Conférence de la Cédéao sur le Niger : voici les principales décisions prises par les Chefs d’Etat à Abuja

         Abuja, 10 août 2023

 

1. La Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est réunie en Session extraordinaire à Abuja, au Nigéria, le 10 août 2023, sous la présidence de S.E.M. Bola Ahmed TINUBU, Président de la République Fédérale du Nigeria et Président en exercice de la Conférence.

2. Le Sommet extraordinaire a été convoqué à la suite de celui tenu le 30 juillet 2023, après la tentative de coup d’état et la détention illégale du Président Mohamed BAZOUM par les membres de la Garde présidentielle en République du Niger, le 26 juillet 2023.

3. Les Chefs d’État et de Gouvernement suivants ou leurs représentants dûment mandatés y ont participé :

  • S.E. Patrice TALON, Président de la République du Bénin ;
  • S.E. Alassane OUATTARA, Président de la République de Côte d’Ivoire ;
  • S.E. Nana Addo Dankwa AKUFO-ADDO, Président de la République du Ghana ;
  • S.E. Umaro Sissoco EMBALO, Président de la République de Guinée Bissau;
  • S.E. Bola Ahmed TINUBU, Président de la République fédérale du Nigeria ;
  • S.E. Macky SALL, Président de la République du Sénégal ;
  • S.E. Julius Maada BIO, Président de la République de Sierra Leone ;
  • S.E. Faure Essozimna GNASSINGBE, Président de la République Togolaise ;
  • S.E. Mamadou TANGARA, Ministre des Affaires étrangères, de la Coopération internationale et des Gambiens de l’extérieur, de la République de Gambie ;
  • S.E. Amb. Dee-Maxwell SAAH KEMAYAH Snr., Ministre des Affaires étrangères de la République du Liberia ;
  • S.E. Hassoumi MASSAOUDOU, Ministre des Affaires étrangères de la République du Niger, représentant S.E. le Président Mohamed Bazoum ;
  • S.E. Belarmino M. SILVA, Ambassadeur de la République de Cabo Verde auprès de la République fédérale du Nigeria et de la CEDEAO, République de Cabo Verde.

4. Étaient également présentes, les personnalités ci-après :

  • S.E. Evariste Ndayishimiye, Président de la République du Burundi ;
  • S.E. Mohamed Ould Ghazouani, Président de la République Islamique de Mauritanie ;
  • S.E. Dr Omar Alieu TOURAY, Président de la Commission de la CEDEAO ;
  • S.E. Leonardo Santos SIMÃO, Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, Chef de l’UNOWAS ;
  • S.E. Amb. Adeoye BANKOLE, Commissaire à la Paix et à la Sécurité, représentant le Président de la Commission de l’Union Africaine.

La Conférence, ayant :

5. Examiné le mémorandum présenté par le Président de la Commission de la CEDEAO sur la situation actuelle en République du Niger, ainsi que les activités engagées par la CEDEAO depuis le dernier Sommet extraordinaire, et ayant pris connaissance des rapports des envoyés spéciaux du Président en exercice au Niger et à divers autres endroits ;

6. Examiné attentivement le rapport et les recommandations du Comité des Chefs d’état-major de la Défense de la CEDEAO ;

7. Discuté en détail des dernières évolutions intervenues au Niger depuis le Sommet extraordinaire tenu le 30 juillet 2023 ;

8. Noté que tous les efforts diplomatiques entrepris par la CEDEAO pour résoudre la crise ont été repoussés avec défiance par les dirigeants militaires de la République du Niger ;

9. Pris acte de l’expiration de l’ultimatum d’une semaine adressé à la junte pour le rétablissement de l’ordre constitutionnel en République du Niger ; 10. Décide de :

a. Réitérer sa ferme condamnation de la tentative de coup d’état et du maintien en détention illégale du Président Muhammed BAZOUM, de sa famille et des membres de son gouvernement ;

b. Dénoncer également les conditions dans lesquelles le Président Bazoum est maintenu en détention et tenir le CNSP entièrement

responsable de la sécurité et de l’intégrité physique du Président Bazoum et des membres de sa famille et de son gouvernement ;

c. Réaffirmer toutes les mesures et tous les principes convenus lors du Sommet extraordinaire sur le Niger tenu le 30 juillet 2023 ;

d. Souligner sa détermination à maintenir ouvertes toutes les options en vue d’un règlement pacifique de la crise ;

e. Faire appliquer toutes les mesures, notamment celles relatives à la fermeture des frontières, aux interdictions de voyage et au gel des avoirs de toutes les personnes, ou tous les groupes de personnes dont les actions ont pour effet d’entraver les efforts pacifiques déployés en vue d’assurer le rétablissement rapide et intégral de l’ordre constitutionnel ;

f. Lancer un avertissement solennel aux Etats membres dont les actions directes ou indirectes, ont pour effet d’entraver le règlement pacifique de la crise au Niger, en ce qui concerne les conséquences de leurs actions devant la Communauté ;

g. Appeler l’Union Africaine à entériner l’ensemble des décisions prises par la CEDEAO sur le Niger ;

h. Lancer également un appel à tous les pays et toutes les institutions partenaires, y compris les Nations Unies, afin qu’ils apportent leur soutien à la CEDEAO dans le cadre des efforts qu’elle a engagés pour assurer un rétablissement rapide de l’ordre constitutionnel, conformément à ses instruments normatifs ;

i. Charger le Président de la Commission de veiller au suivi de la mise en application des sanctions ;

j. Donner instruction au Comité des Chefs d’état-major de la Défense afin qu’il active sans délai la Force en attente de la CEDEAO, avec tous ses éléments ;

k. Ordonne le déploiement de la Force en attente de la CEDEAO pour le rétablissement de l’ordre constitutionnel en République du Niger ;

l. Souligner son engagement permanent en faveur du rétablissement de l’ordre constitutionnel par des moyens pacifiques.

11. La Conférence exprime sa gratitude à S.E. Général Abdulsalami A. ABUBAKAR GCFR, à Son Eminence Muhammadu Sa’ad ABUBAKAR, Sultan de Sokoto, ainsi qu’à l’Ambassadeur Babagana Kingibe, pour les missions entreprises en tant qu’envoyés spéciaux au Niger, en Libye et en Algérie, au nom du Président en exercice de la Conférence ;

12. Elle exprime sa gratitude à S.E.M. Bola Ahmed TINUBU, Président de la République Fédérale du Nigeria et Président en exercice de la Conférence de la CEDEAO, pour avoir convoqué cette session extraordinaire et pour la manière dont il dirige les affaires de la Communauté en sa qualité de Président de la Conférence.

FAIT A ABUJA, LE 10 AOUT 2023.

LA CONFÉRENCE


Sommet de la Cédéao sur le Niger : « la négociation avec le régime militaire doit être le socle de notre approche », a déclaré le Président Tinubu

Bola Tinubu President CEDEAO

Le Sommet extraordinaire de la Conférence des Chefs d’état et de gouvernement de la Cédéao sur le Niger, le second du genre, s’est ouvert ce jeudi 10 août 2023 à Abuja, au Nigéria.  A l’ouverture des travaux, le Président du Nigeria et Président en exercice de l’organisation, Bola Ahmed Tinubu, a certes rappelé que « toutes les options restent sur la table » mais il a aussi déclaré que « les négociations avec le régime militaire au Niger doivent être le socle de notre approche ». Des déclarations qui éloignent de plus en plus l’option militaire envisagée par les Chefs d’Etat lors de leur précédent Sommet du 30 juillet dernier toujours dans la capitale fédérale nigériane.

Dans son discours d’ouverture, le Président Bola Tinubu a déclaré qu’« il est crucial que nous donnions la priorité aux négociations diplomatiques et au dialogue comme socle de notre approche ». Le Chef de l’Etat nigérian a certes souligné que « toutes les options sont toujours sur la table, y compris l’usage de la force en dernier recours », pour restaurer l’ordre démocratique au Niger.

L’éventualité d’une intervention militaire pour rétablir le régime de l’ancien président Bazoum s’écarte de plus en plus. Il convient de rappeler que lors de leur précédent sommet extraordinaire sur le Niger, le 30 juillet dernier à Abuja, les Chefs d’Etat ont donné un ultimatum de six (6) jours à la junte militaire du CNSP de rétablir l’ordre constitutionnel sous menaces d’usage de la force. Les chefs des armées des pays membres se sont par la suite réunis dans la capitale fédérale nigériane pour valider les modalités de cette intervention militaire. Depuis, la donne semble avoir changé. L’ultimatum s’est expiré le 7 août dernier et malgré les sanctions économiques, la junte militaire au pouvoir à Niamey semble déterminée à instaurer une transition démocratique avant tout retour à l’ordre constitutionnel.


En début de semaine, un Premier ministre a été nommé en la personne de Ali Mahaman Lamine Zeine et la veille du sommet extraordinaire, un gouvernement d’une vingtaine de membres a été mis en place par le CNSP.


Difficiles négociations

L’option de la voie diplomatique et du dialogue semble donc être pour le moment la seule qui sera privilégiée par la Cédéao. Au sortir de ce second Sommet sur le Niger, des sanctions pourront certes être prises contre les nouvelles autorités de Niamey ainsi que leurs alliés, notamment le Burkina Faso et le Mali, mais l’option pour des négociations va primer.

Jusque-là, en effet, les émissaires envoyés par la Cédéao, mis à part le Président tchadien, n’ont pas pu entamer un véritable dialogue avec la junte militaire qui campe toujours sur ses positions. « Nous ne sommes pas arrivés pour reculer. Votre engagement et votre mobilisation, ainsi que votre détermination démontrent fortement votre soutien pour changer le Niger », avait par exemple assuré l’un des membres le général Mohamed Toumba à l’occasion d’un gigantesque rassemblement de soutien au CNSP, dimanche dernier à Niamey, le jour où l’ultimatum de la Cédéao arrivait à expiration.

Il faut aussi noter que selon plusieurs sources, des dignitaires de l’ancien régime ont pris part au Sommet d’Abuja. Il s’agit notamment de l’ancien Chef de la diplomatie Hassoumi Massaoudou, aujourd’hui en exil, tout comme plusieurs membres de l’ancien gouvernement alors que le chef de l’Etat déchu continu à être gardé par les militaires à la résidence présidentielle de Niamey.

Hier mercredi, le secrétaire général de l’Onu, António Guterres, s’est dit préoccupé par les « déplorables conditions » de détention du président nigérien, Mohamed Bazoum et de sa famille. « Le secrétaire général de l’Onu est profondément préoccupé par les déplorables conditions dans lesquelles vivraient le président Bazoum et sa famille, alors qu’ils sont toujours détenus arbitrairement par des membres de la Garde présidentielle au Niger », a indiqué l’Onu dans son communiqué.

António Guterres a réitéré sa préoccupation quant à la santé et à la sécurité du président et de sa famille, et a appelé une nouvelle fois à sa libération immédiate et sans condition, ainsi qu’à son rétablissement à la tête de l’Etat.


M. Abdoul Karim (actuniger.com)


 

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