sur le territoire français en vue de l’établissement des membres de famille d’un ressortissant algérien titulaire d’un certificat de résidence d’une durée de validité d’au moins un an, présent en France depuis au moins un an, sauf cas de force majeure, et l’octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l’autorisation de regroupement familial par l’autorité française compétente.

Sans préjudice des dispositions de l’article 9, l’admission sur le territoire français en vue de l’établissement et l’octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la justification de ressources stables et équivalant au moins au salaire minimum légal d’un logement conforme à celui tenu pour normal pour une famille française de même composition ainsi qu’à la production d’un certificat médical délivré par un médecin régulièrement installé en Algérie et agréé par le Consulat de France compétent. Les critères de santé sont ceux figurant en annexe à l’Accord du 27 décembre 1968.

Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l’un des motifs suivants :

1- le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont pris en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales. L’insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont égales ou supérieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance ;

2- le demandeur ne dispose ou ne disposera pas à la date d’arrivée de sa famille en France d’un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant en France.

Peut être exclu de regroupement familial :

1-un membre de la famille atteint d’une maladie inscrite au règlement sanitaire international ;

2- un membre de la famille séjournant à un autre titre ou irrégulièrement sur le territoire français.

Le regroupement familial est sollicité pour l’ensemble des personnes désignées au Titre II du Protocole annexé au présent accord. Un regroupement familial partiel peut être autorisé pour des motifs tenant à l’intérêt des enfants.

Lorsqu’un ressortissant algérien dont la situation matrimoniale n’est pas conforme à la législation française réside sur le territoire français avec un premier conjoint, le bénéfice du regroupement familial ne peut être accordé, par les autorités françaises, à un autre conjoint.

Les enfants de cet autre conjoint peuvent bénéficier du regroupement familial si celui-ci est décédé ou déchu de ses droits parentaux en vertu d’une décision d’une juridiction algérienne.

Article 5

Les ressortissants algériens s’établissant en France pour exercer une activité professionnelle autre que salariée reçoivent, après le contrôle médical d’usage et sur justification, selon le cas, qu’ils sont inscrits au registre du commerce ou au registre des métiers ou à un ordre professionnel, un certificat de résidence dans les conditions fixées aux articles 7 et 7 bis.

Les ressortissants algériens s’établissant en France à un autre titre que celui de travailleurs salariés reçoivent, après le contrôle médical d’usage et sur justification, selon le cas, de leur inscription au registre du commerce ou au registre des métiers ou à un ordre professionnel ou de la possession de moyens d’existence suffisants, un certificat de résidence dans les conditions fixées aux articles 7 et 7bis.

Article 6

Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu’à ceux qui s’y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française.

Le certificat de résidence d’un an portant la mention «vie privée et familiale» est délivré de plein droit :

1- au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen de résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d’étudiant ;

2- au ressortissant algérien marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l’étranger, qu’il ait été transcrit préalablement sur les registres de l’état civil français ;

3- au ressortissant algérien marié à un ressortissant étranger titulaire d’un titre de séjour d’un an portant la mention «scientifique», à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière ;

4- au ressortissant algérien ascendant direct d’un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu’il exerce, même partiellement, l’autorité parentale à l’égard de cet enfant ou qu’il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d’ascendant direct d’un enfant français résulte d’une reconnaissance de l’enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d’un an n’est délivré au ressortissant algérien que s’il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ;

5- au ressortissant algérien qui n’entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;

6- au ressortissant algérien né en France qui justifie par tout moyen y avoir résidé pendant au moins huit ans de façon continue, et suivi, après l’âge de dix ans, une scolarité d’au moins cinq ans dans un établissement scolaire français, à la condition qu’il fasse sa demande entre l’âge de 16 ans et 21 ans ;

7- au ressortissant algérien résidant habituellement en France, dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve qu’il ne puisse pas effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans son pays.

Le certificat de résidence délivré au titre du présent article donne droit à l’exercice d’une activité professionnelle.

Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2- ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux.

Article 7

Les dispositions du présent article et celles de l’article 7 bis fixent les conditions de délivrance du certificat de résidence aux ressortissants algériens autres que ceux visés à l’article 6 nouveau [l’article 6] ainsi qu’à ceux qui s’établissent en France après la signature du premier avenant à l’accord

a- Les ressortissants algériens qui justifient de moyens d’existence suffisants et qui prennent l’engagement de n’exercer, en France, aucune activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent après le contrôle médical d’usage un certificat valable un an renouvelable et portant la mention «visiteur» ;

b- Les ressortissants algériens désireux d’exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d’usage et sur présentation d’un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l’emploi [ministre chargé des travailleurs immigrés] un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention «salarié» : cette mention constitue l’autorisation de travail exigée par la législation française ;

c- les ressortissants algériens désireux d’exercer une activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent, s’ils justifient l’avoir obtenue, un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention de cette activité ;

d- Les ressortissants algériens autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial, s’ils rejoignent un ressortissant algérien lui-même titulaire d’un certificat de résidence d’un an, reçoivent de plein droit un certificat de résidence de même durée de validité, renouvelable et portant la mention «vie privée et familiale [membre de famille]» ;

e- Les ressortissants algériens autorisés à exercer à titre temporaire, en application de la législation française, une activité salariée chez un employeur déterminé, reçoivent un certificat de résidence portant la mention «travailleur temporaire», faisant référence à l’autorisation provisoire de travail dont ils bénéficient et de même durée de validité ;

f- les ressortissants algériens qui viennent en France pour mener des travaux de recherche ou dispenser un enseignement universitaire reçoivent, sous réserve d’une entrée régulière, un certificat de résidence valable un an portant la mention «scientifique» ;

g- Les artistes-interprètes algériens tels que définis par la législation française ou les auteurs algériens d’œuvre littéraire ou artistique au sens de la législation française, titulaires d’un contrat de plus de trois mois avec une entreprise ou un établissement dont l’activité principale comporte la création ou l’exploitation d’une œuvre de l’esprit, reçoivent un certificat de résidence valable un an portant la mention «profession artistique ou culturelle».

Ces certificats de résidence sont délivrés gratuitement.

Article 7 bis

Les ressortissants algériens visés à l’article 7 peuvent obtenir un certificat de résidence de dix ans s’ils justifient d’une résidence ininterrompue en France de trois années.

Il est statué sur leur demande, en tenant compte des moyens d’existence dont ils peuvent faire état, parmi lesquels les conditions de leur activité professionnelle et, le cas échéant, des justifications qu’ils peuvent invoquer à l’appui de leur demande.

Le certificat de résidence valable dix ans, renouvelé automatiquement, confère à son titulaire le droit d’exercer en France la profession de son choix, dans le respect des dispositions régissant l’exercice des professions réglementées.

Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a-, au b-, au c- et au g- :

a- au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de natio- nalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l’article 6 nouveau 2- et au dernier alinéa de ce même article ;

a- au conjoint algérien d’un ressortissant français ;

b- à l’enfant algérien d’un ressortissant français si cet enfant a moins de 21 ans ou s’il est à la charge de ses parents, ainsi qu’aux ascendants d’un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge ;

c- au ressortissant algérien titulaire d’une rente d’accident du travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d’incapacité permanente est égal ou supérieur à 20% ainsi qu’aux ayants droit d’un ressortissant algérien, bénéficiaire d’une rente de décès pour accident de travail ou maladie professionnelle versée par un organisme français ;

d- aux membres de la famille d’un ressortissant algérien titulaire d’un certificat de résidence valable dix ans qui sont autorisés à résider en France au titre du regroupement familial ;

e- au ressortissant algérien qui justifie résider habituellement en France depuis qu’il a atteint au plus l’âge de 10 ans ;

f- au ressortissant algérien qui est en situation régulière depuis plus de 10 ans, sauf s’il a été, pendant toute cette période, titulaire d’un certificat de résidence portant la mention «étudiant» ;

g- au ressortissant algérien ascendant direct d’un enfant français résidant en France, à la condition qu’il exerce, même partiellement, l’autorité parentale à l’égard de cet enfant ou qu’il subvienne effectivement à ses besoins, à l’échéance de son certificat de résidence d’un an ;

h- au ressortissant algérien titulaire d’un certificat de résidence d’une validité d’un an portant la mention «vie privée et familiale» lorsqu’il remplit les conditions prévues aux alinéas précédents ou, à défaut, lorsqu’il justifie de cinq années de résidence régulière ininterrompue en France ;

f- au ressortissant algérien qui justifie par tous les moyens de résider en France depuis plus de quinze ans.

Les certificats de résidence valables dix ans sont délivrés et renouvelés gratuitement.

Les certificats de résidence valables dix ans sont délivrés et renouvelés contre versement d’une somme ne dépassant pas les droits et taxes exigés pour la délivrance des cartes d’identité aux nationaux français.

Article 7 ter

Le ressortissant algérien qui, après avoir résidé en France sous couvert d’un certificat de résidence valable dix ans, a établi ou établit sa résidence habituelle hors de France et qui est titulaire d’une pension contributive de vieillesse, de droit propre ou de droit dérivé, liquidées au titre d’un régime de base français de sécurité sociale, bénéficie, à sa demande, d’un certificat de résidence valable dix ans portant la mention «retraité». Ce certificat lui permet d’entrer à tout moment sur le territoire français pour y effectuer des séjours n’excédant pas un an. Il est renouvelé de plein droit. Il n’ouvre pas droit à l’exercice d’une activité professionnelle.

Le conjoint du titulaire d’un certificat de résidence portant la mention «retraité», ayant résidé régulièrement en France avec lui, bénéficie d’un certificat de résidence conférant les mêmes droits et portant la mention «conjoint de retraité».

Le certificat de résidence portant la mention «retraité» est assimilé à la carte de séjour portant la mention «retraité» pour l’application de la législation française en vigueur tant en matière d’entrée et de séjour qu’en matière sociale.

Article 8

Le certificat de résidence d’un ressortissant algérien qui aura quitté le territoire français pendant une période de plus de trois ans consécutifs est périmé.

Toutefois, il lui sera possible de demander la prolongation de la période visée au premier alinéa soit avant son départ de France, soit par l’intermédiaire des ambassades et consulats français.

Article 9

Sans préjudice des stipulations du Titre I du protocole annexé au présent accord et de l’échange de lettres modifié du 31 août 1983, les ressortissants algériens venant en France pour un séjour inférieur à trois mois doivent présenter un passeport en cours de validité muni d’un visa délivré par les autorités françaises.

Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis al. 4 (lettre c et d) (a à d) et du Titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d’un visa de long séjour délivré par les autorités françaises.

Ce visa de long séjour accompagné de pièces et documents justificatifs permet d’obtenir un certificat de résidence dont la durée de validité est fixée par les articles et titres mentionnés à l’alinéa précédent.

Article 10

Les mineurs algériens de 18 ans résidant en France qui ne sont pas titulaires d’un certificat de résidence reçoivent, sur leur demande, un document de circulation pour étrangers mineurs qui tient lieu de visa lorsqu’ils relèvent de l’une des catégories mentionnées ci-après :

a- le mineur algérien dont l’un au moins des parents est titulaire du certificat de résidence de dix ans ou du certificat d’un an et qui a été autorisé à séjourner en France au titre de regroupement familial ;

b- le mineur qui justifie, par tous moyens, avoir sa résidence habituelle en France depuis qu’il a atteint au plus l’âge de dix ans et pendant une durée d’au moins six ans ;

c- le mineur algérien entré en France pour y suivre des études sous couvert d’un visa d’une durée supérieure à trois mois ;

d- le mineur algérien né en France dont l’un au moins des parents réside régulièrement en France.

Article 11

Le présent accord entrera en vigueur à la date de sa signature.

Les dispositions des articles 1er, 2, 9 et 10 prendront effet à compter du 1er janvier 1969.

L’application des dispositions concernant la délivrance des certificats de résidence s’échelonnera sur une période d’une année à compter du 1er janvier 1969.

Article 12

Une commission mixte est chargée de suivre l’application du présent Accord et d’examiner, dans le but d’y apporter des solutions satisfaisantes, les difficultés qui viendraient à surgir.

La désignation des membres de cette commission est faite par chacun des deux gouvernements.

Cette commission se réunit en tant que de besoin à la demande d’une des parties contractantes alternativement en Algérie et en France.

Fait à Alger, le 27 décembre 1968, en double exemplaire.

Pour le gouvernement de la République française : Jean Basdevant

Pour le gouvernement de la République algérienne : Abdelaziz Bouteflika

Protocole

Titre I- Circulation des personnes

Sont admis à circuler librement entre l’Algérie et la France, sans discrimination aucune et sur simple présentation d’un document de voyage en cours de validité de la carte nationale d’identité, les titulaires du certificat de résidence en cours de validité.

Titre II- Départ des familles

Les membres de la famille s’entendent du conjoint d’un ressortissant algérien, de ses enfants mineurs ainsi que des enfants de moins de 18 ans dont il a juridiquement la charge en vertu d’une décision de l’autorité judiciaire algérienne dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

Le cas des ascendants du travailleur désireux de résider en France fera l’objet d’un examen particulier.

Titre III

Etablissement des étudiants, stagiaires, fonctionnaires et agents des organismes algériens, des travailleurs saisonniers, des malades

Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d’existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d’une attestation de pré-inscription ou d’inscription dans un établissement d’enseignement français, soit d’une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention «étudiant» ou «stagiaire».

Les ressortissants algériens titulaires d’un certificat de résidence portant la mention «étudiant», sous réserve de leur inscription dans un établissement ouvrant droit au régime de sécurité sociale des étudiants, peuvent être autorisés à travailler dans la limite d’un mi-temps annuel pour la branche ou la profession concernée. L’autorisation est délivrée sous forme d’autorisation provisoire de travail sur présentation d’une promesse d’embauche ou d’un contrat de travail.

Les fonctionnaires ou agents des organismes algériens reçoivent, sur présentation d’une attestation délivrée par l’autorité algérienne compétente, un certificat de résidence valable deux ans, renouvelable et portant la mention «Agent officiel».

Les travailleurs saisonniers reçoivent, sur présentation d’un contrat de travail qui est visé par les services du ministre chargé de l’emploi [ministre chargé des travailleurs immigrés] et dont la durée n’atteint pas une année, un certificat de résidence valable pour la durée du contrat portant la mention «Travailleur temporaire», conformément à l’article 7 e- de l’accord.

Les ressortissants algériens admis dans des établissements de soins français et n’ayant pas leur résidence habituelle en France peuvent se voir délivrer par l’autorité française compétente, après examen de leur situation médicale, une autorisation provisoire de séjour, renouvelable le cas échéant.

Le contrat de travail visé constitue l’autorisation de travail exigée par la législation française.

Les ressortissants algériens admis dans des établissements de soins français peuvent résider sur le territoire français pendant la durée de leur traitement, augmentée d’un délai de trois mois, sous le couvert d’une attestation de ces établissements.

Titre IV

Les ressortissants algériens résidant en France doivent être titulaires d’un certificat de résidence à partir de l’âge de 18 ans.

Les ressortissants algériens âgés de 16 à 18 ans qui déclarent vouloir exercer une activité professionnelle salariée reçoivent de plein droit un certificat de résidence :

– d’une validité d’un an, lorsqu’ils ont été autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial et que l’un au moins de leurs parents est titulaire d’un certificat de résidence de même durée ;

– d’une durée de validité de dix ans lorsqu’ils remplissent les conditions prévues à l’article 7 bis, 4e alinéa.

Ils peuvent, dans les autres cas, solliciter un certificat de résidence valable un an.»


 

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