Israël-Palestine : la solution ne sera pas militaire – Entretien avec Naomi Klein

     Dans le cadre de leur entretien avec David Sirota, Naomi Klein et Omar Baddar évoquent la guerre brutale d’Israël contre Gaza, l’absence consternante de soutien occidental à un cessez-le-feu et la politique du deux poids, deux mesures qui caractérise la couverture médiatique dominante concernant Israël et la Palestine.

Les destructions après une attaque israélienne sur le camp de Nuseirat, dans la bande de Gaza, le 22 octobre 2023. (Ashraf Amra / Anadolu via Getty Images)

Entretien avec Naomi KLEIN et Omar BADDAR

Interview par David Sirota

Le mercredi 18 octobre, David Sirota a organisé dans le cadre de l’émission Lever, un entretien en direct avec la journaliste et militante canadienne Naomi Klein et l’analyste politique palestino-américain Omar Baddar dans le but de débattre de la question des combats en cours entre Israël et le Hamas et de la crise humanitaire qui s’aggrave dans la bande de Gaza.

David, Naomi et Omar ont échangé autour du contexte historique et politique qui a conduit à ce qu’il se passe aujourd’hui, du double standard appliqué par les médias généralistes dans leur façon de couvrir les évènements concernant Israël et la Palestine, et des réponses récentes des membres du Congrès. Ils ont également répondu aux questions du public. Une transcription abrégée est éditée ci-dessous.

David Sirota : Naomi, pourquoi ne pas nous dire ce qui se passe en ce moment et pourquoi vous pensez que c’est tellement important ?

Naomi Klein : Je dirais simplement qu’en ces temps difficiles, la solidarité est un des remèdes. Il y a eu un rassemblement en faveur d’un cessez-le-feu et d’une aide humanitaire immédiate, organisé par Jewish Voice for Peace et If Not Now, deux organisations juives qui sont en quelque sorte l’autre lobby juif et qui apportent un point de vue beaucoup plus jeune et progressiste. Il s’agissait de la plus grande manifestation de solidarité avec les Palestiniens organisée par des Juifs dans l’histoire des États-Unis. Il y avait des milliers et des milliers de gens rassemblés devant le Congrès.

Mais ce qui a été plus important encore, c’est la désobéissance civile : cinq cents personnes se sont rendues dans la rotonde du Capitole et ont été arrêtées, parmi lesquelles de nombreux rabbins et beaucoup, beaucoup de jeunes gens. Il s’agissait d’une véritable démonstration de solidarité. Le message en était : « Chaque vie est précieuse. » Il s’agissait véritablement d’un message de rejet total des attaques ciblées contre les civils, quel que soit l’endroit où ils vivent. Il ne s’agissait pas de ce double langage que l’on entend au Congrès, à savoir : « C’est l’horreur absolue quand les civils israéliens sont pris pour cible (oui, je suis d’accord avec ça), mais bombardez-les sans aucune distinction s’il s’agit de Palestiniens. » Je crois vraiment que c’était un jour historique. Ce fut un honneur pour moi d’y assister.

Il s’agissait également de soutenir une résolution de cessez-le-feu déposée par la Représentante Cori Bush [Démocrate Montana], mais signée par de nombreux autres membres de ce que l’on appelle le Squad [The Squad est le nom informel d’un groupe composé à l’origine de quatre femmes démocrates élues aux élections de 2018 à la Chambre des représentants des États-Unis, ils sont actuellement 8, 6 femmes et 2 hommes]. J’ai également consacré beaucoup de temps à des réunions avec différents membres du Congrès pour tenter d’obtenir l’adhésion d’un plus grand nombre à cette résolution de cessez-le-feu, ce qui a permis d’obtenir davantage de signatures. La pression a donc vraiment porté ses fruits. Mais c’est encore trop peu. Et l’appel à verser le sang est très, très fort ici. Ce fut une journée riche en émotions.

David Sirota : Omar, Naomi a mentionné ce double langage concernant les victimes civiles. Parlez-nous un peu de ce que ressent la communauté américano-palestinienne, les Palestiniens qui entendent cela.

Omar Baddar : Je pense, Naomi, que vous mettez le doigt sur un problème très, très sérieux qui existe depuis longtemps, même au-delà de la crise que nous connaissons actuellement, avant même l’attaque du Hamas.

Cette année, 250 Palestiniens ont été tués, majoritairement en Cisjordanie, en raison de décisions du gouvernement israélien et des attaques des colons. Les médias grand public n’en font pratiquement pas état et Washington n’émet pratiquement aucun commentaire à ce sujet. Et puis nous avons eu cette attaque absolument horrible lancée par le Hamas. Résultat, on nous montre, en boucle, la profonde humanité israélienne – on nous montre des parents longuement interviewés, qui témoignent avec émotion de qui étaient leurs enfants et de la douleur que représente leur perte.

Ils ont fermé toutes les voies pacifiques possibles qui auraient permis aux Palestiniens de revendiquer politiquement leur liberté, alors même que la rhétorique politique israélienne devenait de plus en plus sauvagement anti-palestinienne.

Mais ce contraste avec le mépris total pour la vie des Palestiniens est franchement grotesque. Et cela s’est poursuivi même lorsqu’Israël commençait son assaut massif dans toute la bande de Gaza, alors que nous décrivons des bombardements aveugles de zones civiles. Nous parlons de crimes de guerre. Et pire encore, franchement, je pense que le mot « terrorisme » est celui qui vient à l’esprit.

Il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de bombardements de Gaza par Israël auparavant, et lorsque les organisations de défense des droits humains mènent des enquêtes concernant ces bombardements, la conclusion à laquelle elles parviennent est qu’Israël s’est livré à des bombardements irresponsables, délibérés et aveugles, sur des zones civiles. Dans certains cas, y compris lors de la grande Marche du retour à Gaza en 2018, des tireurs d’élite israéliens visaient des journalistes, des médecins et des militants qui, de toute évidence, n’étaient pas armés. Le comportement d’Israël témoigne de son mépris pour la vie des Palestiniens.

Et pourtant, le narratif qui prévaut est que lorsque les Palestiniens tuent des civils, c’est parce qu’ils sont des monstres barbares. Et quand Israël le fait, « Oh, ça doit vraiment être un accident parce qu’Israël est bien trop gentil et civilisé pour faire cela intentionnellement. » Cette attitude traduit un niveau de racisme et de déshumanisation des Palestiniens qui, je pense, est très, très choquant pour beaucoup de téléspectateurs et, plus important encore que le seul impact émotionnel, cela nous empêche d’élaborer de meilleures politiques et de faire avancer les choses dans une meilleure voie parce que nous estimons qu’il existe une disparité fondamentale dans l’humanité des personnes des deux camps.

Parce qu’en fin de compte, au-delà de cette seule crise, je ne pense pas que nous trouverons une solution militaire à quoi que ce soit. Depuis de nombreuses décennies, Israël pense qu’il suffit de frapper les Palestiniens avec suffisamment de force, de les pressurer et de les confiner avec suffisamment de rigueur pour résoudre le problème, et qu’alors l’Etat d’Israël pourra vivre heureux à tout jamais. À maintes reprises, on a pu constater que cette approche ne fonctionnait pas. Elle ne fait qu’engendrer du côté palestinien le degré de désespoir qui conduit ensuite à une explosion comme celle à laquelle nous venons d’assister.

Ce dont nous avons réellement besoin, c’est d’un changement d’approche de la part d’Israël. Cela ne peut se faire que si les Américains font pression pour que l’on accepte le fait que la seule véritable issue à cette situation est celle qui permet aux Palestiniens et aux Israéliens de vivre protégés, en toute liberté et en toute sécurité. Cela implique de mettre fin au siège imposé par Israël – un système d’occupation et d’apartheid qui a rendu l’existence des Palestiniens complètement invivable.

David Sirota : Laissons de côté l’occupation israélienne. Cependant, à titre purement argumentatif, un attentat terroriste se produit et Israël affirme que les terroristes qui ont commis cet attentat ont délibérément lancé leurs attaques à partir d’installations civiles, d’hôpitaux, d’écoles, de quartiers civils. La question se pose alors : Quelle est la réponse humaine et appropriée en matière de sécurité ?

Naomi Klein : Je ne pense pas qu’une réponse militaire puisse s’attaquer à la racine de ce qui a conduit à ces attaques. Je pense qu’Israël crée chaque jour davantage de « terroristes ».

J’étais à Gaza en 2008. J’ai rencontré beaucoup de petits enfants dans les ruines. J’ai rencontré des enfants dont les corps avaient été brûlés par du phosphore blanc. Ce sont les jeunes gens d’aujourd’hui. J’ai vu la même chose en Irak après l’invasion. Je pense que les Palestiniens ont un droit – que les peuples sous occupation ont un droit – le droit à la résistance armée, tant que les civils ne sont pas pris pour cible, parce que cela viole les Conventions de Genève, qui sont l’héritage de la Seconde Guerre mondiale.

Je ne pense pas qu’une réponse militaire puisse s’attaquer de quelque manière que ce soit à la racine de ce qui a conduit à ces attaques.

Nous disposons d’une législation internationale qui est l’un des héritages de l’Holocauste et des autres horreurs de la Seconde Guerre mondiale. Or, à l’heure actuelle, les responsables israéliens passent à la télévision et balaient tout cela d’un haussement d’épaules. On ne peut pas ignorer le droit international le matin et l’invoquer l’après-midi lorsque c’est Israël qui viole le droit international.

Je parle toute la journée des crimes de guerre commis par Israël. Mais le problème avec les crimes de guerre, c’est qu’il faut appliquer les normes, quelle que soit la personne qui les viole. Il ne s’agit pas de dire : « De mon côté tout va bien. Et de ton côté ça ne va pas. » Ce n’est pas comme cela que ça marche.

Nous vivons une période vraiment périlleuse. Mais aujourd’hui, nous regrettons tous notre réaction aux attentats du 11 septembre, n’est-ce pas ? Car, en fin de compte, il s’agissait d’actes criminels auxquels nous aurions pu répondre simplement en les considérant comme des actes criminels et non en menant ces guerres massives qui n’en finissent pas, même si nos gouvernements refusent encore de l’admettre.

Je pense que nous sommes en train de répéter les mêmes erreurs. Je pense aussi qu’à l’instar du 11 septembre, alors que certains membres de l’administration de George W. Bush avaient un projet complet pour redessiner la carte du Moyen-Orient, ils ont saisi leur chance. Nous devons nous en souvenir et penser à des gens comme Benjamin Netanyahu, qui dirige un gouvernement d’extrême droite, qui a ouvertement épousé des principes génocidaires et qui a dit qu’il ne voulait plus s’occuper de Gaza. En fait, ils appellent à un nettoyage ethnique. Ils veulent s’emparer de toute la Cisjordanie, et c’est le moment ou jamais.

David Sirota : Je parie qu’il y a des gens ici qui se souviennent que pendant la campagne présidentielle de 2004, George W. Bush et les Républicains ont fustigé John Kerry pour avoir dit qu’il aurait probablement été plus judicieux de traiter le 11 septembre comme une question de maintien de l’ordre. Je me souviens avoir pensé que tout le monde était devenu fou. Je ne suis pas un grand fan de John Kerry, mais ce qu’il disait, lorsqu’il parlait de la réponse à apporter, était parfaitement logique. Et je me suis demandé, au cours de la semaine écoulée, à quel moment la réponse au 11 septembre est devenue une doctrine plutôt qu’une mise en garde.

Omar, si nous partons du principe, à titre purement argumentatif, que certains terroristes font partir leurs opérations du sein de la population civile, quelle devrait être la réponse humaine la plus appropriée des forces de sécurité israéliennes à une telle situation ?

Omar Baddar : C’est l’une des difficultés de ce qui s’apparente à un attentat-suicide, lorsque l’on envoie des militants de l’autre côté de la frontière en espérant qu’ils se battront et mourront. Une fois l’opération terminée, vous avez tué les auteurs de l’attaque. Vous devez maintenant déterminer dans quelle mesure vous souhaitez aller plus loin en ce qui concerne la responsabilité plus générale du Hamas en tant qu’organisation.

Et on arrive là incontestablement à une question d’application de la loi, d’abord et avant tout. Il s’agit de savoir ce que veut dire poursuivre une procédure judiciaire raisonnable permettant de tenir les membres du Hamas pour responsables – si l’on essaie de faire arrêter des gens, à qui fait-on appel, qui est habilité à procéder à l’arrestation ? Le gouvernement israélien n’a pas l’intention de s’engager dans cette voie, parce qu’il est profondément choqué par la perspective qu’une telle attaque puisse donner au Hamas un quelconque sentiment de puissance. Pour eux, l’objectif premier n’est pas de rendre la justice, loin s’en faut, mais de punir le Hamas pour avoir osé faire une chose pareille. Et cela implique de les décimer de toutes les manières possibles.

Pour eux, l’objectif premier n’est pas de faire justice, loin s’en faut, mais de les punir pour avoir osé faire une chose pareille.

Telle est leur approche, et il est évident qu’elle ne fonctionnera pas. La seule façon d’éliminer l’existence du Hamas est de commettre des atrocités innommables qui rasent littéralement de vastes parties de Gaza. Pour parvenir à un résultat de ce style, il faut se livrer à une attaque génocidaire.

La façon dont nous parlons de ce sujet manque de nuance et à mon avis c’est très, très important. Les militants qui utilisent la guérilla et les tactiques de guérilla parce qu’ils n’ont pas d’avions et de chars vont, par nécessité, se fondre dans les populations civiles. Ils ne vont pas se rassembler dans une partie vide de Gaza et dire : « Nous sommes tous là, nous restons à l’écart des civils », parce qu’à ce moment là un missile israélien les éliminera tous. Il y a un déséquilibre des forces qui rend la chose impossible.

David Sirota : Parlons de la réponse des États-Unis face à ce problème. Naomi, dans vos remarques préliminaires, vous avez mentionné cette résolution que certains membres de l’aile progressiste du parti démocrate soutiennent. Celle-ci m’a semblé non seulement tout à fait raisonnable, mais aussi comme étant le minimum auquel n’importe quel non-sociopathe devrait pouvoir souscrire. Il s’agit simplement de dire : « Ne tuez pas, et évitez, réduisez et mettez fin au massacre de civils palestiniens et israéliens. » Et pourtant, pour autant que je sache, il n’a que cinquante-cinq ou soixante cosignataires.

Par ailleurs, en parallèle, une lettre a circulé qui m’a consterné, émanant à la fois de Républicains et de Démocrates. On y lisait : « Des appels à la désescalade commencent déjà à se faire entendre dans certains cercles. Une désescalade prématurée serait une victoire pour les terroristes et leur permettrait de continuer à menacer les civils israéliens de futures attaques. »

Comment expliquer qu’il y ait relativement peu de soutien pour une résolution qui dit simplement : « Arrêtons de tuer des civils », alors qu’il y a également un soutien au Capitole pour une résolution qui dit que tout appel à la désescalade fait de vous un terroriste ? Comment expliquer cela ?

Naomi Klein : De nombreux membres du Congrès m’ont dit aujourd’hui qu’un « cessez-le-feu » était désormais considéré comme toxique. Il est considéré comme une absence de « soutien à Israël ». Et j’ai vu beaucoup de pancartes dans les couloirs qui disaient « Soutenez Israël », ce qui est synonyme de chèque en blanc. Les États-Unis ont fait la même chose après le 11 septembre. Soit vous êtes avec nous, soit vous êtes avec les terroristes ! C’est tout simplement un pur test de loyauté.

C’est scandaleux, car ces membres du Congrès américain ne devraient pas soutenir Israël si cela veut dire qu’il n’est mis aucune condition quant aux armes utilisées ou à l’aide éventuelle. Ils devraient se ranger du côté du droit international. La question est donc de savoir comment cela a pu se produire si rapidement.

Je pense que ce que le gouvernement israélien a fait très habilement et très rapidement, c’est de prendre un crime de guerre et de le décrire systématiquement et dès le départ comme un crime de haine, comme étant l’attaque la plus meurtrière contre les Juifs depuis l’Holocauste et les pogroms.

Il ne s’agit pas de minimiser. Je pense que les crimes de guerre sont extrêmement graves. Je pense que les massacres sont extrêmement graves. Mais ce n’est pas ainsi qu’ils ont été décrits. On les a sortis de tout contexte géopolitique et on les a intégré dans un narratif de traumatisme juif fondamental et d’antisémitisme dans le cadre duquel il est impossible, par nature, de raisonner.

Je ne vois pas d’autre explication au fait que les gens ont si peur de ne pas se ranger du côté d’Israël. Et ça, c’est de la communication intelligente.

Je voudrais juste ajouter un autre élément qui, selon moi, joue un rôle, à savoir que les territoires occupés sont un laboratoire pour ce qu’Israël appelle « la sécurité sans la paix ». C’est la raison d’être des murs, des points de contrôle et du siège. En gros, il s’agit de dire : « Nous n’avons pas besoin de paix quand nous pouvons endiguer ».

Lorsque le Hamas franchit un poste de contrôle arabe, franchit un mur et inflige un tel nombre de pertes civiles, c’est tout le modèle qui échoue. Mais il ne s’agit pas seulement du modèle israélien. Toutes les puissances occidentales, et on peut y ajouter l’Inde, veulent la sécurité sans la paix. Que pensez-vous qu’il se passe à nos frontières ? Nous vivons dans un monde incroyablement inégal qui devient de plus en plus militarisé, de plus en plus surveillé – et une grande partie de cet arsenal, nous l’achetons à Israël.

Je pense que cela explique aussi en partie la rapidité avec laquelle toutes les puissances occidentales sont venues affirmer que nous protégerions le dôme de fer. Nous sommes inquiets pour nos propres dômes de fer. Et il est utile d’élargir le débat au-delà d’Israël et de la Palestine.

Omar Baddar : Je pense que le deuxième aspect de la question réside dans la manière dont les Républicains utilisent constamment Israël comme un sujet de clivage pour contrer les Démocrates. Ces derniers ne cessent d’essayer de dire : « Non, non, non, nous ne sommes pas anti-Israël. » Les deux partis, dans l’ensemble, soutiennent massivement Israël, au point de dire : « Soutien inconditionnel, faites ce que vous voulez. »

On est face à une situation qui a vu la politique israélienne s’orienter de plus en plus vers la droite. Elle est devenue de plus en plus extrême. On pourrait penser que cela briserait naturellement la dynamique aux États-Unis, mais ce n’est pas le cas.

Si les Nations unies tentent de voter contre [Israël], nous interviendrons et mettrons notre veto à chaque fois. Si les Palestiniens s’adressent à la Cour pénale internationale pour tenter d’obtenir que les responsables rendent des comptes, nous exercerons une pression énorme sur la Cour pénale pour qu’elle n’engage pas de poursuites contre les crimes de guerre israéliens. Ils ont fermé toutes les voies politiques pacifiques possibles qui auraient permis aux Palestiniens de revendiquer leur liberté, nous poussant vers un contexte de violence, tandis que la rhétorique politique israélienne est devenue de plus en plus droitière, brutalement anti-palestinienne – et pourtant les Démocrates ne cessent d’être eux aussi poussés de plus en plus vers la droite.

Et puis, quand un incident comme celui-ci se produit, ce n’est pas vraiment une surprise si nous nous retrouvons dans un climat politique dans lequel tout le monde va s’aligner. Même face à une rhétorique littéralement génocidaire et alors même que observons que des actions génocidaires ont commencé à Gaza, nous sommes coincés.

Il est franchement exaspérant de s’apercevoir que la conscience politique américaine ne s’éveille pas à un moment comme celui-ci pour dire : « Ralentissez, nous comprenons bien que c’est quelque chose d’énorme. C’est vraiment horrible. Mais priver un million d’enfants de nourriture, de carburant et d’eau n’est pas acceptable. » Cela devrait être un principe incontournable, or il semble bien faire défaut à notre establishment politique.

Je pense que le climat est extrêmement inquiétant et je suis très reconnaissante à des groupes comme If Not Now et Jewish Voice for Peace qui ont donné une voix à ceux qui n’en ont pas et qui sont intervenus. Ce sont des juifs américains progressistes qui disent : « N’instrumentalisez pas notre douleur pour la transformer en arme pour commettre des crimes contre d’autres populations. »

C’est ce message qui, je l’espère, réveillera l’establishment politique américain et l’amènera à comprendre que la trajectoire actuelle est profondément moche et inquiétante et qu’elle nous mènera à un désastre total.


Vous pouvez vous abonner au projet de journalisme d’investigation de David Sirota, The Lever, ici.

CONTRIBUTEURS

Naomi Klein est journaliste et militante. Ses derniers ouvrages sont Doppelganger et On Fire : The Burning Case for a Green New Deal.

Omar Baddar est analyste politique et défenseur des droits humains. Il vit à Washington.

David Sirota est rédacteur en chef de Jacobin. Il rédige le Lever et a été conseiller principal et rédacteur de discours pour la campagne présidentielle de Bernie Sanders en 2020.


Source : Jacobin, David Sirota, Naomi KLEIN, Omar BADDAR, 28-10-2023    Traduit par les lecteurs du site Les-Crises


 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *